ERC Consolidator Grant 2014 | Guido Pintacuda - CNRS DR7

Le public bénéficie de cette technique en milieu hospitalier avec l'IRM. Mais c'est aussi un outil de recherche de pointe : la RMN permet par exemple d'obtenir ...
378KB taille 11 téléchargements 382 vues
ERC Consolidator Grant 2014 | Guido Pintacuda

L’imagerie fonctionnelle des molécules biologiques par RMN Guido Pintacuda est chercheur CNRS à l’Institut des sciences Analytiques (ISA1). Spécialiste de la spectroscopie RMN, il développe des méthodes inédites pour repousser les limites de l’observable, et ce pour des échantillons solides comprenant des ions métalliques : un domaine porteur d’enjeux importants.

La spectrométrie RMN permet d’observer la matière à l’échelle de la molécule sans en détériorer sa structure. Le procédé fait appel à une technique extrêmement puissante : les chercheurs utilisent les propriétés magnétiques des noyaux d’atomes ; placés dans un champ magnétique et sollicités par des ondes radio, leur réaction magnétique nous renseigne sur leur nature. Le public bénéficie de cette technique en milieu hospitalier avec l’IRM. Mais c’est aussi un outil de recherche de pointe : la RMN permet par exemple d’obtenir une image en 3D très précise de molécules, qu’elles soient issues du vivant, de matériaux ou de produit chimiques.

Observer les matériaux avec des ions métalliques  : un défi Les ions métalliques peuplent tout autant notre corps que bon nombre de produits d’usages courant. C’est par exemple le cas de certaines de nos protéines, mais aussi des batteries que des ions de lithium s’acharnent à décharger. Avoir une vision précise de la façon dont ces ions métalliques se lient va nous renseigner sur leur comportement, et nous donner la possibilité de le modifier. C’est justement ici qu’interviennent les travaux de Guido Pintacuda en RMN : ces matériaux ne se laissent pas observer si facilement. Premièrement, les détails à l’échelle de l’atome sont trop petits pour être observés par des procédés optiques. La cristallographie par rayon X, l’alternative principale aux techniques optiques, est aussi impuissante quand les composants à analyser ne sont pas ordonnés dans un crystal. La RMN est donc là une alternative, mais un deuxième problème subsiste : les ions métalliques – et leurs électrons non appariés - génèrent des interférences brouillant les observations. C’est ce défi qu’a relevé Guido Pintacuda, avec déjà quelques premières mondiales à son palmarès.

Vers une solution inédite Le mot clé du chercheur est "RMN paramagnétique" : en guise de parade, le scientifique utilise les interférences magnétiques des matériaux récalcitrants pour les observer. Pour cela, il a imaginé des solutions inédites se basant sur le comportement des électrons. Ces approches combinent l’utilisation de champs magnétiques très intenses (notamment, le seul spectromètre RMN "1 GHz" au monde), avec la technique de "l’angle magique", où un échantillon solide subit une rotation avec une vitesse et un angle bien précis lors de son observation. L’échantillon est ensuite perturbé par des champs magnétiques particuliers, avec une puissance et une phase variables. Par ce biais, le contrôle des noyaux à proximité des ions métalliques permet de récupérer des signaux très pertinents pour caractériser ces derniers.

Le projet ERC La moitié de nos protéines contiennent des ions métalliques. Et le tiers de ces protéines est associé à une membrane cellulaire. Ces protéines jouent un rôle primordial dans la vie de la cellule : elles peuvent laisser passer sélectivement des ions métalliques, pour transmettre des messages entre l’extérieur et l’intérieur, ou promouvoir comme des vrais catalyseurs chimiques des réactions complexes de façon très précise et efficace. Comprendre ces protéines permet donc d’intervenir dans des processus cellulaires très importants (par exemple, bloquer l’infection d’une cellule), ou d’exploiter leur potentiel catalytique pour améliorer les procédés utilisés dans nos laboratoires chimiques de synthèse. Or, aujourd’hui, les scientifiques rencontrent de réelles difficultés pour les étudier. Ils utilisent habituellement des techniques de cristallographie mais ces protéines cristallisent trop difficilement.

1

www.cnrs.fr

Unité mixte de recherche CNRS, ENS de Lyon, Université Claude Bernard Lyon 1

ERC Consolidator Grant 2014 | Guido Pintacuda

De plus, la membrane de la cellule n’est pas soluble et quand on y parvient, cela la déforme : on ne peut donc pas utiliser la RMN en solution. La microscopie électronique à basse température représente une alternative mais sa résolution n’est pas totalement satisfaisante. L’objectif du projet ERC de Guido Pintacuda est d’améliorer ses techniques actuelles en RMN solide pour pouvoir étudier les protéines, et obtenir une description à l’échelle de l’atome de leur structure et de leur dynamique. Les domaines pouvant bénéficier d’une telle avancée sont nombreux : une compréhension plus précise des processus cellulaires, des nouvelles applications pharmaceutiques, mais aussi la possibilité d’améliorer des procédés industriels importants comme la conversion du CO2 en O2, la production d’hydrogène, ou le stockage de l’énergie solaire...

ERC Consolidator Les subventions ERC Consolidator Grants sont destinées aux chercheurs possédant entre 7 et 12 ans d’expérience depuis l’obtention de leur doctorat, avec un parcours scientifique très prometteur et un excellent sujet de recherche. Les recherches doivent être menées dans un institut de recherche public ou privé situé dans un État membre de l’UE ou un pays associé. Les subventions peuvent atteindre plus de 2 millions d’euros répartis sur cinq ans.

Cursus Guido Pintacuda a 42 ans. Né en Italie, à Trévise, il intègre la Scuola Normale Superiore de Pise. Il soutient une thèse en 2002 sur les propriétés des ions métalliques via spectroscopies CD et RMN, sous la direction de Lorenzo di Bari et Piero Salvadori. Parallèlement, il assure un post-doc jusqu’en 2004 au Karolinska Institute (Stockholm, Suède) dans l’équipe de Gottfried Otting. Son sujet : la RMN biomoléculaire sur des protéines qui contiennent des ions métalliques. Il utilise alors la spectroscopie RMN sur des échantillons en solution. En 2003 et 2004, il étudie les interactions protéine-protéine sur des assemblages moléculaires impliqués dans la réplication de l’ADN à l’Australian National University. Après un autre post-doctorat à l’Ecole Normale Supérieure de Lyon dans l’équipe de Lyndon Emsley, il intègre le CNRS en 2005 en tant que chargé de recherche au sein Laboratoire de Chimie de l’ENS de Lyon. Il apprend la RMN d’échantillons solides tout en amenant ses compétences sur les protéines et les ions paramagnétiques. L’équipe a depuis déménagé au sein de la nouvelle Cité lyonnaise de l’’environnement et de l’analyse, à Villeurbanne, dans l’Institut des Sciences Analytiques (ISA1). Elle dispose d’une plateforme de spectroscopie RMN unique, notamment du spectromètre le plus puissant au monde. Guido Pintacuda devient directeur de recherche en 2009 et responsable du groupe "Analyse biomoléculaire via RMN solide" de l’ISA. Depuis 2013, il coordonne un réseau européen sur la RMN paramagnétique (ions métalliques), financé par l’Europe (FP7).

1

Unité mixte de recherche CNRS, ENS de Lyon, Université Claude Bernard Lyon 1

Rédaction : Sébastien Buthion - Photo : Vanessa Cusimano CNRS Délégation Rhône Auvergne | Service communication Mai 2015 www.cnrs.fr