axel schoenert

king, pour avoir un maximum de relations. La jeune génération ..... rock n'roll. La même déco s'impose ... pour envelopper au maximum le ou les utilisateurs.
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DESIGNING THE FUTURE OF WORK Travail collaboratif, mobilité, flexibilité, agilité… l’esprit startup a infusé dans les entreprises au point de bouleverser leurs espaces de travail. Témoins de cette transformation, Les Echos–Le Parisien MÉDIAS et MAISON&OBJET, rendez-vous international des professionnels de la décoration, du design et de l’art de vivre, se sont associés pour dresser un état de l’art de la décoration de bureaux, préambule à l’ouverture d’un espace dédié baptisé WORK! lors de la prochaine édition du salon MAISON&OBJET du 6 au 10 septembre 2019 à Paris.

DESIGNING THE FUTURE OF WORK

SOMMAIRE 3-4

ENTRETIEN

avec Philippe Brocart, directeur général de MAISON&OBJET

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SONDAGE

Les Échos-Le Parisien MÉDIAS

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TRANSFORMATION DIGITALE : quel impact sur l’art de travailler ?

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3 QUESTIONS À JEAN-NOËL CHAINTREUIL

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LES ASPIRATIONS NOMADES DES MILLENNIALS

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3 QUESTIONS À FLORE PRADÈRE

©  Alexis Narodetzky

Fondateur de Change Factory

Directrice de recherche et prospective Bureaux chez JLL

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QUAND LES BUREAUX NOURRISSENT LA MARQUE EMPLOYEUR 3 QUESTIONS À SÉVERINE LEGRIX DE LA SALLE

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Fondateur de Welcome to the Jungle

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UN BEAU BUREAU IMPACTE-T-IL LA PRODUCTIVITÉ ?

AMBIANCE, ESPACES, OBJETS

les nouvelles tendances déco au bureau. Interview de Chantal Hamaide, experte en design

Directrice du projet Bridge chez Orange

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3 QUESTIONS À JÉRÉMY CLÉDAT

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DÉCORATION DU BUREAU : ET SI ON PARLAIT RÉÉDITION ? Interview d’Isabelle de Ponfilly, directrice générale France de Vitra

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BUREAUX : COMMENT SORTIR DE LA GLOBALISATION DU COOL ?

Interview d’Axel Schoenert, architecte des espaces WeWork de Paris

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MAISON & OBJET X LES ÉCHOS – LE PARISIEN MÉDIAS

N E I T E R EN T DESIGNING THE FUTURE OF WORK

©  Anne-Emmanuelle Thion

AVEC PHILIPPE BROCART

Directeur Général de MAISON&OBJET

MAISON&OBJET inaugure en septembre un nouvel espace dédié à l’univers du travail, pourquoi ? Depuis quelques années, nos exposants, les éditeurs et les fabricants de mobilier sont confrontés à l’hybridation des espaces de travail qui les a conduits à adapter leur offre et leur style. Car il s’agit pour eux de répondre à une demande qui se concentre aujourd’hui sur la mobilité, la convivialité, le confort, la personna­lisation et la flexibilité. Partout, les bureaux se transforment en lieux de vie invitant les fabricants traditionnels de mobilier de bureau à concevoir des collections plus résidentielles et les marques plus « maison » à proposer des produits spécifiques aux besoins des entreprises. Les agenceurs et les concepteurs rivalisent aussi d’imagination pour proposer de véritables lieux de vie. Tout le monde est concerné jusqu’aux promoteurs immobiliers

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challengés par les opérateurs d’espaces de coworking qui bouleversent le paysage du travail.

D’où vient selon vous cette révolution ? Elle a plusieurs origines. À commencer par la transformation digitale qui non seulement a rendu aux collaborateurs leur liberté physique mais conduit également les entreprises à désiloter leurs services pour faciliter les échanges. Les startups du digital, les incubateurs, les Fablab et autres espaces de coworking ont été précurseurs dans cette nouvelle manière d’appréhender les espaces de travail. Aux États-Unis, le terme de « resimercial » a émergé, contraction de « residential » et de « commercial », car il s’agit bien de créer des ambiances qui ressemblent plus à un aménagement intérieur de maison qu’à un traditionnel espace de bureau.

MAISON & OBJET X LES ÉCHOS – LE PARISIEN MÉDIAS

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ENTRETIEN AVEC PHILIPPE BROCART

Que verra-ton sur WORK! du 6 au 10 septembre à MAISON&OBJET ? WORK! est une zone au sein du salon qui présentera une offre de mobilier d’aménagement de bureaux, mais aussi d’accessoires et autres objets créatifs rassemblés dans un espace What’s New? Un cycle de conférences dédié s’y tiendra et un espace de rendez-vous d’affaires y est également prévu. S’y ajoutera un parcours au sein de l’ensemble du salon permettant d’identifier les exposants en mesure de répondre aux besoins d’aménagements.

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MAISON & OBJET X LES ÉCHOS – LE PARISIEN MÉDIAS

©  Francis Amiand

Les millennials ont-ils accéléré cette transformation ? Oui sans aucun doute. L’arrivée des « millen­ nials », hyper-connectés, communautaires et en quête de sens, a profondément changé le regard porté par les salariés sur l’entreprise au point d’obliger celle-ci à revoir ses méthodes de management. Si le salaire ou la mission restent évi­ demment importants dans leur décision de rejoindre ou non un employeur, de nouvelles motivations relatives à la qualité de l’environnement de travail et à l’expérience collaborateur sont apparues dans lesquelles la déco­ration joue un rôle clé. Ces motivations deviennent essentielles pour attirer et fidéliser cette génération. Un argument dont les entreprises se sont emparées avec d’autant plus de facilité que l’amélioration du bien-être des colla­ borateurs impacte la performance de l’entreprise.

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LES ÉCHOS-LE PARISIEN MÉDIAS

RÉSULTATS E T Ê U Q N E Pendant un mois, le Groupe Les ÉchosLe Parisien MÉDIAS a sondé ses lecteurs, dirigeants et collaborateurs de petites et grandes entreprises, sur l’importance de la décoration dans leur espace de travail*. D’une façon générale, les deux collèges s’accordent à dire que décorer et aménager avec soins ses locaux constitue non seulement une forte marque d’attention à destination des clients ou des collaborateurs mais contribue également à la construction d’une bonne image de marque. C’est ce qu’on appelle aujourd’hui la théorie de la symétrie des attentions. Il s’agit du concept selon lequel la qualité de la relation entre les salariés et leur employeur impacte fortement la qualité de la relation client et sa satisfaction. Certes la décoration / l’aménagement des locaux n’est pas une raison essentielle pour intégrer ou rester dans une entreprise, mais les collaborateurs considèrent à 85 % qu’elle contribue au bien-être. Sans surprise c’est bien l’intérêt de la mission qui est classé nº1 (71 %) des critères les plus importants dans le choix de rester ou d’intégrer une entreprise, devant la convivialité / l’ambiance nº2 pour

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43 % des répondants (sans doute la décoration n’y est pas étrangère), le temps de transport et la souplesse horaire se disputent les 3e et 4e places, et enfin la décoration arrive en 5e position. Trois critères primordiaux campent en tête pour juger de la qualité d’un espace : il doit être lumineux (76 %), ergonomique et pratique (63 %) et bien insonorisé (58 %). Et sans surprise également, c’est sur leur espace de travail que leur exigence se porte en priorité, à 84 %, très loin devant les autres espaces de l’entreprise (restaurant, salle de réunions, cafétéria…). En totale cohérence avec les réponses des collaborateurs, les dirigeants sont conscients de leur côté que la décoration des locaux contribue grandement au recrutement et à lafidélisation de leurs collaborateurs (73 %), et y consacrent cette année un budget stable (64 %), voire en hausse (18 %). En toute logique, ils ont une vision légèrement plus positive de leurs locaux que leurs collaborateurs puisque 86 % trouvent l’aménagement actuel de leur entreprise agréable !

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RÉSULTATS ENQUÊTE

78%

67% 48%

des dirigeants et collaborateurs estiment que cela participe à son image de marque

des dirigeants et collaborateurs pensent qu’une entreprise fait attention à ses salariés quand elle décore / aménage avec soin ses espaces de travail des dirigeants et collaborateurs estiment que cela montre que l’entreprise fait attention à ses clients

73%

64%

des dirigeants sont d’accord ou tout à fait d’accord avec l’idée que la décoration / l’aménagement des espaces de travail contribue au recrutement et à la fidélisation des collaborateurs

des collaborateurs sont d’accord ou tout à fait d’accord avec l’idée que la décoration / l’aménagement des espaces de travail contribue à leur bien-être.

* Étude panel lecteurs Les Échos Le Parisien MÉDIAS – avril 2019

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É N A T N A T S N I SUR LE NOUVEL ART DE TRAVAILLER

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TRANSFORMATION DIGITALE QUEL IMPACT SUR L’ART DE TRAVAILLER ? L

a 4e révolution industrielle, celle du digital, transforme l’ensemble de la société avec une rapidité jamais vue. Les modes de vie changent et viennent redéfinir le rapport au travail et à l’entreprise. On peut croiser son directeur sur Twitter, se connecter à son réseau LinkedIn et commenter ses posts… Pourtant, dans la majorité des cas, cette proximité et cette accessibilité permises par les nouveaux outils et usages digitaux s’arrêtent aux portes des bureaux cloisonnés de l’entreprise. Pour Jean-Noël Chaintreuil, on ne peut plus s’accom­ moder de cette discordance. « Quand on évoque l’idée de transformation digitale, beaucoup de chefs d’entreprise pensent site internet, e-commerce, refonte de la DSI, logiciels d’analyse du big data… Mais il s’agit d’une révolution bien plus profonde, une transformation culturelle de la société qui impose plus de changements que la simple intégration de la technologie numérique dans les activités de production et de vente. » En quelques années, le digital a en effet bouleversé toutes les habitudes. Il a généré de nouvelles attentes, créé de nouveaux besoins et a transformé les genres de vie : ultra-connecté,

« On comprend qu’une entreprise s’oriente vers la satisfaction client. Mais on oublie parfois la satisfaction des employés. » 8

« La transformation digitale, c’est un état d’esprit global qui est en train de changer. » l’Homo digitalis du XXIe siècle attend des services instantanés, personnalisés et des interactions simples et immédiates. En liaison permanente avec « son » Monde (ou ses Mondes) via les réseaux sociaux, il est devenu média, donne son avis et se nourrit de celui des autres pour mieux maîtriser tous les aspects de son existence. Il est plus mobile, plus social, plus collaboratif sans distinction d’espace ni de temps. « Le digital a flouté toutes les lignes. Et en particulier celle entre la sphère privée et l’univers professionnel. » D’ailleurs, le travail ne s’effectue plus forcément de 8h à 18h, installé derrière son bureau : 53 % des Français déclarent travailler occasionnellement ou régulièrement hors des locaux de leur entreprise* avec une prédilection, en dehors du domicile, pour les espaces de coworking et des locaux tiers appartenant à leur entreprise. Conséquence : le salarié attend de vivre une expérience de travail sans couture, quel que soit le lieu où il se trouve, avec des aménagements lui permettant de se connecter, de conduire un projet seul ou à plusieurs, de discuter, de faire des rencontres et de se détendre dans une atmosphère agréable. L’épanouissement personnel est le nouveau moteur assumé du salarié. Et notamment pour la nouvelle génération. Le « slashing » (le fait d’exercer plusieurs

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TRANSFORMATION DIGITALE QUEL IMPACT SUR L’ART DE TRAVAILLER ? emplois) séduit ainsi un nombre croissant d’actifs (1 salarié sur 3** se déclare intéressé). « Dans mon entreprise, un chef de projet, passionné de café, a demandé un 4 / 5 e afin de travailler comme barista. » confie Jean-Noël Chaintreuil ajoutant qu’il ne s’agit nullement d’un changement de vie, mais juste d’une façon nouvelle d’aborder le monde du travail. * L’Observatoire Actineo sur les salariés français, Baromètre 2019 ** Enquête Opinionway pour Horoquartz sur la relation au travail, août 2018

3 QUESTIONS À JEAN-NOËL CHAINTREUIL Fondateur de Change Factory, spécialiste en stratégie, innovation et ressources humaines.

Le digital permet-il de se libérer des contraintes du travail ? Il donne la possibilité de se libérer du cadre rigide du travail. Il permet de réaliser certaines tâches plus facilement et autorise le salarié à travailler en dehors de son bureau. Le digital favorise l’autonomie dans tous les domaines comme celui de la formation par exemple.

©  Anne-Emmanuelle Thion

Le numérique est-il déshumanisant ? Le digital aide à mieux collaborer, à créer du réseau, à tisser des liens entre les personnes. Mais, à un moment, chacun ressent le besoin de sortir du virtuel pour se rencontrer, pour vraiment connaître l’autre, pour enraciner les liens. C’est un mouvement naturel et général : les fans de e-sport se rassemblent pour organiser des tournois dans des lieux physiques et même Amazon ouvre des boutiques ! Dans le domaine du travail, il est donc nécessaire de redéfinir les lieux pour favoriser ces rencontres autour d’espaces de convivialité ou d’événements type meet-up.

©  Welcome to the Jungle

Les startups du digital sont-elles les modèles à suivre pour une approche « bien pensée » de l’espace de travail ? Elles dessinent des voies intéressantes. Par exemple, Etsy, une place de marché pour artisans du monde, a installé son siège dans un immense hangar à Brooklyn (Etats-Unis) qu’elle a organisé autour de petits appartements meublés et décorés avec les produits vendus sur la plateforme. C’est simple, authentique et proche des habitudes de vie des salariés.

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LES ASPIRATIONS NOMADES DES MILLENNIALS N

és entre 1980 et 2000, les digital natives de la génération Y repré­ senteront la moitié de la population active mondiale dès 2020. Plus mobiles, plus exigeants que leurs aînés, ils imposent aux organisations une nouvelle vision de l’espace de travail.

« Les millennials ne veulent plus d’environnements uniformes qui noient les individus. Ils veulent avoir le choix dans l’usage de chaque espace. » 57 % des millennials veulent interagir en face-à-face avec les autres au sein d’espaces physiques et seulement 25 % d’entre eux accordent une grande importance au « tout numérique ». 66 % réclament du bonheur au travail et tous espèrent une carrière épanouissante… On est loin du cliché d’une géné­ration impatiente, volage, rêveuse et superficielle, collectant les relations anecdotiques sur les réseaux sociaux. « Ce qui caractérise cette nouvelle géné­ration, c’est l’envie pour chacun de ne pas être noyé dans la masse mais de s’épanouir au sein de communautés et de trouver du sens dans tout ce qu’elle fait », résume Flore Pradère qui s’est appuyée sur deux grandes études menées par JLL (Human Experience au niveau mondial et Le Travail devient Lifestyle sur les millennials français) pour analyser les comportements et les attentes des jeunes dans l’univers professionnel, et ainsi tordre le cou aux nombreux clichés.

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Tout d’abord, les nouvelles générations ne se placent pas dans une position de rejet du bureau. Au contraire. Mais à l’inverse de leurs ainés qui s’accommo­daient de lieux gris, imper­ sonnels et simplement utilitaires, les millennials cherchent des espaces inspirants, capables de proposer une expérience fluide et décloisonnée. Le modèle ? Les sites de coworking et leurs univers qui n’imposent aucun usage mais laissent le choix à chacun « d’y faire ce qu’il veut, quand il le veut ». Une soif de liberté d’action individuelle qui ne doit pas être interprétée comme un refus de la hiérar­chie, comme le signale Flore Pradère : « En les interrogeant sur l’entreprise libérée, organisée sans manager, nous avons constaté que ce modèle d’entreprise horizontale effrayait les jeunes : ils ont besoin d’une structure managériale. En revanche, ils attendent beaucoup de leurs managers : de l’écoute, de la recon­naissance, de la confiance et une grande place laissée à la co-construction. » Cette demande de proximité implique de l’encadrement qu’il sorte de son traditionnel bureau fermé pour rejoindre l’espace des millennials de travail commun et être alors souhaiteraient au plus près des équipes. travailler au sein Le nouveau siège de Sanofi, d’une organisation rue de la Boétie à Paris, a été ayant une pensé dans cet esprit d’ouverture vraie culture avec un gain réel en termes d’entreprise *. d’échanges et de renforcement * Deloitte, Millennial Survey 2018 des liens entre tous les collaborateurs. Pour être en phase avec les millennials, l’entreprise doit également événementialiser l’espace et le temps au sein du lieu de travail. Elle doit penser « happening » à l’image de ces startups

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49%

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LES ASPIRATIONS NOMADES DES MILLENNIALS de la Silicon Valley qui programment des concerts ou de la Société Générale qui invite des speakers inspirants dans son auditorium de Val-de-Fontenay. Nomades mais pas instables, les millennials ne regardent plus le bureau comme un lieu de transaction avec l’employeur (temps de présence et de production contre salaire) mais comme un espace porteur d’émotion et de sens.

3 QUESTIONS À FLORE PRADÈRE

Directrice de recherche & prospective bureaux de demain chez JLL, société de conseil en immobilier d’entreprise.

En quoi les millennials viennent-ils challenger les entreprises dans l’organi­sation des espaces de travail ? C’est une génération qui annonce clairement son envie de vivre autrement le travail. Ils n’ont pas forcément besoin de plus de bien-être ou de liberté que leurs aînés, mais, à leur différence, ils l’expriment ! Ils attendent de la flexi­bilité, de l’autonomie et des espaces de travail non formatés. Le modèle, c’est la startup qui permet de libérer les potentiels de chacun, les labs où les espaces sont reconfigurables selon les besoins et tous ces lieux inspirés du design thinking.

©  Élodie Dupuis

Les digital natives sont-ils vraiment accros à la technologie dans le travail ? Contrairement aux idées reçues, ils sont très conscients des effets néfastes de la sur-connexion. Ils ont besoin de moments et de lieux pour déconnecter. La techno­logie sur le lieu de travail doit être présente mais pas envahissante. On parle d’ailleurs de « shy technology », pour évoquer cette tendance à fondre les ressources digitales dans le décor. On associe souvent cette génération au travail collaboratif. Cliché ou réalité ? Réalité. Les générations précédentes portaient une grande attention au networking, pour avoir un maximum de relations. La jeune génération, elle, cherche des communautés d’appartenance avec des valeurs communes, des projets communs. Ceci explique le succès des espaces de coworking qui ne sont pas uniquement des lieux « cools » pour travailler.

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QUAND LES BUREAUX NOURISSENT LA MARQUE EMPLOYEUR P Du cuir rouge présent dans l’ameublement des bureaux de Red Bull à Stockholm. Des télécabines transformées en espace de téléphonie pour Google Zurich… Pure déco ? Pas seulement. Car à travers ces partis pris d’aménagement, c’est l’identité de chaque marque qui imprègne l’atmosphère pour créer un dialogue fédérateur entre l’espace de bureau et l’ensemble des collaborateurs. Inscrit dans l’univers de travail, l’ADN de l’entreprise se diffuse alors en interne mais aussi à l’extérieur (visiteurs de passage ou candidats, publications de photos sur les réseaux sociaux…). Le bureau incarne la marque, il la rend sensible. « Dans le cadre de Bridge [ndlr : le nouveau siège social d’Orange en 2020 (photo ci-contre)], nous travaillons à la création d’un mobilier spécifique afin qu’il participe à la signature de l’immeuble, qu’il lui donne un caractère en lien avec notre métier, notre marque et notre image, » souligne Séverine Legrix de la Salle, directrice de ce projet. En reflétant les valeurs de l’entreprise, la décoration « communique » et devient un atout pour la marque employeur. Pour plus d’un salarié sur trois, l’aménagement de l’espace de travail et sa décoration sont d’ailleurs appréhendés comme des révélateurs de la culture d’entreprise *. Et pour près d’un sur deux, ces aspects constituent un double critère de sélection majeur s’ils ont à choisir entre deux emplois équivalents.

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L’atrium de Bridge, le nouveau siège social d’Orange

our attirer, fidéliser et faire des salariés leurs premiers ambassadeurs, les entreprises dévelop­pent des espaces de travail répondant au nouveau paradigme RH : l’amélioration de l’expérience collaborateur.

Dans un contexte de forte concurrence, recruter et conserver des talents impose en effet de proposer plus qu’un poste et un salaire. À l’image des efforts fournis pour améliorer la satisfaction client, pour assurer leur fidélité et les transformer en ambassadeurs, l’entreprise doit apporter à chaque salarié une expérience collaborateur de haut niveau, qui impose la mise à disposition d’un espace de travail aligné sur les besoins du salarié et porteur de bien-être (66 % des insatisfaits au travail pensent que leur lieu de travail n’est pas adapté ** ). Bien dans son bureau et bien avec sa marque, le collaborateur devient alors l’un des premiers ambassadeurs de son entreprise. * Étude française Toluna pour Interface, mars 2018 ** Observatoire Actineo sur les salariés français, Baromètre 2019

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QUAND LES BUREAUX NOURISSENT LA MARQUE EMPLOYEUR 3 QUESTIONS À SÉVERINE LEGRIX DE LA SALLE

Directrice du projet Bridge chez Orange

Qu’est-ce que le projet Bridge ? Bridge est le nouveau siège d’Orange situé au cœur de la « Media river » à Issy-les-Moulineaux et qui rassemblera, en 2020, 3 000 collaborateurs. Dans sa conception, l’immeuble donne une vision très horizontale et très qualitative de l’espace avec un immense atrium intérieur, des terrasses ouvertes, des espaces communs et des univers de travail des Français répartis en quartiers, reliés suivent et par des passerelles. C’est un promeuvent immeu­ble au service de tous leur entreprise les salariés et des visiteurs. sur les réseaux

15% sociaux *

En quoi répond-t-il aux besoins des collaborateurs ? L’ambition de Bridge est d’offrir la meilleure expérience colla­ borateur à tous nos salariés, toutes générations confondues. Pour cela, nous avons embarqué les 3 000 personnes concernées pour réfléchir et co-construire le nouvel espace. Durant un an et demi, à travers des ateliers, les équipes se sont interrogées sur leurs pratiques et ont pu moduler leurs quartiers selon leur vision du travail (dominante collaborative ou concentration individuelle…). Nous avons choisi des solutions d’aménagement essentiellement mobilières (armoires, bulles d’isolement, cloisons mobiles…) qui permettent de re-configurer facilement les espaces.

« En tant que siège, Bridge dépasse la fonction d’immeuble et de lieu de travail : c’est aussi une vitrine qui doit montrer les valeurs et la culture d’Orange. »

©  Anne-Emmanuelle Thion

*Observatoire des usages du digital OpinionWay/Orange, juillet 2018.

En quoi ce projet correspond-il à l’image qu’Orange veut donner ? Nous avons souhaité un siège où les gens et les idées circulent. C’est en cela qu’il peut renforcer notre image de marque employeur : faciliter les rencontres pour que chacun puisse, en dehors de son premier cercle de travail, se nourrir des autres et évoluer. Nous sommes dans un secteur d’activité, le digital, où l’employabilité est liée à notre agilité et notre capacité à nous adapter à un environnement qui évolue très vite. L’agilité n’est pas une méthode de travail : c’est un mindset, une croyance qui imprègne tout le projet Bridge et l’ensemble du projet de transformation d’entreprise.

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UN BEAU BUREAU IMPACTE-T-IL LA PRODUCTIVITÉ ? D e la lumière, de la couleur, un beau mobilier et des accessoires inspirants… La perception de l’espace de travail améliore le bienêtre des collaborateurs. Et leurs performances…

Enjeu de société, le bien-être au travail représente également un levier de performances pour les entreprises. Ainsi, être « heureux » au travail permettrait d’être deux fois moins malade, six fois moins absent et entrainerait des gains de productivité supérieurs à 30 %*. D’où l’intérêt pour les entreprises d’offrir à leurs collaborateurs des conditions de travail favorables. Cela passe par l’aména­gement et la décoration de lieux où il fait « bon travailler » car l’influence du bureau sur l’épanouissement des salariés est aujourd’hui une évidence : les salariés très satisfaits de leur envi­ ronnement de travail sont ainsi deux fois plus engagés que la moyenne **. Et pour 60 % des Français, la configuration du bureau influe sur leur motivation ***. Les neurosciences ont depuis longtemps démontré l’impact des couleurs sur le cerveau : le bleu stimule la créativité, le vert apaise et permet la concentration, le rouge excite… Le blanc et le gris clair seraient ainsi les pires teintes pour travailler. Elles favoriseraient même le burn-out. Il faut donc oser la couleur, sur les murs, dans le mobilier… La présence d’éléments naturels, comme les plantes par exemple, et la lumière du soleil seraient également facteur d’une plus grande implication et efficacité des salariés. Dans un environnement doté d’un éclairage naturel et agrémenté de verdure, les employés sont 15 % plus créatifs et 6 % plus productifs ****.

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Les espaces froids, impersonnels, sombres ou à l’éclairage artificiel jouent sur le moral des troupes. Or la bonne humeur stimule la production de dopamine. Et la dopamine, c’est bon pour la vigilance, la concentration, la mémoire… Jérémy Clédat témoigne : « Les entreprises veillent de plus en plus à ce que les em­ ployés se sentent mieux dans leurs bureaux.

« Bien organisé et bien décoré, l’espace de travail permet d’actionner des leviers importants de performances pour l’entreprise. » Certaines proposent même à leurs salariés d’apporter une touche personnelle à la décoration. Au sein d’une plateforme de e-commerce dédiée à la décoration, chaque nouveau collaborateur se voit remettre un bon d’achat à utiliser sur la plateforme pour personnaliser son bureau. » Si l’approche esthétique des lieux de travail est essentiel, Jérémy Clédat insiste sur la nécessité d’accorder la décoration avec l’ADN de l’entreprise, avec sa culture et l’image qu’elle souhaite renvoyer. Exemple d’aménagement réussi pour le fondateur de Welcome to the Jungle ? le media online My Little Paris (photos page suivante), où chaque pièce de mobilier, scrupu­leusement choisi, raconte une histoire, celle de l’entreprise. * Étude Harvard/MIT 2018 sur les salariés américains ** Rapport mondial Human Experience, JLL *** Etude française Toluna pour interface , 2018 **** Etude Mondiale Human Spaces, Incidence globale du design biophilique sur l’environnement de travail

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UN BEAU BUREAU IMPACTE-T-IL LA PRODUCTIVITÉ EN ENTREPRISE ? 3 QUESTIONS À JÉRÉMY CLÉDAT

Fondateur de Welcome to the Jungle, plateforme d’accompagnement dans la recherche d’emploi

Le gain de productivité constitue-t-il un enjeu conscient pour décider d’un nouvel aménagement de bureau ? Les enjeux primordiaux, ce sont le bienêtre des salariés et le renforcement de la marque employeur. Mais il est certain que l’esthétique d’un lieu a un impact extrêmement positif sur l’envie de travailler. Facebook conduit par exemple un programme pour introduire de l’art dans ses bureaux dont l’objectif est d’attirer les talents et d’inspirer ses salariés pour améliorer leur productivité.

Certains bureaux peuvent-ils être « trop beaux » jusqu’à nuire à la productivité ? Je n’en ai pas encore vu. Mais, dans le domaine du bureau, la dimension esthétique ne doit pas primer sur l’ergonomie. Elle doit la soutenir. Le mobilier doit répondre aux usages, faciliter le travail en solo ou en groupe. C’est comme pour une chambre d’enfant : elle peut être très joliment meublée mais si on ne peut pas jouer dedans, quel intérêt ?

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My Little Paris  ©  Welcome to the Jungle

Observez-vous une vraie tendance des entreprises à s’intéresser à l’organisation des espaces ? Oui, clairement. Durant de nombreuses années, l’aménagement de l’espace de travail a été appréhendé uniquement comme une source de coûts. Depuis quelques années, les études montrent qu’un espace de travail bien organisé et bien décoré permet d’actionner des leviers importants de performances pour l’entreprise. Des aspects de la vie de bureau, comme le bruit, qui avaient été jusqu’ici négligés, sont aujourd’hui beaucoup plus pris en compte. L’esthétique également.

« La dimension esthétique ne doit pas primer sur l’ergonomie. Elle doit la soutenir. »

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AMBIANCES, ESPACES, OBJETS… TOUTES LES NOUVELLES TENDANCES DÉCO AU BUREAU INTERVIEW DE CHANTAL HAMAIDE

Journaliste, curatrice, experte en design, fondatrice du magazine Intramuros (1985-2017)

Pour Chantal Hamaide, l’hybridation de l’offre est la principale tendance observée sur le marché qui bouillonne de propositions. En quoi les nouvelles façons de travailler bousculent-elles le design de mobilier et de décoration de bureau ? Ces nouvelles façons de travailler sur des plateformes, en coworking ou dans des espaces publics, redessinent le cadre du bureau au profit d’aménagements qui empruntent le vocabulaire de l’espace domestique. Cette imbrication des codes dans le sens de la mixité des usages influence les designers sur le dévelop­pement de nouveaux concepts de mobilier.

« Place aux aménagements qui empruntent le vocabulaire de l’espace domestique ». Vive les pastels et les teintes douces ! Récemment, un fabricant vient d’éditer une table équipée d’un plateau amovible sur lequel on peut dessiner ou prendre

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des notes, il sert de paperboard en position verticale et trouve également sa place dans une chambre d’enfant.

Cette polyvalence représente un vrai courant ? Les offres hybrides gagnent du terrain. De la même façon le mobilier indoor et outdoor a élargi sa spécificité au profit d’une polyvalence des besoins des usagers, le mobilier des espaces de travail se dessine dans une identique perspective d’usage. Quelles sont les matières tendances ? L’utilisation du cuir perd de son aura emblématique au profit de textiles très performants, (une nécessité pour la maintenance et la sécurité). Les fabricants font appel à des designers comme Hella Jongerius ou au studio Doshi/Levien, pour la mise au point de nouvelles textures et le subtil assemblage de couleurs. Le bois est très présent, dans les piètements des tables, en structure des fauteuils et pour les panneaux mobiles comme les cloisons isolantes qui s’enrichissent de motifs. Côté couleurs ? Beaucoup de pastels et de teintes douces et apaisantes, qui empruntent définitivement la palette des beiges et même des roses pâles, plus familière de l’espace domestique. Comment est traité l’éclairage ? Les lampes individuelles et les éclairages d’appoint sont moins présents. Les sources LED et OLED permettent une multiplicité de diffusion lumineuse, ponctuelle, linéaire, en cercles, en plaques ou en accessoires lumineux rechargeables.

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©  Élodie Dupuis

COULEURS–MATIÈRES, AMBIANCES–ESPACES, QUELLES SONT LES TENDANCES DÉCORATIVES DES BUREAUX AUJOURD’HUI ?

« Le cuir perd son aura face aux textiles très performants. »

©  Élodie Dupuis

Assiste-t-on à un grand bouillonnement créatif ? Plutôt à une créativité vivante et stimulante de l’ordre des nouveaux matériaux de surfaces jusqu’aux objets. Ils signent à la fois un besoin de diversité mais s’accommodent aujourd’hui de nouvelles contraintes assumées, le respect de l’environnement, le recyclage… Un contexte qui donne la parole aux designers et à leur responsabilité à différentes échelles des mutations de la société.

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DÉCORATION DE BUREAU : ET SI ON PARLAIT RÉÉDITION ? INTERVIEW DE ISABELLE DE PONFILLY

Isabelle de Ponfilly est directrice générale France du fabricant et éditeur de mobilier design Vitra. Elle est également co-présidente d’Actineo, l’Observatoire de la qualité de vie au bureau.

Butterfly Stool par Sori Yanagi, Eames Elephant par Charles & Ray Eames, Eames House Bird , L’Oiseau par Ronan & Erwan Bouroullec, Wooden Dolls par Alexander Girard, Resting Animals pa Front  ©  Vitra International AG

Dans un monde très high-tech et très digital, y-a-t-il une place pour les rééditions d’objets au bureau ? Oui, quand ils sont inspirants ou apaisants. C’est le cas des horloges en forme de soleil, d’œil ou de hibou créées par George Nelson dans les années 1950 : elles apportent de l’élégance à un bureau. Récemment, nous avons réédité la radio

« Les rééditions sont inspirantes et apaisantes [...] elles apportent de l’élégance à un bureau. » créée par Charles et Ray Eames au milieu des années 1940 mais jamais produite en série. Soixante-dix ans plus tard, nous avons redonné vie à cette icône en l’équipant, bien sûr, des technologies les plus récentes en matière de son.

Et du côté des objets purement décoratifs ? Depuis 2017, nous rééditons les éléphants Eames avec un placage en cerisier. Création récente, la série Resting Animals (animaux endormis) en tissu ou céramique connaît un grand succès : le fait de poser ces animaux dans les bureaux favoriserait la pacification des relations entre les personnes. En règle générale, un objet déco apporte de l’émotion dans un lieu, il l’humanise. De la même manière, existe-t-il un marché pour les rééditions de mobilier design ? Oui, depuis une quinzaine d’années. J’ai le sentiment qu’il y a un côté rassurant dans l’acquisition d’une pièce connue et reconnue, de s’appuyer sur une valeur sûre. Pour répondre à une clientèle plus jeune, nous faisons évoluer les finitions. Nous avons d’ailleurs demandé à la créatrice néerlandaise Hella Jongerius de retravailler les couleurs et les matériaux de toutes nos collections. Nous avons ainsi relancé l’Aluminium Chair Group de Charles et Ray Eames dans des teintes pastel de rose, de beige, de vert amande.

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©  Eduardo Perez

DÉCORATION DE BUREAU : ET SI ON PARLAIT RÉÉDITION ?

Resting cat, Front, Vitra

Resting bird, Front, Vitra

Comment ces meubles participent à la décoration et aux usages des bureaux actuels et futurs ? Certaines pièces, comme les tables Jean Prouvé, ont une identité très forte qui permettent de marquer un espace comme une salle de réunion ou une cuisine. Et puis nous adaptons certains modèles aux besoins actuels : c’est le cas avec les tables de réunion Segmented dans lesquelles nous intégrons des chargeurs à induction. Nous avons décidé d’apporter cette modification car nous sommes certains que les Eames l’auraient faite de leur vivant.

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« Les classiques tendance ? La Coffee Table de Nogushi, les sièges Eames, Panton et Prouvé, le banc de George Nelson… » Vitra est membre de l’Ameublement français. En quoi est-ce important d’appartenir à cette organisation profes­ sionnelle qui regroupe les acteurs de l’aménagement d’espaces ? L’Ameublement français a pour mission de valoriser et de protéger les fabricants de meubles et d’aider à la promotion des designers, à favoriser l’innovation. Vitra soutient donc tout naturellement les activités de ce syndicat même si, de notre côté, nous menons nos propres réflexions et nos propres développements avec nos chercheurs, nos ingénieurs et nos designers indépendants.

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BUREAUX : COMMENT SORTIR DE LA GLOBALISATION DU COOL ? Architecte de formation, Axel Schoenert a signé l’aménagement de nombreux sièges sociaux et espaces de coworking à l’image des WeWork de la capitale. Il nous livre sa vision des bureaux d’aujourd’hui… et de demain.

Qu’est-ce qui a changé dans les espaces de travail depuis 20 ans ? Ce qui a d’abord fondamentalement changé, c’est le coût des loyers et donc du poste de travail alors même que la digitalisation, et la flexibilité qui en découle, permet désormais aux collaborateurs de travailler chez eux. Au-delà, c’est la façon même de travailler qui a totalement changé, sous la pression notamment des millennials. Dans une logique à la fois stratégique, de tendance et financière, de grands groupes, à l’instar de Natixis ou de Carrefour, louent aujourd’hui des mètres carrés dans des espaces de coworking. À tel point que si les américains ont été précurseurs dans ce domaine, la France est devenue le premier pays en Europe en matière d’aménagement d’espaces de ce type.

d’OCTO Technology près de l’Opéra à Paris, outre les open spaces, le coin cuisine et les espaces détente, nous avons conçu une salle de sport et des meubles casiers pouvant contenir un ordinateur et un casque de moto. Là encore, c’était inimaginable dix ans en arrière. Dernier changement enfin, la sensibilité à l’écologie est devenue extrême quand ce n’était pas un sujet au début des années 2000.

La décoration est donc devenue un point de différenciation ? Elle devrait l’être car nous assistons à une globalisation des codes du cool dont il faut sortir. Tout le monde veut être rock n’roll. La même déco s’impose partout, faite de mélanges d’éléments que nous n’aurions pas mariés autrefois. De la même manière, plus personne ne veut de faux plafond préférant voir les installations techniques. Les entreprises doivent retrouver une singularité, une identité décorative. Qu’il s’agisse des matériaux, des couleurs ou du choix des meubles, il faut inciter les entreprises à se réinventer.

D’un point de vue décoratif, qu’avezvous observé sur ces mêmes années ? J’observe deux choses. La première est que tout le monde veut aujourd’hui réinventer le lieu de travail. La seconde est que tous les codes de l’architecture d’intérieur se ressemblent, comme s’ils avaient fusionné : maisons, hôtels, bureaux… et les entreprises veulent toutes posséder des espaces plus conviviaux pour attirer de nouveaux talents. Les coins cuisine par exemple ou les phones box ont fleuri un peu partout. Tout cela n’existait pas il y a dix ans. Pour le siège

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Axel Schoenert Architectes, Wewok, Paris 13 ©  D. Delmas

3 QUESTIONS À AXEL SCHOENERT

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ON NE VIENT PLUS SEULEMENT AU BUREAU POUR TRAVAILLER … R U O P S MAI

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COLLABORER F

travail, Elisabeth Pélegrin-Genel, appelle « une intimité collective ». Experte en design, Chantal Hamaide observe une tendance dont l’ampleur ne cesse de croître : « Les lieux de réunions sont de moins en moins définis par l’architecture mais par le mobilier. Les murs disparaissent au profit d’éléments mobiles : armoires ou cloisons sur roulettes qui organisent rapidement un espace de collaboration. » Les tables se font gigognes et s’assemblent jusqu’à créer d’immenses plateformes de partage pour 20 personnes. Elles se règlent en hauteur pour

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aire circuler les idées, faciliter les échanges, favoriser les rencontres interservices et permettre la sérendipité : pour continuer d’innover, les entreprises doivent devenir agiles et poser les conditions d’un travail collaboratif multiforme. Employés et mana­ gers doivent pouvoir se réunir facilement à 2 comme à 15, autour d’un ordinateur ou d’un café, pour un ping-pong d’idées ou pour peaufiner une présentation. Les espaces de coworking ont tracé la voie d’un aménagement de l’espace de travail ouvert et propice à créer ce que l’architecte et psychologue du

travailler debout, assis sur une chaise voire sur un canapé… Enfin, à l’ère du digital, pas de collaboration sans une connectivité maximale. Avec une règle : pas d’ostentation et de la fluidité. Pour la spécialiste en prospective bureaux, Flore Pradère, « nous sommes entrés dans une époque de Shy Technology » où les chargeurs à induction se « fondent » dans les tables (collection Segmented de Vitra) et où la fibre arrive jusqu’au bureau du collaborateur de manière naturelle grâce à l’infrastructure FFTD du futur siège Bridge de Orange.

©  Anne-Emmanuelle Thion

ON NE VIENT PLUS SEULEMENT AU BUREAU POUR TRAVAILLER MAIS POUR

©  Anne-Emmanuelle Thion

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REFLECHIR L

a difficulté de se concentrer à cause du bruit reste l’un des principaux griefs exprimés par les salariés à l’encontre de l’open space. Alors chacun tente à sa mesure de palier le problème en écoutant, par exemple, de la musique au casque, quitte à se couper complètement de ses collègues et se rendre inaccessible. Pour répondre à ce grand défi du calme, designers et spé­ cialistes des aménagements de bureau multiplient les innovations. Tout d’abord, les dossiers des fauteuils et des canapés prennent de la hauteur et l’effet cloison

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est renforcé en prolongeant la structure sur les côtés du siège pour envelopper au maximum le ou les utilisateurs. Ainsi, les sofas alcôves créées par Ronan et Erwan Bouroullec peuvent être disposés face à face pour créer un espace dans l’espace, un cocon pour un, deux, trois ou quatre personnes. Les fabricants multiplient également les concepts de « cellules » individuelles semi ouvertes où la table de travail est cloisonnée à mi-hauteur voire entièrement capitonnée. Puisque le travail est avant tout collaboratif, ces espaces sont conçus et présentés comme des lieux d’exception où l’on vient

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se « réfugier » pour réaliser une tâche ponctuelle. Les bulles d’isolement, ces petits cabinets clos et fixes, ont fait leur apparition, généralement structurées par des parois opaques ou translucides : « De l’extérieur, on voit ou on devine les personnes qui utilisent la bulle mais on ne les entend pas. Elles restent dans l’espace commun, sans y être vraiment, » précise l’experte en design Chantal Hamaide. Un nouveau type de mobilier qui permet, au final, de s’isoler tout en restant accessible.

©  Élodie Dupuis

ON NE VIENT PLUS SEULEMENT AU BUREAU POUR TRAVAILLER MAIS POUR

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Axel Schoenert Architectes, Wewok, Paris 13 ©  D. Delmas

©  Fillioux & Fillioux

« Le grand défi du calme mobilise designers et spécialistes des aménagements de bureau »

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Le nouveau siège de la Région Île-de-France, Saint-Ouen-sur-Seine, conçu et aménagé par Saguez & Partners.

ON NE VIENT PLUS SEULEMENT AU BUREAU POUR TRAVAILLER MAIS POUR

BOUGER P

L’espace de travail protéiforme autorise alors une grande variété d’aména­gements : grands plateaux de travail autour desquels chacun pose son ordinateur (Jean-Michel Wilmotte propose une table de 15 mètres de long), jardins extérieurs ou intérieurs meublés de bancs en bois ou de canapés en tissu waterproof high-tech, espaces de convivia­ lité avec tables basses et fauteuils « lounge »… Pour le Fondateur de Welcome to the Jungle, Jérémy Clédat, « le nouveau siège de l’agence BETC à Pantin est une très belle illustration de ce que peut proposer le flex office » avec

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hénomène émergent très en vogue auprès des millennials, le flex office (ou bureau flexible en Français) épouse les nouvelles façons de travailler et notamment la grande mobilité des salariés permise par le digital. En n’assignant plus d’espace spécifique à ses colla­borateurs, l’entreprise propose à travers ce concept de flex office, différents endroits dont chacun tirera un usage personnel et correspon­ dant à son besoin du moment. « On est passé de la notion de poste de travail à celle de situation de travail, » analyse l’architecte et psychologue du travail, Elisabeth Pélegrin-Genel.

des univers très esthétiques qui invitent chacun à vivre sa propre expérience de travail. Et puisque le nomadisme entre dans les mœurs, de nouveaux types de mobilier et accessoires très « urbains » font leur apparition comme des porte-trottinettes à installer à l’entrée des plateaux. Ou encore, comme le signale l’experte en design, Chantal Hamaide, une foule de petits objets individuels et pratiques (vide-poche, flacon isotherme…) à glisser dans le sac à dos, entre l’ordinateur et le smartphone.

Le nouveau siège de la Région Île-de-France, Saint-Ouen-sur-Seine, conçu et aménagé par Saguez & Partners.

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My Little Paris  ©  Welcome to the Jungle

« On est passé de la situation de poste de travail à celle de situation de travail. »

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DECOMPRESSER D

de bureau et les objets sont de plus en plus influencés par la décoration et les usages domestiques : les formes et les couleurs des canapés, les armoires de rangement… Même les cafetières ! ». Pour déjeuner, se reposer, voire jouer (en équipe, bien sûr !), les designers puisent dans le champ lexical de la cuisine, du salon, du jardin et des espaces de loisir. L’immense variété des sièges, canapés, fauteuils et autres bancs témoigne du fourmillement créatif. D’ailleurs, les élégants grands sofas et les très confortables relax d’Antonio Citterio se destinent aussi bien à la maison

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ans un monde toujours plus connecté, la frontière entre la sphère privée et l’univers professionnel devient de plus en plus poreuse. On travaille et on vit à la maison comme au bureau ou dans un tiers lieu. Dans ces conditions, l’hybri­da­ tion des espaces, initiée et popularisée par les sites de coworking et autres hackerhouses, apparaît comme une évidence. Désormais, les colla­ borateurs attendent de leur lieu de travail des services et des aménagements permettant de se restaurer et de décompresser. Experte en design, Chantal Hamaide constate : « Le mobilier

qu’au bureau. « Il y a cinq ans, personne n’aurait osé s’installer sur un canapé au bureau. Aujourd’hui, c’est accepté, » signale l’architecte et psychologue du travail, Elisabeth Pélegrin-Genel. De mieux en mieux tolérée, aussi, la possibilité de faire la sieste a donné l’idée à un créateur de développer une sorte de coussin-cagoule transportable, et qui permet de faire un petit somme, la tête posée sur son bureau. Confort…

My Little Paris   ©  Welcome to the Jungle

ON NE VIENT PLUS SEULEMENT AU BUREAU POUR TRAVAILLER MAIS POUR

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©  Élodie Dupuis

©  Francis Amiand

« L’immense variété des sièges, canapés, fauteuils et autres bancs témoigne du fourmillement créatif. »

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MAISON&OBJET est le rendez-vous professionnel international référent de la décoration, du design et de l’art de vivre à Paris. Deux fois par an, en janvier et en septembre, 85 000 visiteurs, dont 50 % d’internationaux, s’y pressent à la rencontre de tous les acteurs du marché, 3 000 marques mais aussi les designers, architectes d’intérieur, décorateurs, acheteurs, hôteliers, restaurateurs, journalistes et trendsetters. Leur objectif commun ? Nouer des contacts commerciaux et décrypter les tendances.

Au chevet des évolutions de la société, MAISON&OBJET dédie un espace de sa prochaine édition au nouvel art de travailler. WORK!, c’est son nom, est un laboratoire d’expression qui témoigne de la nouvelle hybridation des espaces de travail.

MAISON & OBJET PARIS 6-10 Septembre 2019 Parc des Expositions de Paris Nord Villepinte Contact : [email protected] www.maison-objet.com

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