L'hétéronormativité à l'épreuve du langage : littératie et

performance des genres en tant qu'elle considère ces derniers comme des constructions formelles d'identités et de catégories sociales (Butler dans Jami, 2008, ...
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L'hétéronormativité à l’épreuve du langage : littératie et enjeux contemporains “Dès qu'elle est proférée, fût-ce dans l'intimité la plus profonde du sujet, la langue entre au service d'un pouvoir. En elle, immanquablement, deux rubriques se dessinent : l'autorité de l'assertion, la grégarité de la répétition. D'une part la langue est immédiatement assertive : la négation, le doute, la possibilité, la suspension de jugement requièrent des opérateurs particuliers qui sont eux-mêmes repris dans un jeu de masques langagiers[...] D'autre part, les signes dont la langue est faite, les signes n'existent que pour autant qu'ils sont reconnus, c'est à dire pour autant qu'ils se répètent ; le signe est suiviste, grégaire ; en chaque signe dort ce monstre : un stéréotype : je ne puis jamais parler qu'en ramassant ce qui ​traîne dans la langue. Dès lors que j'énonce, ces deux rubriques se rejoignent en moi, je suis à la fois maître et esclave : je ne me contente pas de répéter ce qui a été dit, de me loger confortablement dans la servitude des signes : je dis, j'affirme, j'assène ce que je répète.” Roland Barthes, leçon inaugurale au collège de France, 1977

A la base de cette réflexion autour du thème de l’hétéronormativité,se trouve un postulat fondateur : le langage, en tant qu’entité signifiante ne peut être soustrait à la notion de pouvoir. Qu’il s’agisse d’un pouvoir acquis par la langue ou enlevé à nous par celle-ci, les langages qui en découlent sont colorés par ce lien intrinsèque (Yaguello, 1992). Or, dans des systèmes où les rapports entre individus et ceux entre individus et société fonctionnent indépendamment de ces normes, l’idée de pouvoir est sous-jacente. Parce que les normes existent, il est une frange d’individus non conformes se trouvant exclus des processus de valorisation et de visibilité au sein de ces systèmes hégémoniques. Je parle ici du cadre normatif de l’hétérosexualité institutionnalisée qui “gouverne tant ceux et celles à l’intérieur de ses frontières qu’elle marginalise et sanctionne celles et ceux en dehors” (Rich dans Jackson, 2015, p.64). S’agissant du langage, l’hétéronormativité est présente dans les mécanisme de communication entre hommes, entre femmes, entre hommes et femmes. Elle se fixe dans les modes d’interaction interpersonnels, dans les normes discursives ‘à propos’ des femmes, dans les capacités langagières de chacun, dans les registres féminins et masculins mais aussi dans les stéréotypes participant à la cristallisation de ces normes langagières (Yaguello, 1992). La langue telle qu’elle est majoritairement conçue, constitue un élément fondateur de l’humanité telle que nous la connaissons. Le langage, vu selon une perspective linguistique, est l’ensemble des signes qui composent la langue : verbaux et non verbaux, signifiants et signifiés (Saussure, 1914, publié en 1916). Ces deux éléments structurellement liés à l’évolution des groupes humains et des sociétés ont été étudiés dans les domaines de la linguistique, l'anthropologie, la sociologie et les sciences de la communication depuis l’Antiquité pour n'émerger dans le monde académique qu’au début du 20ième siècle. Au sein de ces recherches, existe une niche académique se concentrant sur l’étude des rapports complexes existants entre les langues, les langages et le genre (entendu ici comme la division binaire d’individuation liée au sexe : homme et femme). Que ce soit dans le champs de la ​sociolinguistique, ​de l'anthropologie ou des sciences humaines plus largement, la

nécessité de ces études devient rapidement unanime. Dans les années 1970, alors que l’enthousiasme envers le structuralisme s’essouffle en Europe, émerge le courant des ​Gender and language studies outre-Atlantique (Greco, 2014, p.12). Parmi les différentes problématiques auxquelles s’intéressent ces études, nous pouvons cerner un objectif de compréhension de “l’articulation entre genre, sexualité et langage” (Ibid.) Parallèlement, dans les années 1980, une profusion de travaux féministes sont publiés, tachant, à travers une perspective critique, de déconstruire les idéologies hégémoniques, les systèmes sociétaux, sociaux et économiques dans lesquels les processus d’oppression et d’asservissement des femmes agissent. Les expressions ‘patriarcat’, ‘domination masculine’ et ‘hétéronormativité’ font leur entrée dans le vocabulaire des analyses critiques à visée de changement social. Dès lors, on étudie les phénomènes à travers ces spectres afin d’y débusquer les marques du sexisme, de l’homophobie et de toute autre discrimination liée au sexe et/ou au genre. En effet, parce que s’intéresser au genre et au langage induit de remettre en question les normes linguistiques existantes, nombre de ces études furent labellisées ‘féministes’. Dans ce cadre, ceux qui se penchent sur la relation entre le genre et les langues examinent de près les influences que le premier a sur le second et inversement (Greco, 2014). Dans ​La face cachée du genre (2012), Natacha Chetcuti et Luca Greco définissent l'intérêt principal des études mettant en miroir les constructions des genres et les mécanismes du langage. Selon eux, elles nous permettent de visualiser plus clairement les “articulations entre structures langagières et représentations sociales, genre et rapports sociaux de sexe [...] dans une perspective non critique [...], une vision référentialiste du langage” (Chetcuti et Greco, 2012, p.11). Par ailleurs, ce champ de recherche, au fur et à mesure de son expansion, s’est vu prendre divers chemins : “​sociocultural linguistics (Bucholtz et Hall 2005), [...] ​language et sexuality research (Cameron et Kulick 2003), [...] ​queer linguistics (Livia et Hall 1997, Motschenbacher 2010, Greco, 2013, [...] ​feminist conversation analysis (Kitzinger 2000), [...] feminist post-structuralist discourse analysis​ (Baxter 2003)” (Greco, 2014, p.22)

Au travers de la lentille critique issue des études féministes, il importe de s’intéresser aux modes de discours des femmes car ceux-ci nous renseignent sur les évolutions des prises de pouvoir de ce groupe social historiquement sous le joug de la domination masculine. Aussi, un tel point de focus nous informe quant aux potentialités d’émancipation des femmes vis à vis de langages au sein desquels une prise de parole sérieuse et politique des femmes n’est pas prévu originellement (Yaguello, 1992).

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Ici, les études sur les langages et les genres nous apporterons un éclairage sur les normes de langages ainsi qu’une meilleure compréhension de ce qu’est le sexisme dans la langue et des enjeux y étant liés. Le cadre d’analyse de cette réflexion se situe dans les limites de l’espace d’expression des femmes et des féministes. Cet espace est inscrit dans un mode sociétal hétéronormatif qu’il va être question d’expliciter au regard de ma problématique : le fonctionnement normatif du langage peut-il être transformé et utilisé au profit des enjeux féministes contemporains et d’une agentivité des femmes au travers de la langue ? Cet article se penchera plus spécifiquement sur les enjeux féministes contemporains ayant comme but de remettre en question les formes langagières soumises aux normes hétérosexuelles. Parmi elles, nous comptons les débats actuels sur la féminisation des noms de métiers, mais aussi le phénomène #metoo mettant en exergue une prise de parole collective des femmes contre les violences sexuelles structurelles et la culture du viol. Parce que le présent sujet s’inscrit dans le cadre du champ plus large des études féministes, il est important d’en détailler l’approche. Tout d’abord, l’analyse qui va suivre n’a pas pour ambition de fixer une idée mais plutôt de dessiner les contours des potentialités existantes dans l’études des procédés d’expression des femmes dans un contexte précis qu’est celui de l’hétéronormativité et des codes linguistiques que celui-ci implique. Afin de poursuivre ce but, la théorisation du ​standpoint feminism ou “point de vue situé” ​par Sandra Harding (1986) constitue un point de départ. Comme l’expliquent clairement Bracke et Bellacasa : “La théorie du positionnement affirme que le savoir produit dans les marges et formulé de façon collective est potentiellement plus fiable et susceptible d’accroître l’objectivité du savoir traditionnel” ( 2013, p.48). En effet, je conçois les détracteurs de l’hétéronormativité comme producteurs premiers du savoir en question car c’est par eux et leurs actes de langage que j’arriverai à une modélisation de ma réflexion finale. D’autre part, notons la pertinence de la notion de “​collective consciousness”​ (Mc Kinnon, 1982,1987 dans Haraway, 2001) agissante dans la pratique féministe des femmes dont l’expression sera étudiée au regard de la manifestation de leur agentivité par le langage. Enfin, c’est au travers d’une lentille intersectionnelle que sera développée mon argumentation. Il me semble indispensable de croiser les problématiques de genre, classe, race et sexe dont les implications intrinsèques sont loin d’être imperméables les unes aux autres. Dans un article sur ce point de vue épistémologique, les auteures Catherine Flynn, Dominique Damant et Jeanne Bernard écrivent : “Cette approche de la domination se déploie par le biais des rapports constituants [la domination] c’est à dire que l’analyse ne repose pas sur des catégories sociales prédéfinies qui s’influencent mutuellement mais qu’elle s’appuie sur la coconstruction de ces catégorisations” ( 2014, p.34).

1. Langage, genre et normes : un déséquilibre des pouvoirs

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Dans sou ouvrage ​Les mots et les femmes (1992) Marina Yaguello s’applique à répertorier les modes de discours féminins et masculins de manière à mettre en mots ce qu’elle nomme une “sociolinguistique de la condition des femmes”. Par là, elle entend lister les aspects de la langue qui concernent directement les femmes, autant du point de vue de la mise en pratique de l’expression de soi que dans la minimisation publique de leur parole. Jusqu’au premières approches féministes du langage, les pionniers de la linguistiques avaient déjà remarqué des différences dans les modes de discours féminins et masculins. Au sein des études issues du courant des ​Gender et Langage Studies,​ émergent successivement trois paradigmes (Greco et Chetcuti, 2012) : différence, domination et performance. Le paradigme de la différence D’une part, et pendant très longtemps le paradigme de la différence domine. Les pionniers de la linguistique Otto Jespersen (1922), William Labov (1966) et Peter Trudgil (1972) contribuent à développer cet argumentaire (Yaguello 1992; ​Arnold, 2008). Aujourd’hui critiqués par les féministes, ces chercheurs fondent leurs conclusions sur une image homogène des femmes vues comme un groupe social indifférencié destiné à régner sur les domaines domestiques et maternels (Arnold, 2008). Selon eux, il existerait une différence naturelle entre la manière dont les hommes parlent et pensent. Aussi, les hommes seraient détenteurs d’une créativité leur permettant de transcender le langage, ainsi capable d’enrichir grâce à cela ses formes langagières. Ces différences seraient aussi biologiques, même si liées à des processus de socialisation des rôles et des rites culturels. Luca Greco souligne le caractère “stéréotypique et réifiant” de ces études (Greco et Chetcuti, 2012). On peut y lire que les femmes sont bavardes, qu’elles parlent trop, qu’elles sont des moulins à paroles tout autant que leur caractère conservateur les entraîne à ne pas aborder des sujets sérieux. On apprend que les femmes ne jurent pas, qu’elles excellent à la politesse, qu’elles ne savent pas parler politique mais que “parler chiffon” leur est très simple (Yaguello, 1992). L’image sociale de la femme polie serait, pour Yaguello liée à “l’incapacité de s’affirmer, de dire ouvertement ce que l’on pense, de réclamer son dû, de donner des ordres” (Ibid., p.44). Marina Yaguello relève dès 1978 (Yaguello,1992)plusieurs éléments de discours participant au ​sexage ​(Greco et Chetcuti, 2012) des femmes : ● Les registres féminins et masculins : les registres sont des catégories de langues composés du vocabulaires assignés selon le genre, mais aussi des tabous, et des sphères sociales. Ils agissent comme des conservateurs des rôles et permettent de réguler ceux-ci. Le registre féminin comprend notamment les euphémismes, un réflexe de minimisation de la vision du monde des femmes vue comme “une caractéristique de la bien-pensance, une façon de conjurer le sort” (Yaguello, 1992, 3

p38-39). En ce qui concerne le registre masculin, elle parle de “registre réservé” (Ibid., p.58) pour autant qu’il est fermé aux femmes en public ou avec des hommes : le langage grossier, celui du sexe, l’argent, la politique et autant d’autres sujet dits tabous. Ce registre mâle théorisé ainsi peut être assimilé à ce qu’on appelle aussi un “parler mec” ou “​locker talk”​ ; expression popularisée en 2017 avec les révélations des propos misogynes et violents du président américain Donald Trump. Au coeur du registre masculin existe dans beaucoup de culture un “folklore sexuel” (Ibid., p.42) allant de la blague graveleuse aux chansons douces, contes et autres légendes, chacun nous renvoyant “le plus souvent une image dégradée de la femme” (Ibid.). ● L’hypercorrection : ​Cela consiste en l’assimilation excessive du modèle langagier dominant. Le fait que les femmes corrigent leur propre langue afin de correspondre aux normes prévues pour elles participe à la formation des registres. Dès l’enfance, on réprimande plus souvent les petites filles qui jurent que les petits garçons qui s’éloignent un peu du droit chemin. La féministe critique Shulamish Firestone déclare en 1970 “ Les hommes ont le droit de blasphémer et d’injurier le monde, parce que le monde leur appartient” (Firestone dans Yaguello, 1992, p.44). ● Le comportement langagier ​: Ce comportement se compose de compétences lexicales dont la force et l’étendue du vocabulaire influent sur la valorisation et la visibilité de l’individu. La distribution genrée de ces compétences de langage a un impact sur la place de chacun dans la société, car c’est aussi une question de représentation en termes ​quantitatifs. P ​ ar exemple, et selon les stéréotypes décrits par Labov (1966) et Trudgil (1972), les compétences des femmes les dirigent plus directement vers des places domestiques de par leur ​parler standard​, tandis que celles des hommes les amènent vers des positions professionnelles à fortes responsabilités grâce à leur langue de prestige (​ Arnold, 2008). Le paradigme de la domination Luca Greco est l’un de ceux ayant développé le paradigme de la domination. Ce dernier laisse entendre l’existence d’un système hiérarchique dans lequel les hommes dominent, aussi bien les femmes que la langue. Greco fait le lien entre le genre et la langue de manière on ne peut plus claire : “La domination exercée par les hommes sur les femmes se reflète dans le langage tel qu’il est parlé par les femmes et tel qu’on l’utilise pour parler des femmes” (2014, p.16). Parce que de la langue découle une matérialité, les conséquences du patriarcat dans les mécanismes du langage provoquent un ​sexage (​ Ibid., p.12) d​ es femmes par la langue, sous la forme d’une voie dessinée pour elles afin qu’elles se rendent plus aisément aux rôles qui leur sont destinés. Notamment par le fait que les hommes à travers l’histoire sont garants de la langue, par le pouvoir que cela leur confère, “la maîtrise de la parole, de la parole signifiante, 4

assertive, fonctionnelle, est donc un instrument d’oppression mâle comme est l’instrument d’oppression de la classe dominante” (Yaguello, 1992, p.63). Le paradigme de la performance Avec la prise de force des ​Gender Studies dans les années 1980, les notions de fluidité du genre, de non-binarité ainsi que de pensée ​queer ​(Mead, W.Scott, Butler) acquièrent de plus en plus de visibilité. Ces notions évoluent dans un objectif de déconstruction des normes de ce système, et ce dans tous les domaines de leur effectivité. S’agissant du langage, le paradigme de la performance, influencé par les études féministes de la troisième vague, induit que la domination masculine et l’hétéronormativité seraient notamment “l’effet de pratiques discursives” (Greco et Chetcuti, 2014). Par pratiques discursives, les deux auteurs entendent un agrégat de formes langagières composant ​in fine un discours globalisable. Au travers de plusieurs ouvrages (1990 ; 1997 ) Judith Butler développe une théorie de la performance des genres en tant qu’elle considère ces derniers comme des constructions formelles d’identités et de catégories sociales (Butler dans Jami, 2008, p.208). Chez Butler, la performance du genre a deux facettes. D’une part, l’individu performe son genre en se conformant aux codes associés au genre que la société lui attribue généralement. Ces codes correspondent aux normes hétérosexuelles et aux catégories de genre binaires hommes/femme, masculinité/féminité. Elle propose une analyse critique des fondements des genres selon le postulat que les normes constitutives des identités découlent des discours véhiculés par les formations de pouvoir, ces dernières étant ancrées dans le système hétéronormatif (Ibid.). En ce sens, elle définit la performance de genre comme “la technologie grâce à laquelle toutes les positions de genre (hétérosexuelle comme homosexuelle) sont produites” (Beatriz Preciado, citée dans Bourcier, 2001). Cette conception de la performance du genre se manifeste sous diverses formes : de la performance physique (à travers une forme de conformité vestimentaire ou esthétique) jusqu’à l’adoption de codes de représentation de soi basés sur les éléments binaires constituant les catégories de genre. D’autre part, il existe une agentivité de la performance que Butler décline sous le terme de “performativité”, une potentialité d’action du sujet sur sa propre individuation genrée ou non. La performativité du genre s’inscrit dans une prise en main de la performance de soi. Autrement dit, cela signifie une subversion consciente des normes tendant vers une réappropriation de son identité (Jami, 2008, p.207-2010). En fait, Butler démonte l’idée d’une naturalité de l’identité de sexe, de genre, de statut biologique fixe et immuable. Il existe au sein du système normatif, des normes naturelles (comme les normes d’hygiènes d’aller faire ses besoins par exemple) et des normes 5

culturelles (comme celle de séparer les toilettes des hommes et des femmes). Ces normes sont sujettes à transformation et surtout à transgression. Ceci dit, parce que les normes vont de pair avec une pensée hétéronormative hégémonique, ces actes de transgression sont intrinsèquement en contradiction avec le pouvoir en place. Le langage, parce que historiquement influencé par ces normes traditionalistes, participe à la perpétuation de la conception biologique des genres/sexe. C’est pourquoi interroger les formes de langage héténormatives revient à questionner le mode de fonctionnement patriarcal de nos sociétés. De plus, d’un point de vue féministe, c’est une remise en question de ce système en partant du principe qu’il participe aux procédés oppressifs des individus touchés par la domination masculine. Or, dans cette pensée, quiconque n’étant pas homme blanc hétérosexuel est alors positionné au dessous des normes, soumis aux normes. Cependant, les normes et valeurs nourries par le système et se nourrissant par lui sont un poids pour tous. Il existe en fait une sorte de préjudice collectif de la langue, dont on peut se libérer notamment par des processus d’action personnels, dont une réappropriation du langage fait partie. Nous verrons dans la prochaine section réflexive de cet article comment les actes de langages performatifs en sont un point d’ancrage. 2. Agentivité et Actes de langage Le langage, comme d’autres domaines de la vie humaine, nous soumet à un dressage et donc à des codes. Afin de déjouer ces codes et de se les approprier, il s’agit de comprendre le système et ses implications dans le langage et hors de lui, dans tout ce qu’il a d’arbitraire et de culturellement transmis. Yaguello, dans cette optique parle d’une nécessité de “transgressions des codes masculins et féminins” (1992, p.76) dans le sens où ceux-ci sont liés à des registres, notamment de pouvoir et de domination des uns sur les autres. Par ailleurs, elle implique l’existence d’un “métamessage du langage stéréotypé” qui dénote “l’appartenance sociale du locuteur, son niveau culturel et son idéologie” (ibid., p.71). Ces métamessages, s’ils sont déconstruits, sont susceptibles d’être renversés afin de sortir de l’affirmation automatique de l’identité de chacun selon les normes de genre. Dans ce qu’on appelle aussi l’hétéropatriarcat (Jeffreys, 1990), la notion de consentement est sapée par la suppression automatique de l’agentivité de l’individu oppressé ou victime de violences, et ce sur la base de son genre, de sa sexualité, ou de sa non-conformité au système en place. En ce sens, la prise en main de son agentivité et de son pouvoir d’action est un moyen de se placer en dehors, voire au dessus de ces normes. Au coeur du paradigme de la performance linguistique telle que l’entend Butler, se trouvent “les actes de langage” ou énoncés performatifs (1955​) conceptualisés par J.L Austin dès les années 1950. Selon une approche pragmatique de la communication, cette théorie nous apprend à discerner plusieurs types d’actes de langages (Meunier et Peraya, 2004) :

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locutoire ​(l’acte de dire quelque chose) ; ​illocutoire (​ acte de langage intentionnel) et perlocutoire (​ acte de langage avec l’intention de provoquer un effet). Chez Austin, parler, dire quelque chose, est une action. Prononcer des mots agencés en phrases complexes équivaut à produire ce qu’il appelle les “énoncés performatifs” qui établissent un acte, ni vrai, ni faux mais constatatif. Avec l’étude des actes de langage illocutoires, il s’agit de comprendre l’intention et la direction de la parole du sujet. Ici, l’idée de polyphonie est essentielle : “il est possible d’accomplir plusieurs actes illocutionnaires à partir du même acte locutionnaire’ (Meunier et Peraya, 2004, p.96). En termes méthodologiques, il est question de s’intéresser aux niveaux sémantiques et pragmatiques du discours. Parce que les énoncés sont empreints d’un potentiel d’action, ce sont les points de force du discours que nous allons chercher. En fait, chaque énoncé possède un “potentiel de contenu propositionnel” (Ibid.) ou plus simplement, un éventail de possibilités d’énonciation et d’action selon l’intention du locuteur et la position du récepteur. En ce qui concerne les perlocutions, c’est à travers une contextualisation de l’acte de langage qu’il est possible de situer la portée de son action et la force de l’agentivité du locuteur. En effet, parce qu’on s’intéresse avec les actes de langage perlocutoires aux “effets avec un but, une intention” (Ibid.), il est nécessaire d’adopter un point de vue situé lors de l’analyse du texte (au sens sémiotique du terme).

3. Enjeux contemporains à la lumière de la performativité du langage Les processus de transgressions des normes sexistes dans la langue prennent plusieurs directions. Tandis que divers acteurs gouvernementaux s’intéressent à la problématique, des milliers d’individus disséminés, femmes, hommes, personnes-non binaires et toute autre identification de genre s’appliquent jour après jour à mettre au défi les codes hétéronormatifs des langues. S’agissant de la langue française, les débats actuels sur la féminisation de la langue ou la “démasculinisation” (Ballet, 2017) n’en mènent pas large en France où les membres de l’Académie Française expriment encore aujourd’hui des grandes réserves quant à des évolutions effectives et radicales de la langue. L’argumentaire des détracteurs de la féminisation du français se fondent sur la supposée difficulté de modifier une grammaire française historiquement inflexible. Pourtant, alors que les normes de la langue sont déjà fixées, en 1647, un académicien décide que le “masculin est réputé plus noble” ; depuis on enseigne aux enfants qu’en français “le masculin l’emporte sur le féminin”. Ainsi, et tant qu’un mouvement transgressif ne s’emparera pas des instances linguistiques poussiéreuses, une femme qui enseigne ne sera pas professeure parce que selon les règles, lorsqu’un nom masculin se termine en -eur, son féminin devient -euse (Duneton, 2017), ce qui visiblement, ne satisfait pas encore les grands décideurs de la langue. L’argument de la neutralité viendrait aussi peser dans la balance de la non-évolution. Il semblerait que l'absence de genre serait au 7

profit de l’égalité. Oui, mais n’oublions pas qu’avant la neutralité, il y a une langue masculinisée qu’il s’agirait d’aplanir. Au Québec, l’Office Québécois de la Langue française officialise depuis 2015 la féminisation des noms de personnes, noms de métiers et écriture épicène. Malgré une législation en faveur d’une évolution de la langue, ces changements sont entérinés comme des “recommandations” (OQLF, 2015). Plus précisément : “L’office québécois de la langue française recommande d’utiliser des variantes féminines pour désigner une femme : 1- à l’aide d’un nom féminin usité ou d’un nom féminin qui respecte les modes de formation traditionnels (une couturière, une consoeur, une investisseuse-boursière, une amatrice, une lieutenante-gouverneure). 2- à l’aide d’un nom épicène (qui a la même forme au genre féminin et au genre masculin) et d’un déterminant au féminin et le cas échéant d’autres éléments au féminin format l’appellation (une médecin, une percussionniste, une première ministre, une chef-cuisinière). “ (OQLF, 2015)

Cela signifie que selon le code civil québécois, il reste tout à fait légal d’utiliser des formes langagières invisibilisantes ou non-inclusives. Alors certes, le chemin est long vers une langue québécoise totalement non-hétéronormative mais c’est encore le plus bel exemple de la francophonie en termes d’intention de changement et de valorisation des groupes marginalisés dans la langue. Rappelons ici que dans un contexte de société hétéronormative, les normes sont transmises institutionnellement dans les cadres publics, familiaux, éducatifs, médiatiques et religieux. Aussi, le langage en tant que système perpétue ces normes-là autant qu’il en est la cause, car le processus de transmission des normes d’une sphère à l’autre n’est pas unilatéral. Si les possibilités d’évolutions, de transformation et de transgression des langues ne sont pas communiquées aux enfants pendant leur phase d’apprentissage de la langue, alors il y a perpétuation des registres genrés. Les jeunes continuent d’être intégrés dans ce système, instrumentalisés comme des outils de l’hétéropatriarcat dès l’enfance. Tant de petit.e.s humains, face à une grammaire sexiste se sont déjà demandés “Pourquoi ?” Pourquoi oui ? Pourquoi pas une astronaute, une chercheuse, des humain.e.s ? Malgré cet écart entre la nécessité de changement formel et la réalité officielle, la remise en question en cours se fera en dehors des sphères institutionnelles. A l’aube d’une ère de libération de la parole des femmes et d’un renversement des registres de langage liés au pouvoir, un constat se dessine : la langue et ses évolutions modernes ne sont pas adaptées à l’actuelle remise en question des normes hétérocentrées , et pourtant, le langage est un des moyens les plus immédiats qu’ont les individus marginalisés 8

pour combattre et exprimer les discriminations. Ce point se révèle notamment au regard de l’expression grandissante des femmes au sujet des agressions sexuelles. Les révélations massives des violences faites aux femmes et la popularité du hashtag #metoo sur le web mettent en lumière l’inadéquation du vocabulaire lorsqu’il s’agit d’ouvrir la discussion sur ces sujets évités par les détenteurs de la langue depuis des millénaires. La chercheuse Elsie Wittington nomme ce vide langagier “​grey areas”​ . Selon elle, “​This absence of language is one of the obstacles that's currently preventing us from having meaningful and nuanced discussions. [...] this grey area is "such a tricky topic" because "we don't really have a language for talking about it."​ (Wittington dans Thompson, 2018). La journaliste américaine Constance Grady, à propos du mouvement #metoo et de sa couverture médiatique remarque le manque ​d’outils ​langagiers (Grady, 2017). A l’instar de Yaguello, elle aborde le fait que dans son activité journalistique à propos des violence sexuelles envers les femmes, l’usage des euphémismes est inévitable. De plus, elle pointe du doigt l’inflexibilité du langage disponible pour parler de violences sexuelles : “Historically, the language of sexual violence has been an ideological battleground: If there is no word for an act, you cannot name it, which means that you cannot report it or legislate against it. And our terminology and definitions for sexual violence tend to start small and narrow, and only expand under pressure from feminist activists” (Grady, 2017)

Yaguello précise par ailleurs que dans les rapports entre langue et pouvoir, “l’oppresseur dispose généralement d’un registre du mépris infiniment plus étendu à l’égard de l’oppressé que celui-ci à l’égard de l’oppresseur” (1992,p.188). En ce sens, l’un des challenges de la réappropriation de la langue par les femmes est celui de rétablir un équilibre linguistique leur permettant d’effectivement user du langage pour déconstruire en fin de compte les codes ayant modelé le langage de l'oppresseur. Elle rajoute que “se cantonner dans le langage-femme telle qu’il nous est assigné par la société, c’est accepter d’être définies par ce langage-femme” (Ibid., p.67). Dans la mesure où les privilèges liés à l’expression de soi ne sont pas équivalents pour tous et toutes, cette injonction est à prendre avec des pincettes. Nombres d’individus, de par leur milieu social, leurs cadres culturels et des opportunités d’expression limitées voient leur agentivité réduite dans un tel système. Au vu de ces constats, nous nous rendons compte que l’inflexibilité des langues est une réalité constituant un frein dans l’expression de soi et des expériences n’allant pas dans le sens du système hétéronormatif. Puisque, comme nous l’avons vu, les transformations linguistiques officielles et à grande échelle ne sont pas dans les priorités des gens de pouvoir, c’est bel et bien dans l’intention d’expression que le changement se manifeste. C’est dans ce contexte que la théorie des actes de langage (Austin, 1955) peut nous aider à comprendre les implications signifiantes et politiques des nouveaux modes d’expression des femmes. Si l’on se réfère aux types d’énoncés performatifs (qui agissent) conceptualisés par Austin, on retrouve donc les actes locutoires, illocutoires et perlocutoires. 9

Cette typologie sera utilisée afin d’analyser la forme langagière #metoo (mot-clic) en tant qu’agrégat des témoignages publics de ces derniers mois sur internet. Avant tout chose, précisons que dans cette étude, le mot-dièse #metoo est considéré comme l’essence signifiante d’un discours plus large. Ce discours est composé en fait de textes rédigés par des victimes d’agressions sexuelles et ont pour but de témoigner de leur expérience afin de mettre en lumière un phénomène global que sont les violences sexuelles systémiques. Par ailleurs, internet, et plus particulièrement les réseaux sociaux comme facebook ou twitter où les témoignages furent le plus relayés est conçu ici comme un “dispositif d’énonciation” (Véron, 1983). Ainsi, au delà d’un espace de présentation de soi, ces plateformes sont véritablement des estrades, avec des acteurs et un public. Autrement dit, on y ​fait ​ce que l’on veut, cela passe aussi par ​dénoncer l​ es problèmes structurels du système hétéronormatif. C’est en cela qu’il est possible d’affirmer que ces témoignages rassemblés derrière le mot-clic #metoo sont des actes de langages, ou énoncés performatifs. Le mot-clic #metoo en soi, détaché du fond et de la forme des propos est un acte locutoire, c’est le constat de la nature du texte, soit un témoignage, le témoignage d’une expérience précise dont des éléments se retrouvent invariablement à chaque fois : un.e locuteur/trice ; un texte ; un.e lecteur/trice ; un thème commun : les violences sexuelles. L'intentionnalité du discours personnel et collectif des locuteurs de #metoo n’est pas homogène, il existe une diversité d’intention induites dans l’expression volontaire de ces violences. Parmi elles, nous pouvons citer des objectifs ayant tous la formes d’action (cf. images ci-dessous recensés sur mon fil Facebook personnel) : -

témoigner d’une agression/harcèlement sexuelle vécue par soi-même dénoncer les violences envers les femmes dénoncer la culture du viol se positionner dans le groupe des témoignants exprimer une solidarité combattre le système hétéronormatif lever le voile sur le silence sociétal rétablir des vérités concernant la notion de consentement éduquer sur ces problématiques pointer du doigts des problématiques et/ou des responsables/agresseurs impliqués dans des cas de violences sexuelles créer une cohésion de groupe rendre public les éléments épars d’un phénomène global

Cette dernière intention est celle qui permet de passer de l’illocution à la perlocution. En fait, à partir du moment où le discours devient public, lorsqu’il est visible et donné à tous, selon cet objectif, il est plein d’une attente : celle d’être entendu, et d’être cru. En ce sens, #metoo,

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en tant que forme langagière linguistique est un acte perlocutoire dont la pertinence réside dans les “effets discursifs” espérés.

La compréhension optimale d’un acte de langage perlocutoire dépend de la connaissance des “conditions de succès” ou “conditions de félicité” liés à l’illocution de départ (Meunier et Peraya, 2004). Un acte perlocutoire ne s’entend pas en termes d’effets intentionnels à proprement parler mais dans son accomplissement dont les conditions relèvent de facteurs extra-linguistiques comme : “la volonté de l’auditeur, l’acceptation ou le refus de mon autorité sur lui, le crédit qu’il m’accorde, la rapidité de ses réflexes etc” (Ibid., p.98). L’acte perlocutoire “#metoo” renferme en son sein plusieurs conditions de succès. Tout d’abord, l’espace d’expression en lui-même, les réseaux sociaux. Sur Twitter, les publications sont totalement publiques, sur Facebook, elles sont limitées à un réseau choisi par le soi 11

témoignant. En ce sens, il existe déjà une acceptation implicite de la part du lecteur quant à la réception de ces discours. Aussi, et parce que ce sont des espace de réponse, la réfutation de l’acte de parole est une potentialité à envisager. Comme dans tout discours anti-système, il y a un ​backlash​. Le mouvement de libération de la parole des femmes n’a pas fait exception et des arguments d’opposition furent levés. En France par exemple, la polémique s’est fixée sur un refus de nombreuses femmes à s’identifier au mouvement #balancetonporc. Plusieurs raisons suivent cette réaction : la connotation négative du mot-clic et l’argument de la drague dite gentille qui prendrait des proportions exagérées quant à la problématique des agressions sexuelles. Dans un article réflexif à propos de ce ​backlash,​ l’auteure américaine Jia Tolentino écrit : “This is an unprecedented moment of flux on an impossibly complicated topic; this movement is not even three months old yet. The fact of a hashtag flattens these stories, makes them seem unified, but they are profoundly individual. If we stop looking for straightforward collective agreement, we might find we need it less than we think” (2018). Autour de ce discours global gravitent des acteurs de l’action féministe engagés à user de #metoo comme d’un tremplin vers des changements plus grands, ou en tout cas de s’en servir pour appuyer un argumentaire activiste visant d’une part à déconstruire le système rendant possible ces violences commises en toute impunité et d’autre part établir les bases d’une égalité des genres. La mesure de l’accomplissement de cette perlocution doit aussi se faire en prenant compte de d’un argument d’autorité non-négligeable que sont les médias et l’analyse qu’en font ces derniers. Le succès de mouvement #metoo ne peut être amenuisé lorsque le magazine américain TIME MAGAZINE choisit en une de son numéro de décembre 2017 l’activiste féministe noire Tarana Burke. A l’origine de #metoo il y a de ça dix ans, elle est désignée parmi d’autres sous l’expression ​“Silence Breakers”​. Selon une perspective linguistique, cette formule prend tout son sens. En effet, de part le pouvoir qu’a la langue dans l’émancipation et l’agentivité de chacun, briser le silence et ouvrir la parole est une véritable prise de pouvoir. Assigner le titre de “​silence breake​r” à la fondatrice du mouvement c’est l’associer à tout ceux et celles qui ont choisi de s’insérer dans la trajectoire #metoo. C’est pourquoi, à une échelle de groupe, c’est un succès. L’attente de l’acte de langage d’être pris au sérieux et d’être cru est établie et acceptée comme un point d’ancrage vers une évolution par une instance médiatique des plus influente. Et parce que la presse écrite reste aujourd’hui gage d’une information de qualité à l’ère des ​fake news​, on peut aisément assumer l’entendement massif des intentions portées par ce discours. Avec cette prise de parole, on observe un renversement des normes de langage établies depuis des siècles. Parce que les faits sont graves et l’expression collective, on est obligés de prendre au sérieux la “femme qui parle”. Même si les langues et les formes linguistiques genrées restent bien présentes, malgré les “​grey areas​” (Wittington, 2017), et des registres de langues 12

difficilement modifiables, les locuteurs parviennent, au travers d’une collectivisation de la parole transgressive à faire bouger les éléments sur la balance de l’inégalité. En prenant le parti de s’approprier les mots et les formes linguistiques pour exprimer la violence vécue, observée et mesurée, c’est tout un pan de la population qui gagne en agentivité. Cette dernière, parce qu’elle est dirigée vers et contre un système oppressif a pour but, à terme, de déconstruire les normes hétéronormatives notamment ancrées dans le langage.

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