Confiance des consommateurs et performance du marché immobilier

2 oct. 2017 - Le marché de l'emploi, les taux d'intérêt hypothécaires et le bilan migratoire sont souvent considérés comme les principaux déterminants du marché immobilier. Or, les économistes et les analystes de marché mentionnent aussi souvent la confiance des consommateurs, plus particulièrement le sous-indice ...
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Octobre 2017

CONFIANCE DES CONSOMMATEURS ET PERFORMANCE DU MARCHÉ IMMOBILIER VONT DE PAIR

Le marché de l’emploi, les taux d’intérêt hypothécaires et le bilan migratoire sont souvent considérés comme les principaux déterminants du marché immobilier. Or, les économistes et les analystes de marché mentionnent aussi souvent la confiance des consommateurs, plus particulièrement le sous-indice se rapportant à l’immobilier, pour appuyer leur argumentaire sur la performance d’un marché. Il est à se demander si la confiance des consommateurs est un déterminant du marché immobilier ou si celle-ci est tout simplement influencée par les mêmes facteurs. Toujours est-il que les deux variables semblent étroitement liées.

Qu’est-ce que la confiance des consommateurs? La confiance des consommateurs est le reflet de la perception des consommateurs envers les conditions économiques actuelles et futures. Il existe quelques indices de confiance au Canada qui visent à mesurer ces perceptions à l’aide d’enquêtes réalisées tous les mois auprès des ménages des différentes provinces. La FCIQ choisit de suivre l’indice de confiance du Conference Board du Canada. L’enquête est composée de quatre questions portant sur la perception des ménages quant au marché du travail et à ses perspectives, à leurs finances personnelles et à leur sentiment face à un achat majeur. Ce dernier aspect revêt un intérêt tout particulier pour suivre l’évolution du marché immobilier, puisque les ménages sont appelés à se prononcer sur la perspective suivante : « Est-ce que, selon vous, le moment est propice pour qu’une personne moyenne réalise un achat important, tel que celui d’une propriété ou d’une voiture? » On s’intéresse ici à la proportion de consommateurs ayant répondu par l’affirmative à cette question. Voici un aperçu des résultats de l’enquête sur la confiance des consommateurs dans l’ensemble du Canada pour l’année 2017.

D’un océan à l’autre : Un clivage entre l’est et l’ouest Les deux premières questions du sondage cherchent à mesurer la situation financière des familles par rapport à ce qu’elle était six mois auparavant et par rapport à ce qu’elle sera six mois plus tard. Le Québec est en milieu de peloton quant à la proportion de répondants affirmant que leur situation financière s’est améliorée : les provinces de l’Atlantique et l’Ontario montrent un peu plus d’optimisme, alors qu’à l’opposé, les provinces de l’Ouest affichent les proportions les plus faibles.

Octobre 2017 Question 1 : Globalement, trouvez-vous que votre famille est en meilleure position financière qu’il y a six mois? (Proportion ayant répondu « meilleure », moyenne 2017) Provinces de l’Atlantique 18,4 %

Québec

Ontario

18,3 %

18,5 %

Saskatchewan et Manitoba 16,0 %

Alberta 15,4 %

ColombieBritannique 17,7 %

Question 2 : Globalement, croyez-vous que votre famille sera en meilleure position financière dans six mois? (Proportion ayant répondu « meilleure », moyenne 2017) Provinces de l’Atlantique 22,6 %

Québec

Ontario

26,4 %

23,2 %

Saskatchewan et Manitoba 19,6 %

Les Québécois sont cependant les plus optimistes quant au sort de leur situation financière. C’est effectivement au Québec que les répondants ont été les plus nombreux, en proportion, à croire que leur situation financière s’améliorerait dans les six prochains mois. Il est intéressant de noter, d’une part, que l’optimisme mesuré par ces deux questions est en forte croissance au Québec depuis un creux en 2014 et, d’autre part, que la province est la seule à avoir connu un « crescendo » continu quant à la proportion de réponses positives à ces deux questions. Plus précisément, la proportion de répondants québécois croyant que leur situation financière s’était améliorée en 2014 n’était que de 10,3 %, et la proportion croyant que leur situation s’améliorerait était de 19,3 %, soit des hausses respectives de 8 et 7,1 points en trois ans.

Alberta 21,5 %

ColombieBritannique 22,0 %

C’est au Québec que les répondants ont été les plus nombreux, en proportion, à croire que leur situation financière s’améliorerait dans les six prochains mois.

Question 3 : Comment qualifieriez-vous le marché de l’emploi de votre région dans six mois? (Proportion ayant répondu « meilleure », moyenne 2017) Provinces de l’Atlantique 11,2 %

Québec

Ontario

12,4 %

12,2 %

Saskatchewan et Manitoba 10,5 %

La troisième question porte sur le marché de l’emploi. Le Québec se situe près des niveaux de la majorité des autres provinces, à l’exception de celle de l’Alberta, remplie d’espoir de voir le marché de l’emploi se remettre de la chute du prix du pétrole amorcée tôt en 2015. À cet égard aussi, le Québec affiche une hausse continue sur la période allant de 2014 à 2017. Signe que cette mesure de confiance reflète bien la réalité, le marché de l’emploi québécois, qui avait connu une année 2014 difficile, s’est remis sur pied, avec des augmentations mensuelles continues du nombre d’emplois depuis février 20151.

Alberta 19,7 %

ColombieBritannique 12,7 %

Le marché de l’emploi québécois, qui avait connu une année 2014 difficile, s’est remis sur pied, avec des augmentations mensuelles continues du nombre d’emplois depuis février 2015.

Source : Enquête sur la population active, Statistique Canada. Variations année sur année (un mois par rapport au même l’année précédente)

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Octobre 2017 Les Québécois, les plus confiants envers l’immobilier Question 4 : Croyez-vous qu’il s’agit d’un bon temps pour une personne moyenne de réaliser un achat important, telle une propriété ou une voiture? (Proportion ayant répondu « oui ») Provinces de l’Atlantique 28,0 %

Québec

Ontario

39,4 %

28,5 %

Saskatchewan et Manitoba 25,8 %

Alberta 25,3 %

Finalement, la question la plus pertinente pour les passionnés de l’immobilier montre que les Québécois sont les plus nombreux à croire que les conditions sont favorables à un achat important, telle une propriété. Les Québécois sont d’ailleurs les plus optimistes à ce chapitre depuis le début de 2015.

Les Québécois sont les plus nombreux à croire que les conditions sont favorables à un achat important, tel une propriété.

En effet, l’année 2015 a été marquée par une hausse soudaine et considérable de la confiance des consommateurs envers l’immobilier : la proportion moyenne a alors atteint 35,9 %, en comparaison avec 26,9 % en 2014. La tendance à la hausse s’est poursuivie en 2017, et la proportion de Québécois optimistes a atteint ou dépassé le seuil des 40 % à quatre reprises depuis le début de l’année. À l’extérieur du Québec, on remarque aussi que les provinces qui ont connu des hausses considérables au chapitre des ventes résidentielles en 2017 sont celles qui ont vu s’accroître leur proportion de consommateurs confiants envers le marché immobilier, comme l’Alberta et les provinces de l’Atlantique. À l’opposé, les provinces des Prairies et l’Ontario ont vu leurs ventes diminuer, tout comme leur niveau de confiance.

ColombieBritannique 24,7 %

La proportion de Québécois optimistes a atteint ou dépassé le seuil du 40 % à quatre reprises depuis le début de l’année.

Proportion des consommateurs confiants

Variation de la confiance 2017* vs 2016

Variation des ventes résidentielles 2017* vs 2016*

Provinces de l’Atlantique

28,0 %

+3.2 pdp

+1.6 %

Québec

39,4 %

+2.6 pdp

+5 %

Ontario

28,5 %

-1.2 pdp

-10 %

Saskatchewan et Manitoba

25,8 %

-0.8 pdp

-1.5 %

Alberta

25,3 %

+7.5 pdp

+8,8 %

Colombie-Britannique

24,7 %

+1.4 pdp

-13 %

*Janvier à septembre seulement Sources : Conference Board du Canada et ACI

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Survol de la confiance des consommateurs québécois envers le marché immobilier au cours des dix dernières années Des liens entre le sous-indice de la confiance des consommateurs et le marché immobilier peuvent certes être tracés en observant l’évolution de la proportion de Québécois ayant répondu qu’il s’agissait d’un bon moment pour acheter une propriété. Sur un horizon de dix ans, quatre périodes aux tendances différentes peuvent être observées sur le graphique ci-dessous, chacune reflétée dans l’évolution des ventes et des prix des propriétés résidentielles au Québec.

Proportion des consommateurs québécois qui croient que le moment est propice à un achat important

Source : FCIQ par le système Centris®

1. La crise financière L’année 2007 a été une année record pour le marché immobilier au Québec, avec un nombre de transactions qui n’a toujours pas été égalé. Le dynamisme de 2007 a été stoppé par la récession survenue en 2008 et 2009. Le graphique ci-dessus montre que la confiance s’était nettement détériorée en 2008 lors de la crise financière, tant en raison de la récession au Canada que de la crise des subprimes qui sévissait aux ÉtatsUnis. En parallèle, le marché immobilier au Québec a connu de fortes diminutions des ventes. 2. L’après crise financière Dès le printemps 2009, la confiance s’est redressée. La crise financière avait fait baisser les taux d’intérêt hypothécaires et la Banque du Canada avait affirmé qu’elle maintiendrait le taux directeur à son plancher de 0,25 % jusqu’en juillet 2010. Une plus forte proportion de Québécois croyaient qu’il s’agissait alors d’un bon moment pour réaliser un achat important. Le marché immobilier québécois allait aussi bon train avec de fortes hausses des ventes et de vigoureuses croissances des prix des propriétés. L’optimisme s’est maintenu à des niveaux relativement élevés jusqu’à ce que les autorités gouvernementales viennent calmer le jeu en instaurant un premier resserrement hypothécaire.

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3. Les resserrements hypothécaires et l’atterrissage en douceur Une série de mesures visant à restreindre le crédit hypothécaire ont été instaurées par le gouvernement fédéral en avril 2010, mars 2011, avril 2011 et juillet 2012, ce qui semble avoir refroidi un bon nombre de consommateurs québécois. Ces modifications du financement hypothécaires ont maintenu la proportion de répondants jugeant les conditions favorables à l’achat d’une propriété à des niveaux inférieurs à 30 % en moyenne, et ont eu des répercussions jusqu’à la fin de l’année 2014. Le marché immobilier québécois ne se montrait pas particulièrement convaincant non plus, avec des diminutions de ventes et, au mieux, une stabilité des prix. 4. La reprise Depuis le début de 2015, on observe un niveau de confiance supérieur à la moyenne des dix dernières années, ainsi qu’une tendance à la hausse de cette confiance. Plus récemment, la proportion de Québécois qui croient le moment propice à l’achat d’une propriété a dépassé les 40 % neuf fois au cours des 17 derniers mois, soit des proportions inédites depuis l’été de 2005. En parallèle, sur le marché immobilier, les ventes et les prix des propriétés ont retrouvé le chemin de la croissance au Québec : les ventes résidentielles ont augmenté de 5 % en 2015 et en 2016 et affichent la même progression depuis le début de 2017. La croissance du prix moyen pondéré provincial s’est aussi raffermie au cours des deux dernières années, avec des progressions de 3 % en 2016 et de 4 % de janvier à septembre 2017.

Une corrélation positive entre les ventes et la confiance Comme vu dans l’encadré ci-dessus, le marché immobilier et le sous-indice de confiance portant sur le marché immobilier semblent liés. Le graphique suivant illustre l’évolution du nombre de ventes Centris® et de la confiance des consommateurs envers l’immobilier au Québec depuis 2007.

Proportion des consommateurs québécois qui croient le moment propice à un achat important et ventes résidentielles désaisonnalisées

Sources : FCIQ par le système Centris® et Conference Board du Canada

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Octobre 2017 Si l’examen visuel de ce graphique suggère une corrélation entre les deux variables, il faut toutefois faire preuve de prudence, car la corrélation dans ce cas est plutôt faible. En effet, la corrélation entre les ventes désaisonnalisées Centris® et le sous-indice de la confiance se rapportant à l’immobilier est de 0,46 sur la période étudiée, soit une corrélation jugée modérée. Cette corrélation ne varie pas lorsque la confiance et les ventes sont décalées d’un mois, et elle diminue si les périodes s’éloignent davantage. Il n’est donc pas faux de conclure que les ventes et la proportion de Québécois jugeant le moment propice à l’achat d’une propriété suivent les mêmes tendances, et ce, en même temps.

La corrélation entre les ventes désaisonnalisées Centris® et le sousindice de la confiance se rapportant à l’immobilier est, sur la période étudiée, de 0,46, soit une corrélation jugée modérée.

Une autre raison invitant à la prudence est qu’une corrélation, même très forte, n’implique pas nécessairement une relation de cause à effet : autrement dit, une hausse de la confiance des consommateurs québécois n’entraîne pas nécessairement une hausse des ventes résidentielles au Québec. Divers autres facteurs peuvent être à l’origine du mouvement synchronisé de la confiance et des ventes. Par exemple, une hausse du niveau de l’emploi pourrait entraîner une augmentation à la fois de la confiance et des ventes résidentielles. L’évolution des ventes Centris® est d’ailleurs relativement corrélée (0,43) avec la troisième question du sondage, qui porte sur les perspectives du marché de l’emploi. De la même manière, un assouplissement du crédit hypothécaire ou une baisse des taux hypothécaires pourrait pousser la confiance à la hausse et se traduire également par une croissance des ventes résidentielles.

Faible lien entre les prix et la confiance Du côté des prix, le graphique présentant l’évolution de la confiance envers le marché immobilier et la variation du prix moyen pondéré des propriétés suggère une certaine corrélation positive, quoiqu’irrégulière au cours de la période : pour un niveau de confiance donné, la croissance des prix était beaucoup plus soutenue au début qu’à la fin de la période.

Proportion des consommateurs québécois qui croient le moment propice à un achat important et variation du prix moyen pondéré

Sources : FCIQ par le système Centris® et Conference Board du Canada

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Octobre 2017 La corrélation des variables illustrées au graphique est plutôt faible, soit de 0,18 lorsque les périodes sont les mêmes et de 0,24 lorsque la confiance est devancée de deux mois, ce qui demeure une corrélation faible. C’est donc dire que le sous-indice de confiance et la croissance des prix n’évoluent pas ensemble, ou du moins très peu. Il est normal que la confiance des consommateurs soit reflétée de manière plus importante dans les ventes de propriétés, car son impact est probablement limité à la demande de propriétés, alors que la fluctuation des prix est plutôt la résultante de la dynamique entre l’offre et la demande de propriétés.

C’est donc dire que le sous-indice de confiance et la croissance des prix n’évoluent pas ensemble, ou du moins très peu.

Conclusion : Quand l’immobilier va, la confiance va... et vice-versa La confiance des consommateurs, et plus précisément le sous-indice se rapportant au marché immobilier, est une variable intéressante à surveiller puisqu’elle semble étroitement liée au marché immobilier. La confiance des consommateurs évolue de la même manière que le marché immobilier, sans toutefois en être un indicateur précurseur. Il ne faut pas écarter la possibilité qu’il y ait une causalité, qui peut être unidirectionnelle ou bidirectionnelle. La confiance des consommateurs stimulerait-elle une hausse des ventes ou est-ce la bonne tenue du marché immobilier qui inspire aux répondants un sentiment de confiance envers l’immobilier? Si sa corrélation avec l’évolution des ventes Centris® n’est que modérée, et qu’un le lien de causalité n’est pas démontré, la confiance demeure toutefois une variable sur laquelle économistes et analystes vont continuer de s’appuyer pour qualifier la performance du marché immobilier. Dans tous les cas, ils n’auront pas tort d’affirmer que le marché immobilier se porte bien (ou mal), et qu’en plus, une forte proportion de consommateurs croient (ou non) le moment propice à un achat important. La confiance des consommateurs viendra donc confirmer qu’une bonne performance du marché immobilier n’est pas fortuite lorsque la confiance se porte bien.

Cette publication est produite par le service Analyse du marché de la FCIQ Paul Cardinal Directeur ®

Camille Laberge Économiste

Antoine Abdulnour Grondin Analyste du marché

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