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Les Revenants, enfin

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spécial mode 24 pages

Edwige égérie novö

par Simon Liberati

lʼheure de Lou

M 01154 - 1035 - F: 3,50 €

Allemagne 4.40 € - Belgique 4 € - Cameroun 3400 CFA – Canada 6.99 CAD – DOM 4.80 € - Espagne 4.30 € - Grèce 4.30 € - Italie 4.30 € - Liban 11 000 LBP – Luxembourg 4 € - Maroc 42 MAD – Maurice Ile 6.30 € - Pays-Bas 5.90 € - Portugal 4.30 € - Royaume-Uni 6.30 GBP - Suisse 6.50 CHF – TOM 960 XPF – Tunisie 7 TNM

No.1035 du 30 septembre au 6 octobre 2015 lesinrocks.com

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cher Michel Platini par Christophe Conte

J

e me souviens avec précision de ton art inimitable de tirer les coups-francs. A l’époque, tu avais 15 829 repas d’affaires en moins dans l’abdomen, tu incarnais la France heureuse des Ritals assimilés sans souci dans l’identité tricolore, le FN était borgne et plafonnait à 1 %, et même si les Allemands gagnaient (presque) toujours à la fin, le panache était plus volontiers dans nos vestiaires. Lorsqu’une faute adverse à 20 mètres se présentait à ton appétit de chasseur de lucarnes, surtout légèrement excentrée vers la gauche, tu posais le ballon avec nonchalance, prenait quelques pas de recul et, détail crucial, tu jetais toujours un regard furtif par-dessus le mur, invariablement

du côté opposé de celui où tu finirais par expédier ta céleste praline. Cette feinte magistrale et souvent gagnante m’est revenue en mémoire la semaine dernière, lorsque tu déclaras dans une interview à l’agence Associated Press avoir “peut-être dit” aux dirigeants du foot américain que tu voterais pour la candidature des Etats-Unis en vue de l’organisation de la Coupe du monde 2022. Au final, tu t’en es officiellement vanté, tu as accordé ton suffrage de président de l’UEFA au Qatar, qui emporta la mise, bluffant ainsi les Amerloques avec autant d’aplomb que les gardiens dont tu trouas jadis les filets. Outre ce demi-aveu de traîtrise, c’est la suite de l’interview qui élève l’art de la litote en chaussures de ville à hauteur de celui de tes exploits en crampons.

Revenant sur ce dîner secret autour de Nicolas Sarkozy, alors président de la République, de l’émir et du Premier ministre qataris, lequel précédait le vote en question, tu lâchas ainsi : “Sarkozy ne m’a jamais demandé de voter pour le Qatar, mais je savais que ce serait bien”, et le journaliste de AP de préciser que tu avais sorti ça “en souriant”. Sacré Platoche, tu t’apprêtes à succéder à Sepp Blatter sur la plus haute marche du foot mondial, en prenant la tête de la Fifa, un poste qui pèse des milliards, mais toi tu fais état de tes petites combines comme s’il s’agissait d’une mise de deux euros aux paris sportifs. La gestion Blatter, c’est des soupçons de corruption à grande échelle, un vaste maillage de fric et de pouvoir digne d’une puissante multinationale arrogante et glaciale. Avec toi, si on s’en tient à ta désinvolture souriante, il s’agirait juste d’un petit arrangement entre potes, trois fois rien, du style : “Avec Sarko on avait un peu forcé sur la grappa, on a dit à Mohamed : ‘tu la veux ta coupe du monde, Momo ?’ Tope-là, couscous, j’ai promis la même aux McDonalds mais t’inquiète, le contre-pattes, j’ai beau ressembler à Jacques Villeret, j’en maîtrise toujours la technique…” Ainsi s’est visiblement monté ce petit deal entre Sarko et ta pomme (avec pour arbitre le coffre-fort déguisé en pays qu’est l’émirat), l’un héritant une fois éjecté de l’Elysée de conférences pipeau royalement payées, et toi du soutien sans faille des fortunés pétroliers pour faire carburer ton ambition. Mais c’était sans compter sur la contre-attaque de Blatter dans le temps additionnel, lequel vient de te charger comme un mulet – tu aurais touché pas loin de 2 millions de la Fifa –, et celle-là c’est toi qui ne l’as pas vue venir. Comme quoi, l’art du coup-franc, s’il sert aussi pour les coups tordus, peut aussi conduire droit dans le mur. Je t’embrasse pas, tu peux te brosser (le ballon)

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No. 1 035 du 30 septembre au 6 octobre 2015 couverture Lou Doillon par Hidiro pour Les Inrockuptibles chemise en dentelle et soie Véronique Branquihno puces d’oreilles Stone bijoux perso

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billet dur édito débrief recommandé interview express

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hommage Edwige par Simon Liberati le monde à l’envers nouvelle tête The Garden la courbe à la loupe démontage futurama

38 cette semaine sur

Pierre-Ange Carlotti pour Les Inrockuptibles

Matthias Schoenaerts

manteau Lacoste top Saint Laurent pantalon Vintage chaussures Dr. Martens

42 spécial mode rencontre avec Lou Doillon, icône cool contemporaine + les écoles de mode françaises sont-elles nulles ? + comment la nuit est devenue fashion + Shayne Oliver, créateur de Hood By Air, le nouveau chic new-yorkais

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66 enfin Les Revenants

Jean-Claude Lother/Haut et Court/Canal+

les morts les plus tendance de la télé française sont de retour sur Canal+. Entretien avec le scénariste et réalisateur Fabrice Gobert

70 la rage Girl Band le rock sauvageon revient dans les riffs survoltés de ces Irlandais qui feront convulser de plaisir le festival les inRocKs Philips

74 Encore d’Hakan Günday

l’écrivain turc se penche sur le sort des migrants dans un récit sans angélisme. Rencontre

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cinémas Ni le ciel, ni la terre, Maryland… musiques Kurt Vile, Alejandra Ribera… livres Philippe Forest, Lise Charles… scènes au festival Asian Arts Theatre expos Steven Claydon, Eric Mangion médias Yann Moix, Warren Beatty…

ce numéro comporte un encart scentseal “Dior Sauvage” collé dans l’édition abonnés et l’édition kiosques Paris-IDF.

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Philippe Morillon

Edwige, reine des punks (ici dans les années 1970)

la nuit nous appartient Elle avait 20 ans. Les cheveux blonds peroxydés, à la garçonne. Elle s’était rasé le crâne quelques mois auparavant, en signe de réinvention, après avoir quitté sa famille “20 dollars en poche”, comme elle le répétera souvent. Elle portait un Tuxedo brillant ce soir-là. Quand elle apparaît, sur le trottoir new-yorkais, devant l’entrée du Studio 54 au bras d’Andy Warhol, “la rue, se souvient-elle, s’est littéralement ouverte”. Elle s’appelait Edwige. Elle était l’une des figures les plus électriques de la nuit parisienne de la fin des années 70, l’ange blond de la bande du Palace avec Farida Khelfa, Eva Ionesco, Alain Pacadis, Paquita Paquin… La rencontre avec Warhol avait été immortalisée à Paris dans un cliché devenu célèbre – elle lui embrassait la joue – sur la couverture du quatrième numéro de Façade, le magazine culte du Paris branché et novö. Elle est décédée à Miami la semaine passée, à 58 ans, alors que nous bouclions ce numéro spécial consacré à la mode et à la nuit. Depuis la fin du XIXe siècle et l’invention de la haute couture, ces deux univers s’interpénètrent, se vampirisent, se séduisent, se jaugent. Edwige était le meilleur concentré, la meilleure incarnation de cette relation. Un corps qui, une fois vu, frôlé, admiré sur une couverture

de magazine, une pochette d’album (elle était la voix glacée du duo Mathématiques Modernes avec Claude Arto), transformait immanquablement le regard, l’imaginaire, l’idée que l’on se faisait de la modernité. A la fois icône, image adorée (elle avait défilé pour Gaultier, posé pour Newton, Pierre et Gilles…) et garante de ce monde souterrain, cerbère redoutée du Palace où elle tenait la porte en alternance avec Jenny Bel’Air, autorisant d’un geste ou d’un regard le passage de l’autre côté, dans cet espace-temps où se rejouent et se déjouent les déterminismes sociaux, le masculin et le féminin, où le vêtement dit, plus que jamais, le désir d’appartenance, la singularité, la promesse de la peau. A chaque époque ses nuits. A celles du Palace, extravagantes et années 80, ont succédé celles, plus sombres et rêches, de l’Est parisien. Elles sont queer et métissées et se pensent plus en terme de communauté que de club ou de lieu. Les reines de la nuit ne s’appellent plus Edwige ou Eva, mais Clara 3000, une jeune DJ égérie de Jacquemus, ou Dora Diamant, capturées avec leur bande dans ce numéro par l’objectif de Pierre-Ange Carlotti. Elles ont la morgue, l’attitude, le corps incandescent. Elles sont les jeunes gens modernes.

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comprendre le nouvel esprit Canal grâce aux inRocKs La semaine dernière de l’huile sur le feu, de la droite décomplexée, des liens affectifs avec une chaîne, des soldats obéissants et du beau, du bon, du Bolloré.

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on cher Inrocks, Dominique Delport, le bras droit de Vincent Bolloré définit le “nouvel esprit Canal”, slide sur Powerpoint à l’appui : “Il faut éviter l’irrévérence car c’est segmentant. Il ne faut pas diviser la société française, Canal ne doit plus mettre de l’huile sur le feu.” Alors là, je ne comprends plus. J’avais cru que Bolloré était de cette droite décomplexée qui n’hésitait pas à mettre de l’huile sur le feu, à cliver pour mieux rassembler et à déplorer que les Zemmour qui appellent un chat un chat et un musulman un délinquant soient absents de ses antennes. Et voilà que son bras droit nous sort un programme à la Hollande, semblant confondre le “nouvel esprit Canal” avec celui du 11 Janvier. Deuxième incompréhension : le “nouvel esprit canal” doit en finir avec l’irrévérence. Donc, l’ancien “esprit Canal”, c’était l’irrévérence ? Le Grand Journal, par exemple ? La grand-messe où les politiques se précipitaient pour débiter leurs éléments de langage sans que jamais la réponse à une question gênante ne puisse être entendue, puisqu’il fallait passer à la météo de Machine, à la pastille humoristique de Truc ou à la chronique littéraire de Bidule, mais tout de suite la pub, c’était ça, l’irrévérence ? Ce qui est encore plus dingo dans la définition de Dodo la Bollorure, c’est que si le “nouvel esprit canal” doit éviter “l’irrévérence”, “la division” et “l’huile sur le feu”, alors, il va vite falloir prévenir le patron ! Parce que dans le genre, c’est un client, Vincent. On n’a pas fait mieux depuis longtemps à Canal. Il débarque dans la boutique, on lui explique qu’ici ce n’est pas vraiment une chaîne de télé, que c’est bien plus que cela, “un objet culturel (…) un état d’esprit”, qu’il y a un “lien affectif” entre la chaîne et ses abonnés, qu’il ne faut jamais au grand jamais trahir “l’esprit Canal”. Il écoute le prêche, et d’un coup, il saisit ce pauvre petit esprit Canal, soudain transi de peur, le présente à la foule, fait un grand sourire et crac, il l’écrabouille dans sa main. Ça, c’est de l’irrévérence ! Mais l’irrévérence, comme dit Delport, c’est segmentant. Du coup, les critiques fusent. Mais il s’en fout, Vincent. C’est SA boîte, il fait ce qu’il veut. L’image de la marque se détériore et la sienne aussi, les audiences s’effondrent et la presse s’enflamme. Bolloré remet de “l’huile sur le feu”. Et une petite louche par-ci : il décapite tout l’organigramme du groupe et remplace les têtes pensantes par des soldats obéissants et incompétents. Et une autre par-là : il censure des documentaires qui, du coup, sont diffusés en clair sur d’autres chaînes plus regardées, avec le label “détesté par Bolloré”, le nouvel équivalent à Paris du prix Albert Londres. Rien à foutre. C’est son joujou, il l’a payé, c’est son business. Delport a tout faux. Bolloré est un punk, et le “nouvel esprit Canal”, c’est no future. Alexandre Gamelin

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une semaine bien remplie Se laisser emporter par un songwriting grandiose et tordu, voyager dans un corpus d’images entre ombre et lumière, retrouver une école de pilotes de chasse eighties en trois dimensions et revoir un hypnotique mélange d’archives.

abstraction Umbra Entre réalisme et abstraction, perception et interprétation, ou certitude et illusion, la plus talentueuse des jeunes photographes néerlandais, Viviane Sassen, propose avec Umbra, un corpus d’images qui réactualise de manière vivifiante un des fondements de l’histoire de l’art, celui du jeu entre ombre et lumière. A la demande de l’artiste, des textes de l’écrivaine Maria Barnas viennent scander la poésie et la magie des images.

Paramount/Splendor

exposition jusqu’au 1er novembre à l’Atelier néerlandais, Paris VIIe, atelierneerlandais.com

the aviator

Viviane Sassen, Marte #2, 2014

Top Gun 3D “I feel the need. The need for speed.” Près de trente ans après avoir fait vrombir les réacteurs de son Grumman F-14 Tomcat, Maverick, chien fou de l’US Navy, va reprendre du service. Top Gun ressort en effet en salle, paré pour l’occasion d’une version 3D qui promet une immersion totale au cœur de ses incroyables ballets aériens. Film archiculte signé Tony Scott, Top Gun avait propulsé la carrière de Tom Cruise, alors jeune bellâtre en devenir, vers la stratosphère. cinéma en salle

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multifacette

John Grant On savait l’Américain John Grant et sa voix de stentor impérial capable de tout, de chansons nobles aux arrangements merveilleux, d’expérimentations électroniques, de coups tordus, de textes à l’humour plus noir encore que son existence aux chaos abyssaux. Grant sait tout faire : grandiose et fou, son troisième album dévoile tous ses visages à la fois.

Yervant Gianikian & Angela Ricci Lucchi, Visions du désert, 2010

Michael Berman

album Grey Tickles, Black Pressure (Bella Union/Pias), le 2 octobre. concert le 15 novembre au Festival les inRocKs Philips (Cigale), avec Max Jury, Flo Morrissey, Barns Courtney

alchimistes Yervant Gianikian & Angela Ricci Lucchi Cinéastes, collectionneurs, alchimistes… Yervant Gianikian et Angela Ricci Lucchi proposent une cinématographie sans égale depuis plus de quarante ans. Mélange hypnotique d’archives et de films amateurs de la première moitié du XXe siècle, leurs films et installations vidéo proposent une plongée envoûtante et nébuleuse dans les limbes du septième art. Fracture rétinienne garantie. rétrospective jusqu’au 15 novembre au Centre Pompidou, Paris IVe, rencontre avec les cinéastes le 3 octobre, à 17 heures, centrepompidou.fr 30.09.2015 les inrockuptibles 19

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“je préfère les personnages qui tiennent leur gueule” Sympathique, cash, plus fin que les costauds qu’il joue, Matthias Schoenaerts parle de son nouveau film, Maryland, du cinéma flamand et de la bêtise du nationalisme et de David Lynch.

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u’est-ce qui vous a convaincu de tourner Maryland ? Matthias Schoenaerts – L’histoire, le rôle, et Alice (Winocour, la réalisatrice – ndlr). C’est le portrait intime de Vincent, un soldat souffrant de stress posttraumatique. En tant que comédien, il y avait là un gros challenge. Autour de ce character study, Alice a greffé des éléments de thriller, d’action, de film d’horreur. Sur le papier, c’est un film que j’avais envie de voir, donc j’avais envie de le faire. Votre personnage est un taiseux. Vous aimez ces rôles tout en intériorité ? Oui, on ne dit pas grand-chose mais il faut que ça existe. J’aime ce type de rôle parce que je trouve que souvent, dans la vie, les gens abusent des mots. Jusqu’à un certain point, je cherche cette économie de paroles chez mes personnages. Beaucoup de gens et de personnages de cinéma parlent trop et trop vite. Un personnage bavard peut me plaire aussi, mais généralement, je préfère les personnages qui tiennent leur gueule. J’aime bien quand on parle juste quand c’est nécessaire. Ceux qui parlent beaucoup souvent ne disent rien. Bon, on va pas non plus faire les moralistes… mais un peu quand même ! Travailler avec Alice Winocour, c’était comment ? Elle est ouverte et directe, franche. J’aime ça. On ne perd pas de temps à s’embobiner, on dit ce qu’on pense et on essaie d’avancer. J’aime bien le dialogue franc et honnête, qui n’est pas le conflit, au contraire, c’est toujours dans l’idée de faire la meilleure scène possible. Généralement, qu’est-ce qui détermine vos choix de projets ? Les rôles, mais aussi le sens du film. Je me demande toujours, qu’est-ce que ce film nous raconte ?, qu’est-ce qui restera en sortant du cinéma ?, qu’est-ce que ça dit sur la nature humaine ?, est-ce que ça surprend ?, etc. J’ai besoin de ça pour croire à un projet. Après, il m’est déjà arrivé de découvrir ensuite le film et de penser : “quelle grosse merde !”

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“je n’ai pas du tout l’ambition de devenir une star d’Hollywood” Vous aimez aussi les rôles où votre physique de costaud n’est pas déterminant ? Bien sûr, comme dans Loin de la foule déchaînée ou Suite française. J’ai l’impression qu’on me réduit à Bullhead et De rouille et d’os, mais j’ai fait plein d’autres films et d’autres types de rôles ! Je vais même faire des comédies, des rôles où le type parle tout le temps ! Mais je ne prendrai pas la place de Poelvoorde, il est irremplaçable ! Vous avez fait des films de différentes langues et nationalités. Vous avez l’ambition d’une carrière internationale, voire hollywoodienne ? Pas forcément. J’ai juste envie d’avoir la possibilité de continuer à bouger. L’avantage de l’international, c’est de rencontrer de nouvelles personnes, ce qui permet de rester en mouvement intellectuel, créatif. C’est le plus important. Le cinéma se mélange de plus en plus, l’identité d’un film au sens national du terme tend à disparaître. On me parle de film belge : mouais… Si les personnages parlaient anglais, rien ne dirait que le film est belge. Ce sont les auteurs qui ont une identité de cinéma, pas les pays. Et puis tout bouge, tout évolue tout le temps, l’identité n’est pas un truc figé. Je n’ai pas du tout l’ambition de devenir une star d’Hollywood, je ne sais même pas ce que ça signifie. Mais si j’ai l’occasion de tourner un bon film là-bas, je ne vais évidemment pas refuser. Je ne perçois plus la distance entre les Etats-Unis et l’Europe, quand je suis à New York, je me sens comme en Europe. Il faut arrêter d’étiqueter. Par exemple, si on dit d’un comédien qu’il est un acteur de film d’action, on lui coupe les ailes ! Pareil pour un pays, c’est comme si on disait que la France, c’est le béret et la baguette. Ben non, la France c’est un peu plus que ça. On vous a découvert avec Bullhead, mais vous avez tourné plein d’autres films belges flamands. Ça vous embête qu’on ne connaisse pas le cinéma flamand en dehors de la Belgique ? Ça commence à bien bouger

en Flandre question cinéma, mais pendant longtemps, on a fait des grosses daubes. Maintenant, il y a une génération qui monte, celle de Michaël Roskam, Felix Van Groeningen (Alabama Monroe)… Mais je m’intéresse aussi au cinéma wallon, à Bouli Lanners, Joachim Lafosse, ce sont des cinéastes puissants. Ils ont chacun un style, une personnalité unique. Comment regardez-vous le conflit wallon-flamand qui divise la Belgique ? Je trouve ça d’une débilité absolue. C’est l’effet de la philosophie de la peur. Le politicien flamand va dire du mal des Wallons, “ils nous volent notre argent, etc.”, et vice-versa, et chacun va avoir peur de l’autre. Ma grand-mère est francophone, j’ai grandi en milieu francophone, je ne me sens ni wallon ni flamand, et même pas belge. Le nationalisme m’est complètement étranger, je trouve ça ridicule. A part diviser les peuples, je ne vois pas à quoi ça sert. Ce conflit est représentatif de ce qui se passe en Europe avec la montée des crispations nationalistes… C’est vrai… Je ne tire aucune fierté de ma nationalité. Je peux éventuellement comprendre le nationalisme de façon intellectuelle, mais émotionnellement, je n’y comprends rien, je trouve ça d’une telle débilité. Avec quels réalisateurs aimeriez-vous tourner ? David Lynch ! Si je ne devais plus faire qu’un seul film et que j’avais le choix, ce serait avec lui. Celui que je préfère de ses films est le moins typique, Une histoire vraie. J’adore. Et la fin est magnifique, bouleversante. Mais j’aime aussi Eraserhead, Elephant Man, Lost Highway, Blue Velvet, que des chefs-d’œuvre ! Lynch n’est pas du tout dans la psychologie, il dirige en termes d’énergie, d’atmosphère, ce qui donne des scènes fantastiques, chargées de plein de trucs. Son cinéma est unique. propos recueillis par Serge Kaganski photo Rüdy Waks pour Les Inrockuptibles lire aussi la critique de Maryland p. 81 30.09.2015 les inrockuptibles 21

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Façade Magazine/Alain Benoist

Edwige par Simon Liberati L’écrivain a bien connu Edwige, “reine des punks”, décédée le 22 septembre. Pour Les Inrocks, il a accepté de raconter les débuts parisiens de celle qui devint l’égérie platine de toute une génération, du Palace au Studio 54.

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orsque Edwige habita chez moi en décembre 1979, elle me raconta qu’elle était de l’Assistance publique et que ses parents adoptifs l’avaient chassée à 17 ans. Je ne sus jamais ni son âge, ni son vrai nom, à peine celui de “Jorge”, le nom de son charmant mari Jean-Louis, mort plus tard assassiné à Saint-Domingue. Au moment d’écrire mon livre, j’ai demandé à Eva qui n’en savait pas plus. Le mystère dont Edwige s’entourait forçait le respect. La valeur de certains êtres vient de la capacité qu’ils ont de mêler la plus haute féérie à la vie quotidienne. Peu importe le décor, un halo les distingue et leur donne le pouvoir de modifier par la fascination immédiate qu’ils exercent le cours d’autant d’existences que le destin leur fait croiser. Edwige était de ceux-là. Plus que la période “Palace” ou sa carrière de chanteuse new-yorkaise, ses débuts parisiens révèlent sa vraie nature. C’est en 1973 que Serge Kruger découvrit Edwige dans la pénombre d’un surplus militaire. “Lors d’une vie

précédente, j’étais propriétaire d’une station de matériel électronique (des autoradios) à la porte d’Italie, un quartier de troisième classe. J’étais client d’un surplus qui se trouvait en face, de l’autre côté du boulevard, au Kremlin-Bicêtre. Un après-midi, j’ai croisé les yeux de cette inconnue dans la boutique et je suis tombé amoureux d’elle. Je ne sais pas ce que je lui ai baragouiné, je crois que je lui ai dit tout de suite : ‘Je t’aime.’ Elle avait de longs cheveux châtains et ses yeux inoubliables, obliques.” Une histoire d’amour commence : “Elle voulait bien flirter mais pas plus car pour le reste, elle m’a avoué très vite qu’elle préférait les femmes. Elle avait 15 ans et demi ou 16 ans.” Edwige se laisse embrasser, flirte quelque temps et puis, un jour, annonce à Serge par téléphone qu’elle part faire du camping sur la Côte d’Azur. “Elle avait peut-être parlé de Menton, je ne sais plus… J’ai pris ma voiture et j’ai traversé la France pour aller courir tous les campings de la côte. J’ai fini par la retrouver dans une petite tente

individuelle. Je l’ai réveillée en lui chatouillant les pieds (elle détestait qu’on lui touche les pieds). Quand elle a ouvert les yeux, je lui ai proposé de partir à Porquerolles chez un copain qui avait un beau bateau.” Après trois jours d’idylle toujours platonique, Edwige plante Serge un matin et disparaît. “Elle avait tapé dans l’œil du mari de Jeanne Moreau, mais ce n’était pas réciproque. Elle est partie. J’ai été inconsolable pour l’éternité, c’est-à-dire me concernant, au moins quinze jours.” Trois ans durant, Serge n’entendra plus parler de la belle inconnue. “Je ne savais rien d’elle, même pas son nom de famille.” C’est Eric Busch, autre membre de la confrérie des amis les plus anciens, qui me le livre, intact, ignoré de tous, depuis quarante ans : “Bessuan, Edwige (son vrai prénom) Bessuan…” Elisabeth Hullin, dite Babette, m’en apprend plus sur sa famille. “Ses parents étaient boulangers en banlieue parisienne, elle avait une grande sœur, homosexuelle comme elle, qui s’appelait Belle et que j’ai connue.

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Séance de shooting d’Edwige et Andy Warhol pour la couve du Façade n° 4 par Pierre Commoy

Edwige prétendait que sa vraie mère était sa sœur mais Belle me l’a démenti.” Edwige fait sa seconde apparition dans la vie de Serge Kruger en 1976. “Je me suis heurté au coin d’une rue à quelque chose d’élastique et de chaud : c’était la poitrine de mon Edwige qui avait poussé pendant son absence. Nous nous jetons dans les bras l’un de l’autre, elle m’apprend qu’elle vit à l’hôtel à Saint-Germain, menacée par un voyou qui refuse de payer sa chambre tant qu’elle ne couche pas avec lui. Je prends la Cadillac, on passe à l’hôtel, je paie la chambre et je l’installe chez moi, rue des Lombards. J’ai eu le tort de la présenter à mes amis et surtout à mes amies et ils sont tous tombés amoureux d’elle.” Djemila Khelfa, sœur aînée de Farida Khelfa Seydoux et première égérie de la bande des Halles, se souvient de l’attraction qu’Edwige exerça sur elle. “J’ai rencontré Edwige avec Paquita (Paquin) au hammam de la mosquée. Au retour, dans le bus 27, alors qu’on allait chez Serge, elle m’a dit ‘je t’aime’ et elle m’a roulé une pelle. J’étais en fugue depuis l’âge de 14 ans, je ne suis pas homosexuelle et c’était la première fois qu’une fille m’embrassait sur la bouche, je l’ai laissée faire car j’étais fascinée par sa douceur.” Très vite, Djemila et Edwige deviennent inséparables, formant un de ces couples gémellaires que l’époque chérissait. “On allait danser au Katmandou, la boîte

lesbienne de la rue du Vieux-Colombier, ou au 7. Le Palace a marqué pour moi la fin d’une époque et non le début de quoi que ce soit.” Séductrice, Edwige était aussi suicidaire. Paquita Paquin et Elisabeth Hullin se souviennent que c’est à la suite d’une tentative de suicide qu’elle est devenue l’amazone platine qui créa la légende de la “reine des punks”, un titre surgi de nulle part. “Elle a donné son blouson et ses affaires à ses amis et s’est rasé la tête avant son suicide dont la date était annoncée depuis un moment. Le lendemain, elle s’est réveillée et quand ses cheveux ont repoussé, elle s’est peroxydée et fait la brosse qui allait la rendre célèbre.” Le jeudi 2 juin 1977, Andy Warhol note dans son journal : “Joël LeBon m’a pris en photo pour la couverture de Façade avec Edwige, une punk (taxi jusqu’au Trocadero : 8 $).” Warhol confond Joël LeBon et Pierre Commoy (futur Pierre et Gilles) mais la vraie histoire d’Edwige commence ce jour-là. Alain Benoît, patron de Façade, se souvient. “Je crois qu’elle était très heureuse, je ne sais pas si elle se rendait compte mais quand elle a vu la photo elle a d’abord refusé de la laisser paraître à cause de boutons sur sa peau. Il a fallu la supplier et elle a fini par dire oui.” Un oui en forme d’aller-simple, comme toujours avec elle. dernier roman paru Eva (Stock) 30.09.2015 les inrockuptibles 23

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Geovien So/Zuma/RÉA

Des prisonniers hongrois réquisitionnés pour la construction d’un mur à la frontière avec la Serbie, le 11 septembre

la Hongrie au pied du mur Plus de mille ans d’histoire expliquent pourquoi la Hongrie refuse d’accueillir les réfugiés au risque de se voir mise au ban de l’Europe.

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e 25 septembre, Libération résumait parfaitement l’incompréhension de l’Europe en général et de la France en particulier vis-à-vis de la Hongrie, titrant carrément : “Hongrie, la honte de l’Europe”. Ce qui est fascinant dans ce titre et ce quasi appel à “exclure la Hongrie de l’Union européenne”, c’est combien il imite et reproduit les réticences des Européens vis-à-vis des Hongrois il y a… mille ans de cela ! Dans les premières lignes de son monumental ouvrage, Les Hongrois – Mille ans de victoire dans la défaite, Paul Lendvai écrit : “Entre 898 et 955 après JC, donc pendant un demi-siècle, on surnommait les Hongrois le ‘fléau de l’Europe’.” Qui sont les Hongrois ? A leurs yeux, l’histoire de leur pays se résume à une légende et deux humiliations. La légende est celle des Magyars “gardiens de la chrétienté”. Saint Etienne, premier roi catholique de Hongrie, couronné en 1001, est leur héros national. Arrivés tard en Europe occidentale, les Hongrois se sont installés au Xe siècle dans le bassin du Danube. C’est donc un peuple de migrants qui a gagné son ticket d’entrée en Europe en se convertissant et en promettant d’en garder les frontières contre les invasions. A compter du Moyen Age, les envahisseurs, les “barbares”, qu’il fallait contenir et repousser, étaient mongols puis ottomans, majoritairement musulmans. Une “mission” qui allait durer un demi-millénaire et qui est marquée par une première humiliation. En 1241, les princes européens refusent d’aider la Hongrie qui,

en 1920, les vainqueurs de la Première Guerre mondiale rapetissent la Hongrie

seule, fait face aux troupes mongoles. La défaite du 11 avril, puis la mise à sac du pays, est un des événements fondateurs du roman historique hongrois : la trahison de l’Europe. La seconde humiliation hongroise est plus récente : c’est le traité de Trianon au sortir de la Première Guerre mondiale. En 1920, les vainqueurs rapetissent la Hongrie : trois millions de magyarophones se retrouvent à vivre en Roumanie ou en Yougoslavie. En résumé, les Hongrois se vivent comme les “défenseurs de la chrétienté” et s’attendent à une énième trahison de l’Europe. Les milliers de réfugiés frappant aux portes de la Hongrie donnent à cette légende nationale une curieuse actualité. Mi-septembre, on pouvait par exemple lire dans le quotidien Magyar Idok l’historien Lászlo Petrin expliquer “qu’une fois de plus, il revenait à la Hongrie de défendre les frontières chrétiennes de l’Europe comme à l’époque de l’expansion ottomane”. “L’ouest de l’Europe est déchristianisé et dirigé par une gauche libérale qui se fiche de protéger le christianisme. En accueillant des centaines de milliers de réfugiés et de migrants, ils ne voient pas que c’est l’islamisation de l’Europe qui est en marche.” Je sais bien que les romans nationaux sont très éloignés de la réalité historique. Mais de la même façon que nous sommes convaincus d’être “la patrie des droits de l’homme”, les Hongrois sont attachés à cette légende des siècles magyare. Le Premier ministre hongrois Viktor Orbán le sait : depuis qu’il est au pouvoir, il s’applique à alimenter la psyché hongroise tout en capitulant quelques mois plus tard face aux injonctions européennes. Un peu à la façon de Manuel Valls qui assure que la France est une terre d’asile pour ensuite n’accueillir que quelques milliers de réfugiés. Bien sûr, il ne faut pas cautionner les relents militaro-nationalistes magyars, mais il faut aussi éviter de les conforter. Anthony Bellanger

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“Les inRocKs s’associent à Monabanq pour mettre en lumière ceux qui œuvrent dans l’ombre de l’industrie musicale. Ils sont musiciens studio, ingénieurs du son, travaillent dans des labels ou dans l’organisation de concerts. Vous découvrirez ainsi au cours des prochaines semaines ceux qui, comme les artistes que vous aimez, donnent aussi vie à la musique que vous écoutez.”

Jimmy Grémillon-Merry, chef de projet chez Discograph Depuis quatre ans, Jimmy Grémillon-Merry officie chez Discograph, écurie de Angus & Julia Stone, Flavia Coehlo ou encore Melissmell. Il nous parle de son métier, chef de projet pour un label indépendant.

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omment en êtes-vous venu à faire votre métier ? J’ai une maîtrise de gestion marketing à Dauphine, un parcours assez classique, en quatre ans. J’ai fait un stage de milieu d’études dans un petit label indépendant d’electro, qui s’appelait Pro-Zak Trax. De fil en aiguille, j’ai continué à faire des stages dans la musique. J’ai ainsi construit mon petit réseau et été mis au courant des opportunités qui se libéraient. Il m’a fallu deux-trois stages avant de trouver un vrai poste. En quoi consiste le métier de chef de projet ? Dans un petit label, le poste me semble décloisonné, c’est une fonction centrale entre l’artistique, la promotion, les relations avec les partenaires/médias et le digital. On doit coordonner ces pôles, développer l’image (photos, vidéo, visuels…) avec les artistes, organiser la production des produits et coordonner le travail avec la promotion. Nous sommes également en relation directe avec l’artiste et le management, on discute aussi des décisions stratégiques. Avec qui avez-vous eu la chance de travailler ? En tant que chef de projet, j’ai pu

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collaborer avec Angus & Julia Stone dont on a sorti récemment le dernier album, un groupe suédois aussi que j’apprécie particulièrement, Simian Ghost, ou un rappeur californien, Pigeon John. Discograph est un label indépendant, on est proche de nos artistes, on se donne le temps de les accompagner. Quels sont les avantages de votre métier ? L’accès à beaucoup de concerts et de festivals. On assiste à la création d’un projet des coulisses, on participe au quotidien des artistes. Et c’est toujours agréable de pouvoir travailler pour l’une de ses passions. Quels en sont les inconvénients ? Ce n’est pas que du plaisir, c’est aussi un métier exigeant et on ne travaille pas forcément que la musique qu’on aime. Il y a des moments où on est aussi un peu dépassé, on manque de moyens, de temps : on travaille tard, les week-ends... Mais j’accepte pleinement ces inconvénients. Avez-vous eu envie de monter sur scène ? Pas du tout. Je préfère voir les vrais artistes. Les gens qui font de la musique le font par plaisir, pas forcément pour avoir une carrière. Cela ne demande pas que du talent, il faut avoir un peu

de chance et rencontrer les bonnes personnes… Je ne suis pas forcément envieux, je suis souvent impressionné par le talent des artistes. Un beau souvenir lié à votre métier ? Quand j’étais directeur artistique chez Barclay, nous étions partis enregistrer avec Psy 4 De La Rime à Los Angeles en compagnie de Nate Dogg. Dès les premières secondes, quand sa voix s’est posée dans le studio, on a tous senti qu’on assistait à un moment magique, on retrouvait cette signature vocale qu’on avait jusque-là entendue sur disque. Chez Discograph, j’ai été très content que Julia Stone soit disque de platine. Ce sont des gens talentueux et attachants, j’ai eu beaucoup de plaisir à voir les bons retours du public et des médias et qu’on soit arrivé à développer ce projet en France. Un conseil pour les gens qui veulent exercer le même métier que le vôtre ? Ne pas oublier que c’est un métier qui nécessite une vraie organisation et de la discipline. C’est aussi de plus en plus difficile de gagner sa vie en tant que label indépendant : il faut donc être créatif et curieux pour évoluer et savoir évoluer avec le métier.

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Myles Pettengill

The Garden Des jumeaux qui font du rock dans le plus simple appareil : une basse et une batterie.

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ublier immédiatement l’image bucolique qu’évoque ce nom bien traître. Car dans le jardin, il y a des bêtes difformes, des câbles électriques dénudés, de l’hostilité et de la méchanceté. Pas vraiment le jardin d’Eden : peut-être celui de la haine. Il n’y a plus d’argent dans le rock, alors on le réduit, à son strict nécessaire, à un duo furibond : des hurlements, des coups de jus, du cuir et de la rage. Comme chez Royal Blood, ces beaux jumeaux de Los Angeles ont choisi comme armes de destructuration massive la basse et la batterie (et quelques machines viciées) : un guitariste, ça vient avec de l’ego ; un clavier, ça fait chochotte. Mais contrairement aux Anglais, eux

maltraitent ces deux instruments avec nonchalance : on sent la colère diffuse, la violence flegmatique dans ce rock rugueux, dans ces séquences électroniques cagneuses, le tout hébergé par le label étalon du punk à la coule : Epitaph. On nous souffle à l’oreillette que ce groupe, passionnément couvé par Hedi Slimane, serait responsable de quelques-uns des concerts les plus brûlants et chaotiques à l’ouest du Rio Grande. On l’imagine volontiers à l’écoute de ces brûlots déjà inflammables dans leurs versions apprivoisées du studio pour virer à l’explosif, au dangereux. Il faudra absolument leur parler. JD Beauvallet album Haha (Epitaph/Burger/Pias), sortie le 16 octobre 30.09.2015 les inrockuptibles 29

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habiter Melun

Mustang aux oscars “t’inquiète, il reste plus que 264 jours avant l’été”

retour de hype

“hey Father John Misty, ça va la drogue ?”

retour de bâton

hype

buzz

pré-buzz

Viola Davis

“mais nan, ça c’est du bon gras”

“salade de fruits, jolie, jolie, jolie” “de loin et de profil, j’t’assure que je ressemble à Pattinson”

pizzarat

les pulls en laine

David Cameron