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M. Briand il i'Assemblee de la Societe des Nations en 1928, le sort des « minorites » d'aujourd' hui n'est guere comparable au sort des peuples opprimes dans ...
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ues Ilattes des Renmains Tpansylvains poatr la Itibetrte, et l'Opinion Earopeenne (Bpisodes et Souvenirs)

AUX HEROS-martyrs de notre race de partout et de toujours qui, par leurs soufJrances deux fois millenaires, et beaucoup d'entre eux par le sacrifice sacre de leur vie, ont prepare et realise avec la sagesse et le patriotisme des grands hommes de la nation roumaine et de sa dynastie, ainsi qu'avec~ concours fidele et genereux d~ de peuples et d'eminentes personnalites etrangeres, l'unite politique -ae tous les Roum~ins. L'AUTEUR.

ltES ltUTTES DES

POUR hA ltIBERTE, ET ll'OPINION EU~OPEENNE

EPISODES ET SOUVENU~s PAR

GEORGE

AVEC

PREFACE

PAR

MORO'iANU

M.

WICKHAM-STEED

UIVIVERSITATEA ••WClAN BLAGA LIBRAIRIE

PARIS UNIVERSIT~

SISIU

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JNVENT ARIA T 1998 J. ·AMB,Dn ~

7, Rue Danton 1933

" FEB

PREFACE

D'un sejour il Paris, comme etudillnl d' hisloire ii la Sorbonne de 1893 il 1896, je conserve deux souoenirs particuiierement lumineux el reoelateurs. Au mois .de nooembre 1893, les Societes Alsaciennes de France tinrent Un congres auquel assista une (}elegation d' etudiants Tcheques, Dans u,,: discours passionne, le chef (}e cette delegation predit une lutte europeenne contre le qermanisme, el declara que, lorsque sonnerait l' heure de cette lutte, les Tcheques se rangeraient aux cătes des Alsaciens ; pour soutenir aoec eux la cause de tous les peuples opprimes. A cette epoque je connaissais peu la question tcheque. L'idee qu'on put battre en breche le germanisme et transţormer l'Europe de Bismarck me parut etranqe el meme ţantaisiste. Neanmoins cet incident me resta dans la memoire cornme un aoertissemeni. En 1894, si je ne rne trompe, M. Emile Picot tit il la Sorbonne une saisissante conţerence sur les Roumains de la Transylvanie. Denoncant l'oppression maqţrare, il decrioit leurs souţţrances et paria de leur ţoi invincible dans un aoenir meilleur. Le ţremissemeni de ses auditeurs, parmi lesqueis se trouoaient beaucoup de Roumains de Paris, et bon nombre de Transylvains, me IU songer encore une lois aux ţorces contenues dans une Europe qui semblait alors trop soluiement etaMie pour que les aspirations des peuples assujettis puissent teoranier. I1l'Y Ce ne lut que dix ans plus tard, ii Vienne, que mori ami M. Georges Morozanu d'abord, et M. Aurel P01Jovici ensuite, attirerent mon atlention sur l'importance de la question transylvaine et sur les legitimes revendications de la rnajorite rou-

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maine en Transylvanie. L'activite que deployait M. M'orozamc en France, en Belgique et en Angleterre pour ţaire com/prendre aux hommes d'Etat et au public europeens la situation lamentable de ses compatriotes, lut digne d'un ap6tre. Qu'on voulut l'ecouter ou non, qu'on le traitât de reveur impOTtun ou de patriote eclaire, il suivit son chemin sans trop se llreoccuver des resultats immediats de son apostolat. En eţţet, ira vu son reoe s'accomplir, Aujourd'hui depute de la Transylvanie au Parlement roumain, il rnet en retieţ les eţţorts qui ont .ete ţaits naquere pour [aire ressortir l'irruportance de l' anneau transylvain dans cette chaîne de points d'interrogation qui reliait entre elles les diverses parties de l'ancienne Monarchie Habsbourgeoise. De son ouvrage ses compatriotes ; et ses lecteurs a l' etranqer , apprecieront la juste valeur .. ' Pour tout esprit auise, il s'en degage un enseiqnement precieux, qui se rapporte .au present et a l' aoenir tout autant qu'au passe. L'Europe de Bismarck, nous le savons aujourd'hui, etait beaucoup rnoins solide qu'elle n'e71 avait l'air. Elle a dure, en tout, moins d'un demi-siecle. EUe tut pourtant la creation d'un 'homme de genie. Si la âuree de l'Europe que [aconnerent les Traites de Versailles, de Sairu-Germain. et de Trianon dependait de l' enuerqure politique des homones d' Elat qui les ont rediqes, il y aurait [ort a parier que leur ceuore serait plus ephemere encore que celle du grand Prussien. Heureusement, il n'en est pas ainsi. Ce ne sont pas les homrnes d'Etat seuls qui construisent les ediţices durables. Ce sont les idees, les ţormes morales dont ces hornmes sont les agents et les instruments, La creation im.perissable de Bismarck lut I'unite allemande, [ruit d'un long mouuement d'idees ţoncierement liberales, Sa crealion cad ue ut la Triulice et tout le susteme de contrainte et de reaction. qu'il eriqea pour etauer l' heqemonie militaire qermamique. Dans ce s sleme, le point le plus laible lut le dualisme austrohOrLgrois. Bismarck comptait . 'ten que la suprematie de la ~inorite allemande en Autriche, el celle de la minorite magyare eti Hongrie, auraient suţţi pour atteler indeţiniment la Maison des Habsbourq au -char des Hohenzollern, quels que [ussent les

POUR

LA LIBER TE,

ET L'OPINION

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qemissemerus et les protestations de la maiorite des peuples habsbourgeois. A ses yeux, l'avertissement des peuples pesait ~noins lourd que les interets (i'ynastiques, conception surannee dont la qrande guerre devait dernontrer i'insuţţisance. Malgre leurs deţauts, les Traites de Paix ont ce grand avantage : ils ont reduit, dans des proportions tres considerables , le nombre des peuples sournis il un joug etranqer, Ils ont cree la Grande Roumanie, la Tchecoslooaquie, la nouvelle Pologne et la Yougoslavie. En. outre, comme l'a bien ţait obseroer M. Briand il i'Assemblee de la Societe des Nations en 1928, le sort des « minorites » d' aujourd' hui n' est guere comparable au sort des peuples opprimes dans l'Europe d'ouant-puerre. Alors la souoerainete absolue des Etats ne fut ni contestee 'ni contestable, ~auf dans quelques territoires de l'ancien Empire Oltoman auxquels s'interessaient, pour des raisons souvent ego'istes, les Grandes Puissances du fameux « Concert Europeen ». Que les Roumains de la Transuloanie [ussent maltraites par les M agyars, les Polonais, par les Prussiens ou par les Russes, il n' existait aucune institution, aucun tribunal international, pour entendre les plaintes des oictimes. Aujourd'hui, au contraire, la Societe des Nations peut etre saisie de tout grief justiţie. La souverainete absolue des Etats se trouve limitee, en ţait et en droii, non seulement par les Traites des Minorites mais par l'existence meme de l'Institution de Geneue en tant qu'organe de la Communaute Internationale. Le plus grand resultat de la grande querre est bien l'orqanisation de la Comrnunaute Internationale sous la forme de la Societe des Nations. C' est cette innovation reoolutionnaire qui distingue I'Europe actuelle de l'Europe du passe. L'existence reconnue d'une Communaute Internationale suţţit, il elle seule, pour rnarquer le commencement d'une ere nouvelle dans l' histoire des conceplions politiques. Sans nous faire des illusions sur la oaleur de ce qui a ete fait, sans nous dissimulerla lonqueur du chemin qui nous reste il parcourir, nous aurions tort de [ermer les yeux sur l'immense signification de la Societe des Nations dans le nouvel ordre en Europe. Pour la premiere tois, des puissances victorie~tses dans une grande ,querre· se s.2nt soumises il l'autorite d'une institution internationale creee

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par elles, Dans cette institution, l'autorite se trouve entre les rnains des Etats, autreţois neutres el ennemis aussi bien que dam celle des Etats oainqueurs. El le Pacte, qui seri de constitution. ti cel organe d'une communaute oraiment internationale, est incorpore aux textes des Traites de Paix au meme titre que les chanqements territoriaux et les preoisions economiques el militaires qu'ils enreqistrent. A cet organe incombe, en plus, la tâche su Teme d' em echer la uerre el de ourvmr au des armement progressit, comme premieres etapes vers le but de mettre la guerre elie-meme hors la loi ... Complete, cornme il l' est, par le Pacte Kellog de renonciation il la querre comme instrument de politique nationale, le Pacte de la Societe des Notions iruroduit une modiţication. proţonde dans le droit international et dans la conception meme de la neutralit«. On ne peut mettre la querre hors la loi sans constituer en meme temps un droit nouoeau, un nouueau systeme de justice internationale pour rernplacer ce qui ţut l'ultima ratie des rois et des ţrounernements. Ce susteme de [ustice, tout embryonnaire qu'il soit, irnplique, il son tour, une nouvelle procedure pour reqler les riifferends internationaux, Puisque, selon ce Pacte de la Societe des Nations, « tout Membre de la Societe a le droit, il titre amical, d' appeler l' attention de l'Assemblee ou du Conseil sur toute circonstance de nature il eţţectuer les relations internationales el qui menacent, par suite, de troubler la paix ou la bonne entente entre nations, dont la paix depend )) ; il est evident que l' ancien reqirne de la souoerainete absolue des Etats est serieusemeru circonscrit, Parmi ces « circonstances » il [aut compter les plainies des minorites ethniques. Autrefois, les minorites ethniques ne pouvaient espher une amelioratiori de leur sort que de quelque chan,qernent violent dans rordre territorial ou politique. Aujourd'hui ces changements oiolents sont en principe exclus. De ce ţait decoule Un double deooir, deooir des Etats, dont les territoires sont habites par des minorites; de rendre la vie de ces minorites aussi douce que possible ; el deuoir des minorites memes de contribuer, selon la mesure de leurs ţorces et de leurs mouens, au bien-etre de l'Etat dont ils sont citoţjens. Ges deux devoirs sont reciproques. Si un Etat rnanque il son

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LA LIBERTE~

ET L' o-POOON

HUROPEENNE

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devoir enoers ses minorites, la Soeiete des Nations est la pom se rappeler ii l'ordre. D'ailleurs, eomme l'a bien dit Sir Austtm Chamberlain dans un âiseours il Geueoe, il ţout que de telles minorites se .presentent deoatu' la Societe des Nazion« «~ mains neltes el non pas comme agent!> ou imtlu:mtmts a'une wopagimde PQlilique inaoouable, Ni un T'To:iJe des MiruYrites, ni l' Institutioat de Geneue ne doit seroir de trernpliŢl, iL des intrigues dirigees contre la paix elle-merne. Ainsi la question. des minorites est intimement liee au probleme de la paia; el la question ne pourra se resoudre que dans la certituâe de la pai». Tam qu'wne nouoeile guerre semblera probable, ou mern« possible, les minorites ne ţeront leur deooir de citoşen« qu' avee des restrietions mentaies, et tan; que les Btats auaquels ces mmorites eppartiennent craind-ront la gueru, ils hesiteronl de traiter en citouens parţaitement loyaux des minorites dant la loşaut« pousrait, un [our, devenit âouteuse. De ee cerele vicieux on ne sortiro: qu' en. s'eţţorearu d'organiser la paix internationale de telie ţacon que toute notion de querre pemura ţantastique. Par ce moţ/en, on erdeoera â la question des minorites son caractere menacant. Les minorites elies-memes pourront jouir de leurs droits de citoyens sans arriere-pensee, et Reu ii reu, le rapp"ochement des peuples rendra les /,rontieres politiques de rnoins en moins »isibles, Cette perspective inspire V::Jur une larqe pari, Cidee gerWreuse des Etals-Unis d'Europe, A. l'objection que cette idee ne pourra se realiser tant que l'irnrnense Bussie Sooietique aqira en ennemie acharnee de la cioiiisation accidentale, an peut repondre que le meilleur rnoţ/en de proteqer notre ciuilisation contre toute atteinte est celui de conceooir la paix non pas comme point d'arrivee mais comrne point de depart vers une civilisation meilleure. Une Europe unie el concorde, basee sur la double justice internationale et sociale, .!]'aurait rien ii craindre de la propagande communiste. C'est ce qu'a compris la Roumanie lorsqu'elle enireprit sa grande Reforme Aqraire. Elle donna ainsi un exemple de prevoyante [ustice sociale et de democratie economique que ses voi)l,

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TRANSYLVAINS

sins rnagyars seront contraints, tât ou tard, de suiere. Alors la Roumanie et les pays de l'Europe Centrale pourront [ouer un grand râie, cornme noyau d'une association, economique d' abord, politique ensuite, qui se/vira peut-etre de base a la ţuture union de l'Europe. Lorsqu'on songe au chemin que le peuple roumain a parcouru, depuis l'union des « Principautes Danubiennes jusquă l'accomplissement de son unite nationale, on ne saurait douter de son destin. Unis, desormais, dans la grande patrie, aux ţreres de l'ancien « Regat les Roumains de la Transylvanie peuvent ,!!uiser dans leur propre experience la sagesse de se conduire envers leurs minorites ethniques comme ils auraient voulu que leurs oppresseurs d' hier se lussent conduits envers eux. Cette oppression, dont NI. Moroianu raconte les »icissitudes ou plutât I'intrensiqeance magyare qui l'inspira, lut une des causes premieres de la qrande querre. Pour que la liberation de la Transylvanie lut possible, des millions d' hommes, venus des conţins de la terre, ont du cornbattre el mourir, Notables lurent les services "fendus par le peuple roumain a la cause commune, immenses ses pertes, indicibles ses souftrances; el pourtant, services, vaillance et douleurs eussenT !!~ vains Asans l' appu,i d' autres peuples dont quelques-uns igno, (razent rneme le nOm de la Roumanie. Preuoe eclatante, si besoim eri lut, de la; solidarite des grands interets humains, et gage precieux quiă I'auenir, comme dans le pas se, le peuple roumain ne manquera de [oindre ses eţţorts il ceux des autres peuples pour etablir la civilisation et le nouvel ordre en Europe sur les solides bases de la paix inter'nationale et de la [ustice entre les homrnes, II

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Londres,

25-VIII-30.

Wiclcham Steed.