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No.865 du 27 juin au 3 juillet 2012

www.lesinrocks.com

porte-parole du gouvernement

Patti Smith éternelle

sale temps pour

HOLLYWOOD enquête sur une industrie en crise

M 01154 - 865 - F: 2,90 €

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Allemagne 3,80€ - Belgique 3,30€ - Canada 5,75 CAD - DOM 4,20€ - Espagne 3,70€ - Grande-Bretagne 5,20 GBP - Grèce 3,70€ - Italie 3,70€ - Liban 9 000 LBP - Luxembourg 3,30€ - Maurice Ile 5,70€ - Portugal 3,70€ - Suède 44 SEK - TOM 800 CFP

un art difficile

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Joana Preiss

Remerciements au musée du Louvre

j’ai voyagé au Louvre avec

 M

ardi, jour de fermeture du Louvre, on pensait être seuls à arpenter les salles du musée. “Heureuse d’avoir le Louvre pour nous, quelle merveille !”, m’avait texté la veille l’actrice Joana Preiss. Mais dès l’entrée, on croise le président Giscard, en visite perso. Certes, on ne le reverra plus lors de notre visite particulière dans les luxueux appartements de Napoléon III, là où l’artiste belge Wim Delvoye a glissé ses sculptures incongrues – des pneus sculptés façon gothique, des sculptures baroques dédoublées comme un test de Rorschach, des Christ en bronze circulaires et rutilants comme des jantes de voiture. Mais tout ça n’intéresse visiblement pas Giscard, qui a toujours préféré le patrimoine ancien à la modernité esthétique prônée avant lui par Pompidou. Allez, au revoir. C’est un peu tout le contraire avec Joana Preiss : s’avançant dans l’ambiance feutrée et luxuriante des salons du second Empire (“C’est très exotique, on se croirait dans le hall d’un vieil hôtel de luxe, peut-être au Caire”), admirant la tour gothique torsadée que Wim Delvoye a posé sous la pyramide du Louvre, naviguant très à l’aise entre l’ancien et le nouveau, on se dit que Joana Preiss déambule librement entre les diverses formes d’art et qu’elle incarne superbement une idée, intense et sinueuse, de la contemporanéité : “C’est ma curiosité qui me fait circuler. Et sans doute aussi un désir de liberté, le refus de me laisser enfermer.” Venue du chant lyrique (“J’ai une voix alto, je voulais être cantatrice, mais pas

“c’est très exotique, on se croirait dans le hall d’un vieil hôtel de luxe, peut-être au Caire”

classique : plutôt John Cage ou Morton Feldman”), passée au théâtre avec l’auteur et metteur en scène Pascal Rambert pendant dix ans, actrice de cinéma avec Christophe Honoré ou Olivier Assayas, mais apparue aussi dans les photos de Nan Goldin qu’elle rencontre à Berlin à l’âge de 19 ans, cette “belle personne” affiche une filmographie d’auteur qu’il faut élargir à la photographie, aux vidéos de l’artiste Ugo Rondinone, voire au mannequinat quand elle a été l’égérie du styliste Nicolas Ghesquière pour Balenciaga. L’an dernier, l’actrice est passée de l’autre côté de la caméra. Son film Sibérie est un vrai objet de cinéma, doublé d’un dispositif artistique : soit un dialogue visuel entre elle et le réalisateur Bruno Dumont. Le temps d’un voyage en Transsibérien, ils se filment l’un l’autre à coups de minicaméras DV, discutent ou se disputent, amants fictifs ou potentiels, dans un rapport ambigu entre réalité et fiction. “On s’est rencontrés lors d’un voyage à Novosibirsk, et on a décidé un an après de repartir pour faire un film ensemble. Sans scénario précis : c’est fait sur le vif, comme si l’écriture se faisait au filmage. Puis il y a une réécriture au montage où je réinvente l’histoire. Pour le son très concret des trains ou des villes de Sibérie, je me suis souvenue des journaux sonores que je réalise au gré de mes voyages : je collectionnais plus les sons que les images. Ce film est un aboutissement de choses que j’ai faites avant, d’univers que j’ai traversés.” On en revient à sa libre circulation entre les arts : “Oui, j’aime me sentir libre, mais je fais tout avec intensité dans un état d’immersion totale. Je ne suis pas une passante.” Jean-Max Colard photo Audouin Desforges Sibérie de Joana Preiss, lire page 69

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No.865 du 27 juin au 3 juillet 2012 couverture The Dark Knight Rises de Christopher Nolan. Warner Bros.

07 quoi encore ? Joana Preiss

28

12 on discute 14 sept jours chrono le paperblog de la rédaction

Sony Pictures

édito de Bernard Zekri

16 on décrypte Serge July, sens dessus dessous ; l’ère de rien ; le mot

18 événement Julian Assange menacé d’extradition

20 événement 22 la courbe

43

ça va, ça vient ; billet dur

24 nouvelle tête Suzanne Clément

26 à la loupe

Miguel Medina/AFP

le 25e Festival Les inRocKs

60

les (pu)pitres du G20

28 enquête à Hollywood l’argent est toujours là, mais où sont passés la créativité, la prise de risques et les spectateurs ?

nouveaux députés, nouvelles têtes

46 gouvernement

Valérie Jouve

43 Assemblée le dur métier de porte-parole du gouvernement

50 que le meilleur perde 52 la force de l’esprit nouvel album ardent pour Patti Smith, son plus vivant depuis les années 70

56 l’école du printemps érable à Montréal, les étudiants, soutenus par les Québécois, ont inventé la plus cool des révoltes

56 pour l’édition suisse

de la Suisse dans les idées

60 l’œil sur la photo les Rencontres d’Arles mettent à l’honneur l’école de photo de la ville

cahier 16 pages au centre du journal Plonk & Replonk

62 l’acmé Acne en quinze ans, le designer suédois Jonny Johansson a transformé une marque de jeans en maison de mode

John Londono/Rodeo

les politiques en quête de défaite

A la suite d’un incident indépendant de notre volonté, ce numéro n’a pu être livré en Suisse mercredi dernier. Le voici donc, avec nos excuses pour ce contretemps.

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les inrockuptibles 24 rue Saint-Sabin 75011 Paris tél. 01 42 44 16 16 fax 01 42 44 16 00 www.lesinrocks.com contact par mail : [email protected] ou [email protected] pour les abonnements, contactez la société DIP au 01 44 84 80 34

66 La Part des anges de Ken Loach

68 sorties Bel Ami, Sibérie, Un bonheur n’arrive jamais seul, La Clinique de l’amour…

72 rencontre Anouk Aimée célébrée à La Rochelle

74 Dragon’s Dogma + Rune Factory – Oceans

78 Liars le trio américain se réinvente encore

80 mur du son Hugh Coltman, Blur, Lo’Jo…

81 live Kendrick Lamar

82 chroniques Cold Specks, Chicha Libre, Singtank, Mermonte, Beachwood Sparks…

88 morceaux choisis Total Warr, The Aikiu, Cat Power…

92 concerts + aftershow Pop’pea

94 spécial été : livres de poche Sagan, Marilyn, William Golding… notre sélection de poches à glisser dans ses bagages

102 bd George Akiyama revient en douceur

104 festival Premières + Alain Buffard + Zappalà Danza

106 1917/Kader Attia + Les Maîtres du désordre

108 où est le cool cette semaine ? dans les Schier Shoes...

110 mercato télévisuel nouvelles têtes et vieux routiers

112 Trafic l’autre revue de cinéma

113 John Paul Lepers le métier de journaliste citoyen

114 tendance BYOD utiliser son propre ordi au bureau

116 séries Dallas, insubmersible

118 programme TV Strip-Tease se met au vert

120 la revue du web sélection profitez de nos cadeaux spécial abonnés

pp. 117 et 121

121 vu du net le harcèlement sexuel

122 best-of le meilleur des dernières semaines

rédaction directeur de la rédaction Bernard Zekri rédacteurs en chef Jean-Marc Lalanne, Arnaud Aubron, JD Beauvallet comité éditorial Bernard Zekri, JD Beauvallet, Serge Kaganski, Jean-Marc Lalanne chefs d’édition Sophie Ciaccafava, Elisabeth Féret, David Guérin grand reporter Pierre Siankowski reporters Marc Beaugé, Stéphane Deschamps, Francis Dordor, Hélène Fontanaud, Marion Mourgue actu Géraldine Sarratia (chef de service), Anne Laffeter, Diane Lisarelli, Claire Moulène, David Doucet, Geoffrey Le Guilcher idées Jean-Marie Durand cinéma Jean-Marc Lalanne, Serge Kaganski, Jean-Baptiste Morain musique JD Beauvallet, Christophe Conte, Thomas Burgel, Johanna Seban, Ondine Benetier (coordinatrice) jeux vidéo Erwan Higuinen livres Nelly Kaprièlian expos Jean-Max Colard, Claire Moulène scènes Fabienne Arvers télé/net/médias Jean-Marie Durand (rédacteur en chef adjoint), Anne-Claire Norot cahier villes Alain Dreyfus collaborateurs O. Amsellem, E. Barnett, R. Blondeau, T. Blondeau, M.-A. Burnier, A. Desforges, M. Despratx, R. Dumas, V. Ferrané, J. Goldberg, O. Joyard, M. Judith, B. Juffin, C. Larrède, T. Legrand, H. Le Tanneur, J. Londono, L. Mercadet, L. Michaud, P. Noisette, V. Ostria, E. Philippe, T. Pillault, J. Provençal, G. Sbalchiero lesinrocks.com rédacteur en chef Arnaud Aubron directrice déléguée aux activités numériques Fabienne Martin rédacteurs Diane Lisarelli, Camille Polloni, Thomas Burgel, Azzedine Fall éditrices web Clara Tellier-Savary, Claire Pomares vidéo Basile Lemaire graphisme Dup assistante Geneviève Bentkowski-Menais responsable informatique Christophe Vantyghem lesinRocKslab.com responsable Abigaïl Aïnouz photo directrice Maria Bojikian iconographes Valérie Perraudin, Aurélie Derhee photographe Renaud Monfourny secrétariat de rédaction première sr Stéphanie Damiot sr Fabrice Ménaphron, François Rousseau, Olivier Mialet, Christophe Mollo, Laurent Malet, Sylvain Bohy, Delphine Chazelas, Amélie Modenese, Thi-bao Hoang conception graphique Etienne Robial maquette directeur de création Laurent Barbarand directeur artistique Pascal Arvieu maquettistes Pascale Francès, Antenna, Christophe Alexandre, Jeanne Delval, Nathalie Petit, Luana Mayerau, Nicolas Jan publicité publicité culturelle, directrice Cécile Revenu (musiques), tél. 01 42 44 15 32 fax 01 42 44 15 31, Yannick Mertens (cinéma, livres, vidéo, télévision) tél. 01 42 44 16 17, Benjamin Cachot (arts/scènes) tél. 01 42 44 18 12 coordinatrice Sarah Hami tél. 01 42 44 19 91 fax 01 42 44 15 31 directeur commercial David Eskenazy tél. 01 42 44 00 13 directeur et directrices de clientèle Laurent Cantin tél. 01 42 44 19 94 Isabelle Albohair tél. 01 42 44 16 69 Anne-Cécile Aucomte tél. 01 42 44 00 77 publicité web Chloé Aron tél. 01 42 44 19 98 coordinatrice Lizanne Danan tél. 01 42 44 19 90 événements et projets spéciaux Laurent Girardot tél. 01 42 44 16 08 assistante Sarah Carrier tél. 01 42 44 15 68 marketing, promotion directrice du développement Caroline Cesbron promotion Baptiste Vadon tél. 01 42 44 16 07 Nathalie Coulon (chargée de création) tél. 01 42 44 00 15 responsable presse/rp Elisabeth Laborde tél. 01 42 44 16 62 responsable diffusion Julie Sockeel tél. 01 42 44 15 65 chef de projet marketing direct Victor Tribouillard tél. 01 42 44 00 17 chef de projet Charlotte Brochard tél. 01 42 44 16 09 assistante promotion marketing Yasmine Nick Belkhodja tél. 01 42 44 16 68 service des ventes Agence A.M.E. contact : Otto Borscha ([email protected]) & Terry Mattard ([email protected], tél. 01 40 27 00 18, n° vert 0800 590 593 (réservé au réseau) abonnement HAPY PARIS les inrockuptibles abonnement, 18-24 quai de la Marne 75164 Paris cedex 19 infos 01 44 84 80 34 ou [email protected] abonnement France 1 an : 115 € standard, accueil ([email protected]) Geneviève Bentkowski-Menais, Walter Scassolini fabrication chef de fabrication Virgile Dalier, avec Gilles Courtois impression, gravure Roto Aisne brochage Brofasud routage Routage BRF printed in France distribution Presstalis imprimé sur papier produit à partir de fibres issues de forêts gérées durablement, imprimeur ayant le label “imprim’vert”, brocheur et routeur utilisant de “l’énergie propre” informatique responsable du système éditorial et développement Christophe Vantyghem assistance technique Michaël Samuel les éditions indépendantes sa les inrockuptibles est édité par la société les éditions indépendantes, société anonyme au capital de 3 579 352,38 € 24, rue Saint-Sabin 75011 Paris n° siret 428 787 188 000 21 actionnaire principal, président Matthieu Pigasse assistante Valérie Imbert directeur général adjoint Frédéric Roblot comptabilité Caroline Vergiat, Stéphanie Dossou Yovo, Sonia Pied administrateurs Matthieu Pigasse, Jean-Luc Choplin, Louis Dreyfus, Bernard Zekri fondateurs Christian Fevret, Arnaud Deverre, Serge Kaganski FSSDSFëG«S¶WO«JDOe trimestre 2012 directeur de la publication Matthieu Pigasse © les inrockuptibles 2012 tous droits de reproduction réservés ce numéro comporte un cahier de 16 pages “Edition Suisse” broché dans l’édition suisse ; un encart “Magazine littéraire” jeté dans l’édition abonnés France ; une carte postale “Plage de rock” jetée dans l’édition kiosque et abonnés des départements Paris-Ile-de-France, 04, 05, 06, 13, 83 et 84 ; un supplément de 68 pages “Festival d’Avignon 2012” encarté dans l’édition des départements 13, 30 et 84 et une sélection d’abonnés.

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fou foot Le budget de la Fifa dépasse celui de la France. A-t-on bien mesuré la puissance du foot ? On prend encore cela pour un divertissement au sens pascalien du terme, une façon de fuir le chômage, les salaires ric-rac et les scènes de ménage. Mais les bénévoles qui faisaient fleurir le foot amateur et éduquaient la jeunesse, tout cela relève d’une antique mythologie. Aujourd’hui, le foot, c’est la guerre. On s’attaque à coups de milliards, sponsors et chaînes de télévision. Les Etats mobilisent. Ecoutez le combatif Sarkozy parlant de la candidature française à l’Euro 2016 : “Nous pensons en France que le sport est une réponse à la crise. C’est justement parce qu’il y a des problèmes qu’il faut mobiliser tout un pays vers l’organisation de grands événements. Et qu’est-ce qu’il y a de plus fort que le sport, et dans le sport, le football ?” Voilà de quoi s’interroger sur ces plans où l’on voyait Mme Merkel à côté d’un Michel Platini souverain durant le match entre l’Allemagne et la Grèce. Lequel pèse le plus lourd, de la chancelière ou du président de l’UEFA ? Les commentateurs font les malins en demandant : “Qui va sortir de l’Euro ?” De quel euro ? La monnaie ou la compétition ? Comme l’explique Sarkozy, les deux finissent par se confondre. D’où vient la puissance du foot, si ce n’est de l’énergie et de la passivité de ces milliards de gens devant leurs écrans. Entre les mains des oligarches, des Berlusconi et des mafias, le sport nous vend un plaisir par procuration tout en poussant un chauvinisme féodal avec ses peintures de guerre, ses oriflammes et ses écus. Héros de cette triste musique, Thierry Roland, qui lâcha son micro en plein Euro, nous inonda pendant cinquante ans de ces sottises tribales. La nation et les médias lui ont fait des obsèques de chef d’Etat, retransmises par les chaînes d’info. Ce jour-là, la crise, la Grèce et la Syrie avaient disparu derrière “M. l’arbitre, vous êtes un salaud”. Ces commentateurs-consultants, hommes-sandwichs de la multinationale foot s’étouffaient de nostalgie devant la profondeur de la pensée-Thierry-Roland. Il y a peu, les mêmes tordaient le nez devant les mauvaises manières de ces joueurs issus de la banlieue et devenus si riches. A tout prendre, nous préférons un Ribéry qui malmène la syntaxe à la solidarité chauvine du foot-business.

Bernard Zekri

mignonement twitté par ManonEvans retour de bac “Que gagne-t-on en travaillant ?” C’était l’un des sujets du bac philo tombé la semaine dernière… Je commencerai cet exposé par une remarque : au vu de la crise, il y a peu de chances que la moitié des lycéens passant leur bac en 2012 aient un jour un boulot. Puis je discuterai de l’adage du célèbre philosophe Sarkozy, “travailler plus pour gagner plus”, car peut-on gagner lorsqu’on est sans emploi, au RSA et qu’on a un crédit

Les Sous-Doués de Claude Zidi (1980)

l’édito

enfin je renais : la revue du web de @lesinrocks is baaaaack !! Comment survivre sans les chats de l’espace ou les mèmes de Keanu Reeves ? à la consommation à rembourser chaque mois pour payer son écran 3D et son nouveau 4X4 ? Travailler, c’est aussi créer du lien social ! C’est aussi prendre le train surchargé debout, pour arriver en retard et se faire engueuler par son chef… Travailler, c’est aussi apporter sa contribution à l’évolution de la société en payant ses impôts, ou plutôt en payant les intérêts de la dette nationale aux banques… Un autre courant de pensée “dividendien” nous dit que travailler, c’est aussi créer de la richesse, de la richesse pour les traders, avec plein de zéros derrière, comme le nombre de licenciements en Espagne chaque mois… Enfin, je terminerai par une analyse pratique du cas d’un ouvrier de 57 ans de l’usine Eternit qui disait : “La seule chose que j’aie gagné en travaillant c’est de l’amiante dans les poumons et un cancer”... Alors, au final, le vrai sujet ne serait-il pas plutôt : “Que pourrions-nous gagner en travaillant autrement ?” Damien Zagala

retour de bâton Le TSS, “Tout sauf Ségolène (Royal)”, a encore une fois parfaitement fonctionné, de la droite à la gauche, en passant par Mme Trierweiler, la “twitteuse” invétérée de l’Elysée. M. Bayrou se fait sortir quand M. Morin voit son bail renouvelé : cherchez l’erreur… Cet honnête homme devra prendre des cours de danse, sa valse-hésitation n’a pas payé. Mme Morano, extrêmement… maladroite, est condamnée au “gris de Toul”, à déguster entre amis au Café du commerce. Marion Maréchal-Le Pen, 22 ans, sans expérience politique, est nommée perroquet officiel de Papi Le Pen. Elle va prendre le melon du côté de Carpentras. Elle a la tchatche et connaît déjà à fond le répertoire. Gros succès aussi pour M. Woerth, représentant en casseroles, élu par la crème des électeurs de Chantilly. M. Guéant, plus grand diviseur commun des Français, ramasse une gamelle, de quoi nourrir sa haine des autres. Le crime ne paie pas toujours. Plutôt rassurant… Prix du langage fleuri attribué à maître Collard qui lâche un instant son fromage pour se proclamer futur “casse-couilles” de service à l’Assemblée, comme si l’on ne s’en était pas déjà aperçu. Jean-François Hagnéré

écrivez-nous à [email protected], lisez-vous sur http://blogs.lesinrocks.com/cestvousquiledites

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7 jours chrono le paperblog de la rédaction

le moment Venues d’Espagne et de Belgique, ces structures arrivent en France.

Weeds/Canal+

Si le PS et l’UMP pensaient avoir enterré le débat sur le cannabis avec la fin de la campagne des législatives, ils se sont trompés. Des militants ont profité d’un Appel du 18 joint anticipé, à Tours, pour annoncer le lancement des Cannabis Social Club partout en France. Le but de ces coopératives de consommateurs réguliers de marijuana est de leur permettre de se fournir sans alimenter le trafic, en faisant pousser la plante directement chez eux. Ces structures ont vu le jour de manière formelle en Espagne et commencent à apparaître en Belgique, des pays où la détention, la consommation et la production de cannabis à usage personnel ne constituent pas un délit pénal. En France, la production de cannabis est punie de vingt ans de prison et de 750 000 euros d’ amende. “Ceux qui prennent ce risque à titre personnel ne seront désormais plus tout seuls face à la justice, clame Dominique Broc, porteur du projet de ces clubs sociaux du cannabis à la française. On est prêts pour un éventuel procès. Mieux : on ne demande qu’à être jugés.” Dans les jours qui viennent, il ira signaler à la préfecture qu’il fait pousser de la ganja dans son jardin. Affaire à suivre.

Renaud Monfourny

Cannabis Social Club

Luz + Strokes = Minotaure Quand un dessinateur obsédé par le rock rencontre le batteur des Strokes, ça ne donne pas une affiche The Kooples (“Luz et Fabrizio, ensemble depuis quinze jours”), mais un labyrinthe autour des aventures de Thésée. Mettant leurs forces en commun, Luz et Fabrizio Moretti se sont livrés à une performance à la galerie Perrotin à Paris, dessinant à quatre mains pendant plusieurs jours sur une vaste bande de papier accrochée au mur, au son de leur discothèque personnelle (quand on y était, c’était Johnny Cash et Stand on the Word de Keedz – on a failli leur dire que ça le faisait pas trop de passer le hit de la BO de Maïwenn, mais bon…). Entre deux coups de feutre, on a aperçu la casquette turquoise de Luz et la tignasse bouclée de Moretti, tandis que dans la salle d’à côté, un petit garçon déroulait d’autres rubans dessinés – attendait-il, lui aussi, l’irruption du Minotaure ? vanne de la semaine Elle vient d’un tweet de l’acteur américain Will Ferrell. Extraterrestre 1 : “Tu as bien envoyé notre message aux habitants de la Terre ?” Extraterrestre 2 : “Oui, mais ils l’ont rebaptisé dubstep et ils dansent dessus.” immortels A 94 ans, Stéphane Hessel, auteur d’Indignez-vous !, entre dans Le Robert illustré & Dixel 2013, qui sort jeudi, aux côtés de Jean-Luc Mélenchon, mais également de Jean Dujardin, Brad Pitt, Axel Kahn ou Wolinski. Radiohead reporte ses concerts A la suite du décès de leur technicien Scott Johnson lors de l’effondrement d’une scène à Toronto (qui a également entraîné des blessures pour trois autres personnes), Radiohead a annulé plusieurs dates européennes. Sept concerts prévus en Italie, en Suisse et en Allemagne sont ainsi reportés, mais la première date française, prévue à Nîmes (le 10 juillet), est maintenue. Si le groupe demande du temps pour affronter “la douleur et la stupeur”, d’autres raisons plus prosaïques ont conduit à ces annulations : l’effondrement de la scène a détruit le light show complexe du groupe et une partie de sa sono, et il faudra plusieurs semaines pour les remplacer.

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l’image

Peut-on innocemment équiper une paire de baskets de chaînes et de menottes en caoutchouc orange ? Adidas vient d’apprendre que non et a annulé la sortie sur le marché des baskets dessinées par le créateur Jeremy Scott après deux semaines de grogne des militants antiracistes, outrés par ce qu’ils percevaient comme une référence à l’esclavagisme. alea Acta est La commission du commerce international du Parlement européen a, après les commissions des libertés, de l’industrie, du développement et des affaires juridiques, voté en défaveur du traité Acta ce jeudi. Ce traité commercial international de lutte contre la contrefaçon, très controversé pour son aspect liberticide (via l’identification facilitée des téléchargeurs auprès des fournisseurs d’accès à internet, par exemple) , a été négocié en secret depuis 2007, à l’initiative des Etats-Unis. Il avait suscité des mouvements de mobilisation dans le monde entier.

Two Door 2 Quand Colin, le débonnaire manager de Two Door Cinema Club sonne à la porte, on l’accueille avec quelques appréhensions. Il vient faire écouter les nouvelles chansons du groupe et on craint ce syndrome infernal du “second album”, face B peu inspirée, déjà vidée de fougue, du premier. Mais alors que les tubes s’enchaînent en une insolente cavalcade de singles potentiels, propulsés par la production de Jacknife Lee (Bloc Party, Weezer…), toute crainte s’évapore : à 21 ans, les Irlandais ont réussi un tour de force ultrapop, avec l’incandescent Beacon, qui va taper très haut et très large. Il sortira le 3 septembre. Prévenez vos mollets.

Ahmed Jadallah/Reuters

les galères d’Adidas

place au Frère

Des centaines de milliers de personnes ont célébré la victoire du candidat des Frères musulmans, Mohamed Morsi. La place Tahrir est en ébullition. Le peuple brandit le portrait de Mohamed Morsi, nouveau président égyptien. Le candidat des Frères musulmans l’a emporté avec 51,7 % des suffrages et devient ainsi le premier président élu et choisi depuis la chute du président Moubarak, le 11 février 2011. La victoire du candidat des Frères musulmans marque une forme de soulagement pour les Egyptiens, après une semaine de longue attente lors de laquelle la Haute Commission électorale n’a eu de cesse de repousser l’annonce des résultats officiels. Semaine d’incertitude où les tribulations sur l’état de santé du président déchu sont venues jeter de l’eau sur le feu en plein regain politique. M. Morsi devra se mettre d’accord sur le rôle de l’armée, qui n’entend pas lâcher entièrement les rênes du pays. Le 14 juin, la Cour constitutionnelle qui a dissout le Parlement, majoritairement islamiste, a remis du même coup les pouvoirs législatifs provisoires au Conseil suprême des forces armées, qui avait assuré la transition politique depuis la chute de Moubarak. Pour l’heure, place Tahrir, les manifestants semblent plus préoccupés par la victoire du nouveau président. L’effusion de joie semble nier pour un temps les problèmes sous-jacents liés à l’implication de l’armée dans la politique du pays.

D. D., B. Z., avec la rédaction 27.06.2012 les inrockuptibles 15

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sens dessus dessous par Serge July

le retour du fédéral

l’ère de rien

Guyane : Shell reprend la mer

L

a semaine dernière, on annonçait ici une heureuse nouvelle : les forages de la Shell en mer de Guyane suspendus in extremis par la ministre de l’Ecologie Nicole Bricq, alors que le navireforeur était déjà sur zone. “Jusqu’à quand ?”, concluions-nous avec un zeste de méfiance. La réponse n’a pas traîné. Trois jours après, Nicole a sauté lors du miniremaniement, remplacée par Delphine Batho. Le chantier va pouvoir commencer. Déjà des hélicoptères ont amené les ouvriers sur le bateau plate-forme de la Shell. Wow ! De puissants et furieux intérêts ont parlé, à Matignon, à l’Elysée. Laurence Parisot, du Medef. Jean-Louis Schilansky, président de l’Union française des industries pétrolières, Victorin Lurel, ministre des Outre-mer. “Nous avons expliqué deux ou trois petites choses au gouvernement”, a confié Schilansky au Monde. C’est vrai qu’il y avait urgence : un bateau de forage coûte en location un million de dollars par jour. On suivra donc avec passion la gestion du dossier par Delphine Batho. Comment va-t-elle s’y prendre pour protéger la mangrove guyanaise, les cétacés du coin et réformer le code minier ? Et comment vont réagir les alliés Verts au gouvernement et à l’Assemblée. Léon Mercadet

le mot

[valeurs]

Francis Le Gaucher

l’échec de l’intergouvernemental L’emballement des dettes souveraines a bousculé l’histoire de l’Union européenne. Le fédéralisme avait été condamné aux oubliettes avec le rejet du projet de Constitution européenne en 2005. La victoire du non n’avait pas seulement fait dérailler toute perspective d’union politique, mais elle avait marginalisé la démarche communautaire, et revalorisé la méthode intergouvernementale dont Nicolas Sarkozy aura été le champion, en duo avec Angela Merkel, à qui cela convenait tant que c’est elle qui écrivait la partition musicale. Mais cette méthode, avec ses forcings et ses nombreuses victoires toutes éphémères, aura été impuissante à résoudre la crise de l’euro. le grand air de la croissance Le changement de majorité en France a coïncidé avec le constat d’échec de cette méthode, avec son austérité imposée et son incapacité à sortir du marasme économique qui plombe la croissance mondiale. Le pacte de croissance adopté à Rome ouvre une nouvelle piste. Il représente un point de PIB européen. C’est un premier pas qui devra être complété. En comparaison, le plan de relance d’Obama a représenté 7 points de PIB américain et 1 000 milliards de dollars. le saut fédéral Face à l’offensive sur la croissance de François Hollande appuyé par Mario Monti et Mariano Rajoy, Angela Merkel a répliqué en annonçant que “la solution à la crise, c’est plus d’Europe” et que plus d’Europe avait un nom : “l’union politique”. La chancelière a été très carrée, à l’allemande : vous voulez plus de solidarité, plus de Banque centrale, plus de mutualisation des dettes, plus d’union bancaire, d’union fiscale, OK, c’est très simple, il faut accepter plus d’intégration, plus de contrôle, un vrai pouvoir central et les abandons de souveraineté qui vont avec. C’est ce qu’elle a appelé “le saut fédéral”. la patate chaude La classe politique allemande baigne dans le fédéralisme. Et ce régime a été bénéfique pour toute la société allemande. En le proposant, Angela Merkel n’ignore pas que le fédéralisme donne de l’eczéma à la classe politique française. La France, héritière de la monarchie absolue et du jacobinisme, répugne aux abandons de souveraineté. A François Hollande de faire avec cette patate chaude : la croissance et la mutualisation des investissements et des dettes ont un prix : l’union politique avec tous les outils qui vont avec. A charge pour l’héritier de Jacques Delors de résoudre cette contradiction et d’inventer un chemin européen qui permette enfin à tous les Européens de sortir ensemble de la crise.

Nadine Morano avait insisté sur “les valeurs qu’elle partageait” avec le FN. Là, on peut se demander s’il s’agit vraiment de valeurs. A gauche, Martine Aubry se réfère volontiers aux “valeurs du socialisme que nous n’aurions jamais dû quitter”. Peut-on connaître ces valeurs ? Le socialisme a tant varié depuis son apparition au XIXe siècle. La mission historique du prolétariat ? La collectivisation des biens de production ? Ou plus simplement la justice et la franchise ? Mais celles-là, nul n’en a le monopole. Quant à la droite, sa défaite consommée, elle répète dix fois par jour qu’elle va “réaffirmer ses valeurs”. Ces valeurs, concept éthique, nous les imaginons éternelles. Alain Juppé nous dément lorsqu’il évoque “la charte des valeurs de l’UMP, qui date de 2002 et nécessite d’être réactualisée”. Si les valeurs changent tous les dix ans, c’est qu’elles ne doivent pas présenter beaucoup de consistance. M.-A. B.

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Julian Assange à Quito double Sous la menace d’une extradition vers la Suède et les Etats-Unis, le fondateur de WikiLeaks a demandé l’asile politique à l’ambassade d’Equateur à Londres. Devant les grilles de l’ambassade d’Equateur à Londres, le 22 juin

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n exil à Quito pour Julian Assange ? C’est en tout cas ce que tente d’obtenir le cyberactiviste à la célèbre chevelure blonde, faisant se confondre de plus en plus son histoire avec un thriller suédois signé Stieg Larsson. Assigné à résidence depuis décembre 2010, Julian Assange s’est réfugié la semaine dernière dans l’ambassade d’Equateur, située en plein cœur de Londres, à quelques centaines de mètres du grand magasin Harrods. Le fondateur de WikiLeaks est réclamé comme témoin par la justice suédoise qui souhaite l’interroger sur les accusations d’agressions sexuelles lancées par deux femmes, qui avaient travaillé comme bénévoles lors d’un congrès de l’organisation à Stockholm en août 2010. Depuis le début de l’affaire, l’informaticien australien affirme que ces relations étaient consenties et se dit victime d’un complot ourdi par Washington visant à détruire WikiLeaks. Alors que la Cour suprême britannique a rejeté son ultime demande d’appel, l’homme qui a organisé la plus grande fuite de documents diplomatiques de l’histoire espère échapper à son extradition vers la Suède en demandant l’asile politique à Quito.

“La vie en Equateur est bien meilleure que derrière des barreaux. Ce sont des gens généreux, sympathiques”, a justifié à la radio australienne ABC Julian Assange, qui estime que son pays natal, l’Australie, l’a abandonné. “Je n’ai rencontré personne de l’ambassade d’Australie depuis décembre 2010”, tandis que “les Equatoriens compatissaient à mes luttes et à la bataille de l’organisation (WikiLeaks) contre les Etats-Unis”. Le choix de remettre son salut entre les mains d’un pays peu réputé pour sa défense des libertés publiques peut surprendre, mais pour Jean-Jacques Kourliandsky, chercheur à l’Institut des relations internationales et stratégiques (Iris) et spécialiste de l’Amérique latine, il s’explique par le fait que l’ambassade équatorienne est la “plus hermétique aux pressions des Etats-Unis. Dans le bras de fer politique qui oppose les pays de l’Alliance bolivarienne pour les Amériques (Alba) à Washington, le président équatorien Rafael Correa a remplacé le président vénézuélien Hugo Chávez.” Souvent critiqué par les ONG pour ses atteintes à la liberté de la presse, le président Correa voit dans l’affaire Assange la possibilité de redorer son image. “Nous rappelons notre ambassadrice à Londres pour consultations car il s’agit d’une affaire

très sérieuse”, a déclaré solennellement Correa durant un enregistrement radiophonique à Quito vendredi dernier. En novembre 2010, l’Equateur avait déjà fait des appels du pied au militant australien. Le vice-ministre des Affaires étrangères équatorien avait proposé de l’accueillir mais avait été, à cette époque, désavoué par Rafael Correa. Depuis, les relations entre le fondateur de WikiLeaks et le chef d’Etat équatorien se sont réchauffées. Le 22 mai, Julian Assange l’avait interviewé par écrans interposés lors d’une émission de Russia Today (chaîne d’information en continu financée par le Kremlin) pour laquelle le trublion australien joue les animateurs de talk-show depuis quelques semaines. A la fin d’une interview mielleuse sur sa vision de l’Amérique latine, Correa avait lancé, goguenard : “Au revoir Julian. Bienvenue au club des persécutés !” Ravi, Assange avait répondu, taquin : “Merci, président, ne vous faites pas assassiner !” Alors qu’il se définit comme un libertarien, les soutiens politiques d’Assange ont de quoi étonner, surtout que WikiLeaks a renoncé à publier des documents diplomatiques susceptibles de fragiliser le régime russe. En octobre 2010, le porte-parole de WikiLeaks, Kristinn Hrafnsson, avait pourtant annoncé dans

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Andy Rain/EPA/Maxppp

Assange redoute d’être poursuivi pour espionnage outre-Atlantique où, dit-il, il pourrait encourir la peine de mort

une interview accordée au journal russe Kommersant des révélations à venir sur la Russie. La croisade anti-impérialiste d’Assange aurait-elle pris le pas sur la quête de vérité et de transparence que s’était assignée son organisation ? “Ce rapprochement est avant tout conjoncturel, pour Olivier Tesquet, journaliste auteur de Comprendre WikiLeaks (Max Milo). Dans son combat pour éviter l’extradition vers les Etats-Unis, Assange cherche un pare-feu diplomatico-légal. De ce point de vue, les solutions les plus évidentes étaient à chercher du côté du Kremlin et des bolivariens d’Amérique du Sud.” Depuis l’ambassade équatorienne où il s’est réfugié, Assange s’était justifié d’avoir violé les termes de sa liberté conditionnelle par ses craintes que son extradition vers la Suède ne soit qu’une première étape avant une seconde, vers les Etats-Unis. Le fondateur de WikiLeaks redoute d’être poursuivi pour espionnage outre-Atlantique où, dit-il, il pourrait encourir la peine de mort après la divulgation en 2010 par WikiLeaks de plusieurs milliers de câbles diplomatiques américains, notamment sur les guerres en Irak et en Afghanistan. “Julian Assange a raison de se montrer vigilant puisqu’une procédure pénale a débuté à son encontre aux Etats-Unis,

en Virginie, où un grand jury a été réuni, analyse Me Jean-Marc Fédida, avocat spécialiste des libertés publiques. On sait également que les Etats-Unis ont des autorités de poursuites d’une redoutable efficacité, qui ne font preuve d’aucune timidité lorsqu’il s’agit de lutter contre toutes les formes d’atteinte à leurs intérêts supérieurs.” Peu après l’arrestation de Julian Assange sur le sol anglais en décembre 2010, le journal britannique The Independent avait d’ailleurs indiqué que des contacts diplomatiques avaient eu lieu entre la Suède et les Etats-Unis afin de discuter de l’extradition du fondateur de WikiLeaks. Depuis 1961, un accord d’extradition lie les deux pays. Lors du procès de Julian Assange à Londres, sa défense avait indiqué que la Suède avait de très mauvais précédents en matière de traitement des détenus étrangers. Stockholm avait notamment été rappelé à l’ordre en 2006 par le Conseil des droits de l’homme des Nations unies pour avoir livré à la CIA un demandeur d’asile égyptien suspecté de terrorisme, qui par la suite avait été torturé. Mais Julian Assange représente un tout autre défi juridique pour les Etats-Unis. Pour le poursuivre, Washington aura du mal à se reposer uniquement sur

l’Espionage Act, un texte datant de 1917 qui permet de condamner les “activités antiaméricaines”. Problème, le poursuivre pour ce motif serait immanquablement perçu comme une atteinte à la liberté de la presse, selon Me Jean-Marc Fédida : “Les agissements d’Assange ne sont pas susceptibles d’être sanctionnés au regard du premier amendement de la Constitution des Etats-Unis d’Amérique qui interdit d’édicter toute loi ou toute règle qui viendrait porter une restriction à la liberté d’expression et de pensée.” En marge du G20 à Mexico, la Première ministre australienne Julia Gillard a assuré que Canberra offrirait une assistance consulaire au fondateur de WikiLeaks dans sa demande d’asile politique à l’Equateur. Preuve que la stratégie médiatique d’Assange fonctionne et que son pays natal ne l’a pas définitivement abandonné. Sauf que cette affaire personnelle a affecté la crédibilité de son organisation. Pour Olivier Tesquet, “WikiLeaks est aujourd’hui cannibalisée par les problèmes juridiques de son fondateur et les derniers documents publiés ont été relativement décevants. L’attraction médiatique, qui a tant servi à WikiLeaks au début, se retourne aujourd’hui contre elle. Les gens ont peur de transmettre des infos à cette structure désormais sous très haute surveillance.” David Doucet 27.06.2012 les inrockuptibles 19

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Steve Gullick

Hot Chip

Festival Les inRocKs 25e ! Hot Chip, Andrew Bird, Tindersticks, Lambchop, Electric Guest, Spiritualized, Alabama Shakes : le rendez-vous musical des Inrocks fêtera sa 25e édition en beauté du 5 au 13 novembre.

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armi les 863 raisons qui font que l’on aurait aimé naître dix ans plus tôt, il y en a une qui hante nos nuits chaque mois de novembre : avoir raté les trois quarts des vingt-quatre premières éditions du Festival des Inrocks. En 1988, pendant qu’on se faisait piquer nos jouets à l’école maternelle, The Durutti Column volaient une bonne centaine de points de vie au public de La Cigale qui inaugurait cette première édition du festival. L’année suivante, c’était au tour des La’s, des Stone Roses et de Felt. Puis, en 1991, alors qu’on dansait la lambada dans les cours de récré, Blur et Pulp, réunis sur la même affiche, exportaient pour

la première fois leur brit-pop en France. A l’adolescence, les choses ne se sont pas arrangées et on a pleuré des larmes de sang en réalisant tous ceux qu’on avait manqués : PJ Harvey, Television, Mazzy Star, Placebo, Blondie, Grandaddy, Elliott Smith, Pavement, Phoenix, New Order, The Streets, Kings Of Leon, Sufjan Stevens, The Black Keys, Cat Power… La liste est trop longue pour citer tous ceux qui, des White Stripes, de Muse et des Libertines à Oasis, Coldplay et Franz Ferdinand, ont fait leurs premiers pas live français en terre Inrocks – ou leurs derniers comme LCD Soundsystem venus y faire leurs adieux. Pour sa 25e édition, le festival change de dénomination et devient

le programme Paris, Casino de Paris, Trianon, Cigale et Boule Noire, du 5 au 10 novembre ; Caen, Cargö, 8 novembre ; Lille, Aéronef, 8 et 9 novembre ; Nantes, Stereolux, 9, 10 et 11 novembre ; Lyon, Transbordeur, 9 novembre ; Marseille, Cabaret Aléatoire, 10 novembre ; Toulouse, Bikini, 12 et 13 novembre Location : points de ventes habituels, fnac.com et alias-production.fr. Pass 3 jours Cigale + Boule Noire du jeudi 8 au samedi 10 : 99 €* ; Pass 1 jour Cigale + Boule Noire : 39,50 €*. Programmation complète sur lesinrocks.com * Exclusivité dans les magasins Fnac et sur fnac.com, frais de location inclus

le Festival Les inRocKs. Mais il poursuit son entreprise de fêtes et de découvertes en invitant à la fois têtes d’affiche et jeunes groupes prometteurs. Après une première salve de noms annoncés la semaine dernière, l’affiche se complète aujourd’hui avec de vieilles connaissances puisque la machine à danser et remède electropop anticrise Hot Chip, le surdoué Andrew Bird et les souverains de la mélancolie rock Tindersticks feront leur grand retour aux inRocKs. Trois superstars pour trois supersoirées où les premiers seront accompagnés des brillants Juveniles et Lescop au Casino de Paris ; le second, de Here We Go Magic, Half Moon Run et Arthur Beatrice au Trianon ; et les derniers, de leurs potes de Lambchop et des nouveaux venus Daughter à La Cigale. Retour au bercail pour certains, mais aussi une première pour d’autres qui entameront au passage un grand tour de France puisque, outre Paris, le festival s’arrêtera à Nantes, Marseille, Lyon, Caen, Lille et Toulouse. C’est une

immense fierté pour cet événement que de visiter, plus encore qu’à l’accoutumée, la France d’en haut, d’en bas et des côtés. Avec leur pop vitamine C, les Américains d’Electric Guest agiteront hanches et mollets aux côtés des fous furieux The Vaccines, de la captivante Poliça et des oiseaux de nuit Phantogram. Tandis que l’on découvrira la pop déconstruite des sublimes Alt-J, le jeune et déjà star Jake Bugg, Haim, Savages, Palma Violets, Saint-Michel, Niki And The Dove, Peace et No Ceremony/// à la Boule Noire, on sautillera de bon cœur au son de la pop imparable des Londoniens Citizens!, accompagnés des Maccabees, de Team Me et du (trop) rare Spiritualized. Et quand, en sueur après les shows de Wild Belle, Willy Moon, The Bots et Michael Kiwanuka, on regardera les galvanisants Alabama Shakes renverser La Cigale avec leur soul habitée, on se dira que pour la cinquantième édition du Festival Les inRocks en 2037, ce sera au tour de nos enfants de regretter de n’être pas nés dix ans plus tôt. Ondine Benetier

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“j’ai jamais été très fort en tennis, du coup j’ai pas eu besoin de m’expatrier”

retour de hype

retour de bâton

hype

buzz

pré-buzz Justin Timberlake en Mitch Buchannon

la revue Audimat

la “revue du web”

Wham! Alec Baldwin

“hey, t’as vu Dujardin dans le prochain Scorsese ?”

Gesaffelstein Pirlo