Chapitre 7 : l'énergie nucléaire et son utilisation - Page d'accueil du

peuvent être classées en plusieurs générations, selon la classification créée en 2001 lors du lancement du ..... condenseur sont des sites plus favorables au développement du tartre, de la corrosion ou de la prolifération .... Lors du séjour du combustible dans le réacteur, plusieurs phénomènes se produisent (liste non.
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Chapitre 7 : l’énergie nucléaire et son utilisation 1 Définition et applications de l’énergie nucléaire 1.1 Définition Le terme d’énergie nucléaire recouvre deux sens selon le contexte : Au niveau microscopique, l’énergie nucléaire est l’énergie associée à la force de cohésion des nucléons (protons et neutrons), la force nucléaire forte au sein du noyau des atomes. Les transformations du noyau libérant cette énergie sont appelées réactions nucléaires. La force nucléaire faible, elle, régit les réactions de désintégration responsables de la radioactivité de certains noyaux ; l'interaction forte tire son nom du fait qu'elle est beaucoup plus forte que l'interaction électromagnétique : 1037 fois plus.

Au niveau macroscopique, l’énergie nucléaire correspond, d’une part à l’énergie libérée par les réactions de fusion nucléaire au sein des étoiles, d’autre part aux usages civils et militaires de l’énergie libérée lors des réactions de fission ou de fusion du noyau atomique. Les applications de l’énergie nucléaire s’appuient sur cette énergie.

1.2 Applications : nucléaire civil et militaire Les premières applications de l’énergie nucléaire ont été militaires, qu’il s’agisse de l’exploitation de la fission (bombes à fission d’Hiroshima et de Nagasaki en 1945) ou de la fusion (bombe à hydrogène en 1952). Les applications civiles de la fission contrôlée ont démarré dès 1950 aux États-Unis pour la production d’électricité. La fusion contrôlée est encore au stade des laboratoires de recherche. L’énergie nucléaire a aussi donné lieu à d’autres applications majeures pour l’humanité en particulier en médecine, en radiothérapie et en imagerie médicale, pour la propulsion navale, et dans le spatial pour la propulsion des satellites.

Nous allons surtout parler ici des applications civiles de l’énergie nucléaire, et en particulier de la production d’électricité par voie nucléaire.

Toutefois, il est impossible de dissocier le nucléaire civil du nucléaire militaire. Dès l'enrichissement de l'uranium, ce sont les mêmes usines qui sont à l‘œuvre. Le retraitement des déchets civils permet d'extraire le plutonium pour réaliser des bombes atomiques.

1.3 Part de l’énergie nucléaire dans la production d’électricité

Production d'électricité d'origine nucléaire par pays

Pourcentages de production d'électricité d'origine nucléaire par pays

Consommation énergétique mondiale, en térawatt-heure (TWh), 1965-2012. (pétrole–charbon– gaz–nucléaire–hydraulique)

Nous sommes plus nombreux que nos parents et grands-parents. Nous consommons aussi plus d'énergie. Cette évolution risque de se poursuivre jusqu'en l'an 2100 comme le montrent ces projections de l'évolution de la population et de la consommation d'énergie mondiale.

2 Réactions nucléaires Les réactions chimiques consistent à coller des atomes complets, la « colle » étant l'interaction électromagnétique. Ce sont donc les électrons qui entourent le noyau qui sont responsables de la formation des molécules. Par contre, les réactions nucléaires provoquent un réarrangement des constituants des noyaux (protons et neutrons). L’énergie nucléaire est produite par les noyaux des atomes qui subissent des transformations, ce sont les réactions nucléaires.

Une réaction chimique : la combustion du méthane

Une réaction nucléaire

Une réaction nucléaire est une transformation d'un ou plusieurs noyaux atomiques. Les réactions nucléaires à la base des différentes applications sont de trois types :  Réactions de fission ;  Réactions de fusion ;  Réactions de radioactivité ou désintégrations nucléaires. Dans le cas de la radioactivité, un seul noyau est impliqué et la transformation est spontanée, mais dans le cas des réactions de fission ou de fusion, la transformation est provoquée par une particule mouvante qui heurte un noyau. Dans une réaction de fusion ou de fission, deux noyaux atomiques entrent en collision et produisent des produits différents des particules originelles. En principe, plus de deux particules pourraient entrer en collision, mais cela est beaucoup moins probable. Dans les premières, on ajoute des composants pour former des noyaux plus lourds, dans les secondes au contraire, on casse un gros noyau pour en produire de plus petits. Voici des exemples de telles réactions.

Une réaction nucléaire peut être représentée par une équation semblable à celle représentant une réaction chimique. Des désintégrations nucléaires peuvent être représentées d'une manière semblable, mais avec seulement un noyau à gauche. Chaque particule est écrite avec son symbole chimique, avec son numéro atomique à gauche en bas, et son nombre de masse en haut. Pour le neutron, le symbole est n. Le proton peut être écrit « H » (noyau d'hydrogène) ou « p ». Pour vérifier l'équation, on doit contrôler que les sommes des nombres atomiques soient égales à gauche et à droite (à cause de la loi de conservation de la charge électrique), et que les sommes des nombres de masse soient aussi égales à gauche et à droite (à cause de la loi de conservation du nombre baryonique). Par exemple : 3

6Li

+ 12H → 24He + 24He

Évidemment, l'équation est correcte. Elle pourrait aussi être écrite : 3

6Li

+ 12H → 2 24He

2.1 Réactions de fission La fission spontanée est un phénomène extrêmement rare. Par exemple, pour un noyau comme l'uranium-238 la fission spontanée n'intervient qu'une fois sur 2 millions de désintégrations. La fission est bien plus souvent provoquée par la capture d'un neutron dans un petit nombre de noyaux très lourds, appelés fissiles, fragilisés par un trop grand nombre de nucléons. Ces noyaux très volumineux se scindent alors en noyaux plus stables, libérant de l'énergie. La fission nucléaire a été découverte en 1938 par Otto Hahn et Lise Meitner, à la veille de la Seconde Guerre mondiale.

Lorsqu’un neutron percute le noyau de certains isotopes lourds (noyau qui contient beaucoup de nucléons, tels les noyaux d'uranium et de plutonium), il existe une probabilité que le noyau impacté se scinde en deux noyaux plus légers. Cette réaction, qui porte le nom de fission nucléaire, se traduit par un dégagement d’énergie très important (de l’ordre de 200 MeV par événement, à comparer aux énergies des réactions chimiques, de l’ordre de l’eV).

Le seul noyau fissile naturel est un isotope de l'uranium (U-235), présent en faible proportion (0,7 %) dans les minerais d'uranium. Il existe d'autres noyaux fissiles, mais il faut les produire dans les réacteurs. Il s'agit principalement du plutonium-239 (généré à partir de l'uranium-238) et de l'uranium-233 (généré à partir du thorium-232).

Comparaison des propriétés radioactives des principaux isotopes de l’uranium ; les seuls isotopes naturels sont les 234, 235 et 238. Tous les isotopes possèdent des vies moyennes extrêmement longues à l’exception de l’uranium 232. Tous sont émetteurs de rayons alpha de 4 à 5 MeV d’énergie.

L'arrivée d'un neutron « intrus » de faible énergie dans un noyau fissile génère une excitation qui suffit pour déclencher la fission. Le noyau se déforme, puis se scinde en deux fragments le plus souvent de taille inégale.

Les fragments de fission Y1 et Y2 n'ont pas un nombre de masse identique. La fission symétrique (A1=A2) est en fait très peu probable. Les nombres A des 2 noyaux formés peuvent varier dans des limites assez larges et la probabilité d'obtenir un fragment de fission de nombre de masse A déterminé se voit sur les courbes de la figure ci-contre. La fission la plus probable donne des noyaux dont les nombres de masse sont ≈ 95 et ≈ 139.

Deux fragments de tailles inégales La répartition des produits de fission de l'uranium-235 sur la carte des noyaux montre clairement une fragmentation en deux noyaux de taille inégale. On aperçoit deux groupements distincts. Les noyaux produits le plus abondamment apparaissent en rouge (l'abréviation pcm signifie un sur cent mille). Les produits de fission possèdent aussi un excédent de neutrons hérité de l'uranium. Ils se situent en dehors de la ligne de stabilité représentée en tirets. C'est pourquoi ils sont radioactifs.

Les atomes issus de la fission ne sont pas tous les mêmes (exemple de l’Uranium 235)

Cette fission s’accompagne de l’émission de plusieurs neutrons qui, dans certaines conditions, percutent d’autres noyaux et provoquent ainsi une réaction en chaîne. Dans un réacteur nucléaire, cette réaction en chaîne se déroule à vitesse lente et contrôlée. Dans une bombe à fission, elle se propage si rapidement qu’elle conduit à une réaction explosive. Comment comprendre cette émission de neutrons et la radioactivité des produits de fission ? En résumé, comme le rapport N/Z augmente lorsque Z augmente dans le diagramme des nucléides (ligne de stabilité), il existe, lors de la fission, un excès de neutrons (≈20). Ceci amène 3 conséquences importantes : 1. La réaction de fission s'accompagne de l'émission instantanée de quelques neutrons (≈2 ou 3 dans le cas de 235U).

2. Les 2 fragments de fission sont des noyaux instables, radioactifs émetteurs β(transformations « n→p ») :

La fission génère des éléments instables qui vont se désintégrer

3. La fission donne souvent naissance à l'émission de neutrons retardés. Cette émission a une intensité qui décroît dans le temps suivant une loi exponentielle, donc caractérisée par une certaine demi-vie. En réalité, cette émission retardée est liée aux transformations radioactives des fragments de fission. Elle intervient lorsqu'un noyau intermédiaire de la filiation radioactive est formé dans un état d'excitation suffisant pour émettre un neutron.

L’importance de l’énergie émise dans la fission provient du fait que l’énergie de liaison par nucléon du noyau initial est plus faible que celle des noyaux produits (environ 7,7 MeV par nucléon pour les éléments lourds, contre 8,8 pour le fer).

La plus grande partie de l’énergie libérée se retrouve sous forme d’énergie cinétique des neutrons et des noyaux fils, énergie récupérée sous forme de chaleur dans les réacteurs.

Energie libérée par la fission des atomes (exemple de l'Uranium 235)

Equivalence masse/énergie lors d’une fission

2.2 Réactions de fusion Une réaction de fusion nucléaire est une réaction où deux noyaux atomiques s’assemblent pour former un noyau plus lourd (par exemple un noyau de deutérium et un noyau de tritium s’unissent pour former un noyau d’hélium plus un neutron).

La fusion des noyaux légers dégage une énorme quantité d’énergie provenant de l’interaction forte, bien plus importante que la répulsion électrostatique entre les constituants des noyaux légers.

Ceci se traduit par un défaut de masse (cf. énergie de liaison ; E=mc²) ; le noyau résultant ayant une masse moins élevée que la somme des masses des noyaux d’origine.

Equivalence masse/énergie lors d’une fusion

Cette réaction n’est cependant possible qu’à des températures très élevées (plusieurs dizaines de millions de degrés) où la matière est à l’état de plasma. Ces conditions sont réunies au sein des étoiles ou lors de l’explosion d’une bombe à fission nucléaire, qui amorce ainsi l’explosion thermonucléaire (bombe H).

Actuellement, aucun appareillage ne permet de produire de l’énergie en contrôlant les réactions de fusion nucléaire. Des recherches sont en cours afin d’obtenir un plasma sur une durée suffisante, afin que l’énergie de fusion produite soit supérieure à celle investie dans le chauffage des particules. Des recherches sont actuellement menées dans un cadre international afin de développer l’usage civil de l’énergie de fusion nucléaire pour la production électrique (projet ITER).

Le Soleil tire son énergie des réactions de fusion nucléaire qui transforment, en son noyau, l'hydrogène en hélium.

Toutes les réactions de fusion entre noyaux légers produisent de l'énergie. Mais on s'aperçoit que l'énergie qu'elles dégagent est de plus en plus faible à mesure qu'on considère la fusion d'éléments plus lourds (en partant du plus léger, l'hydrogène). L'hydrogène fusionne pour donner de l'hélium (4 noyaux d'hydrogène donnent un noyau d'hélium), mais l'hélium lui-même peut fusionner pour donner des éléments plus lourds encore, carbone (3 noyaux d'hélium donnent un noyau de carbone), oxygène, azote. Lorsqu'on arrive à synthétiser du fer, la différence s'annule. Le bilan énergétique devient défavorable, à partir du fer, la réaction consomme de l'énergie au lieu d'en produire.

2.3 Energie dégagée par les réactions nucléaires Dans les réactions nucléaires, il faut comme pour les réactions chimiques faire le bilan énergétique. Les réarrangements nucléaires amenés par les réactions nucléaires conduisent à des configurations de plus faibles énergies, donc plus stables, la différence d’énergie (correspondant à la différence de masse, au travers de la célèbre relation d’Einstein) constitue alors l’énergie libérée par la réaction. Plus précisément, pour un noyau isolé, l'énergie de liaison B d'un noyau atomique est l'énergie qu'il faut fournir au noyau pour le dissocier en ses nucléons, qui s'attirent du fait de l'interaction forte. On définit également une énergie de liaison par nucléon : B/A (A étant le nombre de nucléons). L’énergie de liaison du noyau apparaît dans le bilan de masse du système : la masse du noyau est inférieure à la somme des masses de chacun de ses nucléons. Ce défaut de masse se retrouve sous forme d'énergie grâce au principe d'équivalence masseénergie (E=mc²) exprimé par Albert Einstein. La masse M(A,Z) d'un noyau (dans son état fondamental) est alors donnée par l'équation suivante : M(A,Z)c2 = Zmpc2 + (A − Z)mnc2 − B(A,Z), où apparaissent les masses mp et mn des protons et des neutrons.

Energie de liaison d’un noyau d’Hélium

Plus le noyau est lourd et plus cette énergie de liaison totale est grande car elle représente la force à mettre en œuvre pour garantir la cohésion des nucléons. Un noyau plus complexe doit compenser les forces électrostatiques de répulsion, les différences de cohésion pour les nucléons sur les zones internes ou externes du noyau, ainsi que d’autres instabilités. Quelques exemples d’énergie de liaison : 

Deutérium (isotope de l’hydrogène avec un proton et un neutron) : 2,23 MeV



Hélium 4 (2 protons et 2 neutrons) : 28,30 MeV



Uranium 238 (92 protons et 146 neutrons) : 1 822,06 MeV

L’énergie de liaison augmente avec le nombre de nucléons présents dans le noyau

Même pour des noyaux légers comme celui de l’Hélium 4 avec une énergie de liaison de 28,3 MeV, cela représente plus de deux millions de fois l’énergie de liaison d’ionisation d’un atome d’hydrogène (13.6 eV).

Il est alors intéressant de ramener cette énergie de liaison au nombre de nucléons présents dans le noyau car ceux dont les énergies de liaison par nucléon sont les plus grandes, sont également les plus stables. C’est cette information que présente la courbe d’Aston :

 Petit nombre de nucléons : Deutérium, Tritium (isotopes de l’hydrogène) ont des énergies de liaison relativement faibles (Hydrogène est l’isotope stable avec un seul proton). L’énergie de liaison par nucléon est faible également et la fusion conduira à augmenter cette stabilité en obtenant des énergies de liaison par nucléon plus grandes  Grand nombre de nucléons : l’énergie de liaison par nucléon reste importante à cause du grand nombre de protons et de neutrons. Plus les noyaux seront lourds, plus ils pourront facilement fissionner du fait des déséquilibres interaction forte / force électrostatique au niveau des protons  Noyau avec une énergie de liaison de 8 MeV par nucléon : ce sont les plus stables (Fer, Nickel, Cuivre, etc.)

Ce schéma montre l'énergie de liaison moyenne par nucléon, entre les nucléons qui constituent un noyau atomique, en fonction du nombre de nucléons A. Pour l’obtenir, on a donc divisé l'énergie totale de liaison à l'intérieur de l'atome par le nombre de nucléons.

Ce qui est remarquable, c'est que la courbe montre un maximum au niveau du fer (A=56). Ceci signifie que les nucléons dans un noyau de fer sont plus fortement liés à leurs voisins que dans tout autre noyau ! Les noyaux de fer sont donc les plus stables : pour les casser, il faut plus d'énergie que pour tout autre.

Des nucléons qui perdent du poids... On doit au physicien anglais Francis Aston d’avoir le premier mesuré la masse des noyaux. En divisant cette masse par le nombre de nucléons, on en déduit la masse d’un nucléon à l’intérieur d’un noyau. La courbe d’Aston permit de constater que le fait d’appartenir au noyau faisait perdre aux nucléons un peu moins de 1 % de leur masse. Cette perte équivaut d’après la relation d’Einstein, en multipliant la masse par le carré de la vitesse de la lumière, à une perte d’énergie qui peut dépasser 8 millions d’électronvolts. C’est l’énergie qu’il faut dépenser en moyenne pour arracher un nucléon au noyau : l’énergie de liaison. La relation entre perte de masse et énergie de liaison est générale.

Une réaction nucléaire doit se faire (dans le sens de la flèche qui la représente) du moins stable vers le plus stable, comme un pendule évolue vers sa position d'équilibre. Des noyaux légers auront donc tendance à s'assembler (par réaction de fusion), pour former un noyau plus gros, plus proche du fer, alors que des noyaux lourds auront tendance à se briser (par réaction de fission).

Bilan énergétique d’une réaction de fission

La réaction est exoénergétique et produit 2 neutrons supplémentaires. Notons que l‘énergie libérée vaut environ 0,8 MeV par unité de masse atomique, soit 8.10exp13 J/Kg, 2 millions de fois plus que de l'essence.

Bilan énergétique d’une réaction de fusion

La réaction est exoénergétique. Dans cette réaction l‘énergie libérée vaut environ 1 MeV par unité de masse, soit 2,5 million de fois plus que l'essence.

3 Réactions de fission en chaîne 3.1 Principe de la réaction en chaîne La réaction de fission utilisée dans les centrales nucléaires utilise comme matière fissile l’uranium 235. Un noyau d'uranium 235 est bombardé par un neutron. Ce choc va rendre le noyau d'U 235 instable, et il va se rompre en deux nouveaux noyaux : c'est la fission de l’uranium. Cette réaction libère beaucoup d'énergie sous forme de chaleur. De nouveaux éléments apparaissent, on les appelle « produit de fission ». En plus de ces éléments, des neutrons sont libérés. On doit à Hans von Halban, Frédéric Joliot, Lew Kowarski (en France) et à Enrico Fermi (aux États-Unis) la découverte, en 1939, de la réaction en chaîne provoquée par l'émission de neutrons lors de la fission.

Les neutrons libérés vont pour la plupart aller frapper d'autres noyaux d'uranium qui, à leur tour, vont se rompre en libérant d'autres neutrons : c'est la réaction en chaîne. Schéma d'une réaction en chaîne de fission nucléaire 1. Un atome d'uranium-235 absorbe un neutron, et se divise en 2 nouveaux atomes (produits de fission), relâchant 3 nouveaux neutrons et de l'énergie de liaison. 2. L'un des neutrons est absorbé par un atome d'uranium-238, et ne continue pas la réaction. Un autre neutron est simplement perdu et ne continue pas la réaction. Cependant, un neutron rentre en collision avec un atome d'uranium-235, qui se divise et relâche deux neutrons et de l'énergie de liaison. 3. Ces deux neutrons entrent en collision avec des atomes d'uranium-235, qui se divisent et relâchent de 1 à 3 neutrons, qui peuvent encore entretenir la réaction Animation EDF montrant le principe de la réaction en chaîne

Une réaction en chaîne est une réaction dans laquelle un des agents nécessaires à la réaction est produit lui-même par la réaction, causant des réactions additionnelles. Dans une réaction de fission nucléaire, un neutron cause une fission d'un atome fissile produisant un plus grand nombre de neutrons qui à leur tour causent d'autres fissions.

3.2 évolution des réactions de fission A partir du moment où la réaction en chaîne débute, elle peut suivre trois cycles très différents directement liés à la quantité de matière fissile disponible et au nombre de neutrons pouvant forcer les fissions : 

Comportement sous-critique : le nombre de fission va en diminuant car les neutrons émis par les fissions précédentes ne déclenchent pas assez de nouvelles fissions (pas assez de matière fissile ou trop loin des neutrons émis qui sont capturés avant de l’atteindre). La réaction va s’arrêter.



Comportement critique : le rapport entre le nombre de neutrons créés par des fissions et ceux utilisés dans de nouvelles fissions est constant car une partie des neutrons libérés ne provoque pas de nouvelle fission. Il y a en moyenne à un instant donné toujours le même nombre de fission. La réaction se poursuit et la quantité libérée à chaque instant reste à peu près constante



Comportement supercritique : l’ensemble des neutrons issus des fissions précédentes va provoquer de nouvelles fissions, engendrant beaucoup plus de neutrons que précédemment, et de là beaucoup plus de nouvelles fissions. La réaction s’emballe et la quantité d’énergie libérée à chaque instant peut être considérable s’il y a suffisamment de matière fissile, comme dans les bombes nucléaires

L’évolution qui intéresse l’industrie pour la production d’électricité est celle correspondant à un comportement critique afin de maîtriser à chaque instant la quantité d’énergie libérée par les réactions et de là la quantité d’électricité produite. Maîtriser ce comportement nécessite d’évaluer à chaque instant combien de neutrons devraient être capturés et combien devraient être non utilisés pour que le nombre de fission de la réaction suivante soit environ le même que celui de la réaction précédente. Ce chiffre ne peut en aucun cas rester parfaitement stable quels que soient les moyens utilisés car les noyaux produits d’une fission d’un noyau à l’autre ne sont pas tous identiques (voir courbe de répartition statistique des noyaux produits pour l’Uranium 235).

4 Anatomie et fonctionnement normal d’une centrale nucléaire à fission 4.1 Définition et principe de fonctionnement Une centrale nucléaire est avant tout une centrale thermique : il s'agit de transformer une énergie calorifique (chaleur) libérée par un combustible (uranium enrichi) en une énergie mécanique (mise en mouvement d'une turbine), puis en énergie électrique (grâce à un alternateur). Dans une centrale thermique classique, la chaleur provient de la combustion du charbon ou du fioul. Dans une centrale nucléaire, elle provient de la fission de l'uranium. Les centrales nucléaires actuelles fonctionnent grâce à l'uranium, un minerai que l'on trouve en relative abondance dans l'écorce terrestre. L'uranium possède la particularité d'être constitué d'atomes lourds qui, en se brisant, dégagent de la chaleur : la fission des atomes d'uranium est la première étape de production de l'énergie nucléaire.

Centrale thermique « classique » au-dessus et nucléaire en dessous

4.2 Description générale

Une centrale nucléaire regroupe l’ensemble des installations permettant la production d’électricité. Elle comprend plusieurs tranches, chaque tranche correspondant à un groupe d’installation conçu pour fournir une puissance électrique donnée (900Mwe ; 1300MWe…).

Une tranche comprend généralement :  Le bâtiment réacteur, une enceinte étanche qui contient le réacteur nucléaire, les générateurs de vapeur (3 ou 4 selon la génération), un pressuriseur, une partie d’un circuit d’eau secondaire et le circuit d’eau primaire.  Le bâtiment combustible : collé au bâtiment réacteur, il sert de stockage des assemblages du combustible nucléaire avant, pendant les arrêts de tranche et pour le refroidissement du combustible déchargé (12 à 18 mois). Le combustible est maintenu immergé dans des piscines dont l'eau sert d'écran radiologique.  le bâtiment salle des machines, qui contient principalement : une ligne d'arbres comprenant les différents étages de la turbine à vapeur, l‘alternateur et le condenseur. des bâtiments annexes qui contiennent notamment des installations diverses nécessaires au fonctionnement du réacteur nucléaire et à la maintenance des générateurs diesel de secours ; Un aéroréfrigérant atmosphérique, ou simplement une station de pompage pour les tranches dont le refroidissement utilise l'eau de mer ou de rivière.

Les autres installations de la centrale électrique comprennent :  un ou plusieurs postes électriques permettant la connexion au réseau électrique par l'intermédiaire d'une ou plusieurs lignes à haute tension électrique, ainsi qu'une interconnexion limitée entre tranches;  Un bâtiment administratif…

4.3 Principes de fonctionnement Dans le réacteur, l’uranium est enfermé à l’intérieur de gaines métalliques étanches. C’est dans ces gaines que se produit la fission. La fission des atomes d'uranium produit une grande quantité de chaleur. Cette chaleur fait augmenter la température de l'eau qui circule autour du réacteur, à 320 °C. L'eau est maintenue sous pression (pression de 155 atmosphères) par le pressuriseur pour l'empêcher de bouillir. Ce circuit fermé est appelé circuit primaire. L’eau du circuit primaire, à la sortie de la cuve, cède sa chaleur à l'eau d'un second circuit (le circuit secondaire), par l'intermédiaire d'un générateur de vapeur. Une fois refroidie, elle retourne dans le cœur à l'aide d'une pompe. Dans le générateur de vapeur, l'eau du circuit secondaire se transforme en vapeur au contact des tubes parcourus par l'eau chaude à 320° du circuit primaire. La pression de cette vapeur fait tourner une turbine qui entraîne à son tour un alternateur. Grâce à l'énergie fournie par la turbine, l'alternateur produit un courant électrique alternatif. Un transformateur élève la tension du courant électrique produit par l'alternateur pour qu'il puisse être plus facilement transporté dans les lignes très haute tension.

Principe de fonctionnement général d’un alternateur

Alternateur d’une centrale nucléaire

http://www.discip.accaen.fr/phch/college/troisieme/exos_interactifs/centra les_web/co/alt_centrale_elec.html

A la sortie de la turbine, la vapeur du circuit secondaire se transforme en eau dans le condenseur, formé de milliers de tubes dans lesquels circule de l'eau froide formant un troisième circuit appelé circuit de refroidissement. En bord de rivière ou de fleuve, l'eau de ce troisième circuit peut alors être refroidie au contact de l'air circulant dans de grandes tours, appelées aéroréfrigérants. La vapeur en provenance de la turbine se condense au contact des tubes froids du condenseur. L’eau ainsi obtenue dans le circuit secondaire est renvoyée au générateur de vapeur. L'eau contenue dans les tubes du condenseur va se réchauffer d'une dizaine de degrés : cette eau tiède (30-35°) est refroidie par le courant d'air dans l'aéroréfrigérant avant de repartir vers les tubes du condenseur. Un panache de vapeur d'eau générée par la différence de température entre l'air et l'eau s'échappe de la tour de refroidissement. Ces trois circuits opèrent des échanges thermiques entre eux tout en restant indépendants, pour éviter toute dispersion de substance radioactive à l'extérieur de la centrale.

Fonctionnement d’une centrale nucléaire : animation EDF

4.4 Combustibles nucléaires 4.4.1 De l'uranium naturel à l'uranium enrichi L'uranium naturel est longtemps resté le seul combustible possible. Les pays ne disposant pas d'installations d'enrichissement ou n'ayant pas accès à l'uranium enrichi devaient s'en contenter. Les réacteurs à uranium naturel ont été les premiers à fonctionner. Leur fonctionnement est délicat en raison de la pauvreté en isotope fissile. Ils sont maintenant relativement rares, comparés aux réacteurs utilisant de l'uranium enrichi. Il est plus facile de faire marcher un réacteur avec de l'uranium enrichi qu'avec de l'uranium naturel. Le nombre de neutrons secondaires produits en moyenne par neutron lent capturé dans l'uranium du combustible augmente avec la richesse en isotope 235 fissile de cet uranium. Pour que la réaction en chaîne soit possible, ce nombre doit dépasser nettement 1 pour tenir compte des pertes : cette condition est vérifiée confortablement avec du combustible enrichi à 3,5 % comme celui des réacteurs REP mais marginalement avec de l'uranium naturel qui ne contient que 0,7 % d'uranium-235.

Les ressources en uranium, un élément chimiquement rare, sont limitées. L'isotope fissile 235, présent seulement à raison de 0,7% dans l'uranium naturel, est donc une ressource extrêmement rare et précieuse. 4.4.2 Les noyaux fissiles Les noyaux fissiles sont en très petit nombre. Les éléments fissiles principaux sont l'uranium233 et l'uranium-235, le plutonium-239 et le plutonium241. Il faut ajouter à cette liste, le proactinium-230, le neptunium236 et l'américium-242. La figure compare les neutrons produits par la fission des noyaux d'uranium-235, d'uranium233 et de plutonium-239, provoquée par un neutron primaire lent. Des trois noyaux, c'est le plutonium-239 qui produit le plus de neutrons. Mais, tous les neutrons captés par un noyau fissile ne produisant toujours de fission, c'est le nombre de neutrons par capture qui compte davantage pour la marche des réacteurs. Ce dernier nombre est à comparer à la valeur 1, nécessaire pour la réaction en chaîne, et à la valeur 2 requise pour la régénération du combustible.

4.4.3 Modification de la composition du combustible La plupart des réacteurs actuels utilisent un degré d'enrichissement entre 3 et 3,5 %. Une fois introduit dans le réacteur, la composition du combustible change. Le combustible s'appauvrit, les conditions de fonctionnement varient. Une partie de l'uranium fissile est remplacée par du plutonium également fissile. Des noyaux radioactifs plus lourds que l'uranium, les actinides, s'accumulent. Les produits de fission s'accumulent également.

Il faut décharger au bout de trois à quatre ans le combustible usé. L'uranium qui en sort est encore plus riche en isotope 235 que l'uranium naturel. Après retraitement du combustible usé, il est possible de recycler cet uranium grâce à un nouvel enrichissement. Le retraitement des combustibles usés à l'usine de la Hague permet d'en séparer le plutonium et de mélanger ce plutonium, qui est fissile, à de l'uranium pour fabriquer un combustible mixte, le MOX, qui peut être utilisés dans les réacteurs du parc français moyennant une adaptation. Certains réacteurs embarqués utilisent un combustible riche en matière fissile. Ils servent à propulser des sous-marins, porte-avions et brise-glace, assurant leur autonomie. Ils n'ont pas besoin de se ravitailler en combustible pendant des années. Les réacteurs embarqués sont plus compacts que leurs homologues à terre. Les réacteurs rapides surgénérateurs utilisent également un combustible riche en noyaux fissiles ramassé dans un cœur compact.

4.4.4 La formation du plutonium-239 : la transformation d'un noyau fertile en un noyau fissile L'uranium-238 constitue plus de 90 % de l'uranium présent dans le cœur des réacteurs. Il participe marginalement à la réaction en chaîne, mais il joue néanmoins un rôle d'appoint important. Par capture d'un neutron, il se transforme en noyau de plutonium-239 qui subira une fission s'il capte à son tour un neutron. D'une certaine façon, l'uranium-238 fissionne à retardement ou par personne interposée. Il génère du combustible sous forme de noyaux fissiles : il est dit fertile. Le mécanisme de génération du plutonium comprend plusieurs étapes.  En captant un neutron, l'uranium-238 devient de l'uranium-239 qui se transforme rapidement par rayonnement bêta en neptunium-239.  Ce neptunium se métamorphose à son tour par rayonnement bêta, au bout de 3 jours en moyenne, en un nouveau noyau : le plutonium-239.  Ce radioélément est fissile, comme l'uranium235.

Le plutonium-239 est un bon combustible nucléaire : fissionné par des neutrons rapides, il libère en moyenne 2,30 neutrons secondaires par neutron capturé. Un des neutrons secondaires étant requis pour l'entretien de la réaction en chaîne, il en reste 1,30 disponibles. Si un de ces neutrons disponibles est capturé par un noyau d'uranium-238 pour se transformer à terme en plutonium-239, le réacteur produit autant de combustible qu'il en consomme. Quand plus d'un neutron produit du plutonium (au prix d'une bonne configuration du cœur du réacteur), le réacteur est dit « surgénérateur » ou en anglais breeder. Dans le cas contraire, le réacteur est dit « sous-générateur ». Les seuls réacteurs ayant fonctionné en surgénérateurs, sont des réacteurs à neutrons rapides. Les conditions de la régénération sont très loin d'être satisfaites pour les réacteurs conventionnels du parc électronucléaire qui utilisent des neutrons lents, mais des quantités significatives de plutonium sont générées dans le combustible irradié. Pour le parc mondial, la quantité de plutonium produite depuis l'origine était estimée en l'an 2000 à 1400 tonnes, cette quantité - dont 60 % de plutonium-239 - s'accroissant de 70 tonnes par an.

4.4.5 Combustibles mixtes : le Mox Un gramme de plutonium-239 peut générer autant d'électricité qu'une à deux tonnes de pétrole. Fissile, cet élément peut jouer le rôle que tient l'uranium-235 dans un combustible neuf. On peut ainsi économiser une fraction de cet isotope rare et précieux. C'est la raison pour laquelle, depuis 1985, des réacteurs nucléaires français à eau pressurisée ont été adaptés pour brûler des assemblages d’un nouveau combustible contenant 5 à 7 % de plutonium mélangé à de l'uranium normal issu du retraitement. L'uranium et le plutonium se présentant sous forme d'oxydes, le nouveau combustible est appelé MOX : Mixed oxydes. Actuellement, 19 réacteurs d'EDF sont régulièrement chargés en MOX.

Pour ne pas affecter le fonctionnement des réacteurs à eau pressurisée qui n'ont pas été conçus pour le plutonium, on n’introduit dans la charge de combustible que 30% d’assemblages de MOX à côté de 70 % d’assemblages traditionnels d’uranium enrichi.

4.5 La vitesse des neutrons doit être modérée La quasi-totalité des réacteurs en fonctionnement aujourd'hui utilisent un combustible pauvre ou peu enrichi en éléments fissiles. Pour fonctionner, ces réacteurs ont besoin d'un modérateur, un milieu qui favorise les fissions. Dans le combustible nucléaire, les noyaux fissiles d'uranium-235 et de plutonium-239 sont très minoritaires par rapport à ceux d'uranium-238 qui ne le sont pas. Il faut en compenser le faible nombre. Le modérateur en ralentissant les neutrons compense cette faible proportion. Les neutrons lents ont en effet une probabilité beaucoup plus élevée de déclencher la fission d'un noyau d'uranium-235 que d'être capturés par un noyau d'urnanium-238 stérile à ce point de vue. Les neutrons, pour produire de façon efficace la fission des noyaux d'uranium, ne doivent pas aller trop vite : 2 km/s environ. On appelle cela des neutrons « thermiques ». Or les neutrons qui résultent de la fission vont beaucoup plus vite que cela : environ 20 000 km/s. Il est donc nécessaire de les ralentir. Il s'agit de ralentir les neutrons, mais pas de diminuer leur nombre. Il faut donc des noyaux auxquels les neutrons vont pouvoir céder de l'énergie cinétique par choc, mais qui ne vont pas les absorber.

Les neutrons de fission sont ralentis par des collisions successives sur les noyaux du modérateur. Il s'agit de capturer le moins de neutrons possibles lors de la série de collisions : le modérateur doit être « transparent ». Le ralentissement doit être rapide pour éviter les captures stériles par d'autres noyaux. Il faut en moyenne, pour rendre thermique un neutron de 2 MeV, 26 collisions dans un milieu hydrogéné, 31 dans le deutérium, 120 dans le carbone, 2202 dans l'uranium. Une dizaine de collisions sur les protons de l'hydrogène suffit à diviser par 1000 l'énergie du neutron. Le ralentissement est un peu moins efficace dans le deutérium. Il est beaucoup plus lent avec un noyau léger comme la carbone (12 nucléons) et surtout l'uranium qui en comprend 238. Dans les centrales REP, c'est l'eau du circuit primaire qui joue ce rôle de « modérateur » (en plus de son rôle de transport de la chaleur). Ce sont les noyaux des atomes d'hydrogène des molécules d'eau qui jouent ce rôle. Le modérateur (H20) possède une autre propriété importante. Si la réaction en chaîne s'emballe, la température du combustible augmente. L'eau du cœur s'échauffe à son tour, et du coup se dilate : sa densité diminue, si bien qu'un nombre moins grand de neutrons par unité de volume se trouve ralenti. Et par suite, la réaction en chaîne diminue. On dit que le modérateur a un « coefficient thermique de réactivité » négatif. Cette propriété contribue à rendre stable la réaction nucléaire (voir ci-dessous : le contrôle de la réaction).

L'efficacité du ralentissement dans l'hydrogène est due à ce que l'hydrogène est composé de protons qui ont pratiquement la même masse que les neutrons. L'hydrogène est le ralentisseur le plus rapide, mais il présente l'inconvénient de capturer des neutrons pour former un isotope lourd de l'hydrogène, le deutérium. Depuis que l'on utilise de l'uranium enrichi comme combustible cet inconvénient n'est plus rédhibitoire. L'eau ordinaire peut convenir comme modérateur. C'est pourquoi les réacteurs actuels de loin les plus répandus sont à eau bouillante ou pressurisée. Les premières centrales à uranium naturel nécessitaient des modérateurs au deutérium (eau lourde) et au graphite pour fonctionner. Le deutérium, sous forme d'eau lourde, peut servir lui-même de modérateur. Il est un peu moins « efficace », mais étant déjà constitué d'un proton et d'un neutron, il capture moins les neutrons que l'hydrogène. C'est un ralentisseur idéal, dont le handicap est d'être cher (on trouve dans la nature un seul atome de deutérium pour 6500 atomes d'hydrogène). Modéré avec de l'eau lourde, un réacteur arrive à fonctionner même avec de l'uranium naturel. C'est le cas des réacteurs canadiens et indiens de la filière CANDU qui utilisent de l'eau lourde comme modérateur. Le graphite est également un modérateur performant. Le carbone est un noyau très stable peu enclin à accepter un nouveau neutron. La première pile atomique d'Enrico Fermi, qui fonctionna en 1942 durant la seconde guerre mondiale quand on ne savait pas encore enrichir l'uranium, était « modérée » au graphite. Le carbone doit être très pur, nettoyé de ses impuretés.

4.6 Le contrôle de la réaction Le contrôle de la réaction dépend du nombre de neutrons présents à chaque instant. Pas assez de neutrons et la réaction en chaîne s'arrête, trop et elle s'emballe. Or, en permanence, des neutrons sont crées par fission, tandis que d'autres sont absorbés par l'uranium 238 ainsi que par les gaines métalliques qui contiennent le combustible, et que d'autres enfin s'échappent vers les parois de la cuve du réacteur. Il faut, pour que la réaction soit stable, que le nombre de neutrons qui apparaissent soit strictement égal à celui de ceux qui disparaissent (on dit alors que le « facteur de multiplication » est égal à 1 ; on dit aussi qu'on est « en situation de criticité »). La criticité est contrôlée de différentes façons : -D'abord il y a deux mécanismes d'auto-régulation de la réaction par la température. Le premier, évoqué plus haut, est le fait que le modérateur a un coefficient thermique de réactivité négatif. Le second est le fait que le combustible lui-même - étant donné le taux d'enrichissement limité par la réglementation à 4% environ - a un coefficient thermique de réactivité négatif (cette propriété est due à l'élargissement par effet Doppler de la bande d'énergie d'absorption des neutrons par l'uranium 238 : autrement dit, ce dernier peut capturer davantage de neutrons). Dès la conception du réacteur, la disposition géométrique des tubes contenant le combustible est optimisée pour que ces deux facteurs d'autorégulation jouent au mieux.

- Ensuite, on peut injecter de l'acide borique dans l'eau du circuit primaire. Ainsi on diminue la concentration des neutrons. Au contraire, pour augmenter la concentration en neutrons, il suffit de diluer. - Enfin, le nombre de neutrons dans le cœur du réacteur est contrôlé en permanence par les « barres de commande » : ce sont des tiges en matériau neutrophage (cadmium ou bore par exemple) qui sont insérées plus ou moins profondément au sein du combustible. Le flux de neutrons dans les différentes parties du cœur du réacteur est mesuré continuellement, de façon extrêmement précise, ce qui permet de calculer l'insertion optimale des barres de contrôle. Cela revient, in fine, à contrôler la puissance thermique du réacteur nucléaire.

Le contrôle de la réaction est effectué en salle de commande par les opérateurs. Ceux-ci reçoivent en permanence les informations données par les capteurs installés dans la cuve du réacteur : cartographie du flux neutronique, température et pression de l'eau, etc. Les opérateurs doivent en permanence prendre les bonnes décisions afin de concilier - en conformité avec les recommandations techniques officielles - sécurité du système et permanence de la production d'énergie électrique.

Pour satisfaire à ce second objectif, la puissance thermique du réacteur nucléaire est maintenue sensiblement constante (alors que la puissance thermique est maintenue sensiblement constante, la puissance électrique fournie au réseau doit s'adapter en permanence à la consommation, comme l'énergie électrique, à cette échelle, ne peut être stockée. Les opérateurs qui pilotent le réacteur doivent à tout moment prendre en compte les variations de la puissance fournie au réseau électrique par les groupes turbo-alternateurs. Il n'en reste pas moins que la puissance thermique du cœur doit être évacuée, c'est alors le circuit de refroidissement (le circuit tertiaire) qui joue ce rôle : il est dimensionné pour pouvoir évacuer la totalité de la puissance thermique), sauf en cas de problème. Dans ce cas, la puissance thermique peut être assez rapidement abaissée au moyen des barres de contrôle (il suffit d'une vingtaine de minutes, en procédure ordinaire, pour passer de la puissance thermique nominale à zéro). Dans le cas où le flux neutronique dépasse les valeurs limites autorisées, des procédures automatiques provoquent la chute par leur propre poids des barres de contrôle, stoppant la réaction nucléaire en un temps très bref (de l'ordre de la seconde).

Réactions de fission et facteur de multiplication Pour que l’équilibre se fasse dans une réaction maîtrisée de fission il suffit que le nombre de neutrons disponibles pour engendrer de nouvelles fissions soit globalement toujours le même, ou du moins reste dans une fourchette bien définie. Cela impose que le nombre de neutrons libérés à la fois par les nouvelles fissions, mais aussi par les libérations retardées liées aux désintégrations des produits issus des fissions précédentes, compense l’ensemble des fuites. En fonction de l’atteinte de cet objectif, la réaction sera : 

Sous critique : les fuites sont trop importantes et le nombre de neutrons disponibles à chaque cycle diminue. La réaction s’arrête rapidement



Critique : le nombre de neutrons compense les fuites



Sur critique : il y a trop de neutrons produits à chaque cycle et la réaction s’emballe

Les facteurs à prendre en compte lors du cycle sont : 

Formation des neutrons rapides : soit par les fissions liées à des neutrons lents ou des neutrons rapides



Absorptions des neutrons : qu’ils soient lents, rapides ou intermédiaires, les neutrons peuvent être capturés par les atomes fissiles, par d’autres atomes du combustible, par les atomes de la structure du réacteur ou par ceux du modérateur



Fuites : ce sont les neutrons qui ne sont pas capturés, et qui ne génèrent pas une nouvelle fission. Sans interaction avec un autre atome, ils sortent de l’environnement du réacteur et sont définitivement perdus

Le schéma suivant décrit les différentes étapes pour un cycle de fission à base d’Uranium 235 (fissile) mélangé à de l’Uranium 238 :

 Fission d’Uranium 235 par des neutrons lents (+) [h]: un neutron incident génère environ 2,5 nouveaux neutrons. Attention, cela ne veut pas dire que 100 neutrons thermiques vont générer 250 neutrons lents. Ce chiffre doit être réduit du fait de la vitesse des neutrons utilisés, de la proportion d’Uranium 235 présent dans le combustible (le chiffre de 2,5 est donné pour un combustible pur d’Uranium 235 mais dans un combustible avec seulement 10% d’Uranium 235 et 90% d’Uranium 238 ce chiffre est beaucoup pus bas) et également le fait qu’une partie de ces neutrons sera absorbée sans générer de fission par l’Uranium 235.  Désintégration émettrice neutrons (+) : des fissions précédentes, certains isotopes produits ont des durées de vie suffisamment courtes pour émettre également quelques neutrons rapides  Fission d’Uranium 235 et 238 par des neutrons rapides (+) [ε]: parmi les neutrons rapides créés lors de la fission de l’Uranium 235 par des neutrons lents, quelques-uns vont également générer des fissions parmi les atomes d’Uranium 235 et 238 du combustible et ce avant d’atteindre le modérateur. Ils génèrent en moyenne 2,5 nouveaux neutrons  Fuite des neutrons rapides avant et pendant la phase de ralentissement (-) [Lf] : certains neutrons vont échapper au système car leur trajectoire pendant la phase de ralentissement les conduit en dehors du réacteur  Capture par des atomes pendant la phase de ralentissement (-) [p] : une partie des neutrons rapides va être capturée soit par les atomes du modérateur, soit par les atomes lourds, notamment lorsque les énergies de ces neutrons décroissent pendant la phase de ralentissement et coïncident avec la plage de capture par résonance de ces isotopes

 Capture des neutrons une fois thermalisés (-) [f] : lorsqu’ils ont atteint l’énergie thermique, les neutrons peuvent encore être capturés avant de pouvoir générer une fission  Fuite des neutrons thermalisés (-) [Lt]: malgré leur vitesse réduite, là encore, quelques neutrons vont s’échapper du réacteur  Neutrons thermiques disponibles pour le prochain cycle : les neutrons thermiques disponibles pour le prochain cycle sont ceux qui restent après ces différentes étapes

Production et absorption des neutrons dans un cycle de fission critique (Exemple de l’Uranium 235)

4.7 Générations de réacteurs nucléaires Les technologies des réacteurs nucléaires (on dit aussi « filières » de réacteurs nucléaires) peuvent être classées en plusieurs générations, selon la classification créée en 2001 lors du lancement du Forum International Génération IV. La chronologie des différentes générations correspond à la date de maturité des technologies associées, permettant un déploiement à l’échelle industrielle. On distingue de cette façon quatre générations de réacteurs : 

La première regroupe les réacteurs construits avant 1970 (en France filière UNGG).



La deuxième désigne les réacteurs construits entre 1970 et 1998 et actuellement en service, ils sont en majorité de la filière réacteur à eau pressurisée (filières REP, REB).



La troisième est celle des réacteurs dérivés des précédents et conçus pour les remplacer à partir de 2013/2020 (par exemple : l'EPR d'Areva, l'APR1400 du Coréen Kepco et l'AP1000 de Toshiba/Westinghouse, pour ceux dont commande a été passée ou l'appel d'offres attribué).



La quatrième désigne les autres réacteurs en cours de conception appartenant aux six filières définies par le Forum International Génération IV, et qui pourraient entrer en service à l'horizon 2030.

Les réacteurs nucléaires en projet de la Génération IV sont :      

réacteur à neutrons rapides à caloporteur sodium (SFR) ; réacteur nucléaire à très haute température (VHTR) ; réacteur à sels fondus (MSR). réacteur à eau supercritique (SCWR) ; réacteur rapide à caloporteur gaz (GFR) ; réacteur rapide à caloporteur plomb (LFR) ;

Il existe une catégorie spéciale de réacteurs nucléaires de quatrième génération, simplifiés par rapport à ceux décrits dans le traité GIF, susceptibles de transmuter les déchets d'usines électro-nucléaires (par exemple réacteurs TDN, étudiés en Suisse en mai 2007). En accélérant d'importance les travaux de développements de cette catégorie spéciale, l'industrie devrait être capable de les mettre au point pour 2020 au plus tard. Des opposants à l’énergie nucléaire contestent cette classification, l'association française antinucléaire Réseau Sortir du nucléaire estimant pour sa part que tous les réacteurs sont comparables et qu’il ne s’agit que d’une présentation publicitaire inventée en 2001 et destinée à accréditer l’idée que l’industrie nucléaire progresse au fil du temps1.

Généalogie des réacteurs L’arbre généalogique des réacteurs comporte des branches éteintes ou en voie d’extinction, alors que d’autres sont vigoureuses ou en émergence. Les six concepts de quatrième génération se situent en haut de l’arbre : Réacteur à gaz à (très) haute température (V)HTR ; Réacteur à eau supercritique SCWR ; Réacteurs à neutrons rapides au sodium ou au plomb RNR ; Réacteur à sels fondus MSR. Lesquels se développeront ils? Autres sigles : REP réacteur à eau pressurisée ; WPu réacteur plutonigène militaire ; CANDU réacteur à uranium naturel, refroidi et modéré à l’eau lourde ; SGHWR Réacteur à eau lourde producteur de chaleur industrielle ; Magnox et AGR Réacteurs graphite anglais : ADS : réacteurs hybrides.

Caractéristiques des principales filières Les réacteurs fonctionnent à l’uranium naturel ou à l’uranium enrichi. Le recours à l’uranium naturel comme combustible restreint le choix des modérateurs au graphite et à l’eau lourde. L’utilisation d’uranium enrichi ouvre presque tous les choix possibles de caloporteurs (liquide, vapeur ou gaz évacuant la chaleur) et de modérateurs. Certaines combinaisons sont plus heureuses que d’autres : le caloporteur eau a eu beaucoup de succès, car c’est aussi un bon modérateur. Les réacteurs à eau (REP et REB) constituent la majorité du contingent des réacteurs de génération II (actuel) et III (futur proche).

Prédominance des réacteurs à eau pressurisée La répartition des puissances électriques installées en 1990 et 1997 montre la prédominance de la filière des réacteurs à eau pressurisée (REP), suivie par celle des réacteurs à eau bouillante. Cette répartition a peu changé depuis. La production d'électricité à partir des réacteurs à neutrons rapides ou surgénérateurs demeure marginale en attendant l’arrivée envisagée vers 2040 des réacteurs de quatrième génération.

4.8 Réacteur à eau bouillante Un réacteur à eau bouillante ou REB (en anglais BWR pour boiling water reactor) est un type de réacteur nucléaire de puissance actuellement utilisé dans certaines centrales nucléaires électrogènes américaines, japonaises, allemandes, suédoises, finlandaises, russes, et suisses notamment. Il s'agit d'un réacteur à neutrons thermiques dans lequel le modérateur est l'eau ordinaire. Dans le jargon de l'industrie nucléaire, on parle de « filière des réacteurs à eau bouillante » pour désigner la chaîne d'activités industrielles liées à l'exploitation de ces réacteurs. Avec les réacteurs à eau sous pression (REP), les réacteurs CANDU et les RBMK, les réacteurs à eau bouillante constituent l'une des principales catégories (filières) de réacteurs en exploitation dans le monde. Un réacteur à eau bouillante est un réacteur à neutrons thermiques où l'eau circulant dans le cœur assure à la fois les fonctions de fluide caloporteur et de modérateur. Le contrôle neutronique du cœur est uniquement assuré par des barres de contrôle en graphite. L'eau de refroidissement est partiellement vaporisée dans le cœur. Comme pour le réacteur à eau pressurisée, cette eau circule sous pression, mais à une pression inférieure, de 70 à 80 bars contre de 155 à 160 bars.

Réacteur à eau bouillante: 1.Barre d'arrêt d'urgence 2.Barre de contrôle 3.Assemblage combustible 4.Protection biologique 5.Sortie de vapeur 6.Entrée de l'eau 7.Protection thermique

4.9 Réacteur à eau pressurisée Le réacteur à eau pressurisée ou REP (PWR pour pressurized water reactor en anglais) est la filière de réacteurs nucléaires la plus répandue dans le monde en 2011. Les REP utilisent de l'eau comme fluide caloporteur et pour faire office de modérateur, ce qui les classe dans la famille des réacteurs à eau légère. Cette eau primaire — qui réfrigère le cœur du réacteur — est sous haute pression (environ 150 bar) et ne bout pas dans le circuit primaire. La vaporisation de l'eau secondaire se fait au niveau des générateurs de vapeur - ce qui n'est pas le cas dans les réacteurs à eau bouillante (REB)1 où il n'y a qu'un seul circuit. En 2011, les REP équipent environ les deux tiers des réacteurs nucléaires de puissance en fonctionnement dans le monde (dont les 58 réacteurs français), ainsi que les navires et sousmarins nucléaires. Il s'agit d'une technologie d'origine américaine développée par Westinghouse, la France ayant jusqu'en 1969 misé sur une autre technologie, l'UNGG. Cette dernière a été abandonnée pour des raisons de rentabilité et aussi de sécurité en raison d'un début de fusion du cœur dans la centrale nucléaire de Saint-Laurent. Le combustible nucléaire d'un REP est de l'oxyde d'uranium faiblement enrichi : la proportion d'isotope U-235 fissile varie de 3 à 5 % selon les pays. Le combustible se présente sous la forme de pastilles empilées et maintenues dans des gaines en zircaloy appelées crayons, mises sous pression d'hélium. Les crayons combustibles sont agencés sous forme d'assemblages dont la tenue mécanique est assurée par des grilles. Selon les modèles de REP, on charge entre 120 et 250 assemblages dans la cuve du réacteur.

Schéma de principe d'une tranche nucléaire disposant d'un REP et d'une tour de refroidissement

Réacteur à Eau Pressurisée (REP)

Dans le circuit primaire, de l'eau (dite eau légère, par opposition à l'eau lourde D2O) sous pression est chargée de récupérer la chaleur produite par le cœur : c'est ce fluide caloporteur qui circule au sein des assemblages entre les crayons où se produit la réaction en chaîne. Les produits de la réaction nucléaire (produits de fission et transuraniens) sont confinés avec l'oxyde d'uranium à l'intérieur de la gaine des crayons pour éviter leur dissémination et la contamination du circuit primaire. L'eau du circuit primaire fait également office de modérateur : elle a la capacité de ralentir ou thermaliser les neutrons de fission. Comme n'importe quel type de réacteur thermique (nucléaire ou à flamme), un REP est réfrigéré par un grand débit d'eau froide pompée d'un fleuve ou de la mer. La plupart des réacteurs refroidis à partir d'eau de rivière sont équipés d'une tour de réfrigération pour condenser la vapeur à la sortie de la turbine.

Bilan des neutrons de fission dans un réacteur à eau pressurisée (REP). Environ 41 % des neutrons provoquent de nouvelles fissions et entretiennent la réaction en chaîne, dont 39 % avec des neutrons lents. Une fraction importante, 28 %, capturée dans l’uranium-238 se transforme à terme en plutonium-239 fissile. Le reste est perdu : 13 % sortent du réacteur ; 18 % donnent lieu à des captures dites stériles. Parmi ces dernières, certaines peuvent empoisonner la marche du réacteur, d’autres servent à la régulation de la réaction en chaîne (bore, barres de contrôle).

4.10 Aéroréfrigérants De manière générale, un aéroréfrigérant est un dispositif permettant de transférer de l'énergie thermique du fluide interne vers l'air extérieur. On utilise cette méthode pour refroidir un liquide (eau, eau glycolée, huile, fuel…) ou pour condenser et refroidir un gaz (gaz frigorigènes). Par exemple, on utilise un aéroréfrigérant pour refroidir l'eau d'un circuit de refroidissement d'un moteur thermique. Ainsi, on trouve des aéroréfrigérants dans toutes les automobiles. On emploie plus communément dans ce cas le terme de radiateur, le principe de fonctionnement étant effectivement similaire aux radiateurs domestiques : échauffement de l'air externe par refroidissement de l'eau interne. L'aéroréfrigérant est composé d'une surface d'échange et d'un moyen de ventilation. Le fluide à refroidir passant dans des tubes et l'air extérieur passant autour des tubes qui sont munis d'ailettes pour augmenter le coefficient d'échange thermique. Par exemple, la surface d'échange peut être composée de tubes en cuivre et d'ailettes en aluminium, avec des groupes moteurs-ventilateurs pour assurer la circulation de l'air et l'évacuation de la chaleur.

Une tour de refroidissement ou aéroréfrigérant est un système qui permet de refroidir de l'eau utilisée dans un circuit fermé. Ce type de système est notamment utilisé dans les centrales thermiques pour refroidir la température de l'eau qui condense la vapeur au condenseur. Un aéroréfrigérant est constitué d'une grande tour en béton ou en acier traité ayant le plus souvent la forme d'une hyperboloïde à une nappe.

L'eau à refroidir est amenée par une conduite à une certaine hauteur dans la tour. A partir de cette arrivée, l'eau tombe par gravitation au fond de la tour sous forme de gouttelettes. Parallèlement, des ventilateurs (tirage forcé) ou le simple tirage naturel font passer de l'air en sens inverse (vers le haut de la tour). Une partie de l'eau injectée passe sous forme de vapeur et est rejetée (c'est le fameux panache que l'on voit au dessus des aéroréfrigérants). La vaporisation de cette eau demande de l'énergie ce qui abaisse donc la température de l'eau liquide qui descend. Afin de compenser la perte d'eau ainsi occasionnée, de l'eau liquide est ajoutée à l'eau qui repart pour garder un niveau constant.

Aéroréfrigérants humides ouverts.

4.10.1 Tour de refroidissement à circuit ouvert Dans une tour à circuit ouvert, l'eau provenant de la source de chaleur du procédé est distribuée directement sur la surface de ruissellement et entre en contact avec l'air soufflé au travers de la tour, assurant ainsi le refroidissement par évaporation d'une petite partie de cette eau, grâce à l'échange direct obtenu entre l'eau et l'air. La tour ouverte est l'équipement évaporatif qui offre les plus grands avantages en matière de rendement, d'encombrement, de coût unitaire et de consommation énergétique, présentant également le poids d'installation le plus faible. Dans le cadre de la gestion du risque lié à la Légionella et du suivi de la qualité de l'eau, il faudra cependant tenir compte de la totalité du volume du circuit incluant la tour de refroidissement proprement dite et tout le réseau, les échangeurs, les bassins éventuels, et les pompes. Il faut donc gérer souvent des volumes importants et des matériaux constitutifs de natures différentes. Dans ces systèmes, les points chauds tels que l’échangeur de chaleur ou le condenseur sont des sites plus favorables au développement du tartre, de la corrosion ou de la prolifération microbienne. Au vu de leur taille et de leur volume, ces systèmes peuvent parfois être plus difficiles à nettoyer ou à désinfecter en cas d’encrassement ou de pollution.

4.10.2 Tour de refroidissement à circuit fermé Dans une tour à circuit fermé, le fluide à refroidir circule dans un échangeur tubulaire étanche, lui-même directement arrosé. Le refroidissement est assuré comme dans une tour ouverte, par évaporation d'une partie de l'eau de pulvérisation. En matière de gestion du risque, la tour fermée avec échangeur arrosé offre donc de nombreux avantages. Ce principe permet ainsi de confiner l'eau de pulvérisation à la seule tour de refroidissement. Le circuit primaire est fermé et totalement confiné, sans entrer en contact avec l'air. L'eau de pulvérisation ne peut donc pas être contaminée par les bactéries qui se développent dans les bras morts des tuyauteries ou dans les autres équipements externes au refroidisseur évaporatif (ex. condenseur). De plus, elle se trouve à une température inférieure à celle du procédé. Plus la température d’eau est basse, moins il y a de prolifération bactérienne. Seul le circuit de pulvérisation totalement confiné à la tour de refroidissement doit être traité et géré en terme de qualité d’eau.

Certains aéroréfrigérants dits aéroréfrigérants secs travaillent sans ruissellement d'eau. Ce sont des ventilateurs qui en marche forcée refroidissent l'eau plus chaude que l'air qui traverse un échangeur horizontal ou vertical. Ce type d'aérorefrigérant évite la présence d'eau et la formation de légionellose, en contre partie les rendements d'échange sont moindres et la température de refroidissement de l'eau n'est jamais inférieure à la température d'air extérieur.

5 Les barrières d'étanchéité des centrales nucléaires Pour éviter le rejet dans l'environnement de substances radioactives, les centrales françaises, comme toutes les centrales de type REP (Réacteur à Eau Pressurisée) sont conçues sur le principe dit de la « triple barrière de confinement » : 1°) Le combustible est enfermé dans des gaines métalliques étanches. 2°) Le circuit primaire est contenu dans un circuit métallique étanche, constitué des parois de la cuve du réacteur, des générateurs de vapeur, du pressuriseur et des tuyauteries. 3°) Le réacteur est enfermé dans une enceinte en béton étanche. Nous allons passer en revue ces trois barrières, en décrivant leur étanchéité en fonctionnement normal, et en situation incidentelle ou accidentelle.

5.1 La première barrière d'étanchéité : la gaine du combustible Le combustible se présente sous forme de pastilles cylindriques d'oxyde d'uranium UO2 (ou d'un mélange oxyde d'uranium-oxyde de plutonium : combustible MOX) d'environ 8 mm de diamètre sur 13 mm de hauteur. Ces pastilles sont empilées et comprimées les unes contre les autres, grâce à un ressort, dans des tubes creux de 4 mètres de longueur environ. Ces tubes sont en alliage métallique nommé « zircaloy-4 » (zirconium env. 98% - étain env. 1,5% - fer env. 0,2% - chrome env. 0,1%...), fermés aux deux extrémités par des bouchons soudés. L'épaisseur de la gaine de zircaloy-4 est relativement faible : environ 0,57 mm soit 570 micromètres. En haut du tube, un espace vide permet aux gaz de fission produits par la réaction nucléaire de se rassembler. Le zirconium a été choisi comme métal de base pour fabriquer les tubes car il réunit plusieurs avantages : transparence aux neutrons, bonne résistance à la corrosion, bonne conductibilité thermique, faible dilatation thermique, point de fusion élevé. Les autres constituants, comme l'étain ou le chrome, améliorent la tenue mécanique et chimique (anti-corrosion) de l'alliage.

Un tube rempli de pastilles de combustible est appelé « crayon ». Dans un réacteur de 1300 MW, 264 crayons sont placés côte à côte pour former un « assemblage combustible », et le réacteur contient 193 assemblages. Lors de leur séjour dans le réacteur, soit environ 4 ans en moyenne, les pastilles et les crayons « travaillent », comme on va le voir.

Crayons en coupe dans un assemblage combustible

Barres de combustible pour les réacteurs à eau pressurisée (REP/PWR)

5.1.1 Fonctionnement normal Lors du séjour du combustible dans le réacteur, plusieurs phénomènes se produisent (liste non exhaustive) : a) à l'intérieur des pastilles de combustible : -une dilatation des pastilles d'uranium ; le centre des pastilles étant plus chaud que leur périphérie, cette dilatation n'est pas uniforme et s'accompagne de fissurations ainsi qu'une déformation - en forme de diabolo - des pastilles,

- une accumulation dans la pastille de gaz de fission (iode, xénon, krypton...) sous forme de bulles de taille nanométrique à micrométrique ; ces gaz diffusent petit à petit hors des pastilles, c'est pourquoi un espace libre est justement prévu en haut des crayons pour qu'ils s'y accumulent ; ces gaz provoquent une augmentation de la pression interne du crayon.

La première barrière contre la dissémination des produits radioactifs est constituée par la gaine enrobant le combustible. Certains éléments étant gazeux ou rendus volatils par la chaleur, un volume d'expansion est prévu dans le haut de la gaine pour éviter des surpressions. D'autres radioéléments, comme le plutonium, restent piégés dans les pastilles d'oxyde d'uranium. La gaine en zirconium ou en alliage de zirconium, transparente aux neutrons, assure un excellent confinement de la radioactivité malgré les conditions de température et de pression. Une petite fraction de la radioactivité passe cependant dans l'eau primaire.

b) dans la gaine de zircaloy : -une implantation par effet de recul - énergie cinétique acquise lors de la réaction nucléaire des produits de fission dans l'intérieur de la gaine sur une épaisseur de quelques 10 micromètres, -une déformation - appelée fluage - de la gaine, due à l'irradiation, -une corrosion de l'extérieur de la gaine au contact de l'eau du circuit primaire (formation d'oxyde de zirconium selon la réaction Zr + 2 H2O --> ZrO2 + 2H2) ; cette oxydation a pour effet de produire de l'hydrogène qui diffuse dans toute l'épaisseur de la gaine, avec formation d'hydrures pouvant fragiliser le matériau, - une usure mécanique des crayons, due aux vibrations qu'ils subissent et aux frottements qui en résultent (phénomène appelé fretting).

Comme on l'a dit, la diffusion des gaz de fission hors des pastilles provoque une augmentation progressive de la pression à l'intérieur des crayons : pour éviter des contraintes sur la gaine et la diffusion des produits de fission, cette pression doit rester inférieure à la pression extérieure au crayon, celle de l'eau du circuit primaire, soit 155 bars. Par ailleurs, la dilatation des pastilles et le fluage de la gaine évoqués ci-dessus finissent par conduire à une mise en contact de la pastille avec la gaine (situation d'IPG, interaction pastillegaine). Ces deux phénomènes constituent les facteurs limitants du séjour des crayons dans le cœur. Actuellement la réglementation impose de retirer les crayons du cœur lorsque le taux de combustion (le taux de combustion, en anglais burnup désigne la quantité d'énergie thermique par unité de masse de matière fissile produite par le réacteur entre le chargement et le déchargement du combustible) a atteint 52 gigawatts.jours par tonne (GW.j/t), soit au bout de 4 ans en moyenne environ. Les autorités considèrent que jusqu'à cette valeur, la gaine reste intègre en fonctionnement normal, ou face à une « situation incidentelle » (situation définie dans les « Règles générales d'exploitation « des centrales). L'objectif des exploitants est d'augmenter le taux de combustion à plus de 60 GW.j/t, ce qui reviendrait en gros à porter la durée moyenne de séjour du combustible dans le réacteur de 4 à 5 ans : dans ce but plusieurs recherches sont actuellement menées, sur les pastilles de combustible (incorporation d'additifs, par exemple), sur les crayons (remplacement de l'alliage Z4 par l'alliage M5 zirconium - niobium, par exemple), et sur l'IPG.

5.1.2 Situations incidentelles et accidentelles Toute atteinte à l'intégrité des gaines est considérée, au minimum, comme un « incident ». Ces événements sont relativement rares. En 2000, la centrale de Cattenom a présenté, dans le bâtiment réacteur n°3, une contamination du circuit primaire (détectée par la présence de gaz rares et d'halogènes) traduisant un niveau de « rupture de gaine sérieuse » sur plusieurs crayons. Cette situation, qualifiée « d'incident significatif » (un incident est dit significatif s'il est suffisamment important du point de vue de la sûreté ou de la radioprotection pour que l'ASN, Autorité de Sûreté Nucléaire, en soit informée, puis reçoive ultérieurement une analyse plus complète), a été classée au niveau 1 de l'échelle INES en 2001. Un événement considéré comme possible, et étudié dans les scénarii, est l'éjection brutale et inopinée d'une barre de commande - ces barres qui ont pour but de régler la puissance du réacteur en régulant la population neutronique - à la suite d'une défaillance du mécanisme de commande qui permet de descendre plus ou moins ces barres dans le cœur. Il se produit alors, à cet endroit du cœur, une accélération très brutale de la réaction nucléaire : c'est ce que l'on appelle un accident de réactivité. Les crayons combustible montent en température en quelques millisecondes ou dizaines de millisecondes, entraînant la dilatation des pastilles, et par suite de très fortes contraintes sur la gaine des crayons. Heureusement, dans cette situation, l'augmentation de température est immédiatement (quelques dizaines de millisecondes) et naturellement contrée par l'augmentation du taux de capture des neutrons due à l'effet Doppler. Cependant, une perte d'intégrité de la gaine des crayons n'est pas totalement exclue : dans ce cas, l'eau du circuit primaire serait contaminée par les produits de fission et les actinides. L'étanchéité de la deuxième barrière (voir plus loin) entre alors en jeu.

Un autre scénario envisagé, aux conséquences plus graves que le précédent, est un défaut de refroidissement du cœur. Il peut être provoqué, par exemple, par une brèche dans le circuit primaire, ou par la défaillance des circuits d'alimentation en eau des générateurs de vapeur. Dans ce cas le réacteur est arrêté automatiquement par chute des barres de contrôle, mais il reste le problème de l'évacuation de la chaleur résiduelle. Différents dispositifs sont prévus dans ce cas (voir plus loin). Mais, à l'extrême, une suite de défaillances humaines et/ou matérielles pourrait conduire - en une heure ou quelques heures - à la fusion du cœur : combustible et gaines fondus à près de 3000°C s'écouleraient alors jusqu'en bas de la cuve, avec le risque de la percer. A Three Mile Island, en 1979, aux Etats-Unis, un défaut de refroidissement avait conduit à la fusion partielle du cœur, mais la cuve avait heureusement résisté. Sur les réacteurs français actuels, ce scénario a une probabilité d'occurrence extrêmement faible par suite des précautions prises. Il fait néanmoins l'objet de simulations, notamment de la part de l'IRSN (Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire).

5.2 La deuxième barrière d'étanchéité : le circuit primaire 5.2.1 Description du circuit primaire L'eau du circuit primaire circule en boucles fermées, de la cuve du réacteur jusqu'aux générateurs de vapeur et au pressuriseur, via des tuyauteries.

5.2.2 Nécessité de l'étanchéité du circuit primaire Le circuit primaire doit former un ensemble étanche, car toute fuite aurait des conséquences importantes. En effet : 1°) L'eau du circuit primaire contient, même en fonctionnement normal, une faible quantité (car elle est purifiée en permanence au moyen de résines échangeuses d'ions) de substances radioactives : 





des radionucléides produits par l'activation, sous l'effet des neutrons, de l'eau du circuit primaire ; il s'agit essentiellement de carbone 14 (produit par l'activation des noyaux d'oxygène 17) et de tritium (produit par l'activation des noyaux de bore et de lithium présents dans l'eau), des radionucléides produits par l'activation, sous l'effet des neutrons, des alliages métalliques utilisés dans la cuve du réacteur (ou plus exactement de l'activation des produits de corrosion de ces alliages) ; les principaux éléments concernés sont le cobalt 58 et le cobalt 60 ; d'autres sont présents en plus faible quantité (chrome 51, fer 59, nickel 59, etc.), des produits de fission produits par les poussières de combustible qui peuvent se déposer à l'extérieur des crayons, lors de leur remplissage.

2°) Si un incident ou un accident amenait à une rupture de gaine sur un ou plusieurs crayons, l'eau du circuit primaire se chargerait fortement en radionucléides, et l'étanchéité du circuit deviendrait alors essentielle. 3°) Si la fuite est importante et que la pression du circuit primaire baisse notablement (l'eau de ce circuit risquant alors de passer à l'état de vapeur), la chaleur produite par le cœur n'est plus évacuée correctement ; la réaction nucléaire est stoppée, mais il reste à évacuer la chaleur résiduelle (voir plus loin).

5.2.3 Comment l'étanchéité du circuit primaire est-elle assurée ? L'étanchéité du circuit primaire est assurée, dès la conception, par un choix et un dimensionnement adaptés des matériaux, qu'exigent les conditions sévères de température et de pression (env. 300°C, 155 bars), ainsi que l'irradiation neutronique qui provoque la corrosion. La cuve par exemple, pièce maîtresse de la centrale, de taille impressionnante environ 13 mètres de haut pour 4 à 5 mètres de diamètre et autour de 200 tonnes -, est en acier de 23 cm d'épaisseur.

Au cours du fonctionnement ou lors des arrêts, des inspections régulières du circuit primaire sont réalisées. Des points signalés comme fragiles sont les traversées de la cuve : ce sont, au niveau du couvercle, des pièces tubulaires soudées nécessaires au passage des barres de contrôle ; et aussi, sur les parois latérales, les raccordements des tubulures du circuit primaire. Ces traversées, mais également la cuve elle-même, peuvent présenter des corrosions et fissurations plus ou moins profondes : elles sont détectées par ultrasons. Leur réparation nécessite l'arrêt du réacteur. La corrosion et la fissuration des aciers sous l'effet des neutrons, ainsi que leur vieillissement thermique, sont particulièrement surveillés dans l'optique de l'allongement de la durée de vie des centrales. Toutes les soupapes de sûreté font elles aussi, compte tenu des contraintes qu'elles subissent, l'objet d'un contrôle minutieux.

5.2.4 Situations incidentelles et accidentelles Malgré les précautions décrites ci-dessus, diverses causes peuvent conduire à une fuite de l'eau du circuit primaire.  Fuites vers le circuit secondaire Des fuites sont possibles entre le circuit primaire et le circuit secondaire au niveau des générateurs de vapeur. Ces appareils aux caractéristiques impressionnantes (typiquement 20 mètres de hauteur, 4 mètres de diamètre, 350 tonnes de masse) ont pour rôle de transférer la chaleur du circuit primaire au circuit secondaire. Afin d'avoir une très grande surface d'échange thermique (de l'ordre de 5000 mètres-carré) l'eau du circuit primaire circule dans un faisceau de milliers de tubes fins, immergés au sein du fluide secondaire.

L'éclaté du générateur de vapeur montre l'eau primaire baignant les tubes du circuit secondaire. Le confinement de la radioactivité passée dans l'eau primaire est assurée par les parois de la cuve du réacteur et de celles, externes et internes, des générateurs.

Ces tubes sont notamment exposés au risque de colmatage (ce problème détecté en 2007 a amené l'IRSN à demander un état précis du colmatage des générateurs de vapeur sur l'ensemble du parc. Le colmatage est résolu par un nettoyage chimique), et soumis à des contraintes de vibrations. Des micro-fuites entre le circuit primaire et le circuit secondaire peuvent se produire, mais elles doivent rester en deçà de limites déterminées par les autorités de contrôle. La rupture complète d'un ou plusieurs tubes conduit à des fuites bien plus importantes. L'eau du circuit secondaire est continuellement surveillée afin de détecter toute contamination.

 Fuites vers l'enceinte de confinement en béton Des fuites du circuit primaire sont possibles en dehors des générateurs de vapeur. Il peut s'agir, par exemple, d'une défaillance de vanne ou de soupape, d'une brèche sur une canalisation notamment au niveau d'une soudure, d'une fuite sur un joint d'arbre de pompe, etc. Alors de l'eau, radioactive comme on l'a vu, se répand (liquide et vapeur) dans le bâtiment réacteur : c'est pourquoi celui-ci comporte une enceinte de confinement en béton (« troisième barrière », voir plus loin).

Différentes parades sont prévues face à l'éventualité d'une fuite. Notamment, des détecteurs sensibles au taux de radioactivité avertissent les opérateurs, ce qui peut permettre d'intervenir avant que la brèche ne devienne plus importante. Comme on sait, c'est l'eau du circuit primaire qui, en fonctionnement normal, évacue la chaleur produite par le cœur. En cas de rupture du circuit primaire, les systèmes d'injection de sécurité prennent le relai et envoient de l'eau dans le cœur. Pendant ce temps, la vapeur se libère dans l'enceinte du bâtiment réacteur, et elle est pour partie condensée par un système d'aspersion situé sous le dôme du bâtiment. L'injection de sécurité et l'aspersion peuvent devoir durer plusieurs heures, or les réservoirs ont une capacité limitée : c'est pourquoi l'eau qui s'écoule au fond du bâtiment réacteur est récoltée dans des puisards, où elle est pompée et réutilisée pour l'injection et l'aspersion (les puisards sont munis de filtres afin d'arrêter d'éventuels débris qui pourraient endommager les pompes, mais un problème demeure difficile à régler, celui du bouchage de ces filtres eux-mêmes par les débris ou par des précipités minéraux). L'accident de référence en ce domaine est celui de la centrale de Three Mile Island (TMI) aux Etats-Unis, en 1979. L'ouverture de la vanne du pressuriseur a entraîné une perte importante de liquide du circuit primaire (1 mètre-cube par minute), d'où un défaut de refroidissement et la fonte partielle du cœur : les produits de fission et les actinides se sont donc mélangés à l'eau du circuit primaire, et se sont échappés par la vanne ; heureusement l'enceinte de confinement en béton (troisième barrière) a joué son rôle pour confiner cette eau. Autre exemple, en juin 2008, dans la centrale de Krško en Slovénie, il s'est produit une fuite de 2,4 mètres-cubes par heure au niveau d'un joint d'une pompe : cette fuite d'eau peu radioactive - pas de fusion du cœur comme à TMI - est restée contenue dans l'enceinte de confinement.

5.3 L'étanchéité de l'enceinte de confinement

Schéma de principe de l'intérieur du bâtiment réacteur (cuve, circuit primaire, pressuriseur, générateurs de vapeur)

Le bâtiment contenant le réacteur, le circuit primaire, les pompes, les générateurs de vapeur, et les sorties du circuit secondaire, est appelé « bâtiment réacteur ». Dans la technologie REP, la plus utilisée dans le monde, le bâtiment réacteur est systématiquement doté d'une enceinte de confinement. - Pour les réacteurs de puissance 1300 MW ou 1450 MW (soit 24 des 58 réacteurs français), l'enceinte de confinement est faite de deux enveloppes. La plus interne a 1,2 mètre d'épaisseur, la plus externe 0,55 mètre. Entre les deux, l'espace de 1,8 mètre est dépressurisé, de façon à aspirer d'éventuelles fuites provenant de l'enveloppe interne (les gaz et aérosols seraient alors dirigés vers des filtres à sable, capables de retenir plus de 90% de l'iode et du césium radioactifs). L'enceinte interne est dimensionnée pour résister à l'augmentation de pression qui résulterait de la rupture complète d'une tuyauterie du circuit primaire (scénario le plus grave envisagé, après la fusion du cœur). Cette rupture entraînerait un relâchement de vapeur d'eau radioactive à environ 150°C et 5 bars. L'enveloppe externe, quant à elle, est capable de résister à la chute d'un avion militaire tel qu'un mirage V de masse 13 tonnes volant à 540 km/h. En ce qui concerne les avions de ligne, les couloirs aériens sont éloignés des centrales.

- Pour les réacteurs de 900 MW de conception plus ancienne (soit 34 des 58 réacteurs français), il n'y a qu'une enceinte, épaisse de 90 centimètres, la surface interne étant recouverte d'une peau métallique de 6 millimètres d'épaisseur destinée à assurer l'étanchéité. Tous les dix ans, la tenue en pression de la troisième enceinte est testée. Le vieillissement des matériaux (corrosion de l'enveloppe métallique ; retrait ou fluage du béton) est surveillé sur le long terme. Des travaux de renforcement sont engagés si nécessaire.

5.4 Un cas extrême d'accident nucléaire : la fonte du cœur du réacteur. Cet évènement se produit lors d'une perte du produit de refroidissement dans le cœur du réacteur. Si les réactions de fission cessent rapidement par manque de neutrons thermiques (le liquide sert la plus part du temps de caloporteur et de modérateur), les désintégrations naturelles continuent quant à elles et suffisent pour porter le combustible à des températures supérieures à 3 000 degrés. Or les gaines en alliage de Zirconium fondent à partir de 1 850° C, et l'oxyde d'Uranium formant le combustible fond quant à lui à 3 000° C. La première barrière de protection, les gaines du combustible, est donc rapidement franchie et le combustible se répand au fond de la cuve. C'est là que le Corium prend réellement forme : la température est telle que cet alliage comprend non seulement le combustible, mais également le Zirconium des crayons, le métal des structures qui auparavant maintenaient positionnées les barres dans le cœur et d'autres éléments comme le béton de la cuve. La composition du combustible est aussi très variable, surtout s'il se trouve en fin de vie dans le cœur (produits de fission, plutonium créé par capture de neutrons, etc.). Devant la difficulté de définir exactement la composition de cet alliage en fusion, le nom de Corium, venant de « cœur », est utilisé, comme s'il s'agissait d'un élément chimique en tant que tel.

C'est aussi l'impossibilité de définir précisément la composition du Corium qui rend difficile toute estimation de son évolution à court terme, et notamment en ce qui concerne la vitesse à laquelle il va se refroidir. Le danger vient alors de possibilité de cet mélange en fusion de poursuive son chemin par gravitation et de rompre la seconde barrière de protection, la cuve du réacteur, et même la troisième barrière, l'enceinte du réacteur. De ces franchissements possibles des barrières de protection vient l'expression de « syndrome Chinois » pour mettre en avant la presque totale impossibilité d'arrêter le Corium : si aucune structure suffisamment résistante n'est prévue pour le retenir, il peut continuer à descendre sous le réacteur et s'enfoncer dans le sol (jusqu'en Chine disait-on à l'époque). Les risques liés à la fonte du cœur et au déplacement du Corium sont doubles et rattachés à la possibilité que sur son chemin il rencontre une quantité d'eau relativement importante (nappe phréatique, eau accumulée sous la cuve lors du fonctionnement normal du réacteur ou simplement lors des arrosages qui ont suivi l'accident). La rencontre du Corium et de la masse d'eau est explosive avec un dégagement très important de vapeur. Pour imaginer ce que cela peut représenter, il faut noter que la lave volcanique qui entre en contact avec l'eau de mer lors des éruptions à Hawaï est à une température inférieure à 1 000°C et pourtant le contact avec l'eau de mer donne lieu à des panaches d'évaporation gigantesques.

Fonte du cœur du réacteur et rupture des barrières de protection

Différents systèmes pour éviter la propagation du cœur

6 Bilan des rejets des centrales en fonctionnement normal 6.1 La nature et l'origine des rejets Toute centrale nucléaire rejette des effluents liquides et gazeux. Ces rejets doivent être situés en dessous des valeurs réglementaires fixées par les autorités. 6.2 Les effluents liquides - des « produits d'activation » :  du tritium produit essentiellement par l'activation du bore et du lithium (le bore, sous forme d'acide borique sert à contrôler la réaction nucléaire par son pouvoir absorbant des neutrons ; le lithium, sous forme d'hydroxyde de lithium sert à maintenir le pH à 7,3 environ) contenus dans l'eau du circuit primaire ;  du carbone 14 (produit par activation de l'eau du circuit primaire) ;  du cobalt, du chrome... (produits par l'activation des aciers du circuit primaire), - des produits de fission solides (césium, lanthane, strontium...) ou gazeux dissous (iode, xénon, krypton...) Ces effluents sont traités (notamment filtrés sur des résines échangeuses d'ions), puis stockés et analysés, avant rejet dans l'environnement.

6.3 Les effluents gazeux - des produits d'activation : du tritium et du carbone 14, - des produits de fission : des gaz rares (principalement xénon et krypton), les halogènes (principalement l'iode). Ces effluents sont stockés au minimum un mois dans des réservoirs, filtrés afin de retenir les poussières et l'iode, et rejetés par la cheminée de la centrale.

Origine et typologie simplifiées des effluents d’une installation nucléaire.

6.4 Le problème du tritium Le tritium est un radionucléide qui pose un problème particulier, lié à sa très petite taille : il parvient à diffuser - au moins en partie - au travers de beaucoup de matériaux. Comme indiqué plus haut, la grande majorité du tritium rejeté par les centrales provient de l'activation du bore et du lithium contenus dans l'eau du circuit primaire. Mais du tritium est également produit par les réactions nucléaires au sein du combustible. En effet, 1 fission sur 10 000 environ est une « fission ternaire » : le noyau d'uranium se scinde non pas en deux, mais en trois noyaux plus petits, dont un de tritium. La quasi-totalité partie du tritium ainsi produit est piégée dans le combustible lui-même (env. 87%) ou dans les gaines en zircaloy-4 des crayons combustible sous forme d'hydrure de zirconium (env. 13%) : il n'est donc pas rejeté par les centrales, hors incident sur les gaines. En revanche, il est libéré lors des opérations de retraitement du combustible usé à l'usine de La Hague : c'est pourquoi celle-ci en rejette environ 12 millions de gigabecquerels par an, contre 1 million seulement pour l'ensemble des centrales. Les centres de stockage des déchets (à la Hague et dans l'Aube) rejettent elles aussi du tritium. Tous ces rejets font l'objet de limites annuelles fixées par l'ASN (Autorité de Sûreté Nucléaire).

Ces rejets sont annuellement d'une trentaine de grammes. En comparaison, l'inventaire en tritium à l'échelle de la planète est le suivant : - tritium d'origine naturelle : env. 4 kg (valeur sensiblement constante, la production par interaction des rayons cosmiques sur l'air étant à-peu-près compensée par la décroissance radioactive) - tritium produit par les tirs nucléaires atmosphériques, essentiellement entre 1945 et 1963 : env. 650 kg (restait 65 kg en 1995 du fait de la décroissance radioactive) - tritium produit par l'ensemble des installations nucléaires civiles et militaires entre 1950 et 2000 : env. 1 kg (Source UNSCEAR : United Nations Scientific Committee on the effects of Atomic Radiation 2000) Le tritium a une activité de 359 millions de gigabecquerels par kilogramme. C'est un radionucléide « à vie courte » (env. 12 ans), et c'est un « émetteur beta », ce qui signifie qu'en se désintégrant il émet des électrons, lesquels sont absorbés par quelques micromètres d'eau seulement : son danger ne vient donc pas de l'irradiation, mais de la contamination interne. Car le tritium peut remplacer l'hydrogène dans les molécules d'eau, et dans les molécules organiques des êtres vivants. Jusqu'à ces dernières années il était admis que le tritium ne s'accumulait pas dans la chaîne alimentaire. Mais des études récentes ont soulevé des interrogations, qui ont conduit l'ASN (Autorité de Sûreté Nucléaire) à créer en 2007 des groupes d'étude sur le sujet. Quant à l'eau potable, l'OMS (Organisation Mondiale de la Santé) recommande quant à elle une valeur maximale de 7800 Bq/kg.

7 Le cycle du combustible On appelle « cycle du combustible » nucléaire l’ensemble des opérations qui va de l’extraction des minerais de l’uranium jusqu’au retraitement du combustible irradié et au stockage des déchets radioactifs. La principale étape est constituée par les deux ou trois ans durant lesquels le combustible est brûlé dans un réacteur pour produire de l’électricité. Tout ce qui se passe avant cette étape est appelé « amont du cycle », ce qui survient ensuite est « aval du cycle ». Il s’agit effectivement d’un cycle quand, à la suite d’un retraitement, des noyaux fissiles d’uranium ou de plutonium encore disponibles sont recyclés en réacteur dans une charge neuve de combustible. On parle alors de cycle fermé. En l’absence de retraitement, les noyaux d’uranium ou de plutonium ne font qu'un tour de piste : le cycle est dit ouvert .

7.1 L'amont du cycle : de l'extraction de l'uranium à la fabrication du combustible L'amont du cycle est le nom donné en France à la suite des opérations qui vont de l'extraction d'un minerai d'uranium à l'entrée des assemblages de combustible dans les réacteurs. La teneur en uranium du minerai extrait des mines ne dépasse pas généralement quelques pourcents. Les mines sont souvent situées loin des sites. Pour éviter des transports inutiles de tonnages importants sur des distances longues, une première opération de concentration de l'uranium s'effectue à proximité immédiate des sites miniers.

Mine d'uranium d'Arlit au Niger. Carrière à ciel ouvert.

Minerai d’uranium, aussi appelé pechblende ou urane ou uranite, composé de dioxyde d’uranium ou UO2

Après son extraction, le minerai d’uranium est broyé, traité, affiné et dans certain cas, enrichi avant de servir à la fabrication de combustible nucléaire. Après un traitement qui varie d'un site à l'autre, l'uranium se retrouve sous forme d'une poudre, de couleur jaune vif, appelée « yellow cake » (gâteau jaune). Le yellow cake contient environ 750 kg d'uranium par tonne.

Uranium affiné, ou Yellow cake, oxyde d’uranium U3O8

Après transport, l'étape suivante est celle de la purification. Bien que déjà concentré, le « cake » doit être raffiné et l'uranium débarrassé de ses impuretés, pour la préparation du combustible.

Bien que toute la croûte terrestre contienne un pourcentage d'Uranium par tonne, il n'est assez élevé que dans quelques très rares régions. La production minière de l'Uranium est ainsi majoritairement réalisée par trois grands pays : le Kazakhstan, le Canada et l'Australie. A eux seuls ces trois pays représentent les deux tiers de la production. Une solution envisagée pour l'avenir serait d'extraire les très faibles quantités d'Uranium contenues dans l'eau de mer. Bien qu'il y ait moins de 4 mg d'Uranium par mètre cube d'eau de mer, cette source d'approvisionnement est à la fois disponible en très grandes quantités et accessible sans trop de difficultés à de nombreux pays.

L'augmentation rapide du prix, multiplié par dix en quatre ans, montre l'existence d'un problème de ressources minières. Entre 2003 et 2007, le prix du kilogramme de yellow cake est passé de 22 dollars à 249.

A l'état pur, l'uranium solide est un métal radioactif (émetteur alpha de période très longue, environ 4,5 milliards d'années pour l'uranium 238 et environ 700 millions pour l'uranium 235) gris et blanc (voire argenté) qui rappelle la couleur du nickel. Il est dur et très dense. De plus, l'uranium est l'atome le plus lourd (qui contient le plus de nucléons) présent naturellement sur la Terre. L'uranium a 17 isotopes, tous radioactifs, dont 3 seulement sont présents à l'état naturel : 238U ; 235U et 234U. Quelles que soient les teneurs en uranium des milieux, les proportions entre les trois isotopes formant l'uranium naturel sont (presque) exactement les mêmes : 238U : 99,28 % ; 235U : 0,71 % ; 234U : 0,0054 %. On trouve donc dans une tonne d'uranium naturel pur 7,1 kg d'uranium 235 et 54 g d'uranium 234, le reste étant de l'uranium 238. L'isotope 235U est le seul élément fissile naturel.

Enrichissement de l’uranium Seuls les réacteurs Candu sont conçus pour fonctionner avec de l'Uranium naturel. Les autres types de réacteurs nécessitent que la teneur en Uranium 235 soit supérieure :  Uranium naturel : 0,71%  Uranium légèrement enrichi (SEU) : utilisé dans les réacteurs Candu et RBMK (moins de 2% d'enrichissement)  Uranium faiblement enrichi (LEU) : utilisé dans les autres types de réacteurs. La concentration est habituellement de 3 à 5% mais peut atteindre 20% pour une utilisation dans certains réacteurs de recherche  Uranium hautement enrichi (HEU) : avec plus de 20% d'enrichissement, ce combustible est utilisé en grande partie dans les navires lourds à propulsion nucléaire comme les portes avions  Uranium militaire : > à 90%, il permet la mise en place d'armes nucléaires

Pour les réacteurs actuels, l'uranium pur ne suffit pas car il doit être enrichi en isotope 235. L'enrichissement de l’uranium est le procédé consistant à augmenter la proportion d'isotope fissile dans l’uranium. L'opération la plus commune est l'enrichissement de l'uranium naturel en son isotope 235. L’uranium naturel contient 0,71 % d’uranium 235. Or pour provoquer une réaction de fission nucléaire dans les réacteurs à eau pressurisée, il faut disposer d’un uranium qui contienne entre 3 et 5 % de l’isotope 235. Les deux isotopes 235U et 238U ayant les mêmes propriétés chimiques, on se base sur leur seule différence physique, les trois neutrons d'écart, qui expliquent une légère différence de masse atomique. Le procédé industriel de séparation isotopique le plus employé nécessite que l'uranium se retrouve sous forme d'un gaz à base de fluor, l'hexafluorure d'uranium UF6. Ce composé de l'uranium a la propriété de pouvoir passer facilement de l'état solide, à l'état liquide puis gazeux. En dessous de 65°C, il est liquide ce qui facilite son transport au dessus de 65°C, il est gazeux et prêt pour l'enrichissement. Ces opérations de raffinage et de conversion s'effectuent en France sur les sites de Malvési puis de Pierrelatte.

L'enrichissement de l'uranium par un procédé de séparation isotopique - diffusion gazeuse ou ultracentrifugation - passe par l'étape préalable de la conversion. Il s'agit d'obtenir un gaz d'uranium, sous la forme d'un composé fluoré, l'hexafluorure d'uranium. Cet hexafluorure, montré ici sous forme de cristaux, devient gazeux une fois chauffé. Sous cette forme, on peut alors passer à la séparation isotopique proprement dite.

Conteneurs d'hexafluorure d'uranium Entreposage de conteneurs d'hexafluorure d'uranium (UF6) à l'usine d'enrichissement Georges Besse d'EUDODIF sur le site de Tricastin en France. Une fois purifié, l'uranium a été converti sous la forme de ce composé chimique, liquide en dessous de 65°C (ce qui facilite son transport) et qui devient gazeux en dessus de cette température. La forme gazeuse est nécessaire pour séparer l'uranium-235 fissile dans l'usine d'enrichissement.

Il existe plusieurs méthodes d’enrichissement. Toutes reposent sur la légère différence de masse entre uranium 235 et 238, à l'exception de la séparation par laser qui exploite les différences de spectre électromagnétique. Toutes également nécessitent la mobilité des atomes individuels, donc l'utilisation d'uranium sous forme de vapeur, de gaz d'hexafluorure d'uranium UF6 voire de liquide pour la diffusion thermique. Actuellement, les procédés de diffusion gazeuse et de centrifugation dominent le marché, avec une transition vers la seconde, nettement moins énergivore. La diffusion thermique et la séparation électromagnétique appartiennent au passé, tandis que les procédés de séparation chimique ou par laser sont encore à l'étude.

Le procédé de diffusion gazeuse est le plus ancien. La diffusion gazeuse utilise des membranes semi perméables (le fluide ne traverse ces membranes que dans un seul sens et ne revient pas en arrière). Les molécules les plus légères traversent ces membranes plus rapidement et se retrouvent en premier en bout de chaîne. Les molécules d'hexafluorure d'uranium-235 diffusent donc légèrement plus vite que celles d'uranium-238. Après avoir traversé un grand nombre de diffuseurs (dans le cas de l'enrichissement de l'Uranium par diffusion gazeuse il faut faire traverser au gaz près de 1 500 membranes pour que la séparation soit effective), on enrichit le gaz au taux requis de 3 à 5%. La diffusion gazeuse a comme handicap de consommer beaucoup d'énergie. Par exemple, l'usine Georges Besse (Eurodif) en France, qui produit en grande partie le combustible enrichi à 5% utilisé dans les centrales françaises mais aussi plusieurs pays européens, consomme 60% de l'électricité produite par la centrale du Tricastin toute proche (cela représente l’utilisation de deux à trois des quatre réacteurs nucléaires) Enrichissement par diffusion gazeuse

Pour la méthode par centrifugation, l'hexafluorure d'Uranium est placé dans des centrifugeuses dans lesquelles il tourne à grande vitesse. Les molécules les plus lourdes, celles de l'Uranium 238 (238UF6), se retrouvent projetées à la périphérie de la centrifugeuse alors que les molécules plus légères, celles de l'Uranium 235 (235UF6) migrent vers le milieu de la centrifugeuse. En réalisant cette opération plusieurs fois à la suite, il est alors possible d'obtenir un gaz d'hexafluorure d'Uranium enrichi. Comme pour la diffusion gazeuse, le traitement doit être appliqué de nombreuses fois pour obtenir un enrichissement suffisant. Les centrifugeuses sont donc montées en cascades, le gaz passant de l'une à la suivante en augmentant progressivement sa teneur. Ce procédé exige beaucoup de place et est peu discret à implémenter pour des pays sous surveillance, et ce d'autant plus que l'on souhaite obtenir un taux d'enrichissement proche du niveau militaire. Son attrait vient de la simplicité de mise en œuvre et de la faible consommation d'énergie par rapport à la diffusion gazeuse (50 fois moins).

Enrichissement par centrifugation

La centrifugeuse Zippe est une variante de la centrifugeuse standard, où le bas du cylindre en rotation est chauffé, ce qui crée des courants de convections qui tendent à entraîner l'U235 vers le haut, où il est collecté. Cette technologie a été employée au Pakistan, et peut-être en Corée du Nord.

La complexité de ces différentes méthodes et leur coût est au final un rempart contre la prolifération des armes nucléaires. Cela ne sera plus forcément le cas si la méthode d'enrichissement laser (Silex) finit par atteindre sa maturité car ce procédé une fois maîtrisé permettrait d'atteindre une efficacité 10 fois supérieure à la centrifugation, le tout avec des installations de tailles relativement modestes. La différence au niveau du cortège électronique entre les deux isotopes fait que les électrons externes vont réagir à des fréquences d'ondes électro magnétiques légèrement décalées, ce qui va permettre d'arracher des électrons d'un des isotopes, sans que l'autre ne soit ionisé. Le laser est utilisé pour fournir les fréquences avec beaucoup de précision car les différences de sensibilité entre les deux isotopes sont minimes. La fréquence d'éclairage choisie permet alors d'ioniser les atomes d'Uranium 235, sans modifier ceux d'Uranium 238. Une fois ionisés, les isotopes 235 peuvent être attirés par des plaques dans lesquelles circule un courant électrique. Les isotopes 238, électriquement neutres, ne sont pas attirés et la séparation est réalisée. La seule sécurité qui existe aujourd'hui pour éviter toute prolifération de cette technologie est celle liée au brevet et au secret défense qui l’entoure. Cette barrière ne durera pas longtemps et il est possible de voir se multiplier dans l’avenir des centres d’enrichissement bien plus difficiles à détecter et à surveiller.

Enrichissement des combustibles par laser

Fabrication des assemblages Fabrication des assemblages de combustible dans le hall de l'usine franco-belge de Romans en France. Les manipulations des assemblages ne nécessitent pas de précautions particulières, en raison de la faible radioactivité de l'uranium, même enrichi en isotope 235. Les pastilles d'oxyde d'uranium sont confinées dans les gaines des crayons.

7.2 L'aval du cycle La principale question à résoudre pour l'aval du cycle est « que fait-on des produits radioactifs générés par les réacteurs » ? Le combustible irradié est mis en piscine pour une période de 5 ans environ, le temps de laisser décroître ou disparaitre les produits de fission les plus actifs. Au bout de ces 5 ans, une décision est prise de le retraiter ou non le combustible usé. S'il n'est pas retraité, il doit être stocké tel quel. Des recherches sont en cours pour leur stockage dans des couches géologiques profondes. Les décisions sont encore à prendre. En attendant, les déchets entreposés en surface auprès des centrales s'accumulent. En cas de retraitement, le combustible irradié est transporté à l’usine de retraitement où il est d’abord entreposé encore quelques années dans une seconde piscine. Le retraitement consiste à séparer ce qui peut être réutilisé, uranium et plutonium, de ce qui est purement déchets. L’uranium, qui constitue 95 % de la masse et contient encore 1 % d’isotope 235 fissile, peut être recyclé. Le plutonium, 1 % en masse, qui comporte 70 % d’isotopes fissiles, peut produire de l’énergie et être brûlé après avoir été recyclé dans du combustible MOX. Les 4 % restants produits de fission et actinides mineurs - concentrent 99,5 % de la radioactivité alpha et 97,6 % des radioactivités bêta et gamma du combustible irradié. Ce sont des déchets.

Ces déchets sont très radioactifs, mais ils sont conditionnés en étant enrobés dans des verres ou des céramiques qui offrent une meilleure protection à longue échéance pour l’environnement que le stockage en l’état des déchets non retraités. Comme pour ces derniers, le devenir de ces déchets est dans l’attente de décision, mais leur volume étant 25 fois plus petit l’entreposage pose moins de problèmes d’encombrement.

8 Échelle internationale des événements nucléaires Les installations nucléaires et leur fonctionnement sont complexes et difficiles à appréhender aussi bien pour les journalistes que pour le public. Quand l'exploitant annonce un incident, parfois une simple fuite d'eau, les critères d'appréciation manquent pour en évaluer la gravité. C'est pourquoi, la France, puis la communauté internationale, ont conçu une « échelle » des incidents nucléaires bâtie selon le modèle de celle des séismes.

L'échelle internationale des événements nucléaires (INES, de l'anglais International Nuclear Event Scale) sert à mesurer la gravité d'un accident nucléaire. Cette échelle compte huit niveaux de gravité notés de 0 à 7. Mise en application au plan international en 1991, l’INES est maintenant appliquée par une cinquantaine de pays. INES est un outil de communication. Elle est destinée à faciliter la perception par les médias et le public de l'importance en matière de sûreté des incidents et des accidents nucléaires.

9 L'accident de Three Mile Island (TMI) Lieu : Pennsylvanie, Etats-Unis Date: 28 mars 1979, 4 heures du matin Type de réacteur : REP (réacteur à eau pressurisée), 900 MW

TMI : circonstances : un cumul de défaillances ... L'accident débuta le mercredi 28 mars 1979 à 4 heures du matin par un simple incident d'exploitation : la défaillance de l'alimentation normale en eau des générateurs de vapeur de l'unité 2 (TMI-2) de la centrale. Les automatismes de sûreté prévus fonctionnèrent : arrêt de la réaction nucléaire par insertion des barres de contrôle dans le cœur et mise en service des pompes de secours d’alimentation en eau des générateurs de vapeur. C’est alors qu'est intervenue une première défaillance : malgré la mise en service des pompes de secours, l'eau n'atteint pas les générateurs de vapeur car les vannes situées entre ces derniers et les pompes avaient été fermées pour procéder à un essai réglementaire des pompes. On avait oublié de les rouvrir ! Ces vannes furent rouvertes manuellement, huit minutes plus tard. Pendant ces huit minutes, en raison du dégagement de chaleur intense dégagée dans le combustible par la décroissance radioactive des produits de fission, la pression de l’eau du circuit primaire, insuffisamment refroidie, augmenta jusqu’à déclencher l’ouverture de la vanne de décharge du pressuriseur, dont le rôle était d’évacuer les excès de pression Lorsque le refroidissement par les générateurs de vapeur fut rétabli après huit minutes et que la pression du circuit primaire commença à descendre en dessous du seuil d’ouverture de la vanne de décharge du pressuriseur, une seconde défaillance se produisit : la vanne de décharge reçut l'ordre de se fermer mais resta coincée en position ouverte, engendrant une « brèche » dans la partie supérieure du pressuriseur.

Les opérateurs, regardant le voyant d’état de la vanne de décharge, ont vu « vanne fermée » : cette information était fausse, et c'est là le point crucial de l'accident. L'indicateur affichait en salle de commande l'instruction reçue par la vanne et non son exécution. Du fait de la brèche créée par la vanne ouverte, l’Injection de Sécurité d’eau à Haute Pression (ISHP) avait été automatiquement mise en service. Devant la montée rapide du niveau d'eau dans le pressuriseur, les opérateurs, qui croyaient la vanne de décharge fermée, ont arrêté manuellement après quelques minutes cette injection d'eau de sécurité. Contamination du bâtiment réacteur Le dysfonctionnement d’une vanne du pressuriseur joua un rôle crucial dans l’accident. Restée ouverte alors qu’elle aurait du être fermée, elle mit en en relation directe le circuit primaire avec le réservoir de décharge et donc l’enceinte du bâtiment, engendrant par cette brèche une vidange de la cuve du réacteur qui avait été stoppé. Les éléments de combustibles en vinrent à être découverts. Chauffés par les désintégrations radioactives, ils commencèrent à fondre et à relâcher des produits de fission qui transitèrent à travers la vanne de décharge du pressuriseur pour atteindre l'enceinte de confinement.

Une fusion du cœur et un rejet limité de radioactivité Jusqu’ici, il n’y avait pas eu de rejets de radioactivité, mais les opérateurs manquaient d’informations directes sur l’état du cœur du réacteur. Du fait la brèche et de la vidange du circuit primaire, l’intense dégagement de chaleur des désintégrations radioactives porta l’eau restant dans le cœur à ébullition. L'alimentation en eau étant coupée, le niveau d’eau dans la cuve baissa découvrant les assemblages de combustible, amorçant ainsi la fusion du cœur. Des produits de fission furent relâchés et parvinrent dans l'enceinte de confinement à travers la vanne de décharge du pressuriseur toujours ouverte : 2 heures et 14 minutes après le début de l'accident, l'alarme de radioactivité élevée dans l'enceinte se déclencha. Réalisant qu'il y avait dégagement de radioactivité par la vanne de décharge du pressuriseur, les opérateurs fermèrent une vanne d'isolement qui commandait la fuite, ce qui interrompit la décharge, mais aussi toute évacuation d'énergie alors que le cœur du réacteur continuait à s’échauffer. Les opérateurs remirent alors en service une pompe qui renvoya de l'eau refroidie par les générateurs de vapeur sur le combustible. La pression dans le circuit primaire augmenta alors dangereusement par vaporisation de l'eau au contact du combustible très chaud. Les opérateurs durent rouvrir momentanément la vanne d'isolement de la décharge du pressuriseur pour limiter le pic de pression dans le circuit primaire.

De nouvelles alarmes de radioactivité se déclenchèrent alors, dont certaines hors du bâtiment du réacteur. L’eau contaminée qui se déversait dans un puisard de l’enceinte de confinement était renvoyée par des pompes dans des réservoirs de stockage situés dans un bâtiment auxiliaire non étanche. Ces réservoirs débordèrent. De l’eau chaude contaminée se vaporisa dans le bâtiment, relâchant de l’iode et du xénon. Le xénon et la partie de l’iode non capturée par les filtres furent rejetés à l’extérieur le 30 mars. Réalisant entre-temps que le circuit primaire était quasiment vide, les opérateurs remirent en service l’alimentation de sécurité en eau et au bout de quatre heures, le cœur fut à nouveau refroidi non sans quelques difficultés. Environ dix heures après le début de l’accident, une détonation localisée, provoquée par l’accumulation d’environ 320 kg d’hydrogène, se produisit dans le bâtiment réacteur sans provoquer de dégâts. Cet hydrogène provenait de l’eau décomposée par l’oxydation à haute température du zirconium des gaines. Il faudra les douze heures suivantes pour évacuer du circuit primaire l'essentiel de la menace de l'hydrogène et les gaz de fission incondensables relâchés par le combustible. A vingt heures, le mercredi 28 mars 1979, l'accident proprement dit est terminé. Plusieurs jours seront cependant nécessaires pour éliminer l'hypothèse d'une explosion d'hydrogène.

Rejets de xénon L’isolement de l’enceinte de confinement destiné à bloquer les échanges entre le bâtiment réacteur et l’extérieur, limita les rejets dans l’environnement. Cependant une partie de la radioactivité présente dans l’enceinte lors de l’accident se retrouva piégée dans un puisard. Les pompes du puisard, pendant plusieurs heures, transportèrent dans des réservoirs de stockage d’un bâtiment auxiliaire de l’eau de plus en plus chargée en produits radioactifs. Ces réservoirs débordèrent, de la vapeur radioactive s’échappa. Le bâtiment auxiliaire n’était pas étanche et des radioéléments volatils (des gaz rares comme le xénon, un peu d’iode) furent rejetés à l’extérieur de la centrale.

La séquence des événements 1 - A t = 0, suite à des incidents, les pompes principales de circulation du circuit secondaire s'arrêtent ; du fait d'une erreur humaine, les vannes des pompes de secours sont restées fermées ; par conséquent : a) le groupe turbo-alternateur s'arrête automatiquement (la puissance du réacteur n'est donc plus évacuée), b) le refroidissement des générateurs de vapeur, interface entre le circuit primaire et le circuit secondaire, n'est plus assuré. 2 - La température et la pression augmentent dans le circuit primaire. A t = 3 s, la pression atteint 153 bars : la soupape de sécurité du pressuriseur du circuit primaire s'ouvre automatiquement, et l'eau sortant de la soupape s'évacue vers le réservoir prévu à cet effet. 3 - A t = 8 s, la pression atteignant 161 bars, le réacteur se met en arrêt d'urgence par chute des barres de contrôle ; la puissance tombe à quelques % de la puissance nominale, mais il reste néanmoins à évacuer cette puissance résiduelle. 4 - La pression redescend mais la soupape ne se referme pas automatiquement comme elle l'aurait dû (à 155 bars). Les opérateurs en salle de contrôle reçoivent l'information erronée selon laquelle la soupape est refermée. 5 - La pression du circuit primaire baisse pendant 2 minutes. Quand elle atteint 110 bars (t = 2min01s), le circuit d'injection de sécurité se met en route automatiquement.

6 - A t = 4min38s, les opérateurs, recevant des indications défaillantes sur le niveau du pressuriseur, arrêtent manuellement le circuit d'injection de sécurité. Plus d'une centaine d'alarmes se sont déclenchées en salle de commande, rendant la situation incompréhensible et ingérable. 7 - A t = 14min48s, le réservoir d'évacuation de la soupape du pressuriseur est plein ; dès lors, l'eau se déverse directement dans le bâtiment réacteur. 8 - Dans les 2 heures qui suivent : le circuit primaire continue de se vider, par la soupape, dans l'enceinte de confinement ; le haut du cœur commence à émerger de l'eau ; la température du combustible augmente, la gaine des crayons se dégrade chimiquement en produisant de l'hydrogène, les pastilles fondent et des éléments radioactifs sont relâchés dans le circuit primaire, et par suite dans l'enceinte de confinement. 9 - A t = 2h14 l'alarme de radioactivité élevée dans l'enceinte de confinement se déclenche ; les opérateurs comprennent qu'il s'agit d'un accident grave avec perte de refroidissement du cœur ; à t = 2h22 la fuite de la soupape est enfin identifiée. 10 - A t = 3h20 les opérateurs remettent en route l'injection de sécurité. 11 - A t = 3h45 le cœur est de nouveau sous l'eau. 12 - A t = 9h50 l'hydrogène explose dans l'enceinte de confinement, mais sans dégât notable.

13 - La situation se stabilise petit à petit, les pompes du circuit primaire sont remises en route à t = 15h49. 14 - Pendant trois jours, les spécialistes redoutent une explosion de l'hydrogène accumulé sous le dôme de l'enceinte de confinement, ce qui aurait des conséquences dramatiques pour les populations. Les autorités hésitent sur la nécessité d'une évacuation massive. Les informations données par l'exploitant de la centrale, par les journalistes et par les autorités, sont contradictoires. Finalement il est décidé le 30 mars d'évacuer les femmes enceintes et les enfants de moins de 2 ans dans un rayon de 8 km autour de la centrale. Dans un climat de panique, plus de 200 000 personnes fuient la région. Douze jours après l'accident, le gouverneur déclare que tout danger est écarté. La radioactivité relâchée à l'extérieur a été minime (gaz et vapeurs d'iode et de xénon essentiellement). 15 - Trois ans après la catastrophe, un robot équipé d'une caméra permet de mesurer l'étendue des dégâts : - 45% du cœur a fondu, dont une partie a coulé au fond de la cuve, qui heureusement a résisté. - 2000 m3 d'eau radioactive s'est répandue, par la soupape, dans l'enceinte de confinement en béton. 16 - La décontamination du site durera 14 ans, pour un coût de 1 milliard de dollars. Aucune conséquence directe n'a été démontrée en termes de cancers sur la population, en revanche les effets de la peur et du stress ont été bien réels sur la qualité de vie de nombreux habitants.

Améliorations et leçons tirées de Three Mile Island De nombreux équipements et systèmes de sécurité des réacteurs REP ont été revus (comme la vanne de décharge du pressuriseur) ou améliorés. Les composants (mesures de niveau, soupapes, …) sont périodiquement requalifiés. Les centrales sont maintenant équipées de dispositifs permettant d’éviter une explosion qui serait due à une accumulation d’hydrogène, comme celle engendrée lors d’une fusion du cœur. Les leçons tirées de l'accident ont abouti à tout un train de mesures. Les principales « mesures TMI » mises en œuvre à la suite de l'accident concernent : - L'interface homme machine : présentation ergonomique des consignes, lisibilité des pupitres, sélection et regroupement des indications importantes pour la sûreté ; - Entraînement et amélioration de la formation des opérateurs sur simulateur, y compris en situation de crise ; - L'organisation de la conduite à tenir après accident ; chaque opérateur a sa propre consigne, le superviseur en contrôle l'application, une fonction d'ingénieur de sûreté est mise en place ; l'organisation de crise au niveau des exploitants et des pouvoirs publics est redéfinie grâce à des exercices réguliers. Les installations sont maintenant régulièrement inspectées par les autorités de sûreté comme la NRC ou l’ASN en France. - Le renforcement de l'inspection des installations nucléaires. - La mise en place d'un programme de communication en temps de crise.

L'accident de Three Mile Island a constitué une prise de conscience à l'échelle mondiale du manque de sûreté des centrales nucléaires. Il a amené des changements importants comme : • Le renforcement de nombreux équipements et systèmes de sécurité. • La prise en compte du facteur humain comme élément primordial de la sécurité. A la suite de TMI, les systèmes d'alarmes en salle de contrôle ont été totalement modifiées, les procédures de gestion de crise complètement repensées ; les opérateurs sont désormais entraînés systématiquement sur simulateurs.

TMI : nettoyage ; après l’accident : les opérations d'assainissement Le nettoyage du site nucléaire endommagé de Three Mile Island dura près de 14 ans et coûta près d’un milliard de dollars. L’assainissement du site représenta un défi particulièrement difficile à relever du point de vue de la technologie et de la radioprotection. Plus de 1000 travailleurs qualifiés contribuèrent à son succès. Il fallut décontaminer toutes les surfaces touchées. L'eau utilisée et stockée pendant le nettoyage a dû être débarrassée des éléments radioactifs dissous. Il fallut surtout retirer de la cuve du réacteur environ 100 tonnes de combustible endommagé – tout ceci sans faire courir de risques aux équipes de nettoyage ou au public. Le plan d'assainissement élaboré dès les lendemains de l’accident fut réalisé durant ces années en respectant les impératifs de sécurité radiologique. Son exécution commença en août 1979, avec les premières expéditions des déchets de basse radioactivité générés par l’accident à Richland dans l’état de Washington. Dès le début de l'assainissement, l'unité 2 endommagée de la centrale fut complètement isolée de l’unité 1 restée intacte et qui continuait à produire de l’électricité.

Une première inspection du bâtiment réacteur eut lieu en 1979. En 1980 le relâchement contrôlé de 1 700 TBq (ou 43 000 Curies) du Krypton-85 du bâtiment réacteur, rendit possible l’entrée en combinaison étanche dans ce bâtiment. Ce produit de fission gazeux, dont la durée de vie est longue (10,7 ans de période) est encore présent dans l’atmosphère du bâtiment. Bien que le krypton soit un gaz noble, inerte chimiquement et biologiquement, il présente un danger pour les équipes du fait de sa concentration, d’où la nécessité d’un relâchement contrôlé. En 1981, on procéda à la décontamination de 23 000 m3 d’eau du bâtiment réacteur. L’eau pompée du bâtiment passa à travers divers filtres, échangeurs d’ions pour être purifiée des produits radioactifs dissous, en particulier des isotopes du césium et de strontium dont l’activité prédomine dans les premières années, Cette eau fut ensuite reprise dans une seconde étape pour être déminéralisée, débarrassée de ses microscopiques particules (polissage), puis remise à disposition après contrôle de sa radioactivité.

Nettoyages et entreposage de la cuve Ces deux photographies montrent deux phases des opérations : le nettoyage par des équipes en combinaisons étanches du bâtiment réacteur, après le relâchement contrôlé en 1980 du krypton85 radioactif ; l’entreposage de la cuve qui allait permettre la récupération du combustible usé de haute activité.

En mai 1982, l’intérieur de la cuve est inspecté avec une caméra : c’est le « Quick Look » qui révéla un vide de 9,5 m2 avec un creux de 2 m. La cuve sera ouverte en juillet 84. Quelques mois plus tard, en février 1985, on put procéder à une exploration du fond de cuve qui montra 20 tonnes de débris et un corium solidifié. Le débit de dose s’élevait dans le bâtiment réacteur à 3 0,5 mSv/h, c’est à dire qu’il suffisait de cinq minutes pour y recevoir une dose équivalente à un an d’exposition à la radioactivité naturelle.

Les dégâts subis par les éléments combustibles se révélèrent très supérieurs à ceux envisagés lors de la conception pour les accidents les plus graves des réacteurs REP.. On constatera en 1985 que 45 % du combustible avait fondu, entraînant avec lui des matériaux de gaines et de structures, formant ce qu'on appelle un « corium ». Une partie de ce corium, 20 tonnes environ, s’était écoulée sous forme liquide dans le fond de la cuve, sans heureusement la traverser, grâce peut-être à la formation d’un espace entre le corium et le fond de cuve qui aurait permis une circulation d’eau de refroidissement.

A la fin de cette année 1985 débuta l'étape cruciale de l'assainissement, la récupération du combustible endommagé et très radioactif de la cuve du réacteur. Durant cette opération, le combustible endommagé est resté sous eau. Ce n’est qu‘à partir d’octobre 1985, après six années de préparatifs, que les opérateurs réussirent à transférer, au moyen d’outils télécommandés, les assemblages dans des conteneurs adaptés et étanches. Au total, 342 assemblages de combustible furent expédiés dans des conditions sûres dans les installations de l'Idaho National Laboratory en vue d’un entreposage à long terme. En juillet 1986, les débris du cœur furent évacués vers les mêmes installations. Janvier 91 : le résidu d’eau demeurant encore dans le réacteur TMI-2 fut pompé et les effluents liquides traités par évaporation. Des mesures furent prises pour le combustible (environ 1 %) et les débris restant dans des parties inaccessibles de la cuve du réacteur. Les opérations de traitements des eaux se terminèrent en août 93. Après une enquête publique, le site fut « mis à disposition ». Avec la fin de l’assainissement, le site de l’unité 2 fut classé en décembre 1993 comme ayant atteint le stade de « surveillance à long terme ».. Aucune utilisation de la partie nucléaire de la centrale n’était prévue. Les systèmes de ventilation et l'eau de pluie sont depuis surveillés et le matériel nécessaire pour maintenir à long terme la sécurité entretenu.

10 Catastrophe nucléaire de Tchernobyl La catastrophe nucléaire de Tchernobyl, également désignée comme l'accident nucléaire de Tchernobyl, est un accident nucléaire classé au niveau 7, le plus élevé, sur l'échelle internationale des événements nucléaires (INES) qui a eu lieu le 26 avril 1986 dans la centrale Lénine, située à l'époque en RSS d'Ukraine en URSS.

Chronologie Essai malencontreux, engrenage d’erreurs et violations de règles L’accident s’est produit à l’occasion d’un arrêt du réacteur en dehors de son fonctionnement normal. Il avait été décidé de profiter d’un arrêt de maintenance planifié pour procéder à un test de l’alimentation électrique de secours. L’accident est survenu lors de ce test malencontreux. L’expérience avait pour objet de déterminer si le refroidissement du cœur pouvait être assuré en cas de perte de l'alimentation électrique. En effet, après l’arrêt des réactions de fission, il faut continuer de refroidir le cœur du fait de l’important dégagement de chaleur des désintégrations radioactives. En cas de panne, l’inertie des volants de la turbine fournirait-elle encore assez d'énergie électrique aux pompes de circulation de l'eau de refroidissement en attendant le démarrage des groupes diesel de secours ? Des tests similaires avaient été réalisés en 1982, 1984 et 1985 mais les résultats n'avaient pas été concluants. Le contexte et la journée du 25 avril 1986. Le chargement du combustible des RBMK s’effectuant en continu, leurs arrêts sont de courtes durées. Lors d’un arrêt, la baisse de la puissance est progressive. Le 25 avril au matin, débute la procédure d'arrêt programmé. Mais le test est retardé d’environ 12 heures à la demande du centre de distribution électrique de Kiev : entre 13h et 23h, le réacteur est maintenu à la puissance moitié de 1600 MWth. Le temps dévolu au test se raccourcit, car le 1er mai est proche, mettant les équipes sous pression. Vers 23h, la réduction de puissance reprend.

A minuit, changement d’équipe de pilotage. La nouvelle équipe descend la puissance au dessous de 700 MWth, seuil au dessous duquel le réacteur entre dans une zone d’instabilité et devient difficile à contrôler. A 0h 28, le niveau de 500 MWth est atteint. Une tentative de stabilisation de la puissance à 500 MWth échoue, avec une chute brutale à 30 MWth. A ce stade, il convenait d’arrêter le réacteur pour 24 heures, le temps de laisser disparaître le xénon-135, un produit de fission qui empêche le redémarrage. Le test était sans enjeu autre que technique. Le temps venant à manquer, il aurait fallu y renoncer. Un empoisonnement du réacteur ... Lors d’un arrêt ou d'une baisse de puissance rapide, un produit de fission, le Xénon-135, s’accumule transitoirement dans le réacteur. Ce Xénon-135 , très gourmand en neutrons, se comporte comme un poison pour la fission nucléaire. Il met un certain temps à disparaître et gêne pendant plusieurs heures une remontée en puissance. Les opérateurs de Tchernobyl n’attendirent pas la disparition de ce poison après la chute brutale de puissance de la nuit du 25-26 avril. Pour remonter rapidement en puissance malgré l’empoisonnement, ils retirèrent du cœur des barres absorbantes de neutrons et rendirent le pilotage du réacteur plus difficile.

L’engrenage du 26 avril Néanmoins, les opérateurs décident de remonter la puissance afin d’effectuer l’essai prévu. A partir de cet instant commence l’engrenage fatal d’erreurs et de violations de sécurité qui conduisirent à l’accident. Pour remonter la puissance malgré l’empoisonnement au xénon, des barres de contrôle sont retirées : le nombre effectif de barres insérées tombe en dessous de la limite de sûreté . Vers 1 heure du matin, la puissance est remontée à 200 MWth mais il n’y a presque plus d’absorbants dans le cœur. A ce stade l’état du réacteur n’est plus en conformité ni avec les conditions du test ni avec les règles de sûreté. Un peu plus tard, à 1h15, les opérateurs désactivent, pour continuer l’essai, des systèmes d’arrêt d’urgence et de refroidissement. Les évènements s’accélèrent. A 1h:23:04 les vannes d’alimentation de la turbine en vapeur sont fermées provoquant une augmentation de la température dans le circuit primaire. Les barres de contrôle automatique sont retirées du cœur. La production de vapeur augmente considérablement pour devenir incontrôlable à 01:23:25. Le système automatique d’arrêt d’urgence étant désactivé, les opérateurs procèdent à l’arrêt manuel du réacteur à 01:23:40. L’insertion des barres absorbantes de neutrons est trop lente. Un énorme à-coup de puissance survient 4 secondes plus tard, évalué à 100 fois la puissance nominale. L’impulsion de pression dans les tubes de force contenant les assemblages de combustible, provoque leur rupture en grand nombre (01:23:49). A 1h 24, c’est l’explosion du réacteur.

Les opérateurs de l’équipe du 26 avril 1986 étaient expérimentés, malgré leurs erreurs. Ils payèrent un lourd tribut. Un seul survit aujourd’hui des quatre membres de l’équipe. L’un d'eux mourut au bout de quelques semaines. Défauts de conception (RBMK) Un accident aggravé par des défauts de conceptions L’analyse à chaud de l'accident de Tchernobyl par l'AIEA en août 1986 insistait sur la responsabilité des opérateurs, mais les évaluations ultérieures y associent un second facteur important, les défauts de conception du réacteur. 1) Un coefficient de vide positif à faible puissance-. Le coefficient de température (appelé aussi coefficient de vide) indique comment un réacteur réagit naturellement à une augmentation ou une diminution de température. Ce facteur est lié à la quantité de neutrons absorbés en cours de ralentissement et donc perdus pour de nouvelles fissions. Si le coefficient est positif, une augmentation ou diminution de température sera amplifiée : sans dispositif de contrôle le réacteur sera instable.

Les réacteurs RBMK sont caractérisés à faible puissance par un « coefficient de température positif ». Le combustible et l’eau de refroidissement qui devient vapeur contribuent d’une manière antagoniste à ce coefficient, en capturant des neutrons durant leur ralentissement. Le coefficient de température négatif du combustible va dans le bon sens : quand la température augmente, davantage de neutrons sont capturés du fait de l’agitation thermique (effet Doppler) et donc perdus pour la fission. Le coefficient de température de l’eau de refroidissement est lui positif. Quand elle se vaporise l’eau devient moins dense, davantage de neutrons sont disponibles pour la fission : le dégagement d’énergie s’emballe. La vaporisation de l’eau favorise les fissions Une vaporisation de l’eau de refroidissement à la suite d’une élévation de température accrot le nombre de neutrons disponibles pour la fission, l’énergie dégagée et donc la température. Cet effet déstabilisant est à l’origine d’une instabilité à faible puissance des RBMK. Quand les neutrons traversent le mélange eau-vapeur, une petite partie est perdue du fait de captures par les protons des atomes d’hydrogène. Cette perte (exagérée sur la figure) est plus importante pour l’eau liquide, du fait de sa densité, que pour la vapeur. L’augmentation de la proportion de vapeur signifie davantage de neutrons pour la fission.

La vaporisation de l’eau dans un RBMK génère donc une réactivité positive, d’où l’appellation coefficient de vide, A puissance nominale, le coefficient de température négatif du combustible l’emporte sur celui positif de l’eau de refroidissement. A puissance réduite, c’est le contraire : le coefficient de vide positif de l’eau l'emporte. Le réacteur devient naturellement instable et sujet à de brusques à-coups de puissance. Cette instabilité a entraîné d’abord une chute de puissance et surtout plus tard l’à-coup fatal. 2) Un système d’arrêt d’urgence lent et peu fiable -. Le second défaut majeur fut un système d’arrêt d’urgence lent et peu fiable. Lors de l’essai, un grand nombre de barres avaient été retirées pour remonter la puissance, alors que selon les consignes d'exploitation, il fallait laisser au moins l’équivalent de 30 barres de commande insérées pour garder le contrôle du réacteur et contrecarrer le coefficient de température positif ! Seules six à huit barres avaient été laissées. On utilise des barres de commandes, constituées d’une matière très absorbante de neutrons pour stopper en cas d’urgence les réactions de fission. De telles barres doivent être insérées rapidement. Dans les RBMK de Tchernobyl, l’insertion de ces barres était trop lente. De plus l’extrémité inférieure était en graphite, un matériau qui ralentit les neutrons et favorise les fissions. C’est ainsi que la barre de gauche, en début d’insertion dans le cœur du réacteur, accélère les fissions, contrairement à l’effet désiré, alors que les deux autres barres bien insérées les stoppent.

Quand la puissance s’est mise à monter brusquement, il aurait fallu introduire, rapidement, suffisamment de barres absorbantes. Or dans le cas du RBMK de Tchernobyl, la chute de ces barres était lente – environ 18 secondes – et peu fiable. De plus, elle commençait par accélérer la réaction en chaîne avant de l’étouffer : l’extrémité des barres était en graphite, un matériau qui modère les neutrons sans les capturer et donc favorise les fissions. Absence d’enceinte de confinement Enfin, les RBMK ne disposent pas d'enceinte de confinement comme celle qui entoure un réacteur de type REP. En revanche, les RBMK disposent de plusieurs compartiments étanches, destinés à assurer le confinement de différentes zones du réacteur. A l’époque de Tchernobyl, ce système avait été conçu pour faire face à la rupture d'un tube de force. Les ruptures multiples de tubes de force n'étaient donc pas couvertes par cette conception. Le hall situé juste au-dessus du réacteur jumeau No.3. Le réacteur se trouve sous la grande dalle polygonale du premier plan. Des plaques absorbantes de neutrons font office de "bouchons" au dessus des tubes de force sous pression contenant les éléments combustibles situés quelques mètres plus bas. Cette dalle d’environ 2000 tonnes et une autre installée sous le réacteur constituent l’essentiel du confinement. En Occident, la quasi-totalité des centrales sont protégées par une double coque de ciment et d’acier, séparées d’environ deux mètres, qui s'avèrent très utiles pour confiner les émissions radioactives.

Chronologie des événements 25 avril 1986, 13 h 05 : Dans le cadre de l'expérience prévue, la puissance du réacteur est stabilisée autour de 1 600 MW. 23 h 10 : La puissance est encore abaissée à 500 MW. Cependant, la puissance de sortie chute brutalement à 30 MW, ce qui provoque un empoisonnement du réacteur au xénon. Les opérateurs essaient alors de rétablir la puissance, mais le xénon-135 accumulé absorbe les neutrons et limite la puissance à 200 MW. Pour débloquer la situation, les opérateurs retirent les barres de carbure de bore, qui servent à contrôler la température du réacteur, au-delà des limites de sécurité autorisées. 26 avril 1986, entre 01 h 03 et 01 h 07 : Deux pompes supplémentaires du circuit de refroidissement sont enclenchées pour essayer de faire augmenter la puissance du réacteur. C'est le dernier moment pour arrêter le réacteur et le sauver. 01 h 19 : Pour stabiliser le débit d'eau arrivant dans les séparateurs de vapeur, la puissance des pompes est encore augmentée. Le système demande l'arrêt d'urgence. Les signaux sont bloqués et les opérateurs décident de continuer. 01 h 23 : L'essai prévu commence. Les vannes d'alimentation en vapeur de la turbine sont fermées, ce qui a fait augmenter la pression dans le circuit primaire.

01 h 23 et 40 s : L'opérateur en chef ordonne l'arrêt d'urgence. Les barres de contrôle sont descendues, sans grand effet : en effet, le réacteur est déjà bien trop chaud, ce qui a déformé les canaux destinés aux barres de contrôle ; celles-ci ne sont descendues qu'à 1,50 m au lieu des 7 m normaux. 01 h 23 et 44 s : La radiolyse de l'eau conduit à la formation d'un mélange détonnant d'hydrogène et d'oxygène. De petites explosions se produisent, éjectant les barres permettant le contrôle du réacteur. « En 3 à 5 secondes, la puissance du réacteur centuple ». Les 1 200 tonnes de la dalle de béton recouvrant le réacteur sont projetées en l'air et retombent de biais sur le cœur de réacteur, qui est fracturé par le choc. Un incendie très important se déclare, tandis qu'une lumière aux reflets bleus se dégage du trou formé. Les techniciens présents sur place, ainsi que Brioukhanov réveillé à 1 h 30, ne saisissent pas immédiatement l'ampleur de la catastrophe. Ce dernier appelle le ministère de l'Énergie à 4 h en déclarant que « Le cœur du réacteur n'est probablement pas endommagé ». Il reçoit pour ordre de maintenir le refroidissement par eau du réacteur; cet ordre, que Brioukhanov persistera à appliquer toute la journée, n'aura pour effet que de libérer plus de radioéléments dans l'atmosphère et de noyer les installations souterraines communes aux réacteurs 3 et 4, menaçant gravement le fonctionnement et l'intégrité du réacteur 3. L'ingénieur en chef responsable du réacteur 3 prendra, au cours de la journée et contre les directives de Brioukhanov, la décision de faire passer ce réacteur en arrêt à froid, permettant ainsi de le sauver d'une destruction certaine, au vu de la destruction progressive des installations.

Incendie de Tchernobyl : un violent incendie, un enfer de flammes et de radioactivité La déflagration qui soulève la dalle supérieure du réacteur, laisse le réacteur à nu. Un rayonnement intense, mortel, s’échappe des ruines radioactives. Il n’y a plus de refroidissement. L’intense dégagement de chaleur des désintégrations radioactives enflamme l’importante masse de graphite qui servait à ralentir les neutrons. Un gigantesque incendie se déclenche, ajoutant à la tragédie. Une description fidèle de cet incendie peut être trouvée dans l’excellent ouvrage de P.Reuss et M.Chouha " Tchernobyl, 25 ans après … Fukushima ", paru en 2011 (P.139), : « Un incendie gigantesque est généré par l’explosion. La grande quantité de graphite qui se trouve dans le réacteur alimentera longtemps les flammes. Pendant les premières minutes qui suivirent, voire même les premières heures, c’est justement cet incendie qui monopolisera les attentions. Les premiers pompiers arrivent sur les lieux en moins de 10 minutes, mais réalisent rapidement qu’ils se trouvent devant une situation peu ordinaire. Avec les moyens dérisoires dont ils disposent pour intervenir dans des conditions aussi exceptionnelles, ils se battent comme ils peuvent dans cet environnement apocalyptique. Des renforts accourent des villes voisines. Avec le sens aigu du devoir et la touche patriotique qui les caractérise, ces hommes vont tout donner d’eux-mêmes de la manière la plus courageuse. Plusieurs heures durant, il vont évoluer dans ce milieu hautement radioactif dont les effets ne se font pas sentir sur le coup, complètement occultés par l’enfer des flammes qui cernent de toutes parts. Et vers 5 heures du matin, c’est bien leur courage qui l’emporte : l’incendie principal est maîtrisé ».

Après l’explosion, un violent incendie L’explosion du réacteur de Tchernobyl qui survint le 26 avril 1986, fut suivi d’un violent incendie alimenté par la chaleur dégagée et les tonnes de graphite présentes dans le cœur du réacteur. L’intervention des pompiers fut héroïque. A l’enfer des flammes répondait l’enfer d’une très forte radioactivité. : 28 des pompiers qui maîtrisèrent l’incendie principal payèrent de leur vie cette intervention.

Après l’extinction de l’incendie principal, des foyers persistèrent pendant une dizaine de jours. Durant tout ce temps, le panache de fumées émergeant du réacteur emportait en altitude poussières et gaz radioactifs. Ces poussières et gaz furent ensuite dispersés et véhiculés au gré des vents vers l’Europe du nord et de l’ouest. Du fait du relief et des pluies, les poussières radioactives du nuage de Tchernobyl, furent rabattues au sol contaminant principalement l’Ukraine, la Biélorussie et la Russie. Le personnel de la centrale et les pompiers intervenus lors de l'accident ont subi des doses très élevées principalement externes qui s'échelonnent entre une fraction de gray et plus de 10 Grays (Gy). Une trentaine de pompiers de Tchernobyl firent le sacrifice de leur vie et moururent des suites de leurs brûlures et de leur exposition aux rayonnements.. Leurs décès sont survenus dans les jours ou semaines qui ont suivi l'accident du fait d'un syndrome d'irradiation aiguë, consécutifs aux doses de plusieurs grays reçues. Un monument sera érigé à leur mémoire, juste à côté de leur caserne, à l’intérieur de la zone d’exclusion. Une fois l’incendie éteint des tonnes de matériaux divers, furent déversés sur les ruines du réacteur, afin d’enterrer les produits radioactifs et limiter le rayonnement très intense émis. Plus de 5 000 tonnes de ces matériaux, principalement du plomb, du bore et du sable, furent larguées par hélicoptères au cours des semaines qui suivirent. Mal protégés, les pilotes recevront des doses trop importantes de rayonnements. Plusieurs d’entre eux mourront dans les jours suivants.

Monuments aux pompiers de Tchernobyl L’explosion du réacteur déclencha un violent incendie dont la grande quantité de graphite qui se trouvait dans le cœur alimenta pendant une semaine les flammes. Les premiers pompiers arrivèrent dans les 10 minutes, vite rejoints par des renforts accourus des villes voisines. Durant des heures, ces hommes héroïques évoluèrent cernés des flammes dans un milieu très radioactif avant de maîtriser l’incendie principal. Une trentaine de ces pompiers moururent de leurs brûlures et de leur exposition à un rayonnement intense. Un monument en leur honneur a été érigé près du site de Tchernobyl.

La lutte contre l'incendie (26 avril 1986) Afin d'éteindre l'incendie, Brioukhanov appelle simplement les pompiers. Ceux-ci, venus de Pripyat, située à 3 km de la centrale, interviennent sur les lieux sans équipement particulier. Cependant, les matières nucléaires ne peuvent être éteintes avec de l'eau. Les pompiers, gravement irradiés, sont évacués et mourront pour la plupart. Les témoignages sur leur souffrance et les conditions de leur mort ont été recueillis par la journaliste biélorusse Svetlana Alexievitch. Le principal danger de l'incendie est que les dégâts qu'il occasionne à la structure risquent de provoquer l'effondrement du magma en fusion (corium) dans les parties souterraines qui sont noyées. Un contact entre l'eau et le réacteur en fusion provoquerait une explosion qui disperserait d'immenses quantités de matière radioactive. Des plongeurs sont envoyés afin de fermer les vannes et installer un système de pompage pour vider les salles noyées. L'incendie finira par être éteint par projection dans le brasier de sacs de sable et de plomb depuis des hélicoptères.

Largages par hélicoptère Le personnel de l'usine, les pompiers et des militaires luttèrent pour mettre le réacteur sous contrôle. Des hélicoptères furent utilisés pour déverser des tonnes de sable et de matériaux divers sur les ruines du réacteur, afin de réduire la dispersion des produits radioactifs et réduire l’exposition directe aux rayonnements émis. Les pilotes d’hélicoptères firent partie des premiers liquidateurs. Mal protégés, ils reçurent des doses importantes de rayonnements, plusieurs d’entre eux payeront de leur vie leur intervention.

L'étouffement du cœur du réacteur en fusion (26 avril - 14 mai 1986) L'incendie éteint, les techniciens de la centrale prennent conscience de l'étendue des dégâts provoqués par la retombée du toit sur le réacteur, qui est désormais fissuré. Le graphite toujours en combustion, mélangé au magma de combustible qui continue de réagir, dégage un nuage de fumée saturé de particules radioactives. Il faut donc au plus vite étouffer la réaction nucléaire incontrôlée. Ce n'est qu'ensuite que le réacteur pourra être isolé par un sarcophage. La première opération est réalisée grâce à un ballet d'hélicoptères militaires de transport mené par plus de mille pilotes. Il s'agit de larguer dans le trou béant 5 000 tonnes de sable, d'argile, de plomb, de bore, de borax et de dolomite, un mélange qui permettra de stopper la réaction nucléaire et d'étouffer l'incendie du graphite afin de limiter les rejets radioactifs. La mission est difficile, car elle consiste à larguer les sacs à une hauteur de 200 m dans un trou de 10 m de diamètre environ, et ceci le plus vite possible, car malgré l'altitude les personnes reçoivent 15röntgens en 8 secondes (3 000 fois la dose maximale tolérée par an en France pour une personne). Dans la seule journée du 30 avril, 30 tonnes de sable et d'argile sont ainsi déversées sur le réacteur.

Sur le toit et aux alentours immédiats de la centrale, une cinquantaine d'opérateurs sont chargés dans les premiers jours suivant la catastrophe de collecter les débris très radioactifs. Chaque opérateur ne dispose que de 90 secondes pour effectuer sa tâche. Il est exposé à cette occasion à des niveaux de radiations extrêmement élevés dont ne le protègent guère des équipements de protection dérisoires, principalement destinés à l’empêcher d’inhaler des poussières radioactives. Un grand nombre de ces travailleurs en première ligne ont développé par la suite des cancers et sont morts dans les années qui ont suivi. Ces travailleurs ont été surnommés les liquidateurs. Il a aussi été fait appel à des robots télécommandés français, suisses et allemands mais ceux-ci sont tous tombés en panne à cause des niveaux de radiation exceptionnellement élevés. Cependant, le réacteur est toujours actif et la dalle de béton qui le soutient menace de se fissurer. Plus grave, l'eau déversée par les pompiers pour éteindre l'incendie a noyé les sousstructures, menaçant ainsi l'intégrité et le contrôle des 3 autres réacteurs de la centrale. Le Professeur Vassili Nesterenko, éminent scientifique nucléaire russe, diagnostique que si le cœur en fusion atteint la nappe d'eau accumulée par l'intervention des pompiers, une explosion de vapeur est susceptible de se produire et de disséminer des éléments radioactifs à une très grande distance. En effet, la fusion du combustible et des structures métalliques a formé un corium sur le plancher situé sous le réacteur. L'évacuation de la population est recommandée et une nouvelle équipe de pompiers envoyée pour évacuer cette eau en ouvrant les vannes de vidange de la piscine de suppression située sous le plancher de la cavité du réacteur. Ceux-ci travailleront toujours sans protection et y laisseront leur vie.

Premier nettoyage sur le site Ces images sont extraites du film pris lors de la première intervention sur la centrale. Elles disent mieux que des mots, l’héroïsme des équipes de liquidateurs qui furent les premiers à intervenir, l’urgence, les moyens dérisoires face à l’ampleur de la catastrophe, l’absence poignante de radioprotection,

Sous le cœur du réacteur en fusion, la dalle de béton menace de fondre. Au cours de la seconde quinzaine de mai, on fait appel à environ 400 mineurs des mines des environs de Moscou et du bassin houiller du Donbass pour creuser un tunnel de 167 mètres de long menant sous le réacteur afin d'y construire une salle. Un serpentin de refroidissement à l'azote doit y être installé pour refroidir la dalle de béton du réacteur. Les mineurs se relaient 24 heures sur 24 dans des conditions très difficiles dues à la température élevée et au niveau très important de radiation (Le débit de dose à la sortie du tunnel est d’environ 200 röntgens par heure. La radioactivité dans le tunnel lui-même est raisonnable mais la chaleur rend le travail difficile). Le circuit de refroidissement ne fut jamais installé et finalement remplacé par du béton pour ralentir et stopper la descente du cœur fondu. Grâce à ces travaux, le niveau de radiation baissera momentanément avant de s'élever à nouveau. Ce n'est que le 6 mai que la radiation absorbée en 8 secondes chute enfin à 1,5 röntgen. Après cette date, ce sont encore 80 tonnes de mélanges qui seront déversées. Valeri Legassov, un haut fonctionnaire soviétique chargé des questions nucléaires, se suicide en voyant la manière dont l'accident a été géré par les autorités, et publie à titre posthume un article dans la Pravda.

Écroulement final du cœur Le 6 mai, l'émission du réacteur tombe en moins de vingt minutes à 1/50 de sa valeur précédente, puis à quelques curies par jour. L'explication n'en sera connue qu'en 1988, suite aux forages horizontaux faits à cette date à travers le bloc 4 par l'institut Kurtchatov : le fond du réacteur avait cédé d’un coup, et le cœur fondu en lave liquide s’était écoulé puis définitivement solidifié 20 m plus bas dans les infrastructures, dans la piscine de suppression de pression qui avait heureusement été vidée. La réalisation du sarcophage et la décontamination de la zone (14 mai 1986 – décembre 1988) Dans les mois qui ont suivi, plusieurs centaines de milliers d'ouvriers (600 000 environ), les « liquidateurs » sont venus d'Ukraine, de Biélorussie, de Lettonie, de Lituanie et de Russie pour procéder à des nettoyages du terrain environnant. Leur protection individuelle contre les rayonnements était très faible, voire nulle. La décontamination était illusoire dans la mesure où personne ne savait où transférer le terrain contaminé. Selon Viatcheslav Grichine, membre de l'Union Tchernobyl, principale organisation des liquidateurs, sur 600 000 liquidateurs, « 25 000 sont morts et 70 000 restés handicapés en Russie, en Ukraine les chiffres sont proches et en Biélorussie 10 000 sont morts et 25 000 handicapés »

Le réacteur accidenté Une fois le premier danger passé, le confinement de la radioactivité devint le principal défi à relever. Des milliers de liquidateurs furent mobilisés pour nettoyer les abords et construire une vaste structure d’acier et de béton au dessus de réacteur, le sarcophage,. Il fallait le sceller hermétiquement et le mettre à l’abri du vent et à la pluie afin de confiner la radioactivité.

Intérieur du sarcophage Cette image, de qualité médiocre mais rare, date probablement de la construction ou peu après. Elle montre un aspect de l’intérieur du sarcophage. Les gravats, les poutrelles de béton ont été entassés à la hâte.

Le sarcophage terminé Silhouette devenue familière, le sarcophage qui recouvre les ruines du réacteur accidenté fait maintenant partie du paysage de Tchernobyl, avec au premier plan un monument.

La ville morte de Pripiat, territoire interdit pour des siècles :

A gauche, le montage du sarcophage en automne 1986. Au centre, aspect du sarcophage enveloppant tout le complexe en décembre 1999. La photographie est prise de l'endroit le plus proche de la centrale accessible aux "touristes". Vous rapprocher du bâtiment vous expose à des doses supérieures à 300 mSv/h et nécessite une protection spéciale. Malgré son aspect robuste, le sarcophage d'acier s'effrite et n'est pas hermétique. Il devra être renforcé et même recouvert d'un second sarcophage en 2015. A droite, coupe verticale du réacteur N° 4 en l'état actuel.

Dimensions impressionnantes, le stade de France pourrait presque tenir dedans Simulation mise en place du sarcophage

http://www.hilliontchernobyl.com/Tcherno4.htm

Rejets radioactifs : les sources d'irradiations et de contaminations L'explosion du réacteur a entraîné des rejets radioactifs variés. Au total, on estime à près de 12 milliards de GBq (gigabecquerels), l'activité initiale des rejets qui ont été relâchés durant 10 jours dans l'environnement. Le panache radioactif, entraîné par les masses d'air jusqu'à 10 000 mètres d'altitude et dérivant au gré des vents, a disséminé sur la plupart des pays d'Europe des radioéléments tels que l'iode-131, le césium-134 et le césium-137. Du fait de sa courte période (8 jours), l'iode 131 a rapidement disparu. Aujourd'hui, on décèle toujours la radioactivité due au césium-137. La grande majorité des éléments radioactifs dispersés à Tchernobyl étaient à courte période. Très actifs et dangereux lors de la catastrophe, comme l'iode-131, ils ont rapidement disparu. Les éléments qui subsistent 15 ans après l'accident, comme le césium-137 et le strontium-90, ne représentent que 1 % de l'activité des rejets initiaux. Le strontium qui n'émet pas de rayons gamma ne s'est pas propagé au loin. Reste le césium-137, moins toxique que l'iode, mais dont les effets diminuent lentement avec le temps.

Parcours des rejets de Tchernobyl Grâce aux données mises en commun par les pays européens, il a été possible de reconstituer le trajet des poussières radioactives. La plus grande partie de la radioactivité relâchée s’est retrouvée dans les rejets émis le 26 avril 1986 qui, après s’être dirigés vers les pays scandinaves se rabattront ensuite vers l’est et le sud. Les rejets du 27 avril poussés vers l’ouest aborderont la France par l’est et le sud-est et traverseront le territoire entre le 30 avril et le 5 mai. Les trajets émis après le 27 avril contamineront l’est et le sud de l’Europe.

De nombreuses mesures ont permis de reconstituer la carte de la contamination au sol au moment de l’accident. Un bon étalon de cette contamination est l’activité du césium-137 exprimée en kilobecquerels (kBq) par mètre carré, un radioélément significatif car encore présent aujourd’hui.Environ 45% du césium rejeté par l'explosion s'est déposé dans les Etats de l'ex-URSS, la Biélorussie étant la plus touchée : plus de 23% du territoire fut contaminé, c'est-à-dire qu'il a reçu plus d'un millioniéme de Curie ou 37 kBq/ par mètre carré. Certaines régions ont même enregistré plus de 1500 kBq/m2. En Europe de l'Ouest, c'est en Autriche, en Allemagne, en Italie et en Scandinavie que les dépôts mesurés furent les plus élevés (quelques kBq/m2). En France, les dépôts les plus importants, dans l'Est du pays, n'ont pas dépassé les 6 kBq/m2, alors qu'il sont restés inférieurs à 750 Bq/m2 dans l'ouest du pays. Une activité de 6 kilobecquerels est un peu inférieure aux 8 kBq émis par notre corps.

Répartition des surfaces contaminées La répartition en surfaces du degré de contamination au sol (exprimée en kilobecquerels de césium-137 par mètre carré) varie beaucoup d'une partie de l'Europe à l'autre. En France, plus de 52 % du territoire a reçu moins de 1 kbq/m2 et les contaminations au-dessus de 10 kbq/m2 constituent l'exception. Les contaminations en Autriche, par suite du relief et des pluies, sont beaucoup plus élevées. Un cas extrême est celui de la Biélorussie très exposée en raison de la proximité de Tchernobyl.

Les dépôts se sont répartis de manière très inégale en taches de léopard. Des « pics » de dépôts radioactifs (quelques dizaines de kBq/m2 de césium-137) ont été observés localement en France du fait l'influence des précipitations et en raison du relief. Par exemple, le passage des masses d'air contaminées sur le massif alpin pendant un épisode de fortes pluies a donné lieu en altitude à des dépôts de neige contaminée. Ces dépôts, lorsqu'ils se sont produits sur des névés de printemps, ont pu se concentrer du fait de la dynamique de fonte propre aux névés et sont à l'origine de la concentration du césium sous la forme de points chauds.

Ce sont les pluies qui ramènent au sol les poussières radioactives donnant à la carte un aspect de peau de léopard. En France, les contaminations au sol les plus importantes ont concerné 180 communes de l’est du pays qui ont reçu des précipitations supérieures à 40 mm entre le 1er et le 5 mai 1986. Dans ces communes, dont 70 en Corse orientale, 50 dans le Jura et 30 dans la Drôme, les dépôts ont pu dépasser 30 kilobecquerels par mètre carré de césium-137 (NB : l’activité du corps humain est de 8 kBq). IPSN

Par ailleurs, l'interception des aérosols par le feuillage, puis la chute des feuilles, ont entraîné une contamination de la litière de certaines forêts, comme dans les Vosges. Le césium s’enfonçant lentement, cette contamination se retrouvait concentrée dans les cinq premiers centimètres de la litière végétale plus de douze ans après l'accident. Ces concentrations restent très localisées et très inférieures à celles observées en Ukraine et Biélorussie.

11 Fukushima : une agression de la nature, des erreurs humaines … L'accident nucléaire de Fukushima Dai-ichi également désigné comme la catastrophe de Fukushima, a eu lieu le 11 mars 2011 au Japon mais les suites ne sont toujours pas stabilisées en août 2013, plus de 2 ans après l'accident. Cet accident a impliqué les réacteurs 1, 2 et 3 et la piscine de désactivation du réacteur 4 de la centrale nucléaire de Fukushima Dai-ichi. Le séisme du 11 mars 2011 a entraîné un arrêt automatique des réacteurs en service, la perte accidentelle de l'alimentation électrique et le déclenchement des groupes électrogènes. L'observation d'émissions de xénon, avant même la première dépressurisation volontaire du 1er réacteur, indique des dommages structurels probables dans la partie nucléaire des installations immédiatement après le séisme. À la suite du tsunami provoqué par le séisme, des groupes électrogènes de secours sont tombés en panne. Des débris ont pu obstruer des prises d'eau. Ces défaillances, couplées à plusieurs erreurs humaines aussi bien de fond que pratiques, ont causé l'arrêt des systèmes de refroidissement de secours des réacteurs nucléaires ainsi que ceux des piscines de désactivation des combustibles irradiés. Le défaut de refroidissement des réacteurs a induit des fusions partielles des cœurs de trois réacteurs nucléaires puis d'importants rejets radioactifs. Il s'agit d'un accident nucléaire majeur classé au niveau 7 (le plus élevé) de l'échelle internationale des événements nucléaires, ce qui le place au même degré de gravité que la catastrophe de Tchernobyl (1986), compte tenu du volume important des rejets.

Fukushima - chronologie Un tsunami dévastateur Un très violent tremblement de terre de 8,9 de magnitude sur l’échelle de Richter s’est produit le vendredi 11 mars 2011. Son épicentre se situait à 300 km à l’est des côtes du Japon. Il a été suivi d’un tsunami dévastateur dont les vagues de 14 mètres de haut ont ravagé les côtes orientales du pays et ont causé l'accident de la centrale de Fukushima Daiichi. L’accident nucléaire a commencé le samedi 12 mars avec le réacteur N°1 de la centrale suivi par le N°3 . Lundi 14, c'était au tour du réacteur N°2 d'avoir de graves problèmes de refroidissement. Durant presque un mois, les ingénieurs et techniciens japonais se sont battus pour assurer ce refroidissement et limiter les conséquences de l'accident. Les informations données par les autorités et les médias furent souvent contradictoires et incomplètes. Apocalypse, catastrophe, désastre, journalistes et responsables politiques ne lésinèrent pas sur les mots transformant des inquiétudes légitimes en angoisses.

Le Tsunami du 11 mars 2011 a été d’une rare violence comme en témoigne ce navire retrouvé dans une ville de la préfecture de Miagy. Des milliers de personnes sont portées disparues et des villes rayées de la carte. Si médiatiques soient-elles, les peurs engendrées par le nucléaire (qui jusqu’à ce jour restent au niveau de la menace) doivent être mesurées à l’aune de ces drames.

Des systèmes de refroidissement hors service

L’accident n’est pas du type de Tchernobyl, comme parfois il a été dit, où le réacteur qui n’était pas arrêté s’est emballé relâchant les produits très radioactifs présents dans le cœur. Ce relâchement dura 8 jours à la suite de l’incendie du modérateur en graphite. L’accident est dû à un manque de refroidissement alors que les réacteurs s’étaient automatiquement arrêtés immédiatement après le tremblement de terre. Après l’arrêt, le cœur d’un réacteur continue à dégager une chaleur considérable du fait des désintégrations radioactives en son sein. Cette chaleur qui représente 7 % de la puissance du réacteur 1 seconde après l’arrêt diminue régulièrement mais lentement. Si le cœur n’est pas correctement refroidi, il s’échauffe et peut fondre.

Fusion partielle, explosion d'hydrogène et rejets radioactifs.. L’accident s‘apparente à ses débuts à celui de Three Mile Island. A Three Mile Island, il y eut fusion du cœur par suite d’un défaut du système de refroidissement. A Fukushima, c’est la violence du tsunami qui a endommagé et inondé les circuits de refroidissement et installations de secours, conduisant à une perte totale des alimentations électriques et des moyens de refroidissement principaux. A Three Mile Island, les produits très radioactifs du cœur sont restés confinés dans une enceinte de confinement. A Fukushima, les enceintes ont joué ce rôle partiellement. En effet, il a fallu pour refroidir d'urgence injecter de l’eau de mer dans les cuves et les enceintes. L'ébullition de cette eau augmentant dangereusement la pression. il fallait périodiquement soulager l'enceinte en relâchant de la vapeur d'une manière contrôlée. Tant que les gaines de combustible n'étaient pas détériorées, la radioactivité de ces bouffées de vapeur restait anodine. Mais, en cas de fusion partielle ce qui s'est avéré être le cas, la vapeur incorpore des produits radioactifs volatils issus du combustible, dont le redouté iode-131. La procédure devient dangereuse en termes de contamination, même si les quantités rejetées restent faibles comparées au nuage de Tchernobyl.

La destruction le 12 mars du toit du bâtiment réacteur N°1 par une explosion d’hydrogène fut le signe de la décomposition de l’eau par le zirconium des gaines de combustibles à haute température et donc d'une fusion partielle du cœur. A Three Mile Island, ces explosions d'hydrogène étaient redoutées, mais ne se sont pas produites. Lundi 14, une explosion similaire d'hydrogène se produisit sur le caisson externe du réacteur N°3 causant 11 blessés. Mardi 15 mars, cela fut à son tour le cas du réacteur N°2 dont on avait annoncé la veille que les barres de combustibles s'étaient trouvées un certain temps découvertes. Cette dernière explosion fut à l'origine des plus fortes contaminations, car le vent soufflait ce jour là vers le nord-ouest et il pleuvait et neigeait. Le samedi 12 mars au matin, le toit et une partie du mur du bâtiment réacteur de l’unité N1 de la centrale de Fukushima a été détruit par une explosion. On attribue cette explosion à de l’hydrogène décomposé à partir de l’eau par les gaines de combustibles portées à haute température par un défaut de refroidissement et relâché lors d'une dépressurisation avec des produits radioactifs volatils. Cet hydrogène très mobile se serait accumulé en haut du bâtiment réacteur. Malgré l’explosion, il semble que l’enceinte représentée au milieu ait continué de jouer son rôle de confinement de la radioactivité du coeur du réacteur en dehors des dépressurisations.

Une fusion partielle signifie qu'une partie des pastilles de combustible à l'uranium avait fondu, ce qui nécessite de dépasser 2800°C. Les aiguilles de combustible sont endommagées quand une portion de leur gaine se retrouvé découverte par l'eau de refroidissement suffisamment longtemps pour que la gaine se fissure, laissant échapper du combustible les éléments radioactifs les plus volatils. A partir du jeudi 17, la perspective d'accident gravissime avec une fonte totale du combustible parut s'éloigner. Comme à Three Mile Island, on a évacué les populations par précaution dans un rayon de 30 km. Grâce à ces dispositions, les évènements liés aux réacteurs de Fukushima n'ont pas fait de morts à ce jour. Malgré la menace qui persiste et l'incertitude du futur, cette absence ou ce petit nombre de victimes doivent être comparés aux 25000 morts et disparus du tsunami. En prenant comme modèle l'évolution du dégagement de chaleur, après son arrêt, d'un réacteur REP de 900 MWe , nous avons estimé la décroissance de la puissance thermique d'un réacteur de 700 MWe du type de Fukushima en fonction du nombre de jours écoulés depuis son arrêt, c'est-à-dire depuis le tsunami. La chaleur initiale à évacuer est de l'ordre d'une dizaine de megawatts (1 MW pendant 1 heure équivaut à la vaporisation d'1,6 tonne d'eau) . Elle décroit d'environ 50% du premier au septième jour. La décroissance est lente, mais au cinquième jour le plus dur était passé.

Mercredi 16 mars : le danger des piscines d'entreposage Une nouvelle menace s'ajoute ce jour là à celle du refroidissement des réacteurs. Le Japon entrepose longtemps les assemblages de combustibles usés dans des piscines attenantes aux réacteurs. Ces piscines d’entreposages apparurent d'une manière inattendue comme le talon d’Achille des unités de Fukushima. Dès mardi 15, à la suite d'une explosion puis d'un incendie, le niveau de radiations devint très élevé dans les piscines d’entreposage des réacteurs N°3 et N°4. Ce dernier était pourtant à l’arrêt, mais son combustible usé hautement radioactif venait d'être déchargé dans la piscine. Ces piscines ont 12 mètres de profondeur. De très hauts niveaux de radiations signifient que les assemblages de combustible ne sont plus recouverts de 8 m d’eau comme ils devraient l’être mais de beaucoup moins. Si le niveau baisse au point de découvrir le sommet des assemblages, le gainage du combustible va commencer à fondre avec tous les dangers que cela comporte ! La journée du jeudi 17, quatre hélicoptères tentent sans grand succès de déverser de l’eau par une forte brise au dessus de la piscine d’entreposage. Le vendredi 18, des canons à eau sont employés pour déverser des tonnes d'eau avec plus de succès. Plus tard, en mai, une inspection par des caméras vidéos de la piscine montrera des assemblages intacts qui n'avaient pas été dénoyés. La fuite d'hydrogène à l'origine de l'explosion serait venue du réacteur N°3 voisin.

Des progrès lents Une ligne haute tension est enfin amenée sur le site pour l'alimentation électrique. Le dimanche 20, l'électricité est rétablie sur l'unité N°2. Les autres suivront. Lundi 21, des rejets sont encore observés sur les unités 2 et 3 (la plus endommagée) mais le niveau des radiations émises se stabilise et diminue. Cependant la situation tarde à être maîtrisée. Vendredi 25 des flaques d'eau très radioactives dans les bâtiment des turbines sont à l'origine de graves inquiétudes quant à l'étanchéité de la cuve, de l'enceinte et du circuit secondaire du réacteur N°2. A partir du samedi 26, des pompes sont remises en service injectant de l'eau douce à la place de l'eau de mer. Les températures encore élevées avaient sensiblement baissé dans les réacteurs et les piscines d'entreposage. Le samedi 19, une contamination d'iode radioactive est relevée sur des épinards en provenance d'une ferme de Fukushima, conséquence de rejets des jours précédents. Mais les rejets ayant été limités, l'ampleur de cette contamination est probablement relativement faible. D'autres contaminations apparaissent les jours suivants, mais la baisse continue du niveau général de la radioactivité suggère l'absence de nouveaux rejets significatifs. Au début de la troisième semaine, un nouveau problème surgit et un dilemme se pose : comment refroidir en même temps les réacteurs et limiter les fuites d'eau radioactives dans la centrale et au delà vers la mer ? Une partie des tonnes d'eau de mer injectées pour le refroidissement retourne à l'océan porteuse d'une forte radioactivité en iode-131. Pendant plusieurs jours, les techniciens de la centrale se battent pour colmater une fuite d'eau extrêmement radioactive. Cette eau, en provenance de la cuve du N°2, se déverse dans une fosse puis dans la baie. La fuite est colmatée le 6 avril.

L’injection en eau douce se poursuit dans les cuves et les piscines d'entreposage des réacteurs à un niveau a priori suffisant. La chaleur à évacuer n'est plus que le quart de ce qu'elle était le premier jour. C’est un refroidissement en circuit ouvert, c’est-à-dire que l’eau apportée s’évapore ou se répand dans l’enceinte de confinement ou dans d’autres bâtiments, essentiellement les salles des turbines. L’objectif à terme est de passer à un refroidissement en circuit fermé dans la centrale de façon à ce que l’eau contaminée ne s’échappe dans les bâtiments où sa présence retarde les interventions humaines. Le problème est de se débarrasser de cette eau radioactive. Le 12 avril une estimation des autorités de sûreté japonaises chiffre les rejets de radioactifs à 10 % de ceux de Tchernobyl. La quantité d'eau radioactive présente sur le site, à pomper puis à décontaminer est estimée à 100 000 tonnes. Le 18 avril, l'exploitant TEPCO commence le pompage des premières 10 000 tonnes en vue de leur décontamination. Le 17 juin, une station d'épuration est installée par AREVA et la compagnie américaine KRYON entre en fonctionnement. Au cours de juillet, 10 000 tonnes d'eau avaient été décontaminées.

Le 21 avril, le gouvernement japonais classe la zone d'évacuation des 20 km en zone en état d'urgence avec interdiction aux habitants évacués d'y retourner sans autorisation. Cette décision ne signifie pas nécessairement que cette interdiction devienne permanente pour cette zone également dévastée par le tsunami. Les principales contaminations radioactives ont été mesurées selon un axe allant jusqu’au village de Itate. De ce fait, la zone initiale d’accès restreint de 20 km autour de la centrale a été complétée par une zone d’évacuation élargie. En avril 2012, certaines restrictions d’accès ont été levées. : un retour de la population était en préparation dans les zones en vert à l’intérieur du cercle des 20 km. Les zones en orange concernent des parties où le retour des populations ne devrait pas être autorisé à court terme. Dans la partie en rose concerne de la commune de Minamisoma les dépôts radioactifs sont trop importants et un retour des populations est difficilement envisageable.

Fin avril, la situation semble stabilisée. Dix semaines après l'accident, les débits de dose qui ont beaucoup décru permettent de plus longues interventions en particulier dans les bâtiments du réacteur N°1. Une bonne nouvelle, il n'a pas été fait état à cette date de décès parmi ces liquidateurs, contrairement à ce qui s'était passé à Tchernobyl.

Rejets à Fukushima

Composition et ampleur des rejets à Fukushima et Tchernobyl A la date du 22 mars 2011, l'IRSN publie une évaluation de la radioactivité rejetée par les trois réacteurs accidentés de Fukushima Daiichi. Après cette date, les rejets ont été beaucoup moins importants, l'essentiel des radioéléments volatils étant sortis des réacteurs. La table compare la composition des principaux composants - le "terme source" - aux données de Tchernobyl. Cette évaluation a servi à estimer les niveaux de contamination de l'air.

Décroissance de la radioactivité Après quelques jours durant lesquels des isotopes (iode-132, iode-133, tellure-132) jouent un rôle, seul demeure l'iode-131. Cette isotope radioactif de l'iode constitue le principal danger sanitaire en raison de sa fixation éventuelle sur la thyroïde. Mais en raison de sa décroissance rapide (sa période radioactive est de 8 jours), il disparait en quelques mois avec le danger qu'il représente. La figure est établie, à partir de la composition détaillée fournie par l'IRSN ci dessus.

Des rejets qui se dirigent vers le Pacifique Extrait de la simulation par l'IRSN de la dispersion atmosphérique des rejets entre le 12 et le 26 mars, à l’aide d'un modèle utilisant les observations et les prévisions météorologiques fournies par Météo France.A la date du 14 mars, 2 jours après l'accident, cette carte montre les rejets se dirigeant vers le Pacifique. Cette tendance est dominante, mais des rejets reflueront vers la terre. Le césium-137 a été choisi comme traceur du panache radioactif. Les contaminations sont exprimées en becquerels de césium 137 par mètre cube d’air (Bq/m3).

Carte de la contamination marine au 4 avril 2011 Sur les 27 PBq de césium 137 rejetés en mer du 21 mars jusqu'à mi-juillet, l'essentiel (82 %) l’a été avant le 8 avril. Cette carte des retombées montre la contamination de l’eau de mer en césium-137 à la date du 4 avril. La contamination est due aux dépôts en provenance du nuage qui a survolé le Pacifique mais aussi près de la côte en raison des importantes quantités d’eux très radioactives qui se sont déversées près de la centrale jusqu’au 5 avril. Contrairement aux dépôts au sol, cette contamination évolue sous l’effet des courants marins et de la dilution dans l’océan.

12 Pour ou contre les centrales nucléaires 12.1 Arguments en défaveur des centrales nucléaires problèmes de sécurité de la centrale face aux tremblements de terre il faudrait exiger la fermeture des sites dangereux ou restaurer en urgence la résistance des installations dangers associés à la possibilité de sabotages et de vols pendant les transports un réchauffement climatique perturberait le fonctionnement des centrales en période de canicule (exemple été 2003)  émission de plusieurs maladies comme la légionellose en 1986, l’accident de Tchernobyl a eu un impact désastreux (région entièrement inhabitable et d’innombrables victimes)

les déchets, qu’ils soient issus de déchets technologiques solides (boues radioactives) ou de produits de fission se caractérisent par l’intensité des radiations émises, et de leur durée de vie (de courte à longue) le stockage des déchets toxiques reste problématique, leur nombre s’accroît les déchets hautement radioactifs renferment des cendres et des résidus issus des combustibles irradiés en réacteurs : ces déchets concentrent 90 % de la radioactivité ils perdent progressivement leur radioactivité sur des dizaines de milliers d’années !!!  de plus la question des déchets nucléaires va encore s’aggraver vers 2010 avec le démantèlement programmé en France des centrales aujourd’hui en activité car les centrales des années 1970 arriveront en fin de vie ! il faut rappeler que la dose maximale d’irradiation « sans risques » pour un homme est en France 5 fois supérieure à celle des normes internationales

12.2 Arguments en faveur des centrales nucléaires  les centrales nucléaires peuvent produire des grandes quantités d’électricité à bas prix et sans pollution directe  le nucléaire permet de produire de l’électricité peu coûteuse et ce, sans polluer l’atmosphère  environ 75 % de l’électricité produite en France est d’origine nucléaire, celle-ci représente 50 % de notre énergie consommée : la différence est exportée  la consommation électrique augmentant sans cesse depuis 30 ans, seul le nucléaire peut pour l’instant subvenir à nos besoins  le nucléaire peut s’imposer comme la première alternative au pétrole  l’augmentation des centrales nucléaires permettrait d’éviter une grande crise d’approvisionnement, afin d’éviter les coupures électriques à grande échelle.  grâce à une nouvelle génération de centrales nucléaires (2020) la sûreté sera améliorée, la production des déchets radioactifs à vie longue sera réduite

13 Le nucléaire dans le monde

Centrales nucléaires dans le monde

Évolution de la production nucléaire dans le Monde

Les réacteurs en activité en Belgique Les réacteurs actuellement en fonctionnement sont exploités par Electrabel dans les deux centrales suivantes : centrale nucléaire de Doel - 2 réacteurs de 412 MWe, 1 de 1056 MWe et 1 de 1041 MWe centrale nucléaire de Tihange - 1 réacteur de 870 MWe et 2 réacteurs de 930 MWe Les réacteurs arrêtés Le premier réacteur nucléaire construit en Belgique, dénommé BR-3, est localisé dans la centrale nucléaire de Mol. Ce réacteur construit en 1962 est définitivement arrêté depuis 1987.

Réduction des émissions potentielles de CO2 par un recours au nucléaire analogue à la France Tableau comparatif des situations par pays (ordres de grandeur, sauf pour la production brute)

14 Applications militaires de l’énergie nucléaire Bombes atomiques à fission Les premières bombes atomiques, les bombes 'A', sont des bombes utilisant la puissance du combustible fissible pour la production de l'énergie explosive. Le concept général repose sur le fait d’amener le plus rapidement une masse de combustible fissile presque pur (Uranium 235 ou Plutonium 239) jusqu'à la masse critique entraînant cet enchaînement irrémédiable de réactions de fission. Pour ce qui est du dimensionnement et du choix du combustible, deux paramètres sont à prendre en compte :  Enrichissement : le combustible doit être enrichi pour augmenter les chances de fission. Il atteint le plus souvent des taux supérieurs à 80% contre moins de 7% pour le combustible utilisé en vue de produire de l'électricité.  Masse de combustible : la masse doit être sur-critique, c'est à dire qu'elle doit garantir dans un volume le plus faible possible, une probabilité quasi de 100% que les neutrons issus des réactions précédentes génèrent presque tous une nouvelle fission.

La nature du combustible prend ici toute son importance, et particulièrement la section efficace de fission. L'Uranium est plus sensible aux neutrons lents qu'aux neutrons rapides, alors que le Plutonium fissionne très bien avec des neutrons rapides. Or ce sont bien des neutrons rapides qui sont produits par les fissions et il n'y a ici aucun modérateur pour les ralentir. Par conséquent la masse d'Uranium nécessaire pour obtenir une réaction critique doit tenir compte de ces pertes probables : une masse de 50 kg d’Uranium 235 est nécessaire là où seulement 10 kg de Plutonium suffiront. Ces masses peuvent être réduites si des réflecteurs permettre de réduire les pertes de neutrons. Attention, ces masses permettent effectivement d’obtenir une réaction critique. Mais comme l'objectif est d'obtenir une réaction exponentielle, cette masse est insuffisante : les masses utilisées dans les bombes nucléaires sont plus de deux fois supérieures à ces valeurs. Par ailleurs, la masse critique est directement liée à l'enrichissement du combustible et plus cet enrichissement est important, plus la masse critique sera faible.

Plusieurs méthodes existent pour rapprocher les masses de combustible inertes et leur faire atteindre la masse critique. Deux sont historiquement les plus utilisées :  Technique de l'insertion ou du pistolet : une des deux masses est projetée contre la seconde par un explosif puissant qui permet de garantir que cette opération sera réalisée dans un délai extrêmement court. La vitesse de réaction attendue est de l'ordre du dixième de milliseconde  Technique de l'implosion : des explosifs compressent un cœur de combustible sous forme de sphère creuse (inerte car trop de perte de neutrons) ce qui amène à la masse critique.

Principe des bombes à fission

Les deux bombes larguées sur le Japon à la fin de Deuxième Guerre mondiale ont permis, mais à quel prix, de tester les deux modèles de bombe à fission : 

LittleBoy sur Hiroshima : Bombe A à l'Uranium (64 kg d'Uranium) utilisant la technique de l'insertion  FatMan sur Nagasaki : Bombe A au Plutonium (6,2 kg de Plutonium) utilisant la technique de l'implosion

Gadget, LittleBoy et FatMan, les trois premières bombes nucléaires

Les bombes à fission dopées par la fusion Malgré le caractère effroyable que représentent les bombes à fission, le processus est assez inefficace et ne permet de consommer qu'un très faible pourcentage de l'Uranium 235 fissile. Une consommation supérieure permettrait d'obtenir des résultats encore plus dévastateurs. Ce qui limite cette consommation c'est le manque de neutrons aux toutes premières microsecondes de l'explosion. Le combustible étant rapidement dispersé, seuls les neutrons présents sur cette période très courte participeront au processus de réaction. Afin d'améliorer le rendement il faut donc augmenter les neutrons disponibles avant que le combustible ne soit trop dispersé pour participer à de nouvelles fissions. La première source qui déclenche la réaction initiale est fournie par un appareillage externe au combustible, mais dont la quantité de neutrons produit est limitée. Une solution consiste à intégrer dans le processus d’explosion une part de fusion afin de produire rapidement une grande quantité de neutrons qui pourront provoquer un maximum de fissions.

Le processus de fusion se déclenchant à des températures très élevées, le système ne se trouve en condition idéale qu’une fois le processus de fission démarré (température et pression suffisantes pour fusionner les atomes de Deutérium et de Tritium). Il est donc très important d’ordonner correctement les actions :  Déclenchement de la fission : la masse critique est atteinte et le flux de neutrons générés en dehors du combustible va enclencher une fission sur-critique  Compression et montée en température du gaz de Deutérium et Tritium : parfaitement synchronisé avec le processus d’implosion, un gaz de Deutérium et de Tritium est inséré au centre de la sphère de combustible juste avant qu’elle ne soit contractée par les explosifs. La puissance de la compression et la réaction de fission suffisent pour atteindre les conditions nécessaires à la fusion  Emission massive de neutrons par la fusion Deutérium - Tritium : le processus de fusion génère en quelques micro secondes une quantité importante de neutrons de très haute énergie qui vont interagir avec le combustible et souvent multiplier par 10 voir par 100 le nombre de réactions de fissions.

Processus de ‘fission – fusion - fission’ des bombes dopées par la fusion

Les bombes à hydrogène Poussée par la rivalité Est-Ouest de la guerre froide, la course à des bombes toujours plus destructrices et puissantes a conduit à la création des bombes dites à étages. Ce sont des extensions de la bombe à fission dopée par fusion où l’énergie obtenue d’une première explosion sert à obtenir les conditions de températures, de pression et de flux neutroniques nécessaires au déclenchement d’une seconde bombe, encore plus puissante. Sans l’explosion de la première bombe, la seconde ne pourrait pas exploser. Par extension, il est ainsi possible d’imaginer des bombes de plus en plus puissantes, disposant de plusieurs étages, chacun mettant en place les conditions nécessaires à l’explosion de l’étage suivant. Les bombes les plus classiques utilisent deux étages : 

Primaire : c’est une bombe à fission classique ou une bombe à fission dopée par la fusion. Son but est de produire une quantité massive de rayons X qui, maintenue dans l’enceinte de la bombe par un matériau réfractaire, vont compresser la partie secondaire



Secondaire : la partie secondaire comprend à la fois un matériau qui peut déclencher des fusions (Lithium-Deutride) dans un conteneur d’Uranium 238. Au centre de ce conteneur se trouve un bloc de combustible fissile (Uranium 235 ou Plutonium 239) dont la forme ne permet pas d’atteindre la masse critique.

Architecture globale d’une bombe à hydrogène et processus global d’explosion

Le processus d’explosion de l’étage secondaire est le suivant : 

Compression du Deutéride de Lithium : sous la pression radiative des rayons X émis par l’étage primaire, l’étage secondaire est compressé et élevé à une température telle que la fusion commence. Dans le Deutéride de Lithium, le Tritium produit à partir du Lithium par les neutrons issus de la fission de l’étage primaire va fusionner avec le Deutérium, libérant ainsi des neutrons de très haute énergie. La température de fusion obtenue est de plusieurs dizaines de millions de degrés



Fission du bloc de combustible fissile : le combustible fissile est lui aussi compressé et atteint la masse critique. La réaction sur-critique de fission commence, déclenchée en masse par les neutrons ultra-rapides créés lors des fusions Deutérium-Tritium



Fission du conteneur en Uranium 238 (appelé tampon) : le Deutéride de Lithium est stocké dans un conteneur solide qui lui aussi va être compressé. Il est souvent constitué d’uranium appauvri (Uranium 238 presque pur). 

Pendant la phase où il sert de conteneur, il est peu sensible aux neutrons externes mais empêche toutefois qu’ils pénètrent dans le second étage et déclenchent une explosion prématurée de faible puissance.



Pendant la phase compressée, il va recevoir en grande quantité des neutrons rapides créés par les fusions. Même si l’Uranium 238 n’est pas un élément fissile, son noyau peut être séparé par ces neutrons rapides. Le gain est faible mais cela permet de libérer encore plus d’énergie.

L’intérieur même de la bombe est couvert de matériaux qui réfléchissent les neutrons pour éviter les fuites et permettre encore plus de fissions. Il faut noter que malgré son nom de bombe à hydrogène, la répartition de la puissance dégagée se fait entre les deux bombes à fission (premier et second étage) et la fusion du second étage. La répartition est même souvent en faveur des bombes à fissions quant à l’énergie dégagée du fait de la présence de trois blocs de combustible fissile (Plutonium 239 du premier étage, Plutonium 239 du second étage, Uranium 238 du conteneur du second étage). Les retombées radioactives seront alors bien supérieures à celle d’une bombe à fission ‘classique’. Les militaires parlent même de ‘bombe propre’ lorsque le tampon n’est pas constitué de matériau radioactif mais d’un autre matériau comme le plomb. La part de la fission dans l’énergie totale libérée est alors moins de 50% et les retombées radioactives moindres (mais loin d’être nulles comme pourrait le laisser supposer le terme de ‘bombe propre’). Les puissances obtenues sont considérables. La bombe la plus puissante jamais testée est un modèle Russe, la Tsar Bomba, avec une énergie libérée de de plus de 57 mégatonnes (l’équivalent de 57 millions de tonnes de TNT). Cette puissance est d’autant plus impressionnante que le test utilisait une bombe bridée : le tampon était en Plomb et non en Uranium 238, limitant de moitié sa puissance théorique. En comparaison, la puissance dégagée par LittleBoy sur Hiroshima était de 15 kilotonnes (3 800 fois plus faible).

Processus d’explosion du second étage d’une bombe à hydrogène

Les bombes à neutrons Il arrive parfois qu’outre le besoin de destruction des infrastructures et personnes à proximité de l’explosion, les militaires cherchent à obtenir des effets supplémentaires pour lesquels la seule explosion ne suffirait pas :  

Destruction des matériels électroniques sur plusieurs dizaines de kilomètres Destruction des personnes à l’abri des ondes de choc ou de chaleur (char, bunker, etc.)

La bombe à neutron, dérivée de la bombe à hydrogène répond malheureusement à ces besoins. Plutôt que de contenir les neutrons rapides produits par la fusion du Deutéride de Lithium et les faire produire des fissions dans le bloc de matière fissile au centre du second étage ou au niveau du tampon, l’idée est de les laisser sortir de la bombe et parcourir plusieurs kilomètres. Pour cela le second étage ne contient pas de bloc fissile central et le contenu tampon est réalisé dans une matière non fissile (du plomb par exemple). L’intérieur de la bombe n’est plus recouvert comme dans le cas d’une bombe à hydrogène recouvert d’une couche de matériaux pour réfléchir les neutrons car à contrario, ce que l’on souhaite ici, c’est qu’ils quittent rapidement la bombe.

La bombe à neutrons

Les effets destructeurs des neutrons rapides sont liés à : 

Leur capacité à ioniser la matière : et surtout les atomes légers. Ils perdront peu d’énergie à traverser des blindages faits d’atomes lourds, mais ioniseront de façon importante les atomes légers comme l’hydrogène, les dissociant des molécules auxquelles ils appartenaient. Sachant que le corps humain est composé en grande majorité d’eau (H20) on comprend mieux l’effet produit par ce flux de neutrons.



Leur capacité de transformer certains éléments stables en élément radioactifs : Notamment dans les alliages en acier qui contiennent du Cobalt. Le matériel ainsi irradié devient dangereux à utiliser pendant quelques jours à semaines après l’explosion, même s’il n’a pas reçu de retombées radioactives



L’impulsion électromagnétique créée : les neutrons ionisent une partie de l’air, créant une décharge électromagnétique telle qu’elle va détruire les composants électroniques et perturber les communications pendant plusieurs jours

La bombe à neutrons reste une bombe nucléaire qui produira les mêmes types de dégâts que les bombes à fission ou celles à hydrogène (onde de chaleur et onde choc, retombées radioactives). Ces effets seront simplement moins marqués car ce qui est recherché, c’est l’énergie libérée sous la forme de neutrons libres.

Bombe au Cobalt ou bombe salée Le dernier monstre du bestiaire des bombes nucléaires est la bombe au Cobalt. Attention, on parle bien ici de bombe ‘salée’ et non de bombe ‘sale’. Le terme de bombe ‘sale’ s’adresse à des bombes constituées d’explosifs conventionnels utilisées pour disséminer des éléments radioactifs. L’objectif de la bombe au Cobalt est de favoriser les retombées radioactives pour rendre une zone inhabitable (no man’s land, empêcher l’avancée de l’ennemi, etc.) pendant une durée relativement courte. Ce qui au premier abord semble faire l’intérêt de cette bombe est son aspect tactique et la possibilité de ‘maîtriser’ la durée d’inhabitabilité de la zone (en réalité, cela reste une bombe nucléaire avec l’ensemble de ses défauts). Pour cela le tampon du second étage est remplacé par un matériau non fissile, inerte, qui va capturer les neutrons de la fusion du Deutéride de Lithium lors de l’explosion et se transformer en un isotope instable, avec une demi-vie assez courte :   

Sodium 23 : devient du Sodium 24 avec une demi-vie de 15h Or 197 : devient de l’Or 198 avec une demi-vie de 2,7j Cobalt 59 : devient du Cobalt 60 avec une demi-vie de 5,3 ans

Les bombes au Cobalt ou bombes salées

Essais Nucléaires : une pratique des années 1950-1960 ... Les essais nucléaires auxquels ont procédé les grandes puissances, principalement dans les années 1950-1960, ont été à l'origine de rejets de matières radioactives dans l'environnement et ont causé à ce jour la plus importante dose collective d'irradiation non contrôlée. Cette contamination radioactive dure encore, bien qu'atténuée par le temps.

Chronologie des essais nucléaires La chronologie des essais atmosphériques montre que le gros des essais, principalement américains et soviétiques, ont eu lieu de 1951 à 1962 c'est-à-dire durant une douzaine d'années. A partir de l'accord mutuel de 1962 entre les Etats-Unis et l'Union Soviétique interdisant les essais aériens, ce sont les tests souterrains qui ont pris le relais. Ils sont en principe interdits depuis 1995.

Au total, tout au long de la guerre froide et la course à l'arme atomique, 543 essais atmosphériques ont été effectués par les Etats-Unis et l'Union Soviétique et à un moindre degré par le Royaume Uni, la France et la Chine. Les essais souterrains ne sont pas à l'origine d'expositions à distance des terrains de tir, du moins en l'absence de fuite ou de dispersion de radioactivité. À la suite du traité signé en 1963 entre les Etats-Unis et l'Union Soviétique bannissant les essais atmosphériques, ces deux grandes puissances ont procédé à un ample programme d'essais souterrains jusqu'au début des années 1990. Les programmes d'essais souterrains de la France et de la Chine ont continué jusqu'en 1996. L'Inde a procédé à son premier essai souterrain en 1974, puis à cinq autres en 1998, auxquels le Pakistan répliqua quelques semaines plus tard en procédant à six tests.

Essais atmosphériques et essais souterrains La répartition du nombre d'essais atmosphériques et souterrains entre les diverses puissances nucléaires, montre que la plupart de ses essais ont été effectués par les Etats-Unis et l'Union Soviétique, les deux super puissances de la Guerre Froide, suivies de très loin par la France. Les essais souterrains, qui ont pris le relais des essais atmosphériques interdits après les années 1960, ont été plus nombreux mais moins polluants.

Malgré l'existence d'un consensus international pour interdire tous les types d'essais, le traité d'interdiction complète formulé en 1996, n'est pas encore entré en application. L'Inde, le Pakistan, mais aussi Israël, ne l'ont pas encore ratifié, si bien que l'on ne peut dire que la pratique des essais nucléaires a définitivement cessé. L'Iran est soupçonné d'un programme nucléaire militaire. La Corée du Nord a procédé à 3 essais en 2006, 2009 et 2013. Depuis le 11 septembre 2001, on s'inquiète du recours à des armes sales par des groupes terroristes. La puissance totale dégagée par les essais atmosphériques a été de 440 mégatonnes de TNT, celles des essais souterrains de 90 mégatonnes. Les années les plus actives furent 1954, 1958, 1961, et 1962. La plus puissante explosion est celle d'une bombe soviétique de 50 mégatonnes en 1961, dont 97 % dues à la fusion et 3 % à la fission. Les puissances des deux bombes qui ont détruit Hiroshima et Nagasaki étaient beaucoup plus petites : 15 et 21 kilotonnes.

Une puissance totale de plus de 500 mégatonnes ! La puissance dégagée par les essais atmosphériques a été près de cinq fois supérieure à celle des tests souterrains, bien que ceux-ci aient été plus de trois fois plus nombreux. Les essais souterrains n'ont pas occasionné de rejets directs de radioactivité dans l'environnement.

Les rendements de la plupart des essais souterrains étaient bien inférieurs à celui des essais atmosphériques et il était généralement possible de contenir les débris. Les Américains ont effectué leurs essais dans des atolls des Iles Marshall dans le Pacifique et les déserts du Nouveau-Mexique et du Nevada. Le tir le plus polluant - le tir Bravo - s'est produit en 1954 à Bikini. Les sites soviétiques se trouvent dans des zones désertiques du Kazakhstan et de la Nouvelle Zemble au nord du Cercle Polaire. Les Soviétiques ont également procédé à quelques essais malheureux à des fins de génie civil. La France a effectué la plupart de ses essais souterrains sur l'atoll de Muruora.