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investisseurs privés, comme les banques, les corporations et les fonds d'investissement, ainsi que les investisseurs publics, comme les entreprises publiques et les fonds souverains, sont désormais au nombre des accapareurs. À l'occasion du 150e anniversaire du. Canada, il convient de reconnaître l'histoire de.
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CANADA 150 UNE ANALYSE RÉTROSPECTIVE DE L'AGRICULTURE AU NOUVEAUBRUNSWICK L'UNION NATIONALE DES FERMIERS AU N.-B. JUIN 2017

ACCAPAREMENT DES TERRES L’année 2017 marque le 150e anniversaire de la Confédération du Canada, dont le Nouveau-Brunswick est l’un des quatre principaux signataires. Bien que les célébrations entourant le 150e anniversaire du Canada soient controversées, elles offrent l’occasion de s’arrêter et de réfléchir à l’histoire complexe de notre province et de notre pays. Il est important de reconnaître les réalisations accomplies au nom de l’agriculture et des droits fonciers, mais aussi les dommages que ceux-ci ont causés. « Accaparement des terres » est une expression qui désigne l’acquisition massive de terres agricoles par des investisseurs étrangers et nationaux, souvent suscitée par des crises financières, énergétiques ou alimentaires. Il s’agit d’une approche couramment utilisée par les grandes puissances afin d’investir dans des terres situées à l’extérieur de leurs frontières. Or, de nos jours, les gouvernements cherchent de plus en plus à acheter des terres « inoccupées » qui pourraient leur servir, à l’intérieur de leurs propres frontières. Même si le Canada, pays fondé sur le colonialisme, s’y connaît bien en accaparement des terres, le Nouveau-Brunswick a vu ses terres agricoles passer de mains en mains d’innombrables fois. La relation entre le Nord et le Sud en ce qui concerne cette pratique rappelle certes celle du colonialisme, mais les gouvernements ne sont plus les seuls acquéreurs de terres agricoles. En effet, les investisseurs privés, comme les banques, les corporations et les fonds d’investissement, ainsi que les investisseurs publics, comme les entreprises publiques et les fonds souverains, sont désormais au nombre des accapareurs. À l’occasion du 150e anniversaire du Canada, il convient de reconnaître l’histoire de l’accaparement des terres au Nouveau-Brunswick et de retracer ses répercussions sur le milieu agricole de la province.

START SMALL The little things make a difference planting trees, and buying local produce helps lesson carbon footprint.

AVANT L’ARRIVÉE DES EUROPÉENS Pour tenir une discussion de fond sur l’histoire de l’agriculture au Nouveau-Brunswick, il faut remonter beaucoup plus loin qu’il y a 150 ans. Le Nouveau-Brunswick est avant tout la terre natale des nations mi'kmaq et malécites. Avant l’arrivée des Européens, ces peuples autochtones faisaient pousser deux espèces de maïs, des courges et des haricots, en plus d’avoir recours à la sélection de semences. Les Autochtones du territoire qui constitue aujourd’hui le Nouveau-Brunswick pratiquaient également la pêche, la cueillette de baies et la chasse pour complémenter leur régime alimentaire. 

Les peuples autochtones ne connaissaient pas le concept de propriété des terres. Ils attachaient plutôt de l’importance à la relation étroite entre les humains, les animaux, les plantes et l’environnement. La propriété collective, et non pas la propriété privée, de même que la définition des territoires en fonction de la langue, et non pas des frontières, sont des idées profondément ancrées chez de nombreux peuples des Premières Nations. Aucune partie du territoire qui compose les provinces maritimes n’a été cédée – peut-être parce que les communautés autochtones estimaient qu’elles n’en avaient pas l’autorité. À cette époque, l’agriculture représentait le moyen le plus productif d’exploiter la terre et constituait le signe de la civilisation aux yeux des Européens. Le Nouveau-Brunswick compte 17 599 hectares de terre de réserve, soit la plus grande superficie de terre de réserve des provinces maritimes. 

1604  ARRIVÉE DES COLONS FRANÇAIS À partir de 1604, les Français ont colonisé une région qu’ils ont appelée l’Acadie. Les Acadiens se sont fait connaître comme des défricheurs d’eau. Ils ont contribué de manière exceptionnelle à l’agriculture en introduisant le concept des aboiteaux dans la nouvelle colonie et en gagnant ses marais salés. Les Acadiens se sont servis de leur savoir issu de France pour transformer les marais salés de l’Acadie en terres agricoles fertiles grâce aux aboiteaux et au système d’assèchement des terres. Ils ont entretenu une relation harmonieuse avec les Mi'kmaq pendant la fin du 17e siècle et le début du 18e siècle, fait rare à cette époque. La transformation des marais salés n’était pas pierre d’achoppement entre les deux peuples. Par ailleurs, la construction des aboiteaux était une tâche collective, et les terres asséchées étaient attribuées au moyen d’une loterie. Une fois les terres attribuées, les propriétaires s’échangeaient ou achetaient des champs au besoin. Les marais acadiens étaient utilisés pour cultiver le blé, le lin et des légumes, en plus de servir de pâturage pour le bétail.

1705 

DÉPORTATION DES ACADIENS

Les Acadiens étaient d’excellents fermiers. Selon l’Encyclopédie canadienne, les Acadiens ont continué d’appuyer les Français de l’île Royale, alors qu’on leur avait interdit de le faire. Ils leur envoyaient des vivres, ce qui contrariait les Britanniques et a ultimement contribué à leur déportation. L’une des premières mesures prises au cours de la déportation des Acadiens a été de prendre le contrôle des terres rendues fertiles par les précieux aboiteaux, de les donner à de nouveaux fermiers britanniques et de s’assurer que les digues soient maintenues en état de marche grâce à la transmission du savoir des Acadiens.

Les Acadiens ont été abandonnés par leur gouvernement après 1755. Ils ont cessé d'avoir accès aux ressources, aux semences et aux technologies, ce qui a entravé leurs progrès en matière d’agriculture. Les fermiers acadiens qui ont échappé à la déportation ont été forcés de quitter leurs terres fertiles et ont été remplacés par des fermiers anglais et par un groupe de planteurs de la Nouvelle-Angleterre en 1763. Frustrés, certains Acadiens ont abandonné l’agriculture et sont devenus des pêcheurs et des bûcherons.  

D’HIER À AUJOURD’HUI

1783 En 1783, 10 000 nouveaux colons arrivent dans la vallée de la rivière Saint-Jean, à la suite de la Révolution américaine. L’arrivée massive de ces colons, dont la plupart sont des loyalistes, provoque des changements sociaux et économiques considérables au Nouveau-Brunswick.

1820-1850 À cette époque, l’importation de produits alimentaires au Nouveau-Brunswick est très répandue.

1867 L’année 1867 marque l’année de la signature de la Confédération. Le Nouveau-Brusnwick, la Nouvelle-Écosse, le Québec et l’Ontario se réunissent pour former un pays.

1900-1910 En 1900, le rendement moyen du blé au Nouveau-Brunswick dépasse celui de l’Ontario et du Manitoba. L’industrie laitière est bien établie et compte 54 fromageries, qui produisent ensemble 19,3 millions de livres de lait et fabriquent 1,8 million de livres de fromage, ce qui équivaut  à un rendement de 189 706 $. Les fermiers ont encore recours aux chevaux dans le cadre des travaux agricoles. 

1914 -1918 

PREMIÈRE GUERRE MONDIALE La Première Guerre mondiale a eu diverses conséquences sur le secteur agricole du Nouveau-Brunswick. C’est à cette époque que l’industrie de la pomme de terre, toujours bien présente à l'heure actuelle, voit le jour au Nouveau-Brunswick. La guerre crée également une demande pour le foin, le grain, et la nourriture en général. Or, lorsque le Canada s'engage dans le conflit, les communautés agricoles perdent leur main-d’œuvre, qui part au front Des progrès technologiques sont réalisés, notamment en ce qui concerne les véhicules à moteur, l’électricité et l’aviation - des technologies qui sont intégrées dans les communautés agricoles par la suite. Le conflit transforme également les habitudes de consommation des gens et donne lieu à la production de masse des produits de consommation, en plus de voir naître les pesticides et les gaz neurotoxiques, qui sont utilisés comme armes chimiques.

À la fin de la guerre, la viande transformée, par exemple les poitrines de poulet préemballées, sans peau et sans os, fait son apparition sur le marché. Avant cette époque, c’est la carcasse entière de l’animal qui est vendue aux bouchers. L’immense demande pour de la viande transformée réforme les méthodes de production, alors que les militaires désossent la viande afin de l’expédier plus facilement dans des boîtes.

Enfin, la Première Guerre mondiale contribue à l’augmentation de la présence des aliments transformés sur le marché et éloigne les consommateurs des fermiers; les barres énergétiques, la viande en conserve, les croustilles Pringles, un éventail de conservateurs, les plats allant au four à microondes, et le recours au four à micro-ondes en général, sont tous issus de cette époque.

1930

LA GRANDE CRISE

Entre 1932 à 1942, le gouvernement donne 4 400 fermes à des familles néo-brunswickoises afin de leur venir en aide.

1939-1945 DEUXIÈME GUERRE MONDIALE La Deuxième Guerre mondiale favorise l’émergence de la haute technologie et la formation à grande échelle des soldats, des aviateurs et des marins dans ce domaine. À leur retour de la guerre, les jeunes hommes sont courtisés par les entreprises industrielles, qui les incitent à s’installer en ville plutôt qu’en campagne. 

AUJOURD’HUI  L’histoire de l’agriculture du Nouveau-Brunswick est riche et offre une base solide pour l’avenir des fermes de famille. Depuis la Première Guerre mondiale, l’industrie de la pomme de terre est devenue, en 2016, la plus grande culture au NouveauBrunswick, et les cultures de fruits, de baies et de noix, de même que les entailles d’érables, ne cessent de croître. Selon le dernier Recensement de l’agriculture, la superficie totale des terres agricoles a diminué au Nouveau-Brunswick, mais la taille moyenne des fermes est passée de 359 acres il y a cinq ans à 370 acres en 2016. Il s’agit d’un autre signe qu’un changement dangereux s’opère et que les petites fermes de famille cèdent leur place aux grandes fermes gérées par des corporations.

CONCLUSION L’accaparement des terres est toujours une réalité au Nouveau-Brunswick. Il n’existe aucune restriction sur la propriété étrangère des terres agricoles à l’heure actuelle, ce qui expose la province à l’acquisition massive de ses terres par des gouvernements étrangers, des grandes entreprises ou des banques. Il suffit de penser à la société J.D. Irving Ltd, qui est l’un des plus grands propriétaires terriens du monde, et qui cumule 3,6 millions d’acres de terres au Nouveau-Brunswick, en Nouvelle-Écosse et au Maine. C'est sans même parler des terres de la Couronne, qui sont exploitées par des entreprises privées de l’industrie des pâtes et papiers. L’accaparement des terres fait passer les fermes canadiennes des mains de véritables fermiers à celles de propriétaires terriens absents, ce qui n’est pas sans rappeler le modèle des métayers que bon nombre de nos ancêtres européens ont fui en venant s’installer au Canada. 

Souvent, les humains ne reconnaissent pas ce qu’ils ont avant de l’avoir perdu. Le Nouveau-Brunswick est une magnifique province, riche et fertile. Elle comporte de vastes étendues de terre déboisée et arable en jachère, que la forêt et la broussaille s’empressent de regagner. Il faut reconnaître les pertes qu’ont subies les Autochtones, nos ancêtres, et les fermiers du Nouveau-Brunswick. Il s’agit de la seule façon d’apprendre des erreurs du passé et d’avancer sans avoir peur de les répéter. L’un des principes fondateurs de l’Union nationale des fermiers concerne la souveraineté alimentaire, qui prévoit que « les résidents du Nouveau-Brunswick ont le droit de contrôler leur propre alimentation saine et culturellement appropriée, produite grâce à des méthodes écologiquement saines et durables dans le cadre de leur propre système d’agriculture. » En vertu de ce principe, tous les fermiers ont le droit, et même la responsabilité, de s’engager dans le système alimentaire et d’avoir une relation à échelle humaine avec la terre dont ils sont propriétaires.

Les fermiers doivent arpenter leur terrain, traverser leurs champs et surveiller leurs installations la nuit. Ils doivent veiller au bon écoulement des eaux, garder un œil sur les animaux qui circulent sur leurs terres, se renseigner sur l'ancien propriétaire et s’assurer qu’un plan de relève est en place. Les fermiers ont la capacité d’influencer positivement les droits fonciers nationaux pour les générations à venir, car ils voient au-delà des soins quotidiens et saisonniers qu’ils apportent à leurs terres et établissent un lien solide et à long terme avec le sol, cette merveille qui s’étend sous nos pieds. 

BIBLIOGRAPHIE Borras, Saturnino M. Jr.,  Ruth Hall, Ian Scoones, Ben White et Wendy Wolford. “Towards a Better Understanding of Global Land Grabbing: an Editorial Introduction”,  The Journal of Peasant Studies 38, no. 2, 2011: 209216. http://dx.doi.org/10.1080/03066150.2011.559005. Canada. Bibliotèque de parlement. Background Paper. Farmland Grabbing in Canada. Préparer par Khamla Heminthavong et Alexandre Lavoie. [Ottawa, Ontario]: Bibliotèque de parlement, 2015. http://www.lop.parl.gc.ca/Content/LOP/ResearchPublications/2014101-e.pdf

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Contenu écrit par: Amy Baldwin, Claire May Traduction: Karine Arseneau Crédits photographiques: L'Union Nationale des Fermiers au Nouveau-Brunswick, Archives provincial du NouveauBrunswick Remerciements à: Amanda Wildeman, les membres du conseil administratif de l’UNF-NB