ffiEJfuWKJffiffi ffi Les grandes plaidoiries des ténors du barreau Quand les mots Peuaent tout cltanger David Forest commente l'ouvrage de Matthieu Aron i-*****"
i t-. droit de [a propriété Littéraire fait de [a plaidoirie une æuvre de l'esprit au même titre que tout Littérature pour peu qu'e[l.e témoigne d'une certaine originaLité. i Oe son caractère éphémère, VolatiLe et évanescent.
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ne dit mot en revanche
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l^ es mots, rarement \-- écrits et quasi-
discours de Robert Badinter du 17 septembre 1981 devant l'Assemblée nationale. Celui de Bobigty qui a largement
ment jamais publiés, he
contribué à la dépénalisation de l'interruption volontaire
se rappellent au souve-
de grossesse trois ans plus tard. Plus récemment, la dénon-
nir des contemporains
ciation de la garde-à-vue, cette pratique policière ( uennnt tout droit des tribunaux religieux d.e l'ancien régime r, selon les termes du bâtonnier Charrière-Bournazel.
que par ouï-dire. Leur conservation est I'apa-
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nage de quelques rares avocats, la parole de la
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plupart des robes noi-
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res étant vouée à l'oubli.
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Il frt une époque où les ténors familiers des plus
grandes affaires crimi-
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nelles
ou
politiques
succombaient aux demandes pressantes d'un éditeur, et pour certains posaient leur voix sur microsillon. Henry Torrès plaide à nouveau I'affaire Schwarzbard. devant les caméras de I'ORTF tandis qu'à I'autre bord du specûe politique, les Nouvelles éditions latines restituent à l'intention d'un lectorat choisi la défense d'un ( quarteron de généraux en retraite ,,. Le genre a passé de mode à mesure que l'exercice gagnait en concision et efficacité pour emprunter un registre plus courant. Le retour en grâce médiatique de I'avocat pénaliste a inspiré à Matthieu Aron, journaliste
spécialiste du monde judiciaire, ce recueil de ( grandes plaidoiries , restituées, pour certaines, grâce au concours
de leurs auteurs.
Il y avait, reconnaissons-le, tout à redouter de cette entreprise destinée au grand public. Titre en forme de réclame, affaires connues passées à la post érité, presque familières, ou renvoyant l'écho à peine assourdi de duels entre stars des prétoires savamment mis en scène, avocats consacrés
et vaches sacrées réunies en un panthéon convenu, éloquence d'un autre temps. Cette prévention se dissipe toutefois au fil des pages, à mesure que défilent ces témoignages inestimables, et les combats herculéens des plaideurs. On retrouve bien sûr quelques moments ( clés , qui infuenceront de façon décisive le législateur. Le procès de Ranucci accusé du meurtre d'une fillette de 8 ans, celui de Patrick Henry qui trouvera son épilogue dans le
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GAzETTE DU pALAls
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DTMANcHE 6 AU MARDT
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FEVRIER 2011
Jacques Vergès fait du procès de Georges Ibrahim Abdallah
celui de I'ingérence étrangère, et demande K à la justice française de signtfer à nos cond.escend,ants amis américains que la France n'est Pas une fllt soumise, en un mot une
putain ,. Le procès devien t K une magistrale tribune Pzur plaider une cause D, nous dit Matthieu Aron. Certains le font devant le tribunal de l'Histoire : procès Pétain puis, bien plus tard, Barbie, Touvier, Papon oir les parties débattent et tentent de cerner les contours du n crime contre l'humanité ,. D'autres combaftent parfois désespérément pour I'innocence : Outreau, Seznec, Pereira, Dils...
L'intérêt historique et politique
passé, restent en filigrane
quelques enseignements sur l'exercice lui-même et sa perception par les intéressés. Ils rappellent si besoin que la plaidoirie est aussi intellectuelle que physique. Contre, ou plutôt malgré, ur corps et des moyens qui se dérobent. Paul Lombard qui plaide trois heures durant pour Ranucci a une extinction de voix. Jean-Marc Florand, défenseur de
Patrick Dils, plus jeune condamné à la réclusion à perpétuité de France, parle K auec le sentiment physique de le porter sur lses) épaules ,. Contre encore une opinion qui désigne à la vindicte par la voix des medias ou les cris de la foule quand un présentateur télévisé ouvre son journal
par i < la France
A
Peur D. Elle conduit François-Xavier
Charvet, avocat du docteur Garetta dans le procès du sang contaminé, à interpeller en ces termes le représentant du procureur de la République : o Vous aaez oublié uotre rôle de représentant de la société pour deuenir celui de I'opinion publiqîl.e... en ce qu'elle a de plus uil. L'opinion uoulait une tête, uous la lui aaez ffirte >. Et cette opinion publique qui s'invite avec insistance à l'audience est ( une prostituée qui tire le juge par la manclte D, conclut Lombard. # Les
grandes plaidoiries des ténors du barreau, Quand les mots peu-
vent tout changer, Mathieu Aron, Éd. Jacob-Duvernet, nov. 2010, 2A €,, 272 p., disponible sur www.lgdj.fr