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7 janv. 2017 - une menace d'OPA! DEUX FORMES DE RESPONSABILITÉS. Comparer les lièvres et les tortues, c'est comparer deux formes de responsabi-.
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PAYS :France

RUBRIQUE :Idées

PAGE(S) :7

DIFFUSION :275310

SURFACE :23 %

JOURNALISTE :Emmanuelle Duez

PERIODICITE :Quotidien

7 janvier 2017 - N°22390 - Eco et Entreprise

idées Et àla fin, c’estla tortue qui gagne Lalumière jetéesur lesstart-up, par contraste avecle sombre destin des « vieilles » entreprises, néglige la réalité desresponsabilités économiques et sociales par emmanuelle duez et françois hisquin es années 2000 avaient eu cette vertu de donner ànos jeunes diplômés la soif d’entreprendre. Fini les envies de L’Oréal, Morgan Stanley ou autre McKinsey ! Il fallait désormais créer son avenir soi-même. Après le krach des dot-com qui, en 2000, a assommé une génération entière, une nouvelle vague a suivi avec les années Uber. Les motivations ont changé, l’envie de transformer le monde a pris le relais. Les multiples coups de projecteur des différents ministres ou candidats désireux de s’approprier la paternité du mouvement n’ont fait qu’amplifier ce phénomène. C’esttellement plus chic dans un cocktail de présenter sa start-up et de s’ériger en héros des temps modernes ! Il est ainsi devenu une évidence que ces«jeunes pousses » souples, rapides, adeptes des nouvelles façons de penser,allaient créer de l’emploi et mettre au tapis les entreprises installées – appelons-les « end-up »…Pourquoi est-il de si bon ton de canoniser les start-up, et au contraire de signer l’arrêt de mort des grandes entreprises ? Parce que les start-up se positionnent au car-

L

refour de trois discours valorisés : elles répondent de la pulsion créatrice de l’économie libérale, exaltent des valeurs de dynamisme et d’intensité entrepreneuriale, et vendent le slogan «small is beautiful ». Ces lièvres agiles, frugaux, digitaux «by design » et fiers de l’être s’opposeraient ainsi aux tortues, lentes par définition. Cesdernières font l’objet d’une pré-autopsie rapide dont le bilan semble sans appel : traînant comme des boulets tous les archaïsmes de l’économie française, elles demeurent incapables de réagir et de se saisir de l’explosion des technologies et innovations promues par les géants du Web. Et pourtant, elles avancent à leur rythme. Les changements qui surviennent dans les end-up passent inaperçus, absorbés par l’immensité des structures, où une nouveauté en chasseune autre. La Postea su réinventer son métier d’origine ; Auchan redéploie l’ensemble de seseffectifs sans licencier la moindre caissière. Grandes garantes de l’emploi sur un marché du travail instable, certaines conçoivent leur modèle sur la stabilité, lescontrats à durée indéterminée, la rémunération prioritaire des plus anciens actionnaires, ce qui détone dans un

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PAYS :France

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JOURNALISTE :Emmanuelle Duez

PERIODICITE :Quotidien

7 janvier 2017 - N°22390 - Eco et Entreprise

monde réputé instable… et peut leur valoir une baisse du cours de Bourse, une menace d’OPA! DEUX FORMES DE RESPONSABILITÉS

Comparer les lièvres et les tortues, c’est comparer deux formes de responsabilités. Les jeunes entrepreneurs, dirigeants et propriétaires, n’ont la responsabilité que de leur bébé, tandis que les dirigeants de grandes entreprises, différents des propriétaires depuis bien longtemps, héritent d’une histoire, de centaines de collaborateurs, d’un destin. Si l’échec d’une start-up est au pire un incident de parcours, celui d’une grande entreprise est un drame social, voire politique. Plus surveillées, et contrôlées, les grandes entreprises remplissent bien mieux le cahier des charges légal et social que lesstart-up. Or, tout le monde n’est pas entrepreneur. Beaucoup de fantasmes fabriquent des simulacres de start-up, des images déviées de petites entreprises malignes qui «hackent » les grandes

entreprises. Mais combien de lièvres font véritablement la course avec des tortues, combien de start-up proposant des modèles alternatifs plus pratiques et moins chers ?Très peu. Blablacar peut-être, Criteo pour les plus à la page. En réalité, la plupart des start-up ne se frottent pas aux entreprises corporates, elles se contentent d’ouvrir leurs propres micromarchés… Mais, in fine, combien d’emplois créent-elles vraiment ? Il ne s’agit pas ici de décourager les entrepreneurs, mais de redresser les projecteurs pour ne pas être aveuglé. Rapprocher les entreprises innovantes et les « corporates » semble être une voie d’accès rapide au meilleur des mondes possibles, pour les deux parties. Mieux vaut vivre àdeux plutôt que de mourir seul. Car nous connaissons tous l’issue de la fable… p



Emmanuelle Duez est entrepreneuse,cofondatrice de TheBostonProject François Hisquin est fondateur et PDGd’Octo Technology

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