Bulletin économique Chine - Direction générale du Trésor

29 févr. 2012 - Malgré une hausse importante des exportations françaises vers la Chine, tirée par l'aéronautique (30% de celles-ci) et le renforcement de.
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Bulletin Economique Chine

– janvier - février 2012

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Bulletin économique Chine N°43 – janvier - février 2012 © DG-Trésor

SOMMAIRE QUELLES PERSPECTIVES POUR L’ECONOMIE CHINOISE EN 2012 ? .............................................................. 2 LES ECHANGES COMMERCIAUX ENTRE LA FRANCE ET LA CHINE EN 2011 .................................................... 7 LE CREUSEMENT DES INEGALITES DE REVENUS EN REPUBLIQUE POPULAIRE DE CHINE .............................. 11 PIB : LA CROISSANCE CHINOISE EST DE 9,2 % EN 2011 ........................................................................ 17 DEMANDE INTERNE : STABILISATION DE L’INFLATION, MAIS REBOND EN JANVIER ................................. 18 COMMERCE EXTERIEUR : BAISSE DE 30 MDS USD DE L’EXCEDENT COMMERCIAL ANNUEL ....................... 19 RRR : HAUSSE DES RATIOS DE RESERVES OBLIGATOIRES DE 50 POINTS DE BASE ................................... 20 RESERVES DE CHANGES : SORTIES DE DEVISES EN DECEMBRE POUR LE 2EME MOIS CONSECUTIF ............. 21 FINANCES PUBLIQUES : DEFICIT DE 1,1% DU PIB EN 2011 .................................................................. 21 MARCHES D’ACTIFS : LE RALENTISSEMENT DU MARCHE IMMOBILIER SE POURSUIT ................................ 22 ENERGIE : FORTE CROISSANCE DE LA DEMANDE DE GAZ ATTENDUE EN 2012 .......................................... 23 INDICATEURS ECONOMIQUES MENSUELS......................................................................................... 24 INDICATEURS ECONOMIQUES ANNUELS........................................................................................... 25 PREVISIONS DE CROISSANCE DU PIB CHINOIS ............................................................................... 26

Table des

AMBASSADE DE FRANCE EN CHINE SERVICE ECONOMIQUE REGIONAL DE PEKIN

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Quelles perspectives pour l’économie chinoise en 2012 ? L’année 2012 devrait être marquée par une continuité des politiques mises en œuvre dans le contexte d’une croissance en léger ralentissement. Au cours de cette année qui verra la constitution de la nouvelle équipe dirigeante autour de l’actuel vice-président Xi Jinping, les autorités chercheront sans doute en premier lieu à assurer la stabilité de l’environnement économique pour faciliter cette transition, rendant la période peu propice au lancement de réformes d’envergure. Certains enjeux devraient cependant concentrer leur attention cette année, notamment l’ouverture du compte de capital, l’évolution des marchés immobiliers, la situation des finances locales ou encore la place de l’investissement public. En termes de conjoncture, selon les prévisions de la DG Trésor, la croissance devrait s’établir en 2012 à 8½%, après 9,2% en 2011, puis devrait rebondir légèrement en 2013 à 8¾%. La tendance au rééquilibrage de l’économie chinoise devrait progressivement se confirmer, la consommation prenant en 2013 le relai de l’investissement comme moteur principal de la croissance.

1 – L’année 2011 a été marquée par un ralentissement de la croissance en raison des mesures de stabilisation de l’activité et de l’affaiblissement de la demande extérieure L’année 2011 a été marquée par un léger ralentissement de la croissance qui s’est élevée à 9,2% contre 10,4% en 2010. Ce ralentissement s’est affirmé tout au long de l’année comme l’ont révélé les chiffres trimestriels : la croissance en glissement annuel a été successivement de 9,7%, 9,5%, 9,1% et 8,9% au cours des quatre trimestres. Ainsi l’économie chinoise a e enregistré une croissance inférieure à 9% au 4 trimestre 2011 pour la première fois depuis 2009. Ce ralentissement est lié en premier lieu au contexte macroéconomique international. En effet, au plan intérieur, la demande domestique est restée très dynamique. La croissance est en effet restée tirée par l’investissement qui a crû de +23,8% en valeur par rapport à 2010. La croissance de la consommation s’est également maintenue, les ventes au détail ayant progressé de +17,6% sur l’ensemble de l’année 2011. En revanche, en 2011, les excédents commerciaux chinois sont en baisse de 26,4 Mds USD et s’élèvent à 155,1 Mds USD. Les exportations ont en effet progressé moins vite en valeur sur l’ensemble de l’année que les importations (+20,3% contre +24,9%). Cette évolution est principalement liée au ralentissement des exportations vers l’Union européenne (+14,4%) et les États-Unis (+14,5%) par rapport à celles à destination notamment des pays asiatiques (Asean : +23,1%). Le gouvernement a réussi à contenir l’inflation. La maîtrise de la hausse des prix était l’objectif prioritaire que le gouvernement chinois s’était fixé pour 2011 lors de l’Assemblée nationale populaire de l’an passé. Alors qu’il avait fixé une cible de +4%, l’inflation moyenne a finalement atteint +5,4% en 2011. Au cours de l’année, l’inflation a augmenté jusqu’à +6,5% en glissement annuel en août, tirée par la composante alimentaire et notamment par le prix du porc. D’une part, la hausse des prix alimentaires mondiaux s’est répercutée fortement en Chine, et, d’autre part, des facteurs structurels (augmentation des salaires des agriculteurs, organisation inefficace du marché) ont exacerbé cette hausse. Les réponses de politique monétaire – la banque centrale a procédé à 12 hausses du taux de réserves obligatoires en 2010 et 2011 –, la reconstitution du cheptel porcin et la fin de l’effet des aléas climatiques, ainsi que les mesures prises pour assurer un meilleur fonctionnement des marchés agricoles – meilleur approvisionnement notamment – ont finalement conduit à une nette décélération de l’inflation en fin d’année, qui n’était plus que de +4,1% en glissement annuel en décembre.

Inflation et composantes glissement annuel, % 9

6

3

0

derniers points : janvier 2012 Source : NBS, calculs DG Trésor -3

2005

2006

alimentaire

2007

logement

2008

2009

2010

hors alimentaire et logement

2011

IPC total

Dans ce contexte les autorités ont manifesté leur volonté de réagir face au ralentissement de la croissance. Le Premier ministre Wen Jiabao a appelé le 25 octobre à un « réglage fin » de la politique économique. Le gouvernement a alors tiré parti de la diminution de l’inflation pour prendre des mesures ciblées de soutien aux secteurs les plus vulnérables, sans pour autant réorienter fondamentalement sa politique. Des mesures de soutien de politique monétaire et fiscale ont ainsi été prises en novembre pour aider les PME après la crise de Wenzhou. La banque centrale a par ailleurs décidé deux baisses de 50 pdb des ratios de réserve obligatoire en novembre 2011 et en février 2012, afin d’assouplir la politique monétaire et de soutenir l’activité. 2 – L’année 2012 devrait voir ce ralentissement se poursuivre et la croissance atteindre 8½ % Après la phase de ralentissement en 2011 qui se prolonge début 2012, les exportations chinoises devraient rebondir à partir de la mi-2012, tirées par une demande mondiale plus forte. Dans le scénario de référence de la DG Trésor, l’effet macroéconomique des tensions financières en zone euro devrait s’estomper à partir du second semestre 2012 et la demande mondiale, notamment en provenance des pays d’Asie, devrait rebondir également à compter du second semestre. Parallèlement, l’appréciation du yuan devrait être plus limitée en 2012, les autorités pouvant invoquer la réduction en 2011 des excédents courants. Les importations devraient demeurer dynamiques, en lien avec la hausse de la demande intérieure et la baisse des droits de douanes

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annoncée par le gouvernement le 7 mars à l’occasion de l’Assemblée populaire annuelle. Balance courante en pt de PIB

12

10

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gouvernement ne doit pas être compris comme une prévision : il est systématiquement dépassé. En revanche la baisse de cet objectif par rapport à l’année passée est significative. Il s’agit d’une prise en compte de la dégradation de l’environnement extérieur. Mais c’est également le signe manifeste, notamment à l’adresse des collectivités locales, du souhait d’une croissance plus équilibrée et plus durable. PIB et composantes (annuel)

8 pt de PIB

16

6

14

4

12 10

2 8 6

0

4

-2

1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 Balance commerciale Revenu transferts Balance courante

Au plan interne, on peut s’attendre à une continuité de la politique macroéconomique dans un contexte marqué par la transition politique et l’arrivée prochaine au pouvoir de la nouvelle équipe conduite par l’actuel vice-président Xi Jinping. La notion de « stabilité » était au cœur de la conférence annuelle de travail centrale sur l’économie du Parti communiste chinois, en décembre 2011. Comme l’an passé, le principe du maintien d’une politique budgétaire « proactive », ainsi que d’une politique monétaire « prudente » a été approuvé par l’Assemblée populaire nationale, le 5 mars 2012. Il est ainsi probable que la banque centrale continue sa politique d’assouplissement sélectif et procède à une ou deux baisses supplémentaires des ratios de réserve obligatoire. En effet le gouvernement a fixé un objectif de hausse de +14% de l’agrégat monétaire M2, ce qui laisse de la marge de manœuvre au vu de la tendance de 2011 (+13,6%) et de ce début d’année (+12,8% en janvier 2012). Le gouvernement s’est également donné une marge de manœuvre en matière de politique budgétaire, avec un objectif de déficit fixé à 800 Mds CNY, alors qu’il n’a été que de 519 Mds CNY (82 Mds USD) en 2011. Comme à l’accoutumée, et sans doute aussi pour des raisons d’affichage, les prévisions du gouvernement s’appuient sur des hypothèses très prudentes d’évolution des recettes budgétaires, avec un objectif de +9,5% qui semble bas au vu des objectifs et des perspectives de croissance nominale (l’an passé cet objectif avait été fixé à +8% alors que la hausse des recettes a finalement atteint +24,8%). Pour autant, les objectifs de politique monétaire et budgétaire du gouvernement indiquent que si un ajustement à la marge est possible, des mesures de relance semblent exclues. er

Au final, l’activité ralentirait au 1 semestre 2012. La croissance serait, selon les prévisions de la DG Trésor, de 8½ % en 2012 (après 9,2 % en 2011), et s’établirait à 8¾ % en 2013, toujours au-dessus de la cible du gouvernement. Celui-ci a en effet fixé un objectif de croissance 7,5% à l’occasion de l’Assemblée nationale populaire, en baisse par rapport à l’objectif de 8% fixé pour 2011. Il faut souligner toutefois que l’objectif du

2 0 -2 -4 -6

2001

2002

2003

Consommation totale

2004

2005

2006

FBCF Totale

2007

2008

Solde extérieur

2009

2010

2011

Variations de stocks

2012

2013

PIB

Le principal aléa baissier de cette prévision concerne la situation de l’économie mondiale, et notamment européenne, et l’impact de son évolution sur les soldes courants chinois. Sous l’hypothèse de normalisation des marchés financiers, la croissance mondiale devrait redémarrer progressivement en 2012, portée par les efforts de reconstruction au Japon, le dynamisme de l’activité des pays émergents et le redressement graduel des moteurs privés dans les économies avancées. L’investissement privé devrait accélérer dans la plupart des économies avancées, les indicateurs fin 2011 montrant que les taux d’utilisation des capacités de production sont quasiment revenus à leur moyenne de long terme, et les marges des entreprises poursuivant leur rétablissement. La normalisation de l’environnement économique et financier serait alors propice à un rétablissement de la confiance et de la consommation des ménages, mais la baisse des taux de chômage demeurerait limitée. Le Fonds Monétaire International (FMI) a quantifié l’effet pour la Chine d’un scénario très pessimiste, où s’effondrerait la croissance de l'Union Européenne, qui absorbe 20 % des exportations chinoises : en l’absence de réaction budgétaire chinoise ceci aurait un impact de - 4 points de PIB sur la croissance chinoise. Le FMI estime cependant que la Chine dispose des marges de manœuvre budgétaire pour réagir et pourrait alors ramener cet impact à seulement -1 point de PIB grâce à des mesures de relance. 3 – La tendance au rééquilibrage de l’économie chinoise devrait se confirmer En raison de l’orientation, qui reste restrictive, de la politique monétaire, ainsi que de la stabilisation voire de la baisse des marchés immobiliers, il est probable que la croissance de l’investissement ralentisse en 2012. La conjoncture interne est ainsi toujours relativement

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dégradée début 2012 : ralentissement de la croissance de la masse monétaire, baisse des transactions et des prix immobiliers, incertitudes sur la conjoncture (malgré un léger rebond des indices PMI en janvier et février). En intégrant aussi le maintien des mesures administratives d’encadrement du marché immobilier et l’instauration progressive d’une taxe foncière, on peut s’attendre à ce que la croissance de l’investissement ralentisse en volume passe à +11% en 2012, puis à +8% en 2013, après 12% en 2011. Parallèlement, la consommation devrait être soutenue par la croissance des salaires et l’urbanisation du pays, avec un effet accru en 2013. En 2010 et en 2011, le salaire minimum a été revalorisé, dans de nombreuses villes, de près de 20 % en moyenne, pour tenir compte de la hausse des prix à la consommation, notamment alimentaires. Dans plusieurs grandes entreprises, des mouvements sociaux ont également entrainé des augmentations de salaires. Ainsi, la croissance des salaires nominaux auraient accéléré depuis 2009 (+15 % en 2011 en première estimation, après 13,3% en 2010). En prévision, la dynamique des salaires devrait se poursuivre avec des croissances à deux chiffres (environ +15 % en 2012 et en 2013). D’abord, les hausses de salaires minimum et les mouvements sociaux devraient persister. Ensuite, l’épuisement progressif de « l’armée de réserve » en provenance des zones rurales devrait favoriser le pouvoir de négociation des salariés. Des signes de pénurie de main-d’œuvre sur les zones côtières apparaissent et la population en âge de travailler commence à diminuer. Parallèlement, après une forte augmentation durant la décennie 2000-2010, le taux d’épargne des ménages n’augmenterait plus que légèrement en 2012 et se stabiliserait en 2013 à 42% du PIB. Les effets démographiques de cycle de vie devraient exercer une pression à la hausse sur le taux d’épargne. Toutefois, le plan santé lancé en 2009 devrait limiter la tendance haussière du taux d’épargne, notamment en 2013, en raison de sa montée en charge. Taux d’épargne de l’économie 60%

50%

40%

30%

20%

10%

0%

1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 part de l'investissement dans le PIB

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consommation contribuerait à la croissance à hauteur de 4 pts de PIB contre 5 pts pour l’investissement. En 2013, ces chiffres s’inverseraient. La consommation deviendrait alors le plus fort contributeur à la croissance, pour la première fois depuis 2001. Le commerce extérieur aurait une contribution négative en 2012 (-½ pt, comme en 2011), et légèrement positive en 2013 (+¼ pt, contre plus d’un point en moyenne sur la période 2000-2008). En 2012, le rééquilibrage de la croissance conduirait ainsi à une baisse de l’excédent commercial. Ce dernier se stabiliserait en 2013, tout comme l’excédent courant (à respectivement 2½ pts et 3 pts de PIB). Le rééquilibrage interne s’amorcerait en 2013, avec la stabilisation de la part de la consommation dans le PIB. L’épargne globale de la Chine serait stable à 50 pts de PIB en 2012 et en 2013. 4 – Plusieurs grands chantiers de politique économique devraient concentrer l’attention en 2012, bien que l’annonce de réformes majeures semble peu probable avant 2013. Dans un contexte marqué par la réduction des excédents courants, les pressions haussières sur le taux de change pourraient s’atténuer. Alors que le taux de change s’est apprécié de 5% face au dollar en 2011, la stabilisation du solde courant que la DG Trésor prévoit à 2,5% en 2012 puis 3% en 2013 devrait conduire les autorités à ralentir l’appréciation du yuan, tout en continuant de flexibiliser son taux de change. Fin 2011, le taux de change du yuan a connu temporairement des pressions à la baisse, en lien avec des sorties de capitaux en raison d’un regain d’aversion pour le risque sur les marchés financiers internationaux. Les réserves de changes de la Chine ont ainsi diminué à deux reprises en novembre puis en décembre, pour s’établir à 3 181 Mds USD en fin d’année contre 3 274 Mds USD en octobre, d’après la State Administration of Foreign Exchange (SAFE, chargée de gérer les réserves de change et dont le directeur est l’un des Vice-Gouverneur de la PBoC). Il est probable que les autorités limitent l’appréciation du yuan en 2012 : les marchés des non deliverable forward n’anticipent ainsi une appréciation du yuan que de seulement 2% en 2012. En revanche, la banque centrale pourrait progresser dans la flexibilisation du taux de change. Ainsi, la bande de fluctuation quotidienne autour de se valeur pivot fixée par la SAFE pourrait être élargie, comme l’a suggéré à plusieurs reprises le Gouverneur de la banque centrale Zhou Xiaochuan. Par ailleurs la politique d’ouverture graduelle du compte de capital et d’internationalisation devrait se poursuivre. Ainsi, le 22 février, un rapport de la banque centrale présentant comment pourrait être relâché le contrôle des capitaux a été rendu public. Parallèlement, le planificateur central, la commission nationale pour le développement et la réforme (NDRC - National Development and Reform Commission) a dévoilé, le 30 décembre 2011, un plan sur cinq ans visant à faire de Shanghai une place financière internationale en 2015, plan dont l’effectivité reste toutefois à confirmer.

commerce extérieur dans le PIB

taux d'épargne de l'économie

Au total, la consommation devrait devenir le principal moteur de la croissance à compter de 2013. En 2012, la

Les évolutions des marchés immobiliers devraient être au cœur des préoccupations en 2012. Les prix des logements ont continué de baisser début 2012 dans 72 des 100 villes couvertes par l’indice China Real Estate Index

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System. Le Centre de prévision de la Chinese Academy of Social Sciences (CASS) estime que les prix immobiliers moyens en Chine baisseront de 5,3% en glissement annuel en 2012 du fait de l’évolution de la demande sur le marché et des politiques de contrôles, et en dépit de la croissance des revenus des ménages, de celle des prix du foncier et de l’urbanisation rapide. Cette stabilisation est voulue par le gouvernement central. Il est peu probable que le gouvernement revienne de manière générale sur les restrictions mises en place depuis 2010 sur le marché immobilier. En revanche, comme l’a suggéré Wen Jiabao à l’Assemblée populaire nationale, il semble possible qu’un réglage fin de ces politiques introduise plus de flexibilité dans les plus grandes villes. L’impact de cette baisse sur l’investissement et le secteur de la construction devrait être partiellement compensé par la montée en puissance du programme de logements sociaux qui prévoit la construction de 36 millions de logement d’ici 2015. Alors que l’objectif était la mise en chantier de 10 millions de logements sociaux en 2011, selon les chiffres du Ministère du logement, la construction de 10,43 millions de logements avait été lancée, et que 4,32 millions avaient été construits. Pour autant, le Ministère du logement en décembre 2011 a également reconnu que la plupart des mises en chantier avaient été recensées selon une approche maximaliste ; il a suggéré que le nombre de mises en chantier réelles étaient plutôt de l’ordre de 7 millions. Si cette déclaration suggère un risque que les objectifs de construction soient revus à la baisse dans les années à venir, le nombre de logement en cours de construction, qui est le paramètre le mieux corrélé avec l’investissement, devrait néanmoins connaitre une progression soutenue en 2012. A l’occasion de l’Assemblée populaire nationale, les objectifs de construction de 5 millions de logements sociaux et de mise en chantier de 7 millions ont été adoptés, faisant ainsi passer le nombre de logements sociaux en cours de construction de 7 millions à environ 12 millions entre la fin 2011 et la fin 2012. Les autorités devront cependant également résoudre la question du financement de ce programme, alors que les moyens de certaines collectivités locales sont limités. Une contribution plus importante qu’en 2011 du gouvernement central a été annoncée, le budget consacré au logement progressant de 23% en 2012 pour atteindre 212 Mds CNY. Par ailleurs le Ministère des finances et la NDRC imposent que les émissions obligataires des collectivités locales soient destinées prioritairement au financement du logement social. Les incertitudes persistent quant à la situation des finances des collectivités locales, et le gouvernement pourrait entamer une réflexion sur une réforme budgétaire et fiscale de grande ampleur. Le seul chiffre official actuellement disponible sur la situation des collectivités locales demeure celui d’un endettement de 10 700 Mds CNY (27% du PIB) fin 2010. Si le Premier ministre Wen Jiabao a affirmé lors de la conférence de travail annuelle du PCC que la dette des collectivités locales était dans l’ensemble « sûre et maîtrisable », la China Banking Regulatory Commission a indiqué qu’en

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2012 elle s’efforcerait de « nettoyer » les finances locales. Jusqu’ici, les autorités ont surtout mis en place les conditions d’un refinancement de cette dette, les banques étant encouragées à étendre la maturité des prêts octroyés et des émissions d’obligations de collectivités locales ayant été autorisées. Pour autant une réforme de plus grande ampleur du cadre budgétaire des finances locales semble souhaitable. Le Premier ministre Wen Jiabao a déjà indiqué que les financements extrabudgétaires, notamment les Local government financing vehicles, devraient être intégrés désormais dans les budgets des collectivités locales. Par ailleurs, un mécanisme d’alerte sera mis en place concernant leur endettement. Ces mesures pourraient préfigurer une réforme plus importante du cadre des finances locales et de la relation entre le gouvernement central et les collectivités locales. A cet égard, l’extension à tout le pays de la taxe foncière expérimentée à Chongqing et à Shanghai pourrait constituer le début d’une réforme dans le sens d’une plus grande autonomie budgétaire des collectivités locales. L’année 2012 pourrait enfin voir monter le débat sur la place des entreprises publiques dans l’économie chinoise. Dans son rapport China 2030 rédigé avec le Development Research Center – centre affilié au Conseil des affaires d’État – la Banque mondiale souligne la nécessité, pour le rééquilibrage de l’économie chinoise, de réduire l’épargne, l’investissement et la taille du secteur public, et notamment du poids des entreprises publiques dans l’économie. Le rapport recommande ainsi que ces dernières se recentrent sur la production de biens publics et que leur gestion s’appuie désormais sur des standards de transparence et de gouvernance internationaux. Selon ce rapport, cette réforme des entreprises publiques devrait également passer par une réforme du secteur financier pour que les grandes entreprises soient financées selon des mécanismes davantage orientés par le marché, l’augmentation de la pression concurrentielle sur les entreprises publiques, ou encore le versement par ces entreprises de dividendes plus conséquents au budget de l’Etat, permettant un renforcement des politiques éducatives et sociales au profit des ménages. Ces recommandations, qui pourraient susciter en 2012 de fortes résistances, semblent néanmoins être soutenues, dans une certaine mesure, par les autorités. Ainsi, le Premier ministre Wen Jiabao a indiqué, après la publication de ce rapport, que la promotion des investissements privés et la réforme des industries monopolistiques seraient les principales tâches inscrites à l'agenda économique de 2012. En cette année de transition politique, la tournure du débat, pour autant qu’il puisse être observable de l’extérieur, sera essentiel pour le positionnement de la nouvelle équipe dirigeante vis-à-vis de cet axe de réforme essentiel pour l’évolution du modèle de croissance chinois dans les années à venir. Florent Mangin Service économique régional de Pékin Michaël Sicsic Direction Générale du Trésor – Bureau diagnostic et prévision international

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Prévisions Chine DG Trésor – Tableau récapitulatif

En pourcentage

2009

2010

2011

2012

2013

PIB

9,2

10,4

9,2

8,5

8,7

Consommation

9,0

7,8

10,2

8,9

10,3

Formation brute de capital fixe

22,5

11,5

11,9

10,9

7,8

Importations

-2,0

28,4

8,2

9,4

12,0

Exportations

-11,7

27,0

5,3

6,9

11,8

Prix / marché du travail Prix à la consommation

-0,7

3,3

5,4

3,7

4,0

Salaire moyen par tête nominal

11,6

13,3

15,0

15,0

15,3

Productivité

8,5

8,6

8,4

8,2

8,0

Rééquilibrage de l’économie Taux d'épargne des ménages

41

43

42

42

42

Part de la consommation privée dans le PIB

36

33

34

33

33

Part de l'investissement dans le PIB

46

46

48

48

48

Taux d’épargne de l'économie

51

50

51

50

50

Extérieur Balance commerciale (pt de PIB)

4,4

3,9

2,6

2,5

2,6

Balance courante (pt de PIB)

5,3

5,2

3,3

3,0

3,0

Taux de croissance en volume

6

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Les échanges commerciaux entre la France et la Chine en 2011 Malgré une hausse importante des exportations françaises vers la Chine, tirée par l’aéronautique (30% de celles-ci) et le renforcement de certains secteurs (vins et spiritueux, chimie, automobile), l’appétence des consommateurs français pour les produits chinois maintient quasimécaniquement le déficit commercial bilatéral à 27 Mds EUR. Il est cependant à noter que dans un contexte de creusement important du déficit français (de -52 Mds EUR à -70 Mds EUR, soit -18 Mds EUR), le déficit avec la Chine n’a cru « que » de 500 millions EUR. La part de marché de la France dans les importations chinoises augmente légèrement à 1,27%. La stabilisation des exportations aéronautiques, le maintien du dynamisme de certains secteurs, et une moindre augmentation des importations chinoises du fait d’une croissance limitée en France (prévision officielle de 0,5 %) devraient conduire en 2012 à un déficit bilatéral voisin de celui de 2011.

1 - La forte augmentation des exportations françaises vers la Chine ne parvient pas à compenser l’évolution des importations en provenance de Chine L’année 2010 s’était conclue sur un déficit commercial record de la France avec la Chine de 26,4 Mds EUR, malgré une hausse des exportations françaises vers la Chine trois fois supérieure à celle des exportations françaises dans le monde, du fait de la poursuite quasimécanique de l’augmentation des importations chinoises en France (+23,5%). Cette situation a perduré en 2011. L’augmentation des exportations françaises vers la Chine (22,4%) reste presque trois fois plus importante que celle des exportations françaises dans le monde (+7,9%). Les Evolution du solde commercial entre la France et la Chine Mds €

40,4

37,4 31,2

30,2

30 20 10

13,5

11,0

9,0

7,9

0 2008

2009

2010

2011

-10 -20 -22,2

-21,9 -26,4

-30

Exportations

Importations

Dans les exportations françaises vers la Chine, la part de l’aéronautique reste prépondérante (presque 30%). En 2011, 36 A320 ont été livrés par la chaîne d’assemblage final de Tianjin (contre 25 en 2010). La croissance de +22,4 points des exportations est principalement due à l’aéronautique (+8,7 points), la chimie (+3,2 points), les vins et spiritueux (+2,9 points), les équipements électroniques (+1,8 points, composants, équipements télécoms et instrument de mesure, d’essais et de navigation), les autres produits agro-alimentaires (+1,7 points) et l’automobile (+1,1 point, dont 75% de pièces et 17 400 véhicules exportés depuis la France). A noter une nouvelle baisse de 72% des exportations de matériels de transport ferroviaire. Les importations de produits chinois en France restent principalement tirées par trois secteurs : les équipements électroniques (ordinateurs, téléphones, composants, contribution de +2,7 points à la croissance), le textile (contribution de +1,1 points) et les équipements électriques (transformateurs, éclairage et électroménager, contribution de +0,7 points). A noter la croissance à nouveau marquée des produits chimiques (contribution de +1,3 points) tirée par la chimie de base (organique comme minérale) et la progression de la chimie du plastique, ainsi que la nouvelle baisse des produits de santé (-15,1%) liée à la diminution des importations de produits pharmaceutiques de base.

(données douanes françaises)

40

2 - La structure du commerce bilatéral conserve ses tendances, malgré l’émergence de certains secteurs

-26,9

Solde commercial

importations chinoises en France augmentent (+8,1%) à la fois moins vite que les exportations et de manière moins importante que l’ensemble des importations françaises (+10,3%). Cependant, l’effet de base lié au niveau de ces importations crée au final un déficit qui se maintient à 26,9 Mds EUR. Il est à noter que les statistiques des autorités chinoises rapportent un déficit limité à 7,9 Mds USD (5,7 Mds EUR) en 2011 (après 10,5 Mds USD en 2010) du fait de différences de prise en compte des marchandises transitant via Hong-Kong et les ports européens, notamment dans le sens Chine vers France. L’écart entre les chiffres chinois et français s’est donc accru. La consolidation des échanges avec Hong-Kong dans les échanges avec la Chine réduit le déficit commercial global à 23 Mds EUR en 2011.

Structure des exportations de produits français en Chine en 2011 Agriculture et agroalimentaire 4,2% Santé 4,6%

(données douanes françaises) Autres secteurs 17,0%

Aéronautique 29,4%

Automobile 4,7% Mécanique, machines 11,6%

Equipements électriques 5,7% Equipements électroniques 6,2%

Boissons, vins et spiritueux 6,6%

Chimie, plastique, caoutchouc 10,0%

On constate que, hors vins et spiritueux, le solde sur les produits agroalimentaires (-28 millions EUR) reste légèrement négatif.

7

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– janvier - février 2012

Hors aéronautique, les exportations progressent de 20,0% et les importations de 9,1%, entraînant une dégradation plus marquée pour le solde hors aéronautique (-4,4%) que le solde global (-2,1%). 1

Selon les statistiques chinoises , la part de marché française en Chine se situe à 1,27% en 2011 (par rapport à 1,23% en 2010). La France semble avoir bien 2 tiré parti de la hausse des importations chinoises en 2011 . Cependant, la part de marché de l’Allemagne reste 4 fois supérieure à la part de marché française, à 5,33%

Structure des importations de produits chinois en France en 2011

non transformés du fait de la crise économique mondiale et de son impact sur le commerce chinois. En 2011, près de 10 000 entreprises françaises ont exporté en Chine, soit 8,5% des entreprises exportatrices (9500 pour 8% des entreprises en 2010). En 2010, 32,7% de ces entreprises étaient des filiales de groupes étrangers (pour 30% des exportations), 12,7% des grands groupes français (58% des exportations) et 66% des PME (12,5% des exportations). En matière de services, les statistiques 2011 ne sont pas encore disponibles. En 2010, les échanges étaient quasiéquilibrés pour des montants de 4,7 Mds EUR de part et d’autre.

(données douanes françaises)

Bois, Mobilier 3,6% Article métallique, outillage 4,0%

© DG Trésor

Santé 2,8%

Autres secteurs 12,7%

Equipements électroniques 31,5%

Rodolphe Pellé Service économique régional de Pékin

Chimie, plastique, caoutchouc 5,4%

Maroquinerie , cuir , chaussures 6,0%

Mécanique, machines 7,9%

Textiles, vêtements Equipements 16,8% électriques 9,3%

(voir annexe 1). La baisse tendancielle de la part de marché française s’inscrit néanmoins dans la baisse tendancielle de long terme de celle des grands partenaires de la Chine (Japon, Etats-Unis, Union européenne, Taïwan, Corée du Sud, voir annexes 2 et 3), à l’exception notable de l’Allemagne, du fait notamment de la hausse de la part des pays exportateurs de matières premières (Afrique, Australie). On peut noter plus récemment le rebond récent des importations en provenance des pays de l’ASEAN depuis 2008, susceptible de traduire une réorganisation de la chaîne de valeur entre ces pays. L’UE, dont la part de marché se stabilise, devient le premier fournisseur de la Chine devant le Japon en 2011, la crise de Fukushima ayant probablement accentué la perte de part de marché du pays du soleil levant. On peut noter également la relative résistance à la crise en 2009 des importations en Chine de produits européens, dont semble avoir bénéficié en priorité l’Allemagne, liée probablement à une moindre importation en Chine de matières premières ou de produits

1

Comme déjà signalé, celles-ci présentent des différences importantes avec celles des douanes françaises. Les chiffres des douanes chinoises sont donc utilisés dans cette note pour des comparaisons dans le sens des exportations françaises vers la Chine, du fait d’une certaine proximité avec les chiffres français, mais pas dans le sens des importations de produits chinois en France. Les valeurs utilisées ici, sauf mention contraire, sont celles exprimées en euro. 2 La hausse des importations de produits français en Chine est supérieure à la hausse des importations totales chinoises, avec une différence encore plus marquée hors énergie et matières premières. Cette hausse est même un peu supérieure à la hausse des importations allemandes.

8

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Annexe 1 Comparaison communautaires

Evolution des parts de marché annuelles en Chine de pays de l'UE (données douanes chinoises) 16%

14%

14,63% 13,06%

12%

12,86%

12,74%

12,34% 11,41%

11,61%

11,74%

4,65%

4,79%

4,75%

4,94%

11,14%

10%

12,09%

12,13%

5,57%

5,34%

5,33%

8% 5,62%

6%

5,57%

5,90% 5,38%

4% 1,69%

2%

1,44%

1,48%

1,37%

1,37%

1,43%

1,40%

1,38%

1,30%

1,23%

1,27%

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

0% 2001

Union européenne

Allemagne

France

25%

(source: données Eurostat)

45% 40% 35% 39,5%

41,5%

44,0% 43,4%

42,5% 41,5% 43,4% 40,8%

45,2%

47,4% 47,4%

Royaume-Uni

Evolution de la part des principaux pays importateurs européens dans les importations de l'Union européenne en provenance de Chine

Evolution de la part des principaux pays exportateurs européens dans les exportations de l'Union européenne vers la Chine 50%

Italie

22,1%

(source: données Eurostat) 22,5% 22,0% 22,2% 21,9% 22,1% 21,1% 21,2% 20,9% 20,8% 21,1%

20% 15%

30% 25%

10%

20% 15% 11,6% 10,6% 11,3% 11,1% 12,2% 12,6% 12,5% 11,4% 9,6% 9,8% 9,9% 10%

10,2% 9,5% 9,0% 9,1% 9,0% 5%

8,1% 7,8% 7,7% 8,3% 8,2% 8,4%

5% 0%

0%

Allemagne

France

Royaume-Uni

Italie

Allemagne

France

Royaume-Uni

Italie

9

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Annexe 2 Evolution des importations chinoises depuis 1995 et évolution de la part de marché des grands partenaires commerciaux de la Chine Evolution annuelle des importations chinoises MdsUSD

(source: données douanes chinoises) 2 000 1 741

1 800 1 600 1 394 1 400 1 132

1 200

1 004

956

1 000 792 800 660 561

600 413 400 200 132

139

142

140

166

1996

1997

1998

1999

295

225

244

2000

2001

0 1995

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

Evolution annuelle des parts de marché des grands partenaires de la Chine (source : données douanes chinoises) 25%

20%

16,1% 15,4% 14,8%

14,3%

15%

14,6% 13,7%

13,5%

13,1%

12,9%

12,7%

12,3% 11,1%

11,4%

11,6%

11,7%

2006

2007

2008

12,1%

12,1%

2010

2011

10%

5%

0% 1995

1996 ASEAN

1997

1998

1999

Union Européenne

2000

2001 Afrique

2002 Japon

2003

2004 Corée du Sud

2005

Taïwan

Australie

2009

Etats-Unis

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Le creusement des inégalités de revenus en République Populaire de Chine Les inégalités de revenus en République Populaire de Chine se sont creusées parallèlement à la politique de développement de la Réforme Economique lancée en 1978 par Deng Xiaoping pour atteindre des niveaux très élevés, ce qui a conduit à une prise de conscience croissante au sein de la société au tournant du siècle. La progression des revenus à la fin du XXe siècle a été en effet marquée par un accroissement des inégalités entre les populations urbaines et les populations rurales, entre les différentes provinces et les différents secteurs de l’économie. A partir des données officielles chinoises, qui tendent pourtant à sous-estimer les hauts niveaux de revenus et les inégalités, on observe que ces tendances se poursuivent pendant la dernière décennie, sans réaction marquée du gouvernement central.

Depuis le début de la transition économique de la Chine, avec notamment une croissance moyenne de l’économie chinoise de 9,6% sur la période 1985-2000 selon les données officielles du National Bureau of Statistics (NBS), les revenus moyens augmentent très rapidement, au rythme annuel de +15,6% pour le revenu disponible urbain et de +12,6% pour le revenu net rural (respectivement +6,0% et +4,1% après correction de l’inflation des prix à la consommation). En parallèle, les inégalités de revenus s’accroissent, en particulier au sein des zones rurales et 1 urbaines, et entre elles , du fait des disparités et de la faible croissance des revenus dans l’entreprenariat agricole individuel ou familial en zone rurale, ainsi que des écarts de croissance des salaires dans les différents secteurs 2 d’activités en zone urbaine . 3

D’après la Banque Mondiale, le coefficient de Gini , qui donne un degré d’inégalité dans la distribution des revenus, 4 est passé de 0,26 en 1985 à 0,40 en 2000 en Chine. Le coefficient aurait continué d’augmenter au début des années 2000 pour atteindre 0,42 en 2005 d’après la Banque Mondiale. Le suivi de l’évolution des inégalités reste difficile à effectuer en Chine de façon fiable à cause de l’opacité des données sur la distribution des revenus de la population chinoise. On peut supposer en particulier que les chiffres sur les revenus, et notamment les hauts revenus, sont minorés car ils proviennent de déclarations fiscales. Toutefois, à partir des données concernant le marché chinois du travail et des données des sondages des ménages urbains et ruraux, il est possible de donner une idée de l’évolution de la répartition des revenus en Chine entre 2000 et 2010. 1 – D’après les données officielles, les inégalités de revenus continuent d’augmenter dans les années 2000 Les données sur la répartition des revenus en Chine sont fournies par le département des sondages sur les ménages urbains et ruraux du NBS. Ces sondages portent, fin 2010, sur 65 607 ménages urbains et 68 190 ménages ruraux qui sont interrogés sur les montants et les sources de leurs revenus, ainsi que sur leurs dépenses. Les ménages 1

“China’s Income Distribution, 1985-2001”, 2005, Wu X. & Perloff J.M. “Income Inequality during China’s Economic Transition”, 2005, Benjamin D., Brandt L., Giles J. & Wang S. 3 Le coefficient de Gini représente l’écart de concentration des revenus entre celle d’une distribution égalitaire des richesses et celle de la distribution du pays, représentée par la courbe de Lorenz. Il prend une valeur comprise entre 0 et 1, une valeur supérieure à 0,4 étant souvent citée comme reflétant de fortes inégalités (cf. Wang Xiaolu, 2007, « Gray Income and the Household Income Gap », Finance) 4 World Development Report 2006, Equity and Development, July 2004, The World Bank ; “China’s (Uneven) Progress Against Poverty”, 2004, Ravaillon M. & Chen S., World Bank Policy Research Working Paper No. 3408 2

urbains sont regroupés en 7 classes par niveau de revenu, 5 les ménages ruraux en 5 classes , et les niveaux moyens de revenu sont calculés pour chaque classe. Dans la suite de l’étude, nous appelons « revenu » le revenu nominal par tête après redistribution, c’est-à-dire le revenu disponible par tête pour les ménages urbains et le revenu net par tête pour les ménages ruraux. La répartition par classe des revenus nous permet de calculer les coefficients de Gini approchés pour les populations urbaines et rurales, ainsi que d’estimer des coefficients pour l’ensemble de la Chine (Graphique 1), qui auront toutefois tendance à être sous-évalués à cause de l’absence de données sur la répartition des revenus pour 6 l’ensemble des ménages chinois . Alors que la progression réelle des revenus a été entre 2000 et 2010 de +9,7% pour les urbains et de +7,4% pour les ruraux, l’évolution des coefficients de Gini, ajustée du coût de la vie et en prix constants de l’an 2000, indique un fort accroissement des inégalités sur la période 2000-2005 pour la population urbaine dont le coefficient de Gini passe de 0,25 à 0,34, avant de se stabiliser à 0,34 en 2010 (0,33 en prix courants), tandis qu’une tendance croissante des inégalités se dessine pour la population rurale, qui voit son coefficient de Gini passer de 0,35 en 2000 à 0,38 en 2010 (0,37 en prix courants). Le coefficient estimé de Gini en prix constants pour la population totale quant à lui passe de 0,39 à 0,47 sur la période 2000-2009 et s’établit à 0,45 en 2010 (0,44 en prix courants). L’étude de la concentration des revenus nominaux (Graphique 2) montre quant à elle que les 10% plus hauts revenus (20% des plus hauts revenus urbains 5 Le NBS définit les parts dans le total des ménages par ordre croissant de revenus. Les pourcentages choisis sont 10%, 10%, 20%, 20%, 20%, 10%,10% pour les ménages urbains et 20%, 20%, 20%, 20%, 20% pour les ménages ruraux. 6 Un coefficient de Gini sur l’ensemble de la population chinoise n’est ainsi pas directement calculable, et la simple agrégation des répartitions pose un problème de regroupement des ménages car deux classes différentes de ménages pourraient incorporer des ménages de « classes équivalentes ». En considérant cet aspect, nous reclassons par ordre croissant de revenu moyen les classes de revenus issues des deux répartitions fournies par le NBS et agrégeons par la moyenne les classes intermédiaires qui sont susceptibles de « s’empiéter », à savoir les deux classes rurales les plus riches et les trois classes urbaines les plus pauvres, ce qui toutefois tend à réduire la convexité de la courbe de Lorenz et à sous-estimer le coefficient de Gini. Par ailleurs, les parts des différentes classes dans la répartition totale sont pondérées différemment chaque année par la part de la population rurale ou urbaine dans la population totale, et, pour l’analyse de l’évolution des coefficients dans le temps, les revenus de chaque classe sont ajustés de leur coût de la vie respectif et en prix constants de l’an 2000 à partir de leur structure de consommation et des indices de prix à la consommation de chaque catégorie de biens et services consommés, améliorant ainsi la comparabilité inter-population et intertemporelle des niveaux de revenus (cf. “Taking price seriously in the measurement of inequality”, 2002, Pendakur K., Journal of Public Economics Vol. 86-1, p. 47-69).

11

– janvier - février 2012

7

dans notre étude ), dont le revenu nominal moyen annuel en 2010 s’élève à 41 038 CNY (6 174 USD) par ménage soit 22 fois celui des 10% les plus pauvres (20% des ruraux les plus pauvres), se répartissent 30,7% des revenus nominaux nationaux en 2010, contre 27,9% en 2000. Graphique 1. Coefficients de Gini en Chine, 2000-2010

Population totale

0,44 (prix constants 2000)

Coefficient de Gini

0,48

Population rurale

0,40 0,36 0,32 0,28

© DG Trésor

Graphique 2. Concentration des revenus en Chine en prix courants, 2010

Part cumulée des revenus nominaux

Bulletin Economique Chine

100% 90%

Distribution égalitaire

80% 70% 60% 50% 40% 30%

Courbe de Lorenz*

20% 10% 0% 0%

Population urbaine

20%

40%

60%

80%

100%

Part cumulée des ménages

0,24

Sources : NBS, SER de Pékin *approximation (cf. note de bas de page n°6) Sources : NBS, SER de Pékin

La comparaison avec les coefficients de Gini publiés par 8 l’Organisation pour la Coopération et le Développement 9 économique (OCDE) et la Banque Mondiale (Graphique 3) peut donner une idée générale des inégalités en Chine par rapport à d’autres pays dans le monde, bien qu’il ne faille pas oublier le problème de la comparabilité internationale de cet indicateur du fait des méthodologies de collecte des données de revenus et des biais de sélection propres à chaque pays. Deux catégories de pays (selon la classification de la Banque Mondiale) par niveau de revenus sont retenues pour notre étude, à savoir les pays à « hauts revenus » et les pays à « revenus intermédiaires de la tranche supérieure », catégorie dans laquelle se trouve 10 désormais la Chine . Au vu des données, la Chine, avec notre coefficient de Gini, sous-estimé (des économistes 11 chinois l’évaluent à 0,5 ), de 0,44 en 2010, est plus inégale que les pays à hauts revenus dont le coefficient de Gini est en moyenne de 0,30 et ne dépasse pas 0,41. Par rapport aux pays de sa classe de revenu, la Chine se place dans la moyenne, et proche de la médiane, des 37 pays constituant sa classe de revenu, dont le coefficient moyen est de 0,43.

7

En 2010, la population urbaine (669 780 millions) égale presque la population rurale (671 130 millions) selon les données issues du recensement de la population chinoise. 8 http://stats.oecd.org 9 World Development Indicators (WDI), http://data.worldbank.org 10 Les données pour les pays « High income: OECD » sont fournis par l’OCDE et celles des pays « High income: non-OECD » et « Upper middle income » par la Banque Mondiale. Seules les données postérieures à 2004 ont été retenues. 11 ”2nd Survey Study of Wang Xiaolu’s report on China’s Grey Income and Income Distribution”, Analysing Chinese Grey Income, 6 août 2010, Credit Suisse Expert Insights, Asia Pacific/China, Equity Research.

2 – Des inégalités dues à des disparités croissantes à la fois entre urbains et ruraux, entre provinces et entre secteurs Le coefficient de Gini, dont le seul intérêt est la comparabilité inter-temporelle, n’apporte cependant qu’un indice très synthétique sur l’évolution des inégalités. La compréhension des inégalités de revenus nécessite une analyse des différents déterminants de la distribution de ces derniers. Les écarts de distribution des revenus en Chine 12 s’expliquent par trois facteurs principaux : les écarts entre revenus urbains et revenus ruraux, les écarts entre les provinces et les écarts entre les différents secteurs d’activités.

2.a – La distribution des revenus est de plus en plus inégale entre et au sein des populations urbaines et rurales L’étude des revenus des ménages urbains et ruraux permet d’examiner l’évolution des inégalités nationales via celle entre les populations urbaine et rurale (« between inequality ») et celle au sein de chacune d’entre elles («within inequality »). Les inégalités entre ces deux catégories ont un effet d’aggravation sur les inégalités nationales lorsque l’ « effet de revenu » dû à l’écart croissant entre les revenus urbains et ruraux (le groupe le plus riche a le plus haut taux de croissance du revenu) est supérieur à l’ « effet de proportion » causé par l’urbanisation (la population riche devient relativement plus importante). 13 Yang (1999) montre que l’accroissement des inégalités de revenus en Chine s’explique par celle entre les revenus urbains et les revenus ruraux, et suggère que les politiques et les institutions en faveur des populations urbaines en place en sont la principale cause (par exemple l’obtention difficile pour les populations migrantes du hukou, un permis de résidence donnant accès aux aides sociales et aux postes à haute rémunération – la plupart des travailleurs

灰色收入与居民收入差距

12 “ ” (« Le Gray Income et les Ecarts de Revenus des Ménages »), 2007, (Wang Xiaolu), National Economic Research Institute. 13 “Urban-Biased Policies and Rising Income Inequality in China”, 1999, Yang D.T., American Economic Review Papers and Proceedings 89:2, 306-10.

王小鲁

12

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Graphique 3. Indices de Gini par pays

Coefficient de Gini

Revenus médians supérieurs

Hauts revenus

0

0,1

0,2

0,3

0,4

0,5

0,6

0,7

SVN DNK NOR CZE SVK BEL FIN SWE AUT HUN LUX FRA IRL NLD DEU ISL CHE POL GRC EST KOR ESP CAN JPN NZL AUS HRV ITA GBR PRT ISR USA QAT BLR SRB MNE KAZ ROM AZE ALB LVA BIH MDV LTU JOR IRN TUN TUR GAB RUS URY THA VEN CHN MKD BGR JAM ARG MYS PER DOM ECU CRI MEX CHL PAN BRA COL SYC ZAF

© DG Trésor

Graphique 4. Ecart entre revenus moyens urbains et ruraux en prix constants, 2000-2010 3,6

20%

Croissance réelle du revenu disponible urbain

3,4

Ratio urbain / rural

15%

3,2 10%

3,0 5%

2,8 Croissance réelle du revenu net rural

2,6

Taux annuel de croissance réelle

migrants demeurent recensés parmi la population rurale). 14 explique lui l’augmentation rapide des Chang (2002) inégalités et le risque de maintien de niveaux élevés d’inégalités à long-terme par l’incapacité des zones urbaines à assimiler rapidement les migrations rurales. Selon les données officielles, la part de la population urbaine est passée de 36,2% en 2000 à 49,9% en 2010, et les statistiques sur les revenus moyens de populations rurales et urbaines (Graphique 4) indiquent que l’écart entre le revenu urbain et le revenu rural s’est accru sur la même période, les revenus réels urbains ayant augmenté annuellement de +9,7% en moyenne, soit plus fortement que les revenus réels ruraux qui ont crû de +7,4% chaque année en moyenne sur la période. Le ratio réel du revenu urbain moyen sur le revenu rural moyen est ainsi passé, en prix constants, de 2,8 en 2000 à 3,4 en 2010 (3,2 en prix courants). Une tendance vers un rattrapage de la croissance réelle des revenus urbains par celle des revenus ruraux est toutefois observable, cette dernière dépassant la croissance réelle urbaine en 2010.

Ratio (prix constants 2000) : revenu disponible urbain / revenu net rural

Bulletin Economique Chine

0%

Sources : NBS, SER de Pékin

La comparaison des revenus moyens et de la taille des deux composantes de la population ne suffit pas à elle seule pour étudier l’effet de l’urbanisation sur la distribution des revenus. En effet, s’il y a migration vers une population relativement plus riche, la distribution des revenus au sein de celle-ci en est affectée, c’est pourquoi il convient d’analyser l’évolution des inégalités au sein des populations rurales et urbaines. Les données sur les revenus et leur taux de croissance des différentes classes de ménages 15 pour chaque population (Tableau 5) montrent que sur la période 2000-2010 les classes de ménages ayant un revenu relativement élevé ont aussi un taux moyen de croissance réelle de leur revenu plus important. En particulier, l’étendue des taux moyen de croissance réelle de la période est plus importante pour les urbains, aux taux de croissance réelles entre +5,8% et +13,0%, que pour les ruraux, aux taux de croissance réelles entre +5,6% et +7,7%. Au sein de la population urbaine le rapport entre le revenu nominal moyen des 10% les plus riches et celui des 10% les plus pauvres est passé de 5,0 à 8,7 entre 2000 et 2010. En comparant avec les ruraux, les 20% les urbains les plus riches ont un revenu nominal moyen 5,4 fois plus élevé que les 20% les urbains les plus pauvres en 2010, contre 3,6 en 2000, tandis qu’au sein de la population rurale, les 20% les plus riches touchent en moyenne un revenu nominal 7,5 fois plus élevé en 2010, contre 6,5 en 2000, que les 20% les plus pauvres. L’augmentation des inégalités interquintiles et interdéciles au sein de chaque populations est cohérente avec l’accroissement de leurs coefficients de Gini respectifs (Graphique 1). Les deux méthodes font aussi ressortir d’une part que les inégalités urbaines ont augmenté plus vite que les inégalités rurales. Par ailleurs, les inégalités rurales sont restées plus élevées, ce qui pourrait être lié à l’apparition de poches de richesse dans un rural où subsistent également des populations très pauvres.

Sources : Banque Mondiale, OCDE, NBS, SER de Pékin, NB : ces indices n’ont pas tous été calculés pour la même année, mais entre les années 2005 à 2010 selon les pays

15

14 “The Cause and Cure of China’s Widening Income Inequality”, 2002, Chang G.H. , China Economic Review 13, 335-400.

Une analyse des taux de croissance pour la population chinoise dans son ensemble poserait des problèmes de comparabilité intertemporelle, car les parts des populations urbaines et rurales dans la population totale varient dans le temps avec l’urbanisation de la Chine. Les classes de revenus ne sauraient donc concerner les mêmes classes de population dans le cadre d’une analyse between inequality.

13

Bulletin Economique Chine

– janvier - février 2012

Tableau 5. Revenus urbains et ruraux par classe en 2010 et taux moyens de croissance réelle depuis 2000

Classe de revenu (% des ménages) Ménages ruraux (20%) basse (20%) moyenne basse (20%) moyenne (20%) moyenne haute (20%) haute Ménages urbains (10%) très basse (10%) basse (20%) moyenne basse (20%) moyenne (20%) moyenne haute (10%) haute (10%) très haute

Revenu moyen par tête en 2010 (RMB)

Variation réelle moyenne annuelle depuis 2000

5 919 1 870 3 621 5 222 7 441 14 050 19 109 5 948 9 285 12 702 17 224 23 189 31 044 51 432

+7,4% +5,6% +6,4% +6,9% +7,3% +7,7% +9,7% +5,8% +7,3% +8,2% +9,0% +9,9% +10,7% +13,0%

Sources : NBS, SER de Pékin

2.b – Les revenus provinciaux s’éloignent du niveau médian Les évolutions provinciales des revenus affectent aussi les inégalités nationales, comme le niveau et la progression des revenus de chacune des provinces sont notamment affectés par leur taux et leur vitesse d’urbanisation respectifs. Pour mesurer les inégalités, les ratios entre le revenu disponible 16 moyen de chaque province et le revenu provincial 17 médian , estimé dans l’étude à 10 525 CNY (1 555 USD) en 2010 en prix courants et à 3 412 CNY (412 USD) en 2000, sont calculés (Tableau 6). Ceux-ci montrent que 14 provinces sur les 31 en Chine ont en 2010 un revenu significativement plus éloigné du revenu provincial médian qu’il ne l’était en 2000. Elles font partie soit des provinces les plus riches, soit des provinces les plus pauvres. D’après 16

Les revenus disponibles moyens par province sont obtenus par la moyenne des revenus urbains et ruraux par province pondérées par les taux d’urbanisation par province. Cependant, les données provinciales de recensement de la population urbaine et rurale ne sont disponibles que sur la période 2005-2009. Les taux d’urbanisation par province pour 2000 et 2010 sont alors estimés en appliquant les taux annuels de croissance moyenne des populations urbaines et rurales par province sur la période disponible. 17 Le revenu disponible médian national est par définition le niveau de revenu qui partage la population nationale en deux parties égales, soit celui dont la fréquence cumulée croissante est égale à 50%, et évolue en prenant en compte à la fois la progression et la distribution des revenus. Comme nous étudions les écarts de revenus entre les régions, nous calculons plutôt le revenu provincial médian, obtenu à partir de la fréquence cumulée de la répartition des revenus par province. Il est donc différent au revenu national médian, obtenu à partir de la fréquence cumulée de la répartition nationale qui n’est pas fournie par le NBS mais que nous pouvons approximer à partir des données rurales et urbaines de la même façon que pour le calcul du coefficient de Gini mais qui surestime les niveaux médians. Le revenu national médian est ainsi estimé à 9 455 CNY (1 397 USD) en 2010 et à 2 972 CNY (359 USD) en 2000.

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les résultats de l’analyse provinciale, l’effet des disparités provinciales sur les inégalités de revenu en Chine réside donc dans l’appauvrissement relatif des provinces à bas revenu par rapport au reste de la Chine et à la croissance réelle moyenne plus rapide des revenus des ménages dans les provinces riches.

2.c – Le retard des secteurs à bas salaires s’aggrave L’impact des différents secteurs de l’économie sur la répartition des revenus provient principalement des inégalités des salaires entre ces secteurs, dont la ventilation est fournie par les données officielles du NBS sur le marché du travail en Chine et n’est disponible qu’à partir de 2003. Ces données concernent uniquement le personnel des sociétés enregistrées (excluant ainsi les entreprises 18 municipales, familiales ou individuelles) . De façon similaire à l’analyse provinciale, les ratios entre le salaire moyen de chaque secteur et le salaire sectoriel médian en 2000 et en 2010 sont comparés (Graphique 7), en prix constant. Les ratios indiquent que les secteurs à bas salaire moyen en 2010, notamment les activités agricoles, l’hôtellerie et la restauration, les services d’utilité publique, la construction et les services résidentiels, ont un niveau de salaire qui s’écarte de la médiane depuis 2000, tandis que le secteur de la banque et de l’assurance, dont la progression des salaires annuelles a été en moyenne de 19% entre 2000 et 2010, s’éloigne très rapidement de la médiane. Les disparités sectorielles influencent donc les inégalités de revenus en Chine en raison d’un retard de plus en plus important des secteurs d’activités à bas salaires par rapport aux autres secteurs. 3 – Après une lente prise de conscience, la Chine, dans le XIIe plan quinquennal, se fixe des objectifs pour limiter les inégalités L’accélération du creusement des inégalités en République Populaire de Chine apparaît comme une conséquence de la 19 Réforme Economique engagée à partir de 1978 par Deng Xiaoping et qui a marqué le passage d’une volonté d’Etat providence à la réalité d’un Etat investisseur. En effet, bien que la pauvreté ait été fortement réduite (surtout pour les populations rurales avec la décollectivisation de l’agriculture) pendant la première phase de la Réforme Economique et que les niveaux de vie aient significativement augmenté par rapport à la période avant la Réforme Economique, les écarts provinciaux se sont aggravés avec la décentralisation du gouvernement, et les écarts sectoriels avec la privatisation partielle des différents secteurs de l’économie (les monopoles ou oligopoles d’Etats ont été et continuent actuellement d’être protégés dans certains secteurs-clés tels que la banque et l’assurance, le pétrole ou les télécommunications).

18 Ce recensement partiel de la distribution des salaires aura tendance à surestimer les niveaux de rémunérations pour les secteurs comprenant une part non négligeable de la main d’œuvre chinoise non incluse ou non déclarée dans les sociétés, à savoir les personnels des entreprises non sociétaires, mais aussi les travailleurs migrants dont la population est estimée à 242 millions en 2010 d’après les données officielles. 19 Benjamin et al. (2005), cf. infra.

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Bulletin Economique Chine

– janvier - février 2012

Tableau 6. Revenu disponible moyen par province en 2010 et écarts au revenu médian, 2000 et 2010 Revenu disponible nominal moyen par tête et par province*, 2010 (RMB)

1 Shanghai 2 Beijing 3 Tianjin 4 Zhejiang 5 Guangdong 6 Jiangsu 7 Fujian 8 Liaoning 9 Shandong 10 Inner Mongolia 11 Chongqing 12 Jilin 13 Hubei 14 Hebei 15 Hunan 16 Heilongjiang 17 Hainan 18 Jiangxi 19 Anhui 20 Shanxi 21 Ningxia 22 Henan 23 Guangxi 24 Shaanxi 25 Sichuan 26 Xinjiang 27 Yunnan 28 Qinghai 29 Tibet 30 Guizhou 31 Gansu

29 779 26 754 21 264 20 674 18 145 16 993 14 952 13 473 13 358 12 215 11 795 11 147 10 609 10 530 10 524 10 500 10 436 10 128 9 886 9 861 9 692 9 641 9 633 9 333 9 255 8 290 8 213 8 110 6 769 6 745 6 679

Ratio avec la médiane**

2000 3,25 2,73 2,00 2,04 2,09 1,46 1,47 1,19 1,24 0,96 1,04 1,01 1,04 1,02 1,00 1,04 1,02 0,89 0,84 0,87 0,86 0,77 0,86 0,75 0,87 0,87 0,78 0,83 0,83 0,66 0,69

Part de la pop. Chinoise 2010

3,07 2,86 2,14 2,10 1,89 1,67 1,54 1,35 1,32 1,19 1,17 1,09 1,01 1,02 1,01 1,02 1,03 1,01 0,97 0,96 0,89 0,91 0,93 0,90 0,86 0,77 0,78 0,69 0,67 0,65 0,61

1,7% 1,5% 1,0% 4,1% 7,8% 5,9% 2,8% 3,3% 7,2% 1,9% 2,2% 2,1% 4,3% 5,4% 4,9% 2,9% 0,7% 3,3% 4,5% 2,7% 0,5% 7,1% 3,5% 2,8% 6,0% 1,6% 3,4% 0,4% 0,2% 2,6% 1,9%

Sources : NBS, SER de Pékin, *approximation (cf. note de bas de page n°17), **revenu provincial médian, le ratio en 2010 est en prix constants 2000, et les valeurs en rouge indiquent une augmentation significative de l’écart à la médiane entre 2000 et 2010

Alors que la progression des revenus a été un objectif gouvernemental permanent pour l’économie chinoise à travers les plans quinquennaux, la redistribution des ème revenus n’est mentionnée qu’à partir du 9 Plan ème quinquennal (qui couvre la période 1996-2000). Le 12 Plan quinquennal, actuellement en vigueur jusqu’en 2015, est quant à lui plus novateur. Il définit, en plus d’un objectif de progression réelle des revenus disponibles urbains et ruraux d’au moins 7%, des objectifs de réduction des inégalités à travers trois canaux : la réforme des salaires, la redistribution et la régulation des revenus. Concernant les salaires, le plan prône la réduction des écarts sectoriels en rendant le système de répartition des revenus « transparent, juste et équitable », notamment celle des entreprises étatiques, en réformant le système de

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rémunération des hauts fonctionnaires et en définissant une augmentation progressive des salaires minimums de 13% en moyenne par an ainsi qu’un seuil minimum par province de 40% du salaire moyen urbain local. Graphique 7. Salaire moyen annuel par secteur d’activités, 2003-2010

Sources : NBS, SER de Pékin, les poids de chaque secteur dans la main d’œuvre nationale enregistrée sont entre parenthèses, les ratios en rouge indiquent un revenu plus éloigné de la médiane en 2010

Le système fiscal doit quant à lui permettre une meilleure redistribution des revenus en allégeant la pression fiscale sur les faibles et moyens revenus et en encadrant les hauts revenus. La récente réforme de la taxation des revenus individuels publiée en septembre 2011 a en effet élevé les seuils des tranches d’imposition (la première tranche est passée de