Concerto pour Alexandre Rockeuse

Sa marqueterie était peu abîmée, il avait peu servi. Ses pédales de cuivre brillaient encore, il n'y avait pas longtemps qu'on l'avait quitté. Il était d'un simple bois ...
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F RANÇAIS 1 re année du 2 e cycle du secondaire

Situation d’évaluation D OSSIER 1 Textes

Concerto pour Alexandre et

Rockeuse C ONSIGNES 1. Lisez attentivement les textes Concerto pour Alexandre et Rockeuse en

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utilisant les stratégies de lecture adéquates pour lire et apprécier ces textes : planifier sa lecture (genre et type de texte, contraintes de la tâche), comprendre et interpréter les textes (cerner le contenu et l’organisation d’un texte littéraire) et réagir aux textes.

2. T o u t a u l o n g d e c e t t e s i t u a t i o n d ’ é v a l u a t i o n , c o n s u l t e z l e s o u t i l s d e référence pertinents.

Nom de l’enseignant ou de l’enseignante

Nom de l’élève

Date

Groupe

Expressions / Guide 10768

CONCERTO POUR ALEXANDRE

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Installé dans un coin, collé à une baie vitrée battue de pluie et de vent, enfermé dans l’orage, livré aux marchands, seul, triste et oublié, il se tenait digne et droit tel un jeune soldat préoccupé de son avenir. Sa marqueterie était peu abîmée, il avait peu servi. Ses pédales de cuivre brillaient encore, il n’y avait pas longtemps qu’on l’avait quitté. Il était d’un simple bois de chêne, sans décoration, c’était un modeste piano de répétition. Attentive aux moindres détails, j’imaginais l’histoire du grand instrument qui se tenait là-bas, tout au fond de la salle, à l’écart du monde… comme moi. Je le baptisai : Clément. Jamais aucune poupée, aucun jouet, aucune toilette n’avait provoqué en moi cet émoi. Ce piano était telle une partie de moi-même. J’avais envie de le consoler, de l’emporter. Pour lui, je lâchai la main de ma tante. Moi la petite fille modèle de quatre ans, je bravai l’interdit, osai affronter la foule des jambes des grandes personnes et m’approchai. Avec précaution, je me hissai sur l’étrange tabouret de velours, ouvris le couvercle… le clavier blanc et noir, ordonné, parfait, m’éblouit. J’attrapai un pan de ma robe blanche pour l’épousseter. Je touchai le merveilleux. Une note était plus sale que les autres, je frottai plus fort… Un la résonna. Un la emplit la salle, descendit le grand escalier, pénétra les longs couloirs et, libre, sortit dans la rue. Et la pluie s’arrêta. Et l’arc-en-ciel parut. Moi, l’enfant de quatre ans, avec une note, j’avais fait cesser la pluie. J’avais arrêté le monde. Les visages des grandes personnes de toute leur hauteur se tournèrent vers moi. La petite fille bien élevée à qui l’on n’avait pas besoin de dire : « Ne salis pas ta robe, ne fais pas de bruit, ne dérange pas les grandes personnes » avait sali sa robe, fait du bruit, interrompu les grandes personnes et semblait sûre de son bon droit. Comment expliquer cela ?... En rejoignant ce piano, j’avais fait le bien. J’en étais persuadée. J’affrontai les regards avec aplomb. L’instrument miraculeux me protégeait. Ma tante agacée m’attrapa le bras. Je ne craignis pas sa gifle et m’accrochai au couvercle. Quiconque me séparerait de Clément recevrait des coups. Pour lui, je me battrais à en mourir. L’idée de la mort m’arriva ce jour-là. Pour un piano, on pouvait se battre à en mourir. Je laissai tomber ma tête sur le clavier, ma chair se colla aux touches et là… des notes droit sorties du ventre du piano me répondirent. Les sons pénétrèrent mon crâne et gagnèrent tout mon être. Je fermai les yeux, convaincue d’un cataclysme. Attendant la fin du monde, je m’évanouis.

DOSSIER 1 – Lecture

Textes

ÉV1-2

Expressions / Guide 10768

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Je me réveillai, le soleil était sur le piano. À l’endroit même où ma tête était tombée, où les notes avaient jailli, des rais de lumière dansaient. Les poussières jouaient en elles. L’assistance m’entourait. Ma tante m’offrait un jus de fruits. Une autre dame me rafraîchissait le front d’eau de Cologne. Grâce à Clément, j’avais rendu les grandes personnes compréhensives, amies des enfants, j’avais créé un monde bienveillant. Clément n’était plus seul, plus triste. Pour consoler les pianos, il suffisait de les faire jouer… Tout en gardant une main sur mon piano, je me levai. Les yeux au niveau des touches, mon avenir m’apparaissait. Clément et moi, nous allions embellir le monde et chasser la pluie. Cette idée ne m’a plus jamais quittée. Je joue pour que vienne le soleil.

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Joëlle MIQUEL, Concerto pour Alexandre, coll. Un endroit où aller, Arles, Actes Sud, 2002, p. 18 à 21.

DOSSIER 1 – Lecture

Textes

ÉV1-3

Expressions / Guide 10768

ROCKEUSE Rockeuse Rien qu’une rockeuse Rien qu’une rockeuse De grand ch’min 5 Rockeuse Rien qu’une rockeuse Toujours le cœur Sur la main J’ai jamais 10 Voulu faire de mal à mon prochain J’pense plutôt que ma voix fait du bien À ceux qui m’aiment Quand j’me suis mise à chanter C’était pas pour faire un métier 15 Je chante parce que ça m’délivre De ma p’tite misère de vivre

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Rockeuse Rien qu’une rockeuse Rien qu’une rockeuse 20 De grand ch’min

25 Vous vous d’mandez d’où me vient D’où me vient tout ce pouvoir Il me vient de toutes ces mains Tendues vers moi dans le noir Rockeuse 30 Rien qu’une rockeuse Rien qu’une rockeuse De grand ch’min Vous pouvez m’accuser de tous les maux d’la Terre 35 De rendre les gens fous De rendre les gens roses C’est m’condamner à m’taire Mais avant j’voudrais dire quequ’chose 40 À tous ceux qui m’ont suivie Jusqu’ici Je vous aime…

J’ai toujours Donné tout c’que j’avais à donner On vient m’voir comm’ pour se r’garder Dans un miroir

25 Interprétation : Diane Dufresne, album Dioxine de carbone et son rayon rose (1984). Paroles : Luc Plamondon. Musique : Angelo Finaldi. Luc PLAMONDON, Paroles, Montréal, Lanctôt éditeur, 2005, p. 163-164.

DOSSIER 1 – Lecture

Textes

ÉV1-4

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